tag:theconversation.com,2011:/us/topics/noel-63210/articlesNoël – The Conversation2024-02-19T14:55:01Ztag:theconversation.com,2011:article/2231012024-02-19T14:55:01Z2024-02-19T14:55:01ZHuîtres contaminées au norovirus : les limites des dispositifs de surveillance<p>Les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/huitres-88863">huîtres</a> dont la vente avait été suspendue en décembre dernier sur plusieurs sites de production, et notamment sur le <a href="https://www.gironde.gouv.fr/Actualites/Communiques-de-presse/Communiques-de-presse-2024/Janvier-2024/Levee-de-l-interdiction-temporaire-des-coquillages">Bassin d’Arcachon</a>, sont revenues sur les étals mi-janvier.</p>
<p>Petit retour sur l’enchaînement des évènements qui a conduit à leur interdiction entre <a href="https://theconversation.com/fr/topics/noel-63210">Noël</a> et le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/nouvel-an-80568">Nouvel An</a> :</p>
<p>Le samedi 23 décembre 2023 débutent les vacances scolaires des fêtes de fin d’année. Le menu des repas se précise : on compte le nombre de convives pour la commande des huîtres. Récupérés chez les ostréiculteurs, les poissonniers ou en grandes surfaces, les huîtres sont majoritairement consommées crues et vivantes.</p>
<p>À noter qu’en France l’espèce d’huître majoritairement élevée est la <em>Crassostrea gigas</em>, huître creuse originaire du Japon. L’huître plate européenne, <em>Ostrea edulis</em>, est moins courante sur les parcs à huîtres et dans les étals.</p>
<p>Le 24 au soir, puis le 25 à midi, les amateurs se régalent. Dès le 25 décembre, les premiers symptômes de <a href="https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/gastro-enterite-adulte">gastroentérites</a> se déclarent, réclamant parfois les services des urgences. Pour nombre de familles, c’est tout d’abord l’incompréhension, puis les soupçons se portent sur les huîtres.</p>
<h2>Décembre 2023 : des interdictions de vente sur plusieurs sites</h2>
<p>Le mercredi 27 décembre, à Bordeaux, le préfet de la Gironde signe un <a href="https://www.atlas-sanitaire-coquillages.fr/sites/default/files/arrete/AP%202023-12-27%20Interdiction%20p%C3%AAche%20r%C3%A9colte%20commercialisation%20coquillages%20Bas%E2%80%A6%20cachon.pdf">arrêté</a> suspendant toute activité pouvant mener à la consommation des coquillages du Bassin d’Arcachon jusqu’à la <a href="https://www.gironde.gouv.fr/Actualites/Communiques-de-presse/Communiques-de-presse-2024/Janvier-2024/Levee-de-l-interdiction-temporaire-des-coquillages">levée de l’interdiction</a>, 28 jours après la dernière contamination connue des autorités de santé.</p>
<p>Les fêtes ont également été gâchées pour les ostréiculteurs du Calvados, où l’interdiction de consommation a débuté fin décembre, ainsi que pour les ostréiculteurs de Loire-Atlantique <a href="https://www.plateforme-sca.fr/ndeg103-12-janvier-2024">dès début décembre</a>.</p>
<p>Les ostréiculteurs ont été accusés, notamment par une association de défense de l’environnement, <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2024/01/12/huitres-d-arcachon-contaminees-beaucoup-savaient-une-association-porte-plainte_6210462_3244.html">d’avoir commercialisé les huîtres alors qu’ils « savaient »</a>, selon l’association, qu’elles étaient contaminées.</p>
<p>De l’autre côté, les <a href="https://www.francetvinfo.fr/sante/alimentation/reportage-les-ostreiculteurs-du-bassin-d-arcachon-soulages-par-la-fin-de-l-interdiction-de-la-vente-d-huitres-pointent-la-gestion-des-eaux-usees_6313275.html">ostréiculteurs se revendiquent victimes de la gestion des eaux du bassin versant et demandent à être indemnisés</a> pour les pertes économiques subies… sachant que leurs huîtres ne sont pas « malades ».</p>
<p>Porteuses saines (cliniquement saines mais portant des éléments pathogènes), les huîtres ne font que transmettre le virus, en l’occurrence un <a href="https://www.anses.fr/fr/content/eviter-intoxications-alimentaires-norovirus">norovirus</a>, à celles et ceux qui les consomment.</p>
<p>Le problème s’était déjà produit sur la <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/01/16/les-conchyliculteurs-de-l-etang-de-thau-attaquent-la-ville-de-sete-pour-atteinte-a-l-environnement_6158101_3244.html">lagune de Thau à Noël 2022</a> et dans d’autres bassins de production les années précédentes. Alors, que s’est-il passé ? Pourquoi le même problème subsiste-t-il ? N’y a-t-il pas une surveillance sanitaire accrue des huîtres en période de fêtes ?</p>
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<p>Les huîtres sont des <a href="https://archimer.ifremer.fr/doc/00014/12517/9372.pdf#page=2">bivalves filtreurs</a> : leur corps mou est protégé par deux parties (valves) calcaires articulées par une charnière. Elles se nourrissent des microorganismes (principalement des phytoplanctons, microalgues en suspension…) présents dans l’eau, qu’elles filtrent à travers leurs branchies. Elles sont capables de filtrer environ 4,5 l par heure.</p>
<h2>Des coquillages bioaccumulateurs… consommés crus</h2>
<p>Les huîtres sont qualifiées de <a href="https://archimer.ifremer.fr/doc/00729/84082/89005.pdf">« sentinelles »</a> de leur environnement. Comme ces coquillages ont la capacité de concentrer certains microéléments de l’environnement, ils peuvent être utilisés comme bioaccumulateurs afin de dépolluer une zone spécifique, un <a href="https://www.billionoysterproject.org/">projet</a> est par exemple mené dans ce sens dans le port de New York.</p>
<p>Ces qualités posent néanmoins problème quand les huîtres sont élevées pour leur chair : les consommateurs sont alors exposés à des risques sanitaires en raison des pollutions chimiques, biologiques, microbiologiques, virales, etc., qui touchent les eaux littorales.</p>
<p>Les risques sont d’autant plus importants que les huîtres sont mangées crues. En France métropolitaine, une surveillance a été mise en place à partir des années 1980 par l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (<a href="https://www.ifremer.fr/fr">Ifremer</a>) et les eaux sont contrôlées régulièrement. Au total, cinq réseaux sont déployés sur toute la France qui permettent de déterminer la qualité sanitaire de l’eau et des coquillages (<a href="https://littoral.ifremer.fr/Reseaux-de-surveillance">Réseaux de surveillance Ifremer</a>).</p>
<h2>Une surveillance des eaux et des huîtres</h2>
<p>Une nomenclature a été proposée à partir de la <a href="https://www.europarl.europa.eu/factsheets/fr/sheet/74/protection-et-gestion-des-eaux">directive-cadre européenne sur l’eau</a>, au regard des concentrations de la bactérie <em>Escherichia coli</em> <a href="https://theconversation.com/aliments-contamines-par-la-bacterie-e-coli-quels-effets-sur-la-sante-et-comment-prevenir-les-infections-185176">dont certaines souches sont potentiellement pathogènes</a> et peuvent mener à des symptômes comme des crampes abdominales ou des diarrhées.</p>
<p>Des règles sont alors appliquées dans les élevages de coquillages pour que la santé des consommateurs ne soit pas en danger. Outre les contrôles concernant les substances qui influent sur la santé humaine, la santé des coquillages fait également l’objet d’une surveillance avec le <a href="https://ged.cnc-france.com/share/proxy/alfresco-noauth/api/internal/shared/node/sRj-vKzaSOm8eXUgO7qmpw/content/Plaquette%20de%20pr%C3%A9sentation%20Repamo.pdf">réseau REPAMO</a>. Les analyses des résultats permettent l’édition régulière de bulletins de surveillance transmis aux professionnels via leurs représentants.</p>
<p>Lorsque les mesures dépassent les seuils autorisés, une <a href="https://www.calameo.com/read/006961968531b1e70d151">alerte est émise par l’Ifremer tandis que le laboratoire départemental vétérinaire réalise un nouveau prélèvement</a> pour vérifier si la contamination persiste. Les mesures à mettre en place selon le niveau d’alerte seront prises par arrêté préfectoral. Par exemple, le niveau 0 d’alerte pour les concentrations en <em>E. coli</em> correspond à de la prévention face à des pluies importantes ou à des pollutions identifiées.</p>
<p>En parallèle, dans les réseaux d’expédition de coquillages, des prélèvements systématiques sont réalisés par les services vétérinaires pour certifier la qualité des produits proposés. Chaque lot d’huîtres est accompagné d’une étiquette sanitaire qui permet une bonne traçabilité des coquillages et une identification rapide de leur provenance en cas de contamination. Les huîtres sont donc étroitement surveillées et les épidémies d’origine bactérienne sont généralement évitées.</p>
<h2>Des norovirus difficiles à détecter</h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="Basée sur des images de microscopie électronique (ME), l’illustration est une représentation graphique tridimensionnelle (3D) d’un certain nombre de virions de norovirus de couleur bleue, sur un fond noir" src="https://images.theconversation.com/files/575017/original/file-20240212-26-xbanj3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/575017/original/file-20240212-26-xbanj3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/575017/original/file-20240212-26-xbanj3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/575017/original/file-20240212-26-xbanj3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/575017/original/file-20240212-26-xbanj3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/575017/original/file-20240212-26-xbanj3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/575017/original/file-20240212-26-xbanj3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Représentation graphique 3D de virions de norovirus basée sur des images de microscopie électronique.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://phil.cdc.gov/Details.aspx?pid=21347">CDC/Jessica A. Allen</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Sauf que les malades déclarés cet hiver n’étaient pas contaminés par <em>E. coli</em>. Ils ont montré des symptômes de gastroentérites en raison de <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/BIORISK2016SA0273Fi.pdf">norovirus</a>.</p>
<p>La transmission des norovirus par les huîtres est facilitée par la tendance à sélectionner <a href="https://archimer.ifremer.fr/doc/00044/15550/12937.pdf">certaines souches</a>, ce qui favorise la transmission à l’humain. De plus, ces virus ne font pas l’objet d’un suivi sanitaire systématique comme les bactéries : ils sont en effet beaucoup plus complexes à détecter. C’est pourquoi l’interdiction de vente ne se fait qu’après la déclaration de malades.</p>
<p>La saisonnalité de ces virus est très marquée : la plupart des épidémies survient l’hiver, d’où l’apparition du problème principalement lors des fêtes de fin d’année. Ils sont en outre résistants à certains traitements d’épuration et suffisamment stables pour persister dans l’environnement. Les épidémies hivernales induisent alors des charges virales importantes dans les eaux usées, puis dans les eaux littorales.</p>
<h2>Cercle vicieux de contaminations humaines et des eaux… filtrées par les huîtres</h2>
<p>L’hiver est la saison la plus pluvieuse dans la majorité des régions françaises. Ces pluies entrainent des <a href="https://archimer.ifremer.fr/doc/00060/17118/14630.pdf">dysfonctionnements dans les réseaux d’assainissement</a>. Se forme alors un cercle vicieux : les populations humaines sont malades donc des virus sont concentrés dans les eaux usées ; les pluies font dysfonctionner les réseaux d’épuration donc les virus passent dans les eaux littorales avec des charges virales fortes ; les huîtres filtrent l’eau et concentrent les virus ; les consommateurs mangent ces huîtres et l’eau qu’elles contiennent donc ils et elles tombent malades et contaminent leurs proches ; ce qui accroît la charge virale dans les eaux usées.</p>
<p>Une partie des malades se rend chez le médecin, et à partir de deux personnes présentant les symptômes de la gastroentérite ayant consommé le même repas, le médecin déclarera une toxi-infection alimentaire collective (TIAC) <a href="https://www.formulaires.service-public.fr/gf/cerfa_12211_02.do">via ce formulaire</a> envoyé à l’Agence régionale de santé.</p>
<p>Une enquête est menée pour identifier l’aliment puis des mesures sont prises pour le retirer de la vente, ce qui permettrait de briser la boucle de contamination. Dans le cas des huîtres, un arrêté préfectoral est signé pour l’interdiction de l’ensemble des actions pouvant mener à leur commercialisation.</p>
<h2>Impuissance et colère des ostréiculteurs</h2>
<p>La colère et le sentiment d’injustice qu’expriment les ostréiculteurs proviennent principalement de leur impuissance dans la gestion de la charge virale présente dans l’eau, et de l’incertitude qu’ils et elles ressentent face à ce risque. Les fêtes de fin d’année représentent près de 50 % de leur chiffre d’affaires, d’où leur question : <a href="https://www.rtl.fr/actu/economie-consommation/huitres-interdites-a-la-vente-qui-va-payer-l-addition-s-interrogent-les-producteurs-en-colere-7900336534">« Qui va payer l’addition ? »</a>.</p>
<p>Cependant, les alertes sur les pluviométries importantes et les potentiels dysfonctionnements des stations d’épuration, surtout l’hiver, peuvent signaler une augmentation du risque d’épidémie par des norovirus. Ces épidémies peuvent donc a priori être anticipées. Pour autant, les huîtres ne sont pas autorisées – pour le moment – à être stockées dans des bassins en circuit fermé en vue de leur vente et ces zones de stockage ont par ailleurs un coût élevé d’installation et d’entretien.</p>
<h2>Tout le monde est perdant… sauf les huîtres</h2>
<p>Finalement tout le monde est perdant, sauf les huîtres : les consommateurs et leurs proches sont malades, les ostréiculteurs perdent beaucoup d’argent (directement et indirectement car cela affecte la réputation de leurs produits), les services de l’État et les gestionnaires des eaux usées sont pris en étau comme responsables.</p>
<p>Mais les huîtres peuvent rester en vie plus longtemps car, même si elles ne sont pas elles-mêmes malades, elles ne seront pas consommées sur la période… Leur répit n’est toutefois que de courte durée, puisque trois semaines après l’interdiction de vente, les mêmes huîtres seront proposées sur les étals, cette fois sans risques de maladies pour les consommateurs.</p>
<p>Les huîtres auront naturellement relargué les virus par la suite détruits par un séjour prolongé dans l’eau de mer.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223101/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>DULAT Julie a reçu les financements suivants : l'allocation de recherche doctorale de l’ED60 (Université Paul Valéry Montpellier 3), la bourse d’études de la Fondation Soroptimist International pour l’année 2022-23, la bourse de recherche « Trophée Minerva » de la Fondation F.Initiativas pour l’année 2022-23, ainsi que les bourses de mobilité du Collège Doctoral Languedoc-Roussillon, de l’ED60 et de l’UMR SENS.
</span></em></p>En décembre, la vente d’huîtres contaminées par des norovirus a été interdite car leur consommation provoque des gastroentérites. Des dispositifs existent pourtant pour anticiper les épidémies.Julie Dulat, Doctorante en anthropologie, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2194132023-12-22T06:38:09Z2023-12-22T06:38:09ZNoël en 2050, une dystopie douce<p><em>Nous avons demandé à quelques autrices et auteurs d’imaginer à quoi pourraient ressembler les fêtes de fin d’année en 2050. Pascal Lardellier, spécialiste de l’anthropologie des mondes contemporains et Professeur à l’Université de Bourgogne, a signé plusieurs ouvrages touchant aux différents aspects du lien social et de la culture, ainsi qu’aux relations amoureuses dans les réseaux numériques. Il vient de publier « Éloge de ce qui nous lie. L’étonnante modernité des rites » (L’Aube, 2023). Il s’est prêté au jeu, et projette les grandes questions qui agitent notre société contemporaine dans un avenir proche – transformation des liens sociaux, surveillance généralisée, changement de nos modes de consommation – non sans humour !</em></p>
<hr>
<p>24 décembre 2050, 20 heures, heure de Paris. La famille, ou plutôt « la communauté inclusive et ouverte de celles et ceux qui s’apprécient durablement » est rassemblée. Dans un logement naturellement partagé (le « co- » est devenu un mode de vie naturel et presque obligé), deux veillées auront lieu, rassemblant deux « collectifs collaboratifs et conviviaux » dans des lieux distincts de l’appartement. Mais la cérémonie est sensiblement la même. On s’efforce de suivre les « protocoles de convivialité » proposés par le Gouvernement, bornant le nombre de convives, la répartition de genres, le séquencement de la soirée, ce qui peut circuler et s’échanger, ou pas.</p>
<h2>Une soirée respectueuse avant tout</h2>
<p>Dans la pièce baptisée « Louisa et Emile » (du nom des grands-parents, qui ont fait le choix d’une <a href="https://theconversation.com/pourquoi-se-dirige-t-on-vers-une-legalisation-de-leuthanasie-en-france-190414">euthanasie</a> simultanée il y a 2 ans, à 80 ans), tous sont assis en rond sur de petits tabourets dans la salle à manger, rebaptisée la « pièce pour toutes et tous ». Et un cercle d’écrans de tablettes format XXL est posé, face extérieure vers le groupe, au centre du cercle. Effet miroir entre les présents, et ceux qui assisteront à la soirée en direct live depuis leur réseau. Ce dispositif de « visio de vie » est un White Mirror.</p>
<p>Des <a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-haptique-214411">capteurs sensoriels</a> et des extensions diffusant des odeurs et des saveurs de synthèse permettront, à certains moments de la soirée, de partager des sensations. Communion des corps et des cœurs, par-delà la distance et l’absence.</p>
<p>D’ailleurs, cette soirée ne s’appelle plus vraiment « veillée de Noël ». Cette appellation, longtemps de mise, a été déclassée par quelque chose d’un peu plus inclusif, qui respecte de manière œcuménique les croyances des unes et des autres ; ou leurs non-croyances d’ailleurs.</p>
<p>C’est donc « l’esprit de l’arbre sacré » que l’on célèbre. Curieux retour animiste ou païen aux origines de Noël. L’ère chrétienne n’a fait que se les approprier. Et le procès des <a href="https://theconversation.com/appropriation-culturelle-peut-on-voler-une-culture-136885">appropriations culturelles</a>, en effet, a été fait et bien fait. Celles-ci concernent les autres cultures, mais aussi le passé bien sûr.</p>
<p>Le repas pourra commencer, après un apéritif essentiellement composé de jus de fruits et de boissons aux plantes infusées. <a href="https://theconversation.com/le-french-paradox-demonte-non-une-consommation-moderee-dalcool-na-pas-deffet-protecteur-114853">Très peu d’alcool</a> est servi désormais, même si les parents (un rien rétrogrades) boiront une coupe de vin à bulles.</p>
<p>On commence par une série de courts discours, que chacun prononce à tour de rôle, en célébrant, dans ses propos, le collectif rassemblé, mais aussi des valeurs sociétales de tolérance, d’ouverture, de fraternité et d’inclusivité.</p>
<p>Après cette série de toasts, qui verra circuler parmi le groupe une coupe remplie de fruits secs, les festivités peuvent commencer.</p>
<p>Les absents le sont parce qu’ils n’avaient pas à être contraints par une fête peut-être conservatrice. Elle aurait imposé une violence symbolique en exigeant que l’on soit présent « IRL », In Real Life. Alors qu’on peut tout à fait l’être URL, en visio. Et puis il faut penser au <a href="https://theconversation.com/debat-decarbonation-quotas-que-faire-de-lavion-privilege-dune-minorite-210072">coût carbone faramineux de ces anciennes transhumances</a> qui voyaient jusqu’aux années 2030 les familles se réunir « par la force des choses » (même s’il y avait du plaisir et de la sincérité, probablement), à se raconter les mêmes histoires, à s’offrir les mêmes cadeaux dispendieux et inutiles, et puis trop manger pendant trois jours.</p>
<p>D’ailleurs on notera que la <a href="https://theconversation.com/peut-on-justifier-ethiquement-le-regime-carne-104524">viande se fait rare</a> aux tables de fin d’année de 2050, très rare. Elle a été remplacée par divers <a href="https://theconversation.com/texture-gout-nutrition-sur-la-piste-de-la-viande-vegetale-parfaite-163825">produits de synthèse</a> produits localement à base d’insectes, de légumineuses, ou de légumes et céréales compressés. Et ce pour diverses raisons, de bien-être animal, de <a href="https://theconversation.com/les-aliments-ultratransformes-sont-aussi-tres-mauvais-pour-la-planete-140869">respect de la vie, autant que de « capital santé »</a>. Chacun a d’ailleurs une appli qui lui permet de savoir ce que chaque plat ingurgité lui apporte en termes de calories, de lipides, de glucides, en temps réel. Un voyant rouge peut s’allumer en cas d’excès !</p>
<h2>Contrôle, autocontrôle et contrat</h2>
<p>Nous sommes dans une société du panoptique social institué – des <a href="https://theconversation.com/objets-cultes-le-qr-code-208991">QR codes partout</a>, sésames sans lesquels on n’entre pas, et l’on ne sort pas non plus ! – et du contrôle total : omniprésence des caméras dans les lieux publics. Mais on accepte de bonne grâce ce principe, car c’est dans l’intérêt général, semble-t-il, et dans l’intérêt de chacun, déjà. D’ailleurs, l’appartement est aussi équipé de discrètes caméras, qui scrutent faits, gestes et paroles.</p>
<p>Chaque cadeau a été pensé en fonction d’un prix qui correspond peu ou prou au prix des cadeaux offerts en retour. De toute façon, des applis très pratiques permettent de calculer au centime près la balance de ces cadeaux. On scanne et hop, le prix, l’équivalent, en fonction du profil de la personne. Et l’important, avant tout, est que cette balance ne soit pas déséquilibrée. On ne dit rien, l’algorithme s’en charge, mais on n’en pense pas moins. On n’a plus à réaliser ce calcul intérieur auquel on se livrait avant : « le pull en cachemire que je lui offre, 80 euros, son livre, 50 seulement… ». L’algorithme neutralise les tensions, apaise les déceptions possibles. Et puis cela évite les psychodrames qui ont tant amusé le cinéma français au siècle dernier.</p>
<p>Après un repas frugal et respectueux de la vie et de l’environnement, après que chacun ait pris la parole solennellement sans la couper à autrui (attention aux micro-agressions !), vient le moment des cadeaux.</p>
<p>Le père Noël est tombé en désuétude, il serait très violent d’imposer aux enfants de fausses croyances qui pourraient les traumatiser, le <a href="https://theconversation.com/que-dire-a-son-enfant-au-sujet-du-pere-noel-89038">jour où ils apprendraient</a> que leurs parents leur ont menti pendant tant d’années. Rupture du pacte de confiance égalitaire présidant au juste avènement de la « famille démocratique ». Et puis l’enchantement à ses limites, surtout quand il s’agit d’un vieil homme blanc à la gentillesse poissarde et kitsch, de surcroît sponsorisé de manière subliminale par une marque de soda américain.</p>
<p>Le fond sonore de la soirée est constitué de flûtes de pan et de mélodies New Age, ayant prouvé qu’elles harmonisent les ondes cérébrales.</p>
<h2>Des cadeaux utiles et responsables</h2>
<p>Les cadeaux ont été déposés devant chacun, on les reçoit à tour de rôle en apportant des commentaires sur la valeur symbolique, mais aussi énergétique et utilitaire de ce qui lui a été offert.</p>
<p>Ce sont des choses utiles avant tout, et produites dans un rayon de 10 km à la ronde. Tout le monde a renseigné depuis quelques mois des listes (non pas de ses envies) mais de ses « nécessités contingentes » ; ces cadeaux se devant de surcroît d’être <a href="https://theconversation.com/sur-terre-la-masse-de-lartificiel-egale-desormais-la-masse-du-vivant-153352">écoresponsables dans leur production et dans leur livraison</a>. Ils faut même payer une taxe aux communautés qui les ont produits. Tout cela, l’algorithme s’en charge.</p>
<p>Mais d’ailleurs, pourquoi offrir ? Certes, on se plie là à une coutume ancienne, à une tradition désuète, qui oblige un peu, mais c’est presque drôle, finalement, de faire un détour par des proches pour acquérir quelque chose qu’on aurait pu commander et recevoir dans les 2 heures, livré par drone.</p>
<p>Les convives désirant s’affranchir de ces conventions peuvent opter pour le Secret Santa, qui consiste à choisir une seule personne, forcément spéciale, à qui on offre un présent. Là, le cadeau unique et dédié prend tout son sens, et les autres ne doivent surtout pas prendre ombrage. Aucune injure ne leur est faite, il faut comprendre qu’un présent unique revêt une valeur morale et écologique immense. Et l’an prochain, ça sera peut-être notre tour, si l’attitude durant l’année est appréciable. Donc des efforts d’altruisme, de serviabilité et de bienveillance à produire, afin d’être récompensé. Ainsi, des cadeaux non plus automatiques mais vraiment mérités, telle est la règle prévalant aux échanges de présents. Seuls les enfants y échappent jusqu’à 11 ans. Après, il est normal qu’ils aient intégré les logiques présidant à des relations sociales équitables et respectueuses.</p>
<p>Les enfants qui ont moins de huit ans ont réalisé en ateliers « Collectif et générosité » des objets symboliques, mettant à l’honneur « la communauté qui s’aime », le respect et la tolérance. Il convient de n’oublier personne. Et les mêmes applis veillent scrupuleusement à rappeler la liste de la gratitude et de la reconnaissance dues à chacun et à tous.</p>
<p>Après que la parole ait circulé, que les cadeaux aient été ouverts et approuvés, la soirée se termine doucement. On grignote des graines multicolores en devisant paisiblement. Les conciliabules prennent surtout garde à n’exclure personne. D’ailleurs, les caméras fourniront le lendemain des « graphes relationnels » envoyés aux participants, qui se devront d’être équilibrés.</p>
<p>Certains quittent un moment le cercle, pour se permettre un petit live avec des amis qui ne sont pas de la partie. On se souhaite gentiment des vœux de paix, de bonheur et d’harmonie. Point d’embrassades à la fin du repas. La distanciation est devenue une norme morale et sociale presque intangible. Il ne saurait être question d’effusions physiques attentatoires à la sphère intime de chacun. On se fait des Namasté, cette salutation s’est généralisée. Ou alors des petits signes de la main, et cela suffit.</p>
<p>Des protocoles de conversation ont lentement été mis en place. On ne doit pas se couper la parole, il faut s’écouter en se regardant dans les yeux, et parler à tour de rôle. D’ailleurs, des petits signes de la main indiquent qu’on en a terminé.</p>
<p>Le retour, pour ceux qui habitent la même ville, se fera via des systèmes de transports collectifs ou partagés. Il est hors de question d’utiliser une <a href="https://theconversation.com/et-si-lecologie-cetait-plutot-de-rouler-avec-nos-vieilles-voitures-214495">voiture individuelle</a>.</p>
<h2>Au-delà de l’uchronie, les lumineuses perspectives de l’anthropologie</h2>
<p>Maintenant, dépassons l’uchronie, qui se voulait divertissante, à défaut d’être réaliste (quoique…)</p>
<p>Si les choses se passent ainsi en 2050, il y aurait quelques enseignements anthropologiques à tirer :</p>
<p>La perpétuation des rites, interpersonnels et communautaires. Des rites procédurisés et algorithmisés, mais qui subsistent. Ils s’adaptent avec une incroyable plasticité aux époques, aux cultures et aux valeurs ambiantes, mais ils subsistent, comme formes symboliques. Oui, en 2049, on se réunit, on fait cercle et corps, on célèbre ensemble des valeurs, mais le collectif avant tout. Et on se souvient de la <a href="https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/la-petite-philo/pourquoi-avons-nous-besoin-de-rites-2739120">lumineuse intuition de Durkheim</a> : « ce ne sont pas leurs dieux que les communautés célèbrent dans leurs rites, mais elles-mêmes ».</p>
<p>Rites communautaires, mais interpersonnels aussi. Et encore perceptible à l’œuvre dans nos saynètes le souci de ne pas offenser, de ne pas faire perdre la face. Tout en célébrant, via les civilités, <a href="https://journals.openedition.org/philonsorbonne/102">« la face sacrée de l’autre »</a> (E. Goffman), même si le sacré est discret.</p>
<p>De même, étonnante résurgence dans le « Noël 2050 » de croyances antiques et même archaïques, <a href="https://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/animisme">animistes</a> et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9opaganisme">paganistes</a>, pleines de pensée magique et de références <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-chemins-de-la-philosophie/le-chamanisme-une-experience-de-l-invisible-8213628">chamaniques</a> (la mise au diapason des consciences individuelles via musiques et rythmes spécifiques). Or, nos <a href="https://theconversation.com/la-meilleure-version-de-moi-meme-une-serie-grincante-qui-questionne-le-developpement-personnel-183750">rites contemporains</a> viennent pour la plupart de si loin. Résonne en eux l’écho d’un autre Occident. Ils sont des palimpsestes, que l’on relit, et où l’on se relie…</p>
<p>Enfin, la lumineuse circularité du don, tel que <a href="https://www.scienceshumaines.com/essai-sur-le-don_fr_12948.html">théorisée par Marcel Mauss</a>, garde encore une formidable vigueur : donner et recevoir des présents, esthétiser la transaction dans un contexte qui équilibre les tensions possibles par un juste calcul de ce qui est donné, et rendu, encore au cœur du lien, même si celui-ci, en 2050, est devenu bien émollient, chacun étant terrifié des conséquences (morales et pénales) de ses paroles et de ses actes.</p>
<p>Passent les tendances et les individus, restent à l’œuvre des formes robustes, et des dynamiques puissantes. Elles sont le ressac du social.</p>
<p>Si l’on peut, au vu des connaissances actuelles, souhaiter le recul de l’individualisme, de l’usage déraisonné des énergies fossiles et de la surconsommation, le Noël trop lisse et plein de contraintes que j’ai imaginé ne fait pas vraiment rêver. Il reste dès lors à imaginer, à écrire, à décrire un Noël 2050, utopique cette fois-ci, plein de liesse, de délices, de saveurs, de sève et de joie. Gageons que les mille narrations festives et les rites de fin d’année, bien vivaces, y seraient plus beaux encore. Et que dans cette soirée magique, la confiance prévale encore sur le calcul et contrat.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/219413/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pascal Lardellier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Imaginer les fêtes de fin d’année en 2050, c’est ce à quoi s’essaie ce petit exercice de « futurologie », se fondant sur le probable, le vraisemblable, ou l’invraisemblable !Pascal Lardellier, Professeur à l'Université de Bourgogne Franche-Comté, Chercheur au laboratoire CIMEOS, Université de Bourgogne – UBFCLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2196232023-12-22T06:38:04Z2023-12-22T06:38:04Z2050 : de Noël à la béatitude, la révolution des arbres<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/565264/original/file-20231212-19-s6r917.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=3%2C41%2C2492%2C1620&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pratiquer le bain de forêt, une occasion de se reconnecter au monde ?</span> <span class="attribution"><a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p><em>Nous avons demandé à nos auteurs d’imaginer à quoi pourraient ressembler les fêtes de fin d’année en 2050. Damien Karbovnik, sociologue des religions et spécialiste des nouvelles pratiques spirituelles s’est attaché à décrypter la quête spirituelle de la famille Martin dans un monde où la nature se raréfie. Avec… bienveillance bien sûr !</em></p>
<hr>
<p>Ce réveillon de Noël 2050, la famille Martin a décidé de le fêter à la manière des « bienheureux », comme aiment à s’appeler eux-mêmes ceux qui ont fait le choix de vivre dans la <a href="https://www.liberation.fr/france/2018/02/06/claude-martin-etre-bienveillant-cela-va-de-soi-mais_1627941/">« bienveillance »</a> au quotidien.</p>
<p>Noël, « <a href="https://books.google.fr/books?id=GjKDDQAAQBAJ&redir_esc=y">trop chrétien</a> » pour eux, n’est plus que noël, même s’ils concèdent qu’une partie du message du Christ, d’une certaine manière, est toujours d’actualité, mais ils refusent <a href="https://www.cairn.info/revue-l-annee-sociologique-2010-1-page-41.htm">« tous ces dogmes et croyances dépassés »</a>.</p>
<p>Pour eux, pas besoin de se raconter d’histoires ni d’en raconter aux enfants. De Noël, ils ont gardé la date, « pour ne pas se déphaser avec les autres », ils en ont aussi gardé l’esprit, mais eux, « l’expériencent » vraiment. Ils célèbrent ce qu’ils appellent entre eux la « fête de la béatitude », fête pendant laquelle le bien-être n’est plus réservé aux seuls êtres humains.</p>
<h2>Une harmonie retrouvée</h2>
<p>Cette année, Gabriel et Jade Martin ont définitivement tranché : la fête se fera sans leurs parents. « <a href="https://www.cairn.info/magazine-cerveau-et-psycho-2019-10.htm">Trop toxiques</a> », nous confie-t-elle. Elle déplore de priver ses deux enfants, Kylian, 6 ans, et Louise, 8 ans, de ce lien familial, mais elle ne culpabilise pas.</p>
<blockquote>
<p>« Chaque année, c’est un peu pareil avec les <a href="https://www.cairn.info/revue-internationale-de-psychosociologie-de-gestion-des-comportements-organisationnels-2016-53.htm?ora.z_ref=cairnSearchAutocomplete">milléniaux</a> : toujours des reproches, toujours des discours pessimistes sur l’avenir ; mais on les attend toujours, les catastrophes qu’ils nous ont prédites dans notre enfance. »</p>
</blockquote>
<p>Certes, la température a légèrement augmenté et il fait un petit 15° de moyenne, en ce mois de décembre 2050 en région parisienne, mais les quelques catastrophes climatiques de ces dernières années n’ont pas entamé la confiance du couple :</p>
<blockquote>
<p>« Nous on a décidé de <a href="https://www.cairn.info/revue-etudes-2013-7-page-53.htm">vivre au jour le jour</a> et on voit bien qu’il n’y a pas lieu de s’inquiéter, on le voit bien que rien n’a vraiment changé en dehors de quelques problèmes ponctuels. »</p>
</blockquote>
<p>Gabriel enchaîne en nous expliquant qu’il ne supporte pas les conseils d’éducation de sa mère, toujours à les reprendre sur leur comportement vis-à-vis de leurs enfants. Pour lui, « ils ne comprennent rien à l’éducation assertive ». Bloqués dans « <a href="https://www.cairn.info/les-fondements-de-l-education-positive--9782100788033.htm">l’éducation positive</a> », ils accusent les milléniaux de créer une fausse ambiance de bien-être qui ne serait, selon lui, qu’une condescendance intergénérationnelle, devenue dorénavant intolérable.</p>
<p>Si les parents sont absents, ils passeront une partie du réveillon en visio avec la sœur de Jade, restée dans le Sud avec sa famille afin de limiter son empreinte carbone. Distanciel oblige, ils ne s’échangeront pas de cadeaux, mais des énergies positives, un « cadeau sans valeur commerciale », nous explique Jade, et qui rappelle « la simplicité d’un bonheur familial sans jugement, dans la paix et le respect de chacun ».</p>
<p>Le Sapin, quant à lui, est toujours là, mais il est holographique. Totalement virtuel, il est complètement modulable dans sa forme et sa décoration depuis une application installée sur l’une des tablettes de la famille. En 2050, il est devenu impensable pour un bienheureux de couper un arbre.</p>
<h2>Le sacre des arbres</h2>
<p>Depuis la publication de l’ouvrage de <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Eu4mpUDKdTA">Peter Wohlleben</a>, la question du bien-être sylvestre a fait du chemin et a fini par rejoindre les adeptes du <a href="https://www.psychologies.com/Therapies/Developpement-personnel/Methodes/Articles-et-Dossiers/Sylvotherapie-le-pouvoir-bienfaisant-des-arbres/Shinrin-yoku-comment-profiter-des-bienfaits-du-bain-de-foret">shirin-yoku</a>, cette pratique initiée au Japon dans les années 1980 et qui a pour but de diminuer son stress et d’augmenter son bien-être par le contact avec la nature. Aussi appelé « sylvothérapie » ou « bain de forêt », le shirin-yku était dans un premier temps totalement centré sur le seul bien-être des êtres humains mais, au tournant des années 2030, de plus en plus de praticiens ont réussi à entrer en communication avec des arbres, dévoilant ainsi au monde entier la complexité de leur pensée et une philosophie sylvestre axée sur l’immobilité, le rythme des saisons et l’adaptation.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/bQGY1wYNRnM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Découverte du shirin-yoku, France 3 Pays de Loire.</span></figcaption>
</figure>
<p>Pour Gabriel, la découverte du « message des arbres » avait été une véritable prise de conscience et, depuis ce jour, il n’avait plus jamais voulu faire de sapin de Noël.« La première fois que j’ai dit à mes parents qu’ils étaient des meurtriers, quand ils ont ramené un sapin à la maison, ils m’ont ri au nez », nous raconte-t-il, encore ému par l’événement.</p>
<blockquote>
<p>« Ça a été mon pire noël, je crois. Depuis, je me suis promis de faire de mon mieux pour passer noël en accord avec de vraies valeurs gaïennes ».</p>
</blockquote>
<p>Les valeurs <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/l-hypothese-gaia-de-james-lovelock-theorie-influente-et-controversee-1824581">gaïennes</a> ont peu à peu remplacé les valeurs « humanistes », bien trop anthropocentrées et limitées. Gabriel précise :</p>
<blockquote>
<p>« Comment veux-tu faire une fête sans tenir compte du bien-être de tous les êtres vivants qui t’entourent ? ».</p>
</blockquote>
<p>Jade se rappelle qu’au début, moqueries et critiques « pleuvaient sur la sylvothérapie », mais elles n’ont fait, selon elle, que rendre possible « la croissance de la conscience gaïenne » et, en même temps, favoriser le développement spirituel des humains.</p>
<blockquote>
<p>« Tout ça, nous dit-elle, nos parents ne le comprennent pas et viennent contaminer notre maison avec leurs énergies de meurtriers inconscients ».</p>
</blockquote>
<p>D’ailleurs, avant le repas du réveillon, Gabriel et Jade emmèneront leurs deux enfants à la grande <a href="https://www.cairn.info/la-meditation--9782715405677.htm">méditation</a> de la béatitude, organisée au pied d’un chêne que la légende dit pluriséculaire. Gabriel s’empresse alors de préciser :</p>
<blockquote>
<p>« C’est là que Saint Louis rendait la justice, les vibrations y sont vraiment très spéciales, elles ne sont pas seulement positives, elles sont justes. Je crois que c’est l’un des meilleurs endroits au monde pour tenter de communiquer avec un arbre ».</p>
</blockquote>
<p>En effet, comme chaque année depuis près de vingt ans maintenant, tous les bienheureux se réunissent le jour de noël au pied d’arbres célèbres à travers le monde entier pour communiquer leurs énergies bienveillantes aux arbres, afin qu’ils puissent se défendre contre les intempéries et surtout les incendies, tout en continuant à nous protéger contre le réchauffement climatique. Jade est formelle :</p>
<blockquote>
<p>« Depuis que la pratique s’est répandue, le climat s’est stabilisé ».</p>
</blockquote>
<h2>Un repas en pleine conscience</h2>
<p>Pour le repas, en apparence, rien n’a changé quand on entend Gabriel et Jade en décliner le menu. Pourtant, le foie gras servi en entrée est de synthèse, car depuis la fin des années 2020 plus aucun foie gras produit « à l’ancienne » n’est toléré dans l’Union européenne. À table, les aliments d’origine animale sont d’ailleurs rares. Gabriel nous explique qu’ils ne sont pas végans, dans sa famille, mais qu’ils pratiquent « l’alimentation consciente », c’est-à-dire qu’ils ne mangent pas plus de produits d’origine animale que ce dont ils ont « biologiquement besoin ». Et pour le peu de viande qu’ils mangent, ils s’assurent du respect du bien-être de l’animal.</p>
<p>Pour le plat principal, une traditionnelle dinde, mais Jade raconte comment elle est allée la choisir elle-même auprès d’un éleveur à proximité : le circuit-court est devenu, en effet, la seule source d’approvisionnement pour les produits frais. Surtout, elle a pu ainsi s’assurer par elle-même des conditions d’élevage de l’animal.</p>
<p>Mieux encore, nous dit-elle, avec la dinde qu’elle mangera à noël, elle a pu pratiquer la « <a href="https://www.marianne.net/societe/sciences-et-bioethique/communication-animale-une-nouvelle-derive-sectaire-qui-menace-autant-les-betes-que-les-humains">communication animale</a> ». En approchant sa main de la tête de l’animal, elle est parvenue à communiquer avec elle et à l’informer de ce qui allait se passer. « Comme ça, explique-t-elle, l’animal comprend son destin et donne son consentement à son accomplissement ».</p>
<p>Outre un élevage et un abattage éthiques, Jade estime que la communication animale est le meilleur moyen de savoir si l’animal a réellement vécu une vie heureuse et s’il accepte de faire don de lui pour perpétuer le cosmos.</p>
<p>Gabriel s’empresse alors de préciser que le soir du réveillon, lorsque la dinde sera servie, et avant d’y goûter, il s’assurera que l’âme de la dinde aura trouvé son chemin dans l’après-vie. Réunie autour de la table, se tenant les mains, la famille assistera au <a href="https://www.cairn.info/le-chamanisme--9782130792840-page-101.htm">voyage chamanique</a> de Gabriel qui, une fois passé dans l’autre monde, dialoguera avec l’esprit de la dinde afin de s’assurer que son âme a bien quitté son corps.</p>
<p>Et cette vérification n’est pas superflue, nous raconte Gabriel : deux ans plus tôt, l’âme de la dinde avait refusé de quitter son corps. Il l’avait alors accompagnée, en lui montrant la « voie des étoiles ».</p>
<blockquote>
<p>« Vous vous rendez compte, s’inquiète-t-il, on est passé à côté d’une catastrophe énergétique ! Mes parents nous assuraient qu’après la cuisson, il ne pouvait plus rester d’âme qui vive dans la dinde. Cette anecdote m’a permis de comprendre définitivement qu’ils n’étaient ni éveillés ni prêts pour l’éveil. »</p>
</blockquote>
<p>Quant au dessert, la traditionnelle <a href="https://www.lexpress.fr/styles/plaisirs/saveurs/buche-de-noel-du-haut-de-ce-gateau-5000-ans-vous-contemplent_1306969.html">bûche</a>, pour des bienheureux, ne saurait être remplacée. Quoi de mieux pour symboliser la nouvelle alliance entre les hommes et les arbres ? Jade s’empresse alors de nous rappeler l’<a href="https://journals.openedition.org/nordiques/5445">origine païenne</a> de cette tradition, dénaturée par les chrétiens :</p>
<blockquote>
<p>« À l’époque païenne, ils n’avaient pas encore véritablement compris tout ce qui se jouait, mais ils avaient déjà senti que le lien qui nous unissait à l’Univers passait par les arbres ».</p>
</blockquote>
<h2>La fin du Père Noël</h2>
<p>Au réveil, au pied du Sapin holographique, il n’y aura pas cadeaux. Jade et Gabriel déplore cette tradition. Pour eux, c’est elle qui a détruit l’esprit de noël. « De la célébration du partage, on est passé à celle de la <a href="https://www.cairn.info/revue-du-mauss-2014-2-page-229.htm">consommation</a> », s’insurge Gabriel. « Et je ne vous parle même pas de la question écologique », renchérit Jade. Mais ce qui les désespère le plus, l’un et l’autre, ce sont « toutes ces histoires de Père Noël ».</p>
<p>« C’est l’exemple même de la mauvaise idée, le Père Noël, explique Jade, agacée, et en plus, ça perpétue des <a href="https://www.nouvelobs.com/debat/20181221.OBS7492/le-pere-noel-est-il-un-symbole-du-patriarcat.html">schémas patriarcaux</a> malsains ». Pour elle, il vaut mieux « dire la vérité » aux enfants : c’est le meilleur moyen de les rendre conscients de la beauté des liens qui les unissent à nous et au cosmos.</p>
<blockquote>
<p>« Nous voulons élever nos enfants dans la confiance et la positivité. Rien de pire que de leur faire commencer leur vie par un mensonge et une trahison », témoigne Gabriel.</p>
<p>« Le jour de la béatitude, nous partageons le bonheur d’être réunis tous ensemble et reconnaissants de ce que chacun apporte à l’équilibre de notre famille, nous explique Jade, et le Sapin est là pour nous rappeler ce que nous devons aussi à la Nature. Tout ça, poursuit-elle, ça crée de bonnes énergies ».</p>
</blockquote>
<p>Bien sûr, Jade et Gabriel reconnaissent qu’il vaudrait mieux se comporter ainsi tous les jours, mais les aléas de la vie rendent difficile de rester positif à longueur de temps. Alors, l’ancien jour de Noël, devenu nouveau jour de la béatitude, est l’occasion de partager un peu plus de vibrations positives que d’habitude, de compenser les écarts de l’année et de rééquilibrer les énergies du cosmos.</p>
<p>Célébrer le bonheur d’être ensemble, dans la paix et le partage, n’est-ce pas là l’esprit originel de Noël ? Pour les Martin, c’est un peu plus compliqué, et Gabriel nous explique la différence :</p>
<blockquote>
<p>« On entend souvent la formule “Paix sur la Terre aux hommes de bonne volonté”, mais nous, on va beaucoup plus loin, on souhaite la paix à toutes formes de conscience, quelle qu’elle soit : homme, animal ou arbre ».</p>
</blockquote>
<p>La communion de toutes les formes de conscience dans le respect des particularités de chacun ne serait-elle pas finalement le secret du bonheur ? « À n’en pas douter », nous disent Jade et Gabriel, tout en ajoutant : « À la condition de tenir aussi à distance tous ceux qui nous nuisent par leurs énergies négatives ».</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/219623/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Damien Karbovnik ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Passez les fêtes avec la famille Martin, en proie à une quête spirituelle dans un monde où la nature se raréfie. Avec… bienveillance bien sûr !Damien Karbovnik, Historien des religions, sociologue, Université de StrasbourgLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2201172023-12-20T19:56:12Z2023-12-20T19:56:12ZÀ Noël, des cadeaux de seconde main sous le sapin ?<p>Une <a href="https://tripartie.com/second-hand-european-market-study/">étude récente</a> de Tripartie, plate-forme sécurisant les paiements pour des produits de seconde main, en témoigne : le <a href="https://theconversation.com/topics/vente-doccasion-111904">marché de l’occasion</a> devient une alternative de plus en plus considérée par un nombre croissant de consommateurs.</p>
<blockquote>
<p>« La demande de produits d’occasion affiche une nette augmentation : près de la moitié des Français (46 %) a acheté au moins un produit d’occasion au cours des 12 derniers mois ».</p>
</blockquote>
<p>Bien que les <a href="https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/5945-les-objets-d-occasion-surconsommation-ou-sobriete-.html">discours convenus</a> sur les bénéfices perçus de l’achat d’occasion concernent essentiellement le gain financier et la réduction de l’impact environnemental, plusieurs recherches ont montré l’appétence des consommateurs pour la « chose marchande ». L’achat pour soi-même ne traduit souvent pas tant une volonté de consommation raisonnée qu’un désir de consommer encore et toujours davantage grâce à des prix réduits. D’ailleurs, d’après un <a href="https://presse.ademe.fr/wp-content/uploads/2023/01/CP-ADEME-Occasion.pdf">rapport</a> de l’Ademe, 86 % des individus estiment que l’occasion permet d’acheter plus d’objets pour moins cher et 84 % y voient l’occasion d’économiser pour s’offrir plus de loisirs en retour. Les liens entre achat d’occasion et sobriété ne sont alors <a href="https://theconversation.com/du-troc-aux-ventes-doccasion-les-paradoxes-de-la-consommation-collaborative-chez-les-jeunes-197961">pas si évidents</a>.</p>
<p>D’un autre côté, des <a href="https://www.cm-cm.fr/post/et-si-offrir-jeux-et-jouets-en-seconde-main-a-noel-n-etait-pas-un-cadeau">freins</a> persistent encore chez certains consommateurs comme la difficulté à trouver le produit recherché, la peur de la mauvaise affaire ou encore la crainte de l’escroquerie. Cela explique que de nombreuses garanties et facilitations soient mises en place par les plates-formes comme LeBonCoin ou Vinted : des applications faciles d’utilisation, une présentation optimisée des produits, des filtres de recherche, des transactions financières sécurisées, une protection acheteur incluse, un contrôle des contrefaçons pour les produits de luxe… Ces dispositifs participent à l’accélération de cette pratique de consommation, qui s’est institutionnalisée et devient aujourd’hui la norme.</p>
<p>Acheter des produits de seconde main n’est pas chose récente mais le phénomène a connu un essor fulgurant ces dernières années, facilité par les plates-formes de mise en relation de « particuliers à particuliers » et l’ouverture de nombreuses friperies ou ressourceries locales. Jusqu’à arriver au pied des sapins de Noël ?</p>
<h2>Pour soi-même et pour les autres ?</h2>
<p>Si les consommateurs sont désormais acculturés à l’achat d’occasion pour eux-mêmes, ils sont aussi de plus en plus nombreux à envisager d’offrir un cadeau de ce type. Un <a href="https://www.ifop.com/publication/les-francais-et-les-cadeaux-de-seconde-main/">sondage</a> récent mené par l’Ifop pour LeBonCoin le confirme : 43 % de sondés ont déjà offert un cadeau de seconde main. Parmi eux, 27 % possédaient déjà l’objet, 41 % l’ont acheté pour offrir, le reste a déjà pratiqué les deux.</p>
<p>Pour mieux comprendre ce phénomène, nous avons mené une recherche exploratoire à partir d’entretiens avec des consommateurs, individuels comme groupés. L’objectif était de chercher à identifier dans quelle mesure les adeptes de l’occasion pour eux-mêmes sont enclins ou non à considérer des produits de seconde main lorsqu’ils sont à la recherche d’un cadeau à offrir à un proche, un membre de la famille, un ami ou un collègue.</p>
<p>Nos résultats ont révélé que les bénéfices perçus de l’achat d’un cadeau d’occasion sont similaires à ceux identifiés dans la pratique d’achat d’occasion n’ayant pas vocation à être offert : le gain financier et l’impact écologique positif. Et comme pour l’achat d’occasion pour soi, un bénéfice additionnel apparaît : celui de pouvoir acheter « plus », et donc offrir « plus », en quantité et/ou en qualité. Nous retrouvons ici la même contradiction que pour les achats pour soi-même : des discours tournés vers une consommation plus responsable et sobre, alors que les pratiques restent ancrées dans l’hyperconsommation.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1731789340156494078"}"></div></p>
<p>En ce qui concerne les freins relatifs à l’achat de cadeaux d’occasion, on retrouve <a href="https://www.jstor.org/stable/258788">ceux qui existaient il y a encore quelques années</a> alors que l’achat d’occasion n’était pas devenu normalisé. Les consommateurs soulignent également qu’il ne leur paraît pas normal et naturel, et donc pas dans leurs habitudes d’achat, de se tourner vers des offres de seconde main lorsqu’il s’agit d’offrir un cadeau. Mathilde, 32 ans, explique :</p>
<blockquote>
<p>« Je n’y ai jamais pensé. C’est sans doute par habitude : pour offrir un cadeau, on veut du neuf, pour que ce soit parfait, un beau jouet, tout emballé. On se met la pression. »</p>
</blockquote>
<p>D’autres individus évoquent spontanément la crainte de l’image négative perçue par le destinataire du cadeau de seconde main, comme Ingrid, 46 ans :</p>
<blockquote>
<p>« Jamais de la vie, je ne me le permettrais pas ! »</p>
</blockquote>
<p>Il y a encore une forme de honte ou de culpabilité à offrir un cadeau d’occasion, ce que ressent Bruno, 36 ans :</p>
<blockquote>
<p>« On est dans une société où offrir de l’occasion pourrait être mal pris par la personne. »</p>
</blockquote>
<h2>Dissimuler, assumer ou valoriser ?</h2>
<p>Pour d’autres, malgré tout, la tentation de tirer profit des avantages de la seconde main l’emporte sur les freins potentiels. Dans ce cas, une attention particulière est portée à l’état du produit et tout particulièrement à son emballage. Pour Aurélien, 39 ans, les cadeaux d’occasion, c’est « oui » mais « à la condition que ceux-ci soient dans l’emballage d’origine ». Emeline, 39 ans, est aussi adepte de la seconde main pour offrir mais le dissimule :</p>
<blockquote>
<p>« Je l’ai déjà fait mais je ne dis pas que c’est de l’occasion… »</p>
</blockquote>
<p>D’ailleurs, la question de la transparence quant aux vies antérieures d’un produit offert divise. D’après le sondage Ifop, 44 % de ceux qui ont déjà offert de la seconde main l’ont toujours indiqué et 40 % l’ont dit parfois, mais pas tout le temps.</p>
<p>Au-delà d’être simplement « assumés », parfois sous la contrainte lorsqu’il est impossible de cacher que l’emballage ait déjà été ouvert, ou que la garantie ou le ticket d’échange ne peuvent pas être fournis, les cadeaux d’occasion sont parfois même « valorisés » auprès du destinataire. C’est notamment le cas lorsqu’ils sont explicitement demandés par conviction écologique ou lorsqu’il s’agit d’une pièce rare, vintage, ou de collection.</p>
<p>Si l’on en croit les <a href="https://presse.leboncoincorporate.com/actualites/un-acteur-majeur-de-lecosysteme-numerique-francais-ebbf-763e3.html">chiffres</a> régulièrement affichés par les plates-formes, on peut penser que Noël 2023 plus encore que les précédents, devrait voir de nombreux paquets contenant des produits d’occasion « dissimulés » ou « assumés » sous le sapin. Dans les deux cas, ce sera le moyen de gâter ses proches dans un contexte inflationniste encore présent avec la volonté d’adopter un mode de consommation plus raisonné et responsable.</p>
<p>Même si pour une grande majorité de nos répondants, le cadeau d’occasion n’a pas encore trouvé toute sa légitimité, les premiers signes d’un élargissement des pratiques liées à l’achat de seconde main sont déjà présents. Les plates-formes semblent l’avoir bien compris. Rakuten affiche le slogan « Idée cadeau pas cher : découvrez nos idées cadeaux incontournables pour faire plaisir autour de soi, du côté du neuf, de l’occasion et du reconditionné » ; la concurrence n’est pas en reste : « Pour un Noël plus abordable, plus durable, plus responsable, faites vos cadeaux sur LeBonCoin ». 73 % des personnes ayant déjà acheté des objets de seconde main pour les offrir se les sont procurés sur Internet.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220117/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Elodie Juge est membre de la Chaire industrielle TRENDS dont les partenaires sont la Métropole Européenne de Lille, l'Initiative d'Excellence de l'Université de Lille, les entreprises Boulanger, Idkids, Leroy Merlin et Cap Digital.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Ses recherches sont actuellement financées par la région Pays de la Loire, l'Académie PULSAR et la chaire TRENDS (Université de Lille). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Isabelle Collin-Lachaud est également directrice scientifique de la chaire de recherche TREND(S) dont les partenaires sont la Métropole Européenne de Lille, l'Initiative d'Excellence de l'Université de Lille, les entreprises Boulanger, Idkids, Leroy Merlin et Cap Digital.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Tiphaine Chautard Darde est membre de la chaire TRENDS dont les partenaires sont la Métropole Européenne de Lille, l'Initiative d'Excellence de l'Université de Lille, les entreprises Boulanger, Idkids, Leroy Merlin et Cap Digital.</span></em></p>Si s’acheter des produits d’occasion pour soi-même est une pratique de plus en plus répandue, qu’en est-il lorsqu’il s’agit d’offrir ?Elodie Juge, Maître de Conférences - Univ. Lille, ULR 4999 LUMEN - Membre de la chaire TREND(S), Université de LilleEva Cerio, Enseignant-chercheur en marketing responsable, Université d'AngersIsabelle Collin-Lachaud, Professeure des universités, LUMEN (ULR 4999), directrice scientifique de la chaire TREND(S), Université de LilleTiphaine Chautard Dardé, Maître de conférences / Associate Professor of Marketing, Université d'AngersLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2189542023-12-14T19:11:09Z2023-12-14T19:11:09ZTéléfilms de Noël : les recettes de leur succès au long cours<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/565157/original/file-20231212-23-3tf6ve.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C0%2C988%2C664&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">_Falling for Christmas_, téléfilm de Noël diffusé sur Netflix.</span> <span class="attribution"><span class="source">Netflix</span></span></figcaption></figure><p>Alors que la nuit tombe plus tôt, que les rues, vitrines et monuments s’illuminent de mille feux et que les traditionnels marchés s’installent au cœur des bourgs, Noël envahit également l’intérieur des habitations, des décorations aux petits écrans. En effet, comme le chantait <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Rct7_aMc5B8">Billy Mack</a> dans le désormais culte <a href="https://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=44445.html"><em>Love Actually</em></a>, « Christmas is all around », y compris à la télévision.</p>
<p>Les « films de Noël » ne sont pas nouveaux : ils existent dès la fin du <a href="https://www.brut.media/fr/entertainment/tout-ce-qu-il-faut-savoir-sur-les-films-de-noel-e5ccd9ce-ca1b-4cfe-9468-c19a72a2a054">XIX<sup>e</sup> siècle</a> et arrivent en France au tout début du XX<sup>e</sup> siècle (avec notamment <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Dc3ei1tseeM"><em>Santa Claus</em></a> de George Albert Smith, en 1898). Parmi les plus iconiques, on compte <em>Maman j’ai raté l’avion</em> (1990), <em>Love Actually</em> (2003), <em>The Holiday</em> (2006), ou les diverses adaptations des contes et histoires de Noël (<em>Le Grinch</em>, par exemple).</p>
<p>En plus d’un siècle d’histoire, ils ont bien entendu évolué au gré des époques et des technologies. Si les films de Noël existent toujours, ces dernières décennies ont vu le succès d’un autre format : les téléfilms de Noël. Ces derniers sont produits uniquement pour la télévision, et donc sont soumis à une production différente, généralement bien moins onéreuse. Ils se distinguent aussi par des codes narratifs bien précis empruntés aux comédies romantiques – les décorations de Noël en plus – qui en font des objets emblématiques de la période des fêtes.</p>
<h2>Un scénario cousu de fil blanc</h2>
<p>En général, l’histoire suit une jeune femme carriériste vivant dans une grande ville ; elle rencontre un problème qui la contraint à se rendre dans une petite bourgade pour les fêtes, où elle va rencontrer un homme. Sur place, les habitants et le protagoniste masculin, baignés dans une ambiance festive traditionnelle, l’aident à résoudre son problème, l’incitant ainsi à changer de vie et à s’installer dans la bourgade où elle a passé Noël… avec l’homme en question.</p>
<p>Parmi les instigateurs de ces codes bien connus de tous les amateur de ces téléfilms, on compte la chaîne américaine Hallmark, filiale de Hallmark Cards, la plus grande entreprise de cartes de vœux américaine. A l’origine, les films produits par la chaîne Hallmark avaient pour but de rappeler aux téléspectateurs que le temps était venu d’envoyer des cartes de vœux.</p>
<p>Les valeurs de Noël représentées dans les téléfilms appellent au partage et à la générosité, tentant ainsi d’inciter leurs publics à promouvoir les mêmes valeurs dans leur vie quotidienne. La chaîne Hallmark elle-même était, avant de devenir Hallmark, une chaîne religieuse (The Faith and Values Channel), puis une chaîne centrée sur la famille (Odyssey Network).</p>
<p>Cette orientation vers des programmes pour la famille s’est intensifiée après le rachat d’Odyssey par Hallmark, ce qui explique le côté conservateur de ses productions mais aussi l’aspect marketing, toujours présent derrière ces programmes saisonniers. La chaîne Hallmark diffuse dès le début des années 2000 ses premiers films de Noël et <a href="https://www.brut.media/fr/entertainment/tout-ce-qu-il-faut-savoir-sur-les-films-de-noel-e5ccd9ce-ca1b-4cfe-9468-c19a72a2a054">lance en 2009 son « Countdown to Christmas », une programmation spéciale de fin octobre au 1<sup>er</sup> janvier »</a>, établissant la diffusion saisonnière des téléfilms de Noël. Hallmark est par ailleurs un des plus grands producteurs de téléfilms de Noël, avec plus de <a href="https://www.brut.media/fr/entertainment/tout-ce-qu-il-faut-savoir-sur-les-films-de-noel-e5ccd9ce-ca1b-4cfe-9468-c19a72a2a054">300 films diffusés depuis 2009 et près de 40 nouveaux films produits et diffusés chaque année</a>.</p>
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<p>Ces téléfilms sont le fruit d’un simple calcul : un téléfilm de Noël Hallmark est produit pour environ <a href="https://thesciencesurvey.com/arts-entertainment/2022/01/13/the-hallmark-movie-popularity-paradox/">800 000 $ en trois mois</a> (contre plusieurs millions de dollars et plus d’un an pour un film classique) tout en étant extrêmement rentable, lors de la diffusion américaine (les annonceurs plébiscitent ces productions de fin d’année) et de la vente de ces téléfilms à l’international.</p>
<p>Les téléfilms Hallmark jouissent d’un succès certain, rassemblant plusieurs millions de téléspectateurs devant leur écran. De fait, Hallmark était en 2020 une des chaînes américaines les plus regardées.</p>
<h2>En France aussi</h2>
<p>Mais les téléfilms de Noël se sont également démocratisés en France ces dernières années. TF1 diffuse quotidiennement <a href="https://www.allocine.fr/article/fichearticle_gen_carticle=1000047293.html">2 téléfilms de Noël</a> à partir de fin octobre. Les téléspectateurs français peuvent également trouver des films de Noël sur les plates-formes de replay My TF1 (dans la section <a href="https://www.tf1.fr/tf1/telefilms-de-noel">Les Films de Noël</a>) et M6 Replay (dans la section <a href="https://www.6play.fr/6play/-telefilms-de-noel-6play-f_1317">Téléfilms de Noël</a>).</p>
<p>Depuis plusieurs hivers, les téléfilms de Noël sont également devenus des incontournables des plates-formes de streaming telles que Netflix, qui s’est lancé dans la production de téléfilms et séries de Noël depuis 2017. Ces productions, parmi lesquelles on peut citer <em>A Christmas Prince</em> (2017), <em>The Princess Switch</em> (2018), <em>A Castle for Christmas</em> (2021) ou <em>The Noel Diary</em> (2022), rencontrent un succès indéniable. Sous forme de téléfilm ou de séries, ces réalisations reprennent les codes bien connus des films de Noël, tout en tentant d’actualiser le genre, avec plus de diversité dans les castings et la production de films de Noël LGBTQ-<em>friendly</em> par exemple (<em>Happiest Season</em>, 2020, <em>Single All the Way</em>, 2021).</p>
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<p>On l’a bien compris, à partir du 1<sup>er</sup> novembre, il n’est plus possible d’échapper à ces productions kitsch et pleines de bons sentiments. Comme l’écrit <a href="https://www.20minutes.fr/television/4006934-20221024-telefilms-noel-arrivent-automne-nouveau-printemps-demain?utm_term=Autofeed&xtref=twitter.com&utm_medium=Social&utm_source=Twitter&fbclid=IwAR2an9RyYBO-FiLZ620jilY9jYjpOVIAk9awU3XL_L47tITojOYCCqjxwvU#Echobox=1666630466">Maxime Fettweis</a>, « désormais incontournables, ces productions américaines se sont fait une place de choix dans le catalogue des rituels de Noël ». Celles-ci enchantent autant qu’elles agacent : pour certains téléspectateurs, ces productions codifiées et prévisibles sont insupportables, alors qu’elles font chaque année le bonheur d’autres publics, inconditionnels du genre. Qu’on les aime ou qu’on les déteste, les téléfilms de Noël ne laissent personne indifférent. Mais quelles sont les raisons de leur succès ?</p>
<h2>Un rendez-vous réconfortant</h2>
<p>Un des premiers facteurs de succès des téléfilms de Noël, c’est leur temporalité : ces productions ne sont diffusées qu’à une période de l’année, entre fin octobre et début janvier. Ce sont donc des produits « de saison », dont les spectateurs ne peuvent profiter qu’à une période donnée et pendant un laps de temps déterminé.</p>
<p>Outre leur saisonnalité, les téléfilms de Noël sont également un divertissement qui arrive à point : novembre rime généralement avec pluie et froid, alors que décembre est le plus souvent une période effrénée et stressante de planification des achats de Noël et d’organisation des fêtes de famille. Que ce soit contre la grisaille de novembre ou la frénésie de décembre, les téléfilms de Noël apportent <a href="https://thesciencesurvey.com/arts-entertainment/2022/01/13/the-hallmark-movie-popularity-paradox/">optimisme</a> et réconfort, et présentent une vision positive des fêtes de fin d’année.</p>
<p>Autre raison de leur succès, ces téléfilms en appellent à la <a href="https://thesciencesurvey.com/arts-entertainment/2022/01/13/the-hallmark-movie-popularity-paradox/">nostalgie</a> des téléspectateurs à l’égard de la période de Noël. Par le biais de poncifs liés à la période des fêtes, ils convoquent des souvenirs et soulignent ce qui en fait une période magique – ou offrent l’occasion de la fantasmer ou de l’idéaliser. À cet égard, les téléfilms de Noël sont une véritable madeleine de Proust permettant un retour en enfance. Les spectateurs voient à nouveau Noël à hauteur d’enfant, avec ses lumières, sa magie et sa chaleur humaine – ou peuvent se lover dans cet imaginaire stéréotypé, quand bien même Noël n’a jamais ressemblé à cela pour eux. Ces productions se veulent un plaisir réconfortant qui garantit une déconnexion avec les problèmes du quotidien.</p>
<h2>Des valeurs conservatrices et rassurantes</h2>
<p>Les téléfilms de Noël mettent également en avant des valeurs conservatrices qui peuvent être rassurantes : la famille, la communauté, la solidarité, l’amitié, la loyauté. Ces « bons sentiments » qui peuvent faire paraître ces films mièvres sont également ce qui les rendent attrayants : ils ne sont pas engagés politiquement (même s’ils sont sous-tendus par une idéologie conservatrice), non clivants, et ne traitent pas de sujets controversés. Ce sont des téléfilms qui se veulent <a href="https://www.wgfoundation.org/blog/2022/12/6/hallmark-christmas-movies">consensuels</a>, qui rassemblent en rappelant les valeurs idéales d’une société utopique. Dans ces productions, les valeurs américaines conservatrices ont la part belle, et subliment la vie dans les petites villes, le travail manuel et les petits bonheurs quotidiens, par opposition à la représentation des citadins-cols blancs carriéristes et égocentriques. Ces téléfilms mettent aussi l’accent sur le fait qu’il n’y a pas besoin d’aller loin pour trouver le bonheur, dans une vision rassurante et un « retour aux vraies valeurs » qui trouve un écho aux États-Unis et au-delà.</p>
<h2>Un divertissement pour toute la famille</h2>
<p>Enfin, les téléfilms de Noël sont des produits divertissants par leur simplicité de compréhension. Ils ne requièrent pas une grande attention, s’adressent à tous, petits et grands, et permettent ainsi de rassembler toute la famille. Les scénarii cousus de fil blanc permettent de s’adonner à d’autres activités en parallèle tout en créant une ambiance de Noël.</p>
<p>C’est ce <a href="https://www.vogue.com/article/hallmark-christmas-movies">qu’affirmait Bill Abbott</a>, alors dirigeant de Crown Media Family Networks, la maison mère de la chaîne Hallmark, lorsqu’il déclarait : « Notre but est de créer une expérience où on peut allumer la télévision, se sentir bien, et cuisiner, décorer ou faire une activité en lien avec les fêtes qui met dans l’esprit de Noël. » Les téléfilms de Noël ne sont donc pas des films faits pour être appréciés pour leur qualité cinématographique, mais l’équivalent télévisuel d’un feu de cheminée, appréciés pour leur valeur symbolique et leur capacité à fédérer. Ils parlent à toutes les générations et ainsi unissent la famille devant la télévision, que ce soit pour profiter du film… ou pour s’en moquer.</p>
<p>Qu’on les aime ou qu’on les déteste, les téléfilms de Noël font à présent bien partie du paysage médiatique français. Ce genre codifié et rassurant, fortement ancré dans les valeurs traditionnelles américaines, a su trouver son public en France. Au-delà des téléfilms américains, les plates-formes de streaming comme Netflix ont permis une plus grande diversification des productions de Noël, avec l’apparition de téléfilms et séries de Noël <a href="https://www.allocine.fr/series/ficheserie_gen_cserie=28716.html">français</a>, <a href="https://www.programme-tv.net/news/cinema/290161-aux-antipodes-de-noel-netflix-devoile-un-nouveau-film-de-noel-a-laccent-espagnol/">espagnols</a> ou <a href="https://www.allocine.fr/series/ficheserie_gen_cserie=25431.html">norvégiens</a> qui adaptent le genre aux spécificités culturelles européennes. Un premier pas vers de nouvelles représentations ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218954/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julie Escurignan ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Qu’on les aime ou qu’on les déteste, les téléfilms de Noël font à présent bien partie du paysage médiatique français. Mais pourquoi séduisent-ils autant ?Julie Escurignan, Enseignante chercheuse en Communication & Marketing, Responsable du Master Creative & Cultural Industries Management, Pôle Léonard de VinciLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1968452022-12-22T19:07:24Z2022-12-22T19:07:24ZEt si vous profitiez des fêtes pour questionner vos proches à la manière des anthropologues ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/502160/original/file-20221220-26-oznpq5.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C9%2C836%2C430&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Que savons-nous vraiment de nos proches? </span> <span class="attribution"><span class="source">Unsplash/Glen Hodson</span></span></figcaption></figure><p>Comment est-il possible de passer autant de temps avec ses parents et grands-parents sans vraiment les connaître ?</p>
<p>Cette question m’a toujours laissé perplexe en <a href="https://liberalarts.utexas.edu/anthropology/faculty/elk612">tant qu’anthropologue</a>. Elle est particulièrement pertinente à l’époque des fêtes de fin d’année, où des millions de personnes voyagent pour passer du temps avec leur famille.</p>
<p>Lorsque mes parents étaient vivants, je parcourais de longues distances pour être avec eux. Nous avions les conversations habituelles : ce que faisaient les enfants, comment se passait le travail, les maux et les douleurs des uns et des autres. Mais ce n’est qu’après la mort de mes parents que je me suis demandé si je les connaissais vraiment de manière profonde, riche et nuancée. Et j’ai réalisé que je ne les avais jamais interrogés sur les périodes formatrices de leur vie, leur enfance et leur adolescence.</p>
<p>Qu’est-ce que j’avais manqué ? Comment cela s’était-il produit ?</p>
<p>En réalité, j’avais interrogé ma mère quelques années avant sa mort. Mais je ne l’avais questionnée qu’au sujet d’autres membres de la famille – des personnes qui suscitaient ma curiosité parce que le travail de mon père nous avait menés dans des endroits éloignés du reste de la famille. J’ai basé mes questions à ma mère sur les quelques informations que j’avais déjà, pour construire un arbre généalogique. On pourrait dire que je ne savais pas ce que je ne savais pas.</p>
<p>J’ai décidé de rechercher le type de questions qui auraient permis à ma mère d’obtenir des informations sur sa vie, dont je n’avais aucune idée, et qui sont désormais perdues à jamais. J’ai interviewé des personnes âgées pour <a href="https://www.penguinrandomhouse.com/books/690817/the-essential-questions-by-elizabeth-keating-phd/">élaborer des questions</a> qui permettraient de brosser un tableau de la vie d’une personne lorsqu’elle était enfant et adolescente. Je voulais des détails qui m’aideraient à voir le monde qui avait influencé la personne qu’elle était devenue.</p>
<p>J’ai donc utilisé ma formation d’anthropologue pour poser le type de questions qu’un anthropologue pose lorsqu’il essaie de comprendre un mode de vie ou une culture qu’il connaît peu. Les anthropologues veulent voir le monde du point de vue d’une autre personne, à travers d’autres lunettes. Les réponses des personnes âgées m’ont ouvert de nouveaux horizons.</p>
<h2>Sonder la banalité</h2>
<p>L’un des secrets pour avoir une conversation approfondie avec vos aînés lorsque vous êtes ensemble pendant les vacances est de mettre de côté votre rôle habituel. Oubliez, le temps de l’entretien, votre rôle de petit-enfant ou d’enfant, de nièce ou de neveu, et pensez comme un anthropologue.</p>
<p>La plupart des <a href="https://lib.guides.umd.edu/c.php?g=326980&p=2198795">enquêtes généalogiques</a> se concentrent sur les grands événements de la vie comme les naissances, les décès et les mariages, ou sur la construction d’un arbre généalogique.</p>
<p>Mais les anthropologues veulent connaître les détails de la vie ordinaire : les interactions avec les voisins, la façon dont le temps passe, les objets qui étaient importants pour eux, ce dont les enfants avaient peur, comment fonctionnait la séduction, les styles d’éducation, etc.</p>
<p>Si vous posez des questions sur la vie sociale, vous obtiendrez des descriptions qui vous donneront une idée de ce que c’était que d’être un enfant qui découvrait les choses à l’époque – quand, par exemple, comme l’explique un parent, « à moins qu’on ne vous dise d’aller dire bonjour à grand-mère, vous ne parliez jamais, en tant qu’enfant, aux adultes ».</p>
<p>En revanche, si vous questionnez au sujet des objets importants, vous entendrez parler de ces choses tangibles qui se transmettent de génération en génération dans votre famille et qui sont dépositaires d’une certaine valeur. Ces objets ordinaires peuvent véhiculer des histoires sur la vie familiale, comme le décrit cette personne qui a grandi au Royaume-Uni :</p>
<blockquote>
<p>« Maman me disait que le meilleur moment de la journée, c’était quand je rentrais de l’école, que j’entrais par la porte de derrière, que je m’asseyais sur le tabouret de la cuisine et que je parlais, un truc mère-fille. J’ai toujours ce tabouret de cuisine. Mon père l’a construit en cours du soir. Mes enfants se souviennent aussi d’avoir été assis sur le tabouret dans la cuisine, pendant que grand-mère cuisinait, pour passer le temps, boire des tasses de thé et manger des sablés. »</p>
</blockquote>
<p>Mon interlocutrice, devenue elle-même grand-mère, avait du mal à comprendre la fascination des jeunes pour les mondes sociaux contenus dans leurs téléphones.</p>
<p>Mais en ce qui concerne les téléphones, j’ai découvert qu’il pouvait aussi y avoir des points de connexion inattendus entre les générations. Lorsque j’ai demandé à une grand-mère dans quelle maison elle avait grandi, alors qu’elle visualisait sa maison dans la campagne du Dakota du Sud, elle s’est soudain souvenue du téléphone qu’elle avait, un téléphone <a href="https://www.mentalfloss.com/article/62876/10-aspects-old-telephones-might-confuse-younger-readers">« party line »</a>, ce qui était courant aux États-Unis à l’époque.</p>
<p>Toutes les familles de la région partageaient une ligne téléphonique, et vous étiez censé ne décrocher le téléphone que lorsque vous entendiez la sonnerie spéciale de votre famille – soit un certain nombre de sonneries. Mais comme elle l’a raconté, le lien de sa mère avec la communauté a été considérablement élargi, même à l’époque, par la technologie du téléphone :</p>
<blockquote>
<p>« Nous avions un téléphone, et il était sur une ligne partagée. Et vous savez, nous avions notre sonnerie, et bien sûr, vous entendiez les autres sonneries aussi. Et puis parfois, ma mère le prenait en douce et soulevait le récepteur pour voir ce qui se passait. »</p>
</blockquote>
<h2>Tout ce que vous avez à faire, c’est de demander</h2>
<p>J’ai tellement apprécié les entretiens avec des personnes âgées que j’ai demandé à mes étudiants de l’université du Texas à Austin d’interroger leurs grands-parents. Ils ont fini par avoir des conversations exaltantes, intéressantes et qui font le lien entre les générations.</p>
<p>Leurs expériences, ainsi que les miennes, m’ont amenée à <a href="https://www.penguinrandomhouse.com/books/690817/the-essential-questions-by-elizabeth-keating-phd/">rédiger un guide</a> à l’intention des personnes désireuses d’en savoir plus sur les débuts de la vie de leurs parents et grands-parents, afin de protéger une partie de l’histoire familiale qui est précieuse et facilement perdue.</p>
<p>Les grands-parents se sentent <a href="https://www.jenonline.org/article/S0099-1767(20)30425-6/fulltext">souvent seuls</a> et ont l’impression que <a href="https://www.dailymail.co.uk/news/article-1388922/The-ignored-elderly-Weve-invisible-society-say-half-65s.html">personne ne les écoute</a> ou ne prend au sérieux ce qu’ils ont à dire. J’ai découvert que cela peut être dû au fait que beaucoup d’entre nous ne savent pas comment entamer une conversation qui leur donne l’occasion de parler des vastes connaissances et expériences qu’ils possèdent.</p>
<p>En adoptant la position d’un anthropologue, mes élèves ont pu sortir de leur cadre de référence familier et voir le monde comme les générations précédentes. Une élève a même confié à la classe qu’après avoir interrogé sa grand-mère, elle aurait souhaité être une jeune personne à l’époque de sa grand-mère.</p>
<p>Souvent, les récits de vie « ordinaire » rapportés à mes élèves par leurs parents plus âgés semblaient tout sauf ordinaires. Il était notamment question de la ségrégation raciale dans les écoles, de l’obligation pour les femmes d’être accompagnées d’un homme pour pouvoir entrer dans un pub ou un restaurant, et de l’abandon de l’école en sixième année pour travailler dans la ferme familiale.</p>
<p>À maintes reprises, les grands-parents ont dit quelque chose du style « personne ne m’avait jamais posé ces questions ».</p>
<p>Lorsque j’ai commencé à élaborer les bonnes questions à poser aux membres âgés de la famille, j’ai demandé à l’une de mes participantes à la recherche d’interroger sa mère âgée sur la vie quotidienne lorsqu’elle était enfant. Vers la fin de l’entretien, elle a dit à sa mère : « Je ne connaissais pas ces choses-là avant. »</p>
<p>En réponse, sa mère âgée de 92 ans lui a répondu : « Il suffit de demander. »</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196845/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Elizabeth Keating ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si vous laissez de côté les bavardages et creusez un peu plus, vous serez surpris de ce que vous pourrez apprendre.Elizabeth Keating, Professor of Anthropology, The University of Texas at AustinLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1954082022-12-22T15:20:57Z2022-12-22T15:20:57ZLe père Noël dans l’imaginaire collectif : entre profane et sacré<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/502550/original/file-20221222-18-d432yn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C1%2C991%2C664&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pour que l'idée d'un père Noël sacré survive dans l'esprit des enfants, il nous faut compter sur la complicité et la solidarité de tous les adultes, que ce soit à la maison, à l'école, dans les médias, dans les commerces ou dans les œuvres de culture populaire.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Doit-on laisser nos enfants croire au père Noël ou serait-il plus prudent de leur expliquer, dès leur plus jeune âge, qu’un tel personnage <em>n’existe pas</em> ?</p>
<p>C’est une question à laquelle plusieurs parents trouveront certainement des réponses pertinentes dans les écrits de la <a href="https://naitreetgrandir.com/fr/etape/1_3_ans/viefamille/fiche.aspx?doc=bg-naitre-grandir-croire-pere-noel">psychologie pédiatrique</a>. En adoptant toutefois la perspective de l’<a href="https://www.cas-sca.ca/fr/a-propos-d-anthropologie/qu-est-ce-que-l-anthropologie">anthropologie culturelle</a>, ma question est un peu différente. Je me demande pourquoi nous acceptons tous, un jour ou l’autre, de nous faire les complices de ce mystère sur la réalité du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/P%C3%A8re_No%C3%ABl">père Noël</a>, qu’on le voit comme un <a href="https://theconversation.com/coca-cola-is-coming-to-town-ou-lepopee-publicitaire-de-santa-128412">personnage fictif du soft power américain</a> ou plutôt comme une icône des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/No%C3%ABl">fêtes chrétiennes de la Nativité</a>.</p>
<p>Deux sous-questions doivent être formulées. La première concerne le besoin que nous, occidentaux, avons d’incarner l’esprit religieux de Noël sous la forme d’un vieillard costumé plutôt que de lui conserver son essence mythique originelle. Et la seconde concerne notre volonté encore plus naïve de sublimer l’image de ce personnage folklorique en feignant de ne pas remarquer ses écarts de conduite lorsqu’il s’en donne la licence morale, notamment dans les films ou les chansons pour enfants.</p>
<p>Dans une <a href="https://professeurs.uqam.ca/professeur/genest.sylvie/">perspective universitaire</a> et sur la base de mes intérêts pour la culture populaire et sa construction dans un contexte capitaliste, je me réfère principalement aux écrits du philosophe <a href="https://www.puf.com/Auteur:Jean-Jacques_Wunenburger">Jean-Jacques Wunenburger</a>, éminent spécialiste de l’image et du sacré, pour aborder ce thème de l’ambivalence qui caractérise notre expérience du père Noël.</p>
<h2>L’expérience infantile du « numineux »</h2>
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<figcaption><span class="caption">Des enfants prennent des photos, assis sur les genoux du père Noël.</span></figcaption>
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<p>Ce que nous enseigne d’abord Wunenburger, c’est que le sacré dispose fondamentalement d’un statut paradoxal. C’est-à-dire qu’en tant qu’il fixe un seuil entre le naturel et le surnaturel, le sacré constitue à la fois un « interdit à ne pas transgresser » et une « invitation à enfreindre les limites », notamment celles de la matérialité du monde. Devant ce paradoxe, il est normal d’être en proie à des sentiments ambivalents : d’un côté, nous ressentons une « peur panique devant la grandeur incommensurable de l’inconnu » ; et de l’autre, une « attraction irrésistible vers quelque chose de supérieur, de merveilleux et de solennel ». C’est ce que le théologien Rudoplf Otto a appelé l’expérience du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Numineux"><em>numineux</em></a>.</p>
<p>C’est sans doute ce que ressentent nos enfants lorsque nous, parents, les asseyons sur les genoux d’un père Noël inconnu en plein milieu d’un centre commercial. Par ce geste, nous les soumettons à ce type d’expérience en permettant que soit entretenue, en eux, une grande confusion de sentiments. D’une part, ils éprouveront une peur effroyable envers cet étranger flamboyant qui les empoigne ; et, d’autre part, ils nourriront cette espérance ardente à laquelle nous les raccrochons en leur faisant miroiter de jolis présents d’ordinaire inaccessibles.</p>
<h2>Sacraliser notre expérience du profane</h2>
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<figcaption><span class="caption">Le défilé du père Noël, à Montréal, en 2022.</span></figcaption>
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<p>Aussi, pour que l’étrange bonhomme soit <em>plus</em> qu’une image dans un cahier à colorier, il nous faut mettre en place des stratégies visant à en instituer le caractère sacré. Comme nous en instruit Wunenburger, il s’agit dès lors de structurer notre expérience « par le symbole, le mythe et le rite ».</p>
<p>Parmi les rites de Noël les plus pratiqués dans les métropoles industrielles, il y a celui qui consiste à assister, les enfants sur les épaules, à un long défilé de chars allégoriques au terme duquel l’apparition du père Noël produit généralement l’émoi escompté. D’autres rites plus intimes consistent par exemple à laisser des indices du passage du père Noël dans nos maisons, que ce soit en disposant des biscuits grignotés, des verres de lait à moitié bus ou des cadeaux sous le sapin, le tout à l’insu des enfants endormis.</p>
<p>Afin de donner au père Noël son caractère sacré, les créateurs de la fête capitaliste en ont par ailleurs engendré les mythes de sorte à lui octroyer des pouvoirs magiques, des connaissances secrètes et des privilèges merveilleux.</p>
<p>Quant aux symboles de la sacralité du père Noël, on les a empruntés au domaine du religieux. Il s’agit notamment de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Crosse_%C3%A9piscopale">crosse épiscopale</a>, de la <a href="https://articlesreligieux.fr/vetements-du-clerge/2482-barrette-rouge-avec-pompon.html">barrette à pompon</a> et de la couleur pourpre portée par les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cardinal_(religion)">cardinaux</a>, un rouge flamboyant symbolisant le pouvoir, le prestige et l’autorité de ces hauts dignitaires de l’Église catholique.</p>
<h2>Profaner notre expérience du sacré</h2>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/zGoISPHVTxU?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Extrait du film The Santa Clause.</span></figcaption>
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<p>Dans son goût pour le paradoxe, l’industrie du divertissement ne craint pas, par ailleurs, d’avilir l’image de son père Noël en produisant des œuvres qui en exposent certains travers. Dans la scène où il boit du chocolat chaud préparé par une jeune elfe (ci-dessus), le père Noël en pyjama flirte librement avec elle : « je dois dire que tu es très bien pour ton âge ! » Cet extrait compte parmi les plus embarrassants qu’ait tourné Disney pour sa série <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Super_No%C3%ABl"><em>The Santa Clause</em> (ou Sur les traces du père Noël, en français)</a>.</p>
<p><em>The chimney song</em> (ci-dessous), interprétée par une fillette, est un autre exemple de propos à caractère pédophile exploitant la figure sacrée du père Noël.</p>
<blockquote>
<p>Il y a quelque chose de coincé dans la cheminée</p>
<p>et je ne sais pas ce que c’est, mais c’est resté là toute la nuit.</p>
<p>J’ai attendu le père Noël toute la nuit de Noël</p>
<p>mais il n’est jamais venu et ça ne semble pas normal…</p>
</blockquote>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/yQS5nAesfGk?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">The chimney song.</span></figcaption>
</figure>
<h2>L’idée théorique du père Noël</h2>
<p>L’anthropologue Gregory Bateson a proposé une métaphore intéressante à propos du sacré et, surtout, de la place que celui-ci occupe dans l’<a href="https://www.seuil.com/ouvrage/vers-une-ecologie-de-l-esprit-gregory-bateson/9782020532334#">écologie de l’esprit humain</a>. En comparant les idées à des êtres vivants, Bateson a montré comment celles-ci naissent, vivent, se reproduisent et meurent pour créer autour de nous un écosystème de communication à la fois riche, sensible et vulnérable. Comme les espèces qui luttent ou coopèrent pour leur survie dans des conditions qui leur sont parfois favorables, parfois hostiles, les idées s’assemblent, se coordonnent, s’embrouillent ou s’entrechoquent dans une compétition qui n’est pas toujours loyale.</p>
<p>Ainsi, pour que l’idée d’un père Noël sacré survive dans l’esprit des enfants, il nous faut compter sur la complicité et la solidarité de tous les adultes, que ce soit à la maison, à l’école, dans les médias, dans les commerces ou dans les œuvres de culture populaire.</p>
<p>En revanche, pour que ce mensonge reste socialement acceptable, il est nécessaire que les adultes se mentent à leur tour à eux-mêmes quant à la réalité obscène que recouvre le personnage fictif du père Noël. En tant que complices de cette manipulation du sacré, nous devons en quelque sorte fermer les yeux sur la licence morale qu’accorde au père Noël l’industrie du divertissement lorsqu’elle met en scène la réalité de l’<a href="https://www.youtube.com/watch?v=M8GcjB6WnPY">homme ordinaire qui en endosse le costume</a>.</p>
<p>Nous signons alors un pacte avec le diable en faisant semblant de croire en l’existence d’un père Noël capable de prendre des enfants sur ses genoux sans avoir de pulsions sexuelles ; de se montrer généreux avec eux sans ruiner leurs parents ; de leur promettre des cadeaux sans exiger quelque service en retour ; qui ne voit rien d’obscène à s’introduire dans l’intimité des familles en pénétrant leur cheminée trop étroite et pas assez profonde ; ni rien de louche à se trouver dans la chambre des tout-petits.</p>
<p>Or, c’est un secret de polichinelle que ce sont des hommes de chair et de sang qui donnent vie aux pères Noël. Considérant la dualité de la nature humaine, se rendre complice de leurs mauvais penchants ne me semble pas, dès lors, très avisé.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/502549/original/file-20221222-18-98s46i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="représentation illustrée d’un père noël penché sur le lit d’une fillette endormie" src="https://images.theconversation.com/files/502549/original/file-20221222-18-98s46i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/502549/original/file-20221222-18-98s46i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/502549/original/file-20221222-18-98s46i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/502549/original/file-20221222-18-98s46i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/502549/original/file-20221222-18-98s46i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/502549/original/file-20221222-18-98s46i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/502549/original/file-20221222-18-98s46i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Doit-on laisser nos enfants croire au père Noël ou serait-il plus prudent de leur expliquer, dès leur plus jeune âge, qu’un tel personnage n’existe pas ?</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/195408/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sylvie Genest ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Doit-on laisser nos enfants croire au père Noël ou serait-il plus prudent de leur expliquer, dès leur plus jeune âge, qu’un tel personnage n’existe pas ?Sylvie Genest, Professeure à la Faculté des arts, Université du Québec à Montréal (UQAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1966202022-12-21T18:19:42Z2022-12-21T18:19:42ZCadeaux de Noël : la fabrication de nos appareils numériques a une énorme empreinte carbone<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/502191/original/file-20221220-26-ecence.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C0%2C992%2C667&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Si vous tenez absolument à offrir des produits électroniques à vos proches,
cherchez des informations environnementales et sociales sur les produits que vous souhaitez acheter.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>La période des fêtes arrive à grands pas et vous cherchez à offrir des appareils électroniques à vos proches ? Téléphones intelligents, consoles vidéos, tablettes, liseuses, montres connectées, ordinateurs, batteries externes ; le moins qu’on puisse dire, c’est que les options sont nombreuses.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/en-construction-mieux-vaut-preconiser-le-bois-pour-reduire-lempreinte-carbone-des-batiments-180752">En construction, mieux vaut préconiser le bois pour réduire l’empreinte carbone des bâtiments</a>
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<p>Mais, en tant que consommateurs de ces produits, sommes-nous vraiment conscients de l’énorme coût carbone associé à tout le cycle de vie de notre cadeau, de la fabrication, à l’utilisation et à la fin de vie de ces appareils électroniques ? Dans un <a href="https://doi.org/10.1016/j.spc.2022.09.025">article publié récemment</a>, mes collègues et moi avons montré que l’empreinte carbone associée à l’utilisation des services numériques (regarder des films et de séries en diffusion en continu, écouter de la musique, envoyer des courriels, faire des rencontres en visioconférence) est dominée par la fabrication des appareils électroniques.</p>
<p>En tant que chercheurs travaillant sur les impacts environnementaux des systèmes économiques, nous pensons qu’il est important d’alerter les utilisateurs de services numériques sur les enjeux associés à la production de leurs appareils électroniques. Nous fournissons également quelques trucs et astuces à celles et ceux qui souhaitent offrir un produit électronique comme cadeau.</p>
<h2>Une production effrénée de produits électroniques et de déchets</h2>
<p>Le trafic de données numériques est passé de <a href="https://twiki.cern.ch/twiki/pub/HEPIX/TechwatchNetwork/HtwNetworkDocuments/white-paper-c11-741490.pdf">100 Go par jour en 1992 à 46 000 Go par seconde en 2017, et pourrait atteindre 150 000 Go par seconde avant la fin de 2022</a>. La numérisation de notre société s’est également accompagnée d’une utilisation intensive d’appareils électroniques.</p>
<p>En 2019, les quatre milliards d’utilisateurs de services numériques dans le monde possédaient <a href="https://www.greenit.fr/empreinte-environnementale-du-numerique-mondial/">34 milliards d’appareils numériques</a>. Le nombre d’appareils électroniques connectés à l’internet devrait atteindre <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0959652621031577">200 milliards d’unités d’ici 2030</a>.</p>
<p>La production effrénée d’appareils électroniques produite chaque année génère aussi une quantité importante de déchets électroniques à traiter en fin de vie. On estime que le monde a généré <a href="https://ewastemonitor.info/gem-2020/">53 millions de tonnes de déchets électroniques en 2019, dont seulement 17 % ont été recyclés</a>. En moyenne, un Canadien génère <a href="https://globalewaste.org/map/">20 kg de déchets électroniques par an</a>.</p>
<h2>L’empreinte carbone des appareils électroniques</h2>
<p><a href="https://doi.org/10.1016/j.spc.2022.09.025">Dans un article publié récemment</a>, nous avons créé plusieurs profils d’utilisation de services numériques (intensif, modéré et consciencieux) afin de comparer l’empreinte carbone des utilisateurs en fonction d’un certain nombre de paramètres. On parle notamment du nombre d’appareils électroniques achetés, le modèle et le temps que les consommateurs décident de les garder.</p>
<p>Uniquement à cause de la fabrication des appareils électroniques, l’empreinte carbone varie de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S2352550922002652">90 kg à 327 kg d’éq. CO₂ par an</a>.</p>
<p>Pour mettre ces chiffres en perspective, il suffit de les relativiser par rapport au budget carbone disponible pour chaque habitant de la terre (<a href="https://www.unep.org/emissions-gap-report-2020">2,1 t éq. CO₂ par an</a>) afin de respecter les accords climatiques. À titre comparatif, les émissions par personne des Québécoises et Québécois représentent en moyenne <a href="https://unfccc.int/documents/194925">près de 10 t éq. CO₂ par an</a>. On estime ainsi que le poids annuel de la fabrication des appareils électroniques dans le budget carbone des utilisateurs varie entre 4 % (utilisateur consciencieux) à 16 % (utilisateur intensif).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/502181/original/file-20221220-6047-ko0oa2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/502181/original/file-20221220-6047-ko0oa2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/502181/original/file-20221220-6047-ko0oa2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/502181/original/file-20221220-6047-ko0oa2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/502181/original/file-20221220-6047-ko0oa2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/502181/original/file-20221220-6047-ko0oa2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/502181/original/file-20221220-6047-ko0oa2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Empreinte carbone de la fabrication des appareils électroniques en fonction des profils des utilisateurs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Luciano Rodrigues Viana), Fourni par l’auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le budget carbone des utilisateurs peut être encore plus compromis lorsqu’on y ajoute la consommation d’électricité des appareils électroniques. Un utilisateur intensif en Alberta consommerait ainsi 25 % de son budget carbone (électricité très carbonée). <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S2352550922002652">Ces chiffres s’élèvent à 17 % pour le même profil d’utilisation au Québec (électricité bas carbone)</a>.</p>
<p>N’oublions pas qu’il faut également ajouter à ce budget carbone ce que nous mangeons, les transports que nous utilisons, nos vacances, nos voyages d’affaires, nos vêtements, le chauffage de notre maison, et j’en passe. Bref, vous avez compris que chaque choix de consommation est important dans l’équation de notre budget carbone, budget que nous souhaitons respectueux des objectifs climatiques mondiaux.</p>
<p>À la lumière de ces résultats, acheter moins de produits électroniques et surtout prolonger leur durée de vie sont les deux actions les plus efficaces pour réduire l’empreinte carbone des utilisateurs des services numériques.</p>
<p>Bien que cette solution semble triviale, l’obsolescence technologique rapide et les pressions sociales incitent les utilisateurs à acheter régulièrement de nouveaux appareils électroniques au lieu de les conserver plus longtemps.</p>
<p>Aux États-Unis, par exemple, les téléphones intelligents sont remplacés, en moyenne, <a href="https://www.statista.com/statistics/619788/average-smartphone-life/">après 2,75 ans d’utilisation</a>. À l’échelle mondiale, <a href="https://librairie.ademe.fr/cadic/7327/guide-longue-vie-smartphone.pdf">1,43 milliard de téléphones intelligents</a> ont été vendus en 2021. Ces chiffres renforcent la nécessité d’une utilisation plus raisonnée des produits numériques.</p>
<h2>D’où provient cette empreinte carbone aussi élevée ?</h2>
<p>L’impact carbonique élevé des produits électroniques provient notamment de <a href="https://librairie.ademe.fr/consommer-autrement/1190-modelisation-et-evaluation-du-poids-carbone-de-produits-de-consommation-et-biens-d-equipement.html">la production de cartes et de composants électroniques de puissance et de contrôle, ainsi que de la production d’écrans pour les produits concernés</a>.</p>
<p>L’extraction et la transformation de minéraux indispensables à la fabrication des produits électroniques (or, argent, cuivre, cobalt, lithium, terres rares et autres) nécessitent une grande quantité d’énergie.</p>
<p>En outre, la production de composants et l’assemblage de produits finis sont en grande partie réalisés en Chine (<a href="https://arxiv.org/abs/2102.02622">61 % de la production du secteur des technologies de l’information et de la communication (TIC) pour 2015</a>), où la production d’électricité est très carbonée.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/502182/original/file-20221220-20-zxuzeo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/502182/original/file-20221220-20-zxuzeo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=266&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/502182/original/file-20221220-20-zxuzeo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=266&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/502182/original/file-20221220-20-zxuzeo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=266&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/502182/original/file-20221220-20-zxuzeo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=334&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/502182/original/file-20221220-20-zxuzeo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=334&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/502182/original/file-20221220-20-zxuzeo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=334&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Empreinte carbone de la fabrication de certaines marques et modèles de téléphones intelligents. Le transport, l’utilisation et les étapes de fin de vie ne sont pas inclus dans l’évaluation.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Luciano Rodrigues Viana), Fourni par l’auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Au-delà de la culpabilisation des utilisateurs des TIC</h2>
<p>Si l’action individuelle peut réduire notre empreinte écologique liée à la fabrication des appareils électroniques, elle est largement insuffisante pour l’émergence d’une industrie numérique compatible avec les limites planétaires. Les États et les entreprises ont donc un rôle fondamental à jouer.</p>
<p>Les gouvernements doivent, entre autres, créer des lois pour lutter contre le gaspillage de ressources matérielles et énergétiques. Par exemple, <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/indice-reparabilite">exiger que les fabricants des produits électroniques affichent le niveau de réparabilité de leurs produits</a> et même interdire la commercialisation des produits non réparables et non recyclables.</p>
<p>Les entreprises doivent d’adopter des modèles économiques cohérents avec les enjeux environnementaux et sociaux de notre époque.</p>
<p>Aujourd’hui, le modèle économique utilisé par la plupart des fabricants des appareils électroniques est largement basé sur <a href="https://www.qqf.fr/infographie/49/obsolescence-programmee">l’obsolescence programmée (technique, esthétique et logicielle)</a>. En d’autres mots, c’est une stratégie qui vise à créer, chez les consommateurs, un besoin constant l’amenant à racheter de nouveaux biens.</p>
<p>Ces pratiques sont vraisemblablement en contradiction avec les efforts actuels pour développer une industrie numérique cohérente avec une trajectoire de neutralité carbone.</p>
<h2>Offrir des produits numériques</h2>
<p>Si vous tenez absolument à offrir des produits électroniques à vos proches, n’oubliez pas de considérer au moins trois aspects dans votre décision.</p>
<p>En premier lieu, assurez-vous que votre cadeau sera réellement utilisé. Il est dommage de mobiliser autant de matières premières et d’énergie pour fabriquer des appareils qui seront très peu, voire jamais utilisé. <a href="https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/5942-evaluation-de-l-impact-environnemental-de-la-digitalisation-des-services-culturels.html">L’empreinte carbone d’une liseuse</a>, par exemple, est amortie entre 50 et 100 livres lus. Ainsi, pour une personne qui lit, disons cinq livres par an, il faut garder la liseuse de 10 à 20 ans pour que chaque livre électronique supplémentaire ait moins d’impact carbone que le format papier.</p>
<p>Deuxièmement, achetez de préférence des produits reconditionnés. Par exemple, en moyenne, un téléphone intelligent reconditionné est <a href="https://librairie.ademe.fr/cadic/7327/guide-longue-vie-smartphone.pd">jusqu’à 8 fois moins impactant pour l’environnement que le neuf</a> (82 kg de matières économisées et 87 % de gaz à effet de serre en moins). C’est bon pour la planète, mais aussi pour le porte-monnaie !</p>
<p>Enfin, cherchez des informations environnementales et sociales sur les produits que vous souhaitez acheter. Il faut choisir ceux qui sont <a href="https://tcocertified.com/fr/criteria-overview/">plus facilement réparables</a>, <a href="https://www.ecoconso.be/fr/content/label-ange-bleu-blauer-engel-pour-le-materiel-informatique">efficaces d’un point de vue énergétique</a>, émettent moins de carbone et fabriqués dans le <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/nouveau-monde/nouveau-monde-fairphone-2-le-smartphone-anti-geek_2383230.html">respect des droits de l’humain</a>.</p>
<p>La prochaine fois que quelqu’un vous offrira un produit électronique, vous saurez désormais qu’il a un impact très important sur la planète. Assurez-vous au moins de lui donner la plus longue vie possible !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196620/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Luciano Rodrigues Viana a reçu des financements du Conseil de Recherches en Sciences Naturelles et en Génie du Canada (CRSNG). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jean-François Boucher a reçu des financements du Conseil de Recherches en Sciences Naturelles et en Génie du Canada (CRSNG).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Mohamed Cheriet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’empreinte carbone associée à l’utilisation des services numériques est dominée par la fabrication des appareils électroniques. À l’approche de Noël, une prise de conscience s’impose.Luciano Rodrigues Viana, Doctorant en sciences de l'environnement, Département des sciences fondamentales, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Jean-François Boucher, Professeur, Eco-consulting, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Mohamed Cheriet, Full Professor, System Engineering Department & General Director, CIRODD: Interdisciplinary Research Centre on the Opérationnalisation of Sustainability Development, École de technologie supérieure (ÉTS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1969122022-12-21T16:20:09Z2022-12-21T16:20:09ZLe rire du père Noël, amusant ou angoissant ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/502163/original/file-20221220-23-6tgbyn.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C4%2C888%2C612&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le rire du Père Noël a quelque chose d'ambivalent. </span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>C’est reparti pour la joyeuse et festive saison de Noël avec ses clochettes, ses guirlandes et le typique « Ho ho ho ! » du père Noël. Avec les citrouilles d’Halloween et les clowns, le père Noël est l’un de nos symboles culturels les plus populaires qui soient associés au sourire et au rire. Et les représentations du rire du père Noël dans la culture populaire nous en disent long sur les pièges et les promesses de l’humour, ainsi que sur les liens pas si évidents entre l’humour et le rire.</p>
<p>Le rire du père Noël est souvent un rire innocent et empreint de gentillesse. Dans la comédie musicale fantastique de 1970 <a href="https://www.youtube.com/watch?v=haKESbXK28g"><em>Santa Claus Is Coming to Town</em></a>, presque toutes les bonnes actions du joyeux bonhomme sont accompagnées de rires, qu’il s’agisse de distribuer les jouets aux enfants de la peu accueillante Sombertown ou de faire fondre le cœur du sorcier de l’hiver. Le rire souligne ainsi la gentillesse du père Noël et ajoute un élément de gaieté aux sombres paysages urbains et forestiers. Le rire du père Noël peut également être utilisé pour <a href="https://reporter.anu.edu.au/all-stories/from-killer-robot-to-sweatshop-boss-santa-on-screen">améliorer le système éducatif sur Mars</a> comme dans le film de 1964 <a href="https://www.youtube.com/watch?v=L4SZyeUGSM4"><em>Santa Claus Conquers the Martians</em></a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une carte vintage" src="https://images.theconversation.com/files/502149/original/file-20221220-16-5idb4m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/502149/original/file-20221220-16-5idb4m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/502149/original/file-20221220-16-5idb4m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/502149/original/file-20221220-16-5idb4m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/502149/original/file-20221220-16-5idb4m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=481&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/502149/original/file-20221220-16-5idb4m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=481&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/502149/original/file-20221220-16-5idb4m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=481&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une carte de Noël du début des années 1900.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.rawpixel.com/image/556799">NYPL/Creative Commons</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le film fantastique mexicain surréaliste de 1959 <a href="https://www.youtube.com/watch?v=SYStOBykqZk"><em>Santa Claus vs. the Devil</em></a> en est un autre bon exemple. Dans ce film, hilarant et scandaleux pour les spectateurs contemporains, le père Noël est un bonhomme rondouillard qui vit dans l’espace et ne dit presque rien. Qu’il jette un coup d’œil dans les chambres des enfants sur Terre grâce à son télescope cosmique ou qu’il assomme avecd es médicaments afin de pouvoir distribuer ses cadeaux sans être dérangé, son seul commentaire et sa réaction universelle à tout est un gros « Ho ho ho ! »</p>
<p>Ce joyeux papy au ventre rond est peut-être un fainéant 364 jours par an, mais c’est certainement une créature inoffensive. Son rire semble indissociable de l’atmosphère festive de Noël et constitue l’un des stimuli sonores les plus importants du film. Cependant, même un père Noël aussi bon vivant ne peut s’empêcher de jouer des tours au diable et de rire de bon cœur lorsqu’il y parvient. Son rire n’est donc pas seulement un signe de bonheur, mais aussi une façon de montrer que le père Noël n’est pas aussi inoffensif qu’il n’y paraît.</p>
<h2>Un père Noël plus sombre</h2>
<p>Dans les histoires où le père Noël est un robot tueur rigolard (par exemple, dans l’épisode de Futurama intitulé <a href="https://www.youtube.com/watch?v=yJGUhVrS-Gs">« Xmas »</a>) ou s’attaque, en version démultipliée, à un simple père de famille joué par Arnold Schwarzenegger (<a href="https://www.youtube.com/watch?v=jWyeugspkUA"><em>Jingle all the Way</em></a>), la nature pas si innocente du rire du père Noël devient encore plus évidente. Contrairement à ce qui se passe dans de <a href="https://doi.org/10.1177/00187267035612004">nombreux autres cas</a>, l’humour et le rire ne sont pas ici destinés à favoriser la cohésion sociale et l’esprit communautaire. Ils signalent plutôt le pouvoir que l’on a sur ses ennemis, la jouissance malicieuse face à leurs échecs ou même l’intention de les tuer.</p>
<p>Dans ces films, le rire du père Noël fait écho au <a href="https://doi.org/10.1080/21504857.2021.1989005">rire mortel du Joker et à d’autres méchants de la bande dessinée</a> ; c’est une arme psychologique, une autre façon d’attaquer et de vaincre. Le rire est souvent accompagné d’un rictus, et le fait de montrer les dents peut facilement devenir menaçant (les sourires des citrouilles d’Halloween ressemblent souvent à des grimaces angoissantes !). </p>
<p>Ces monstres au rire malicieux peuvent faire surface avant Noël, ajoutant une dimension effrayante à cette fête. Le film <em>L’étrange Noël de Monsieur Jack</em> de Tim Burton illustre la façon dont des créatures maléfiques peuvent essayer de transformer Noël, notamment en détournant le rire du père Noël, qui est clairement reconnaissable mais qui semble d’autant plus effrayant lorsqu’il est émis par un Jack Skellington, le Roi des citrouilles. Un tel rire n’a aucun rapport avec l’humour et se rapproche plutôt du <a href="https://doi.org/10.1016/j.ijid.2013.11.014"><em>risus sardonicus</em></a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Père Noël souriant" src="https://images.theconversation.com/files/502140/original/file-20221220-23-5oehez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/502140/original/file-20221220-23-5oehez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=339&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/502140/original/file-20221220-23-5oehez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=339&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/502140/original/file-20221220-23-5oehez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=339&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/502140/original/file-20221220-23-5oehez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=426&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/502140/original/file-20221220-23-5oehez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=426&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/502140/original/file-20221220-23-5oehez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=426&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une photo du film <em>Santa Claus</em> de 1959.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.imdb.com/title/tt0053241/mediaviewer/rm4031742721/">IMDb</a></span>
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</figure>
<p>De manière (peu) surprenante, les différentes nuances du rire du père Noël reflètent les différents rôles que le <a href="https://www.researchgate.net/publication/232489851_Laughter_A_Scientific_Investigation">rire joue dans les sociétés humaines</a>. Il peut représenter le plaisir et en procurer, mais il peut aussi avoir un côté plus sombre : lorsque nous rions <em>de</em> quelqu’un (par opposition à <em>avec</em> lui), nous l’excluons du groupe, l’humilions et le dénigrons. Le rire peut signaler l’accord, la gêne, la supériorité, l’agressivité – et paradoxalement, ces sentiments peuvent être mélangés dans la seule expression du rire. Il n’y a donc pas de frontière nette entre la joie et l’effroi dans nos rires.</p>
<p>Le père Noël, dans toutes ces versions, montre que nous savons apprécier l’ambiguïté du rire, qui en dit parfois beaucoup plus que mille mots. Le rire est étroitement lié à l’humour, mais il est encore plus étroitement lié à la complexité des relations humaines en général. Le moment et le contexte de notre rire – ou, au contraire, de notre <a href="https://doi.org/10.2307/20487675">« non rire »</a> lorsque nous voulons montrer explicitement que nous ne sommes pas amusés – sont également d’une importance cruciale.</p>
<p>Gardez donc un œil sur votre père Noël ce week-end et vérifiez s’il est plutôt du genre « Ho ho ho ! » plein de bonhomie ou d’un Père Noël Joker. Et lorsque vous rirez de lui ou avec lui, pensez à ce que votre rire peut signifier pour vous et pour les gens qui vous entourent.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196912/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le « Ho ho ho » de ce personnage familier pourrait-il être plus proche du rire d'un clown maléfique que vous ne le pensez ?Anastasiya Fiadotava, Assistant professor, Institute of English studies, Jagiellonian UniversityAnna-Sophie Jürgens, Assistant Professor in Popular Entertainment Studies, Australian National UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1968442022-12-21T13:54:46Z2022-12-21T13:54:46ZLes restes du réveillon peuvent être toxiques pour les chats et les chiens. Voici quoi faire si votre animal en mange<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/502157/original/file-20221220-20-c5dcf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Offrez à Minet une nouvelle boîte ou une gâterie pour animaux, mais pas les restes des repas des fêtes.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Pendant les fêtes, on aime se faire plaisir avec des aliments qu’on ne mange pas d’ordinaire. Étant moi-même propriétaire d’un animal de compagnie, je sais que les gens veulent aussi offrir des gâteries à leur compagnon à quatre pattes.</p>
<p>En tant que <a href="https://experts.okstate.edu/le.fanucchi">vétérinaire et chercheuse en médecine vétérinaire</a>, je sais toutefois que des aliments très communs — dont certains sont très populaires pendant les fêtes — sont <a href="https://vethospital.okstate.edu/services/behavior.html">dangereux pour les animaux de compagnie</a>.</p>
<p>Voici quelques problèmes causés par la nourriture que les vétérinaires rencontrent régulièrement dans les urgences pendant les fêtes, et ce qu’il faut faire s’ils se produisent.</p>
<h2>Le gras</h2>
<p>La dinde en sauce constitue probablement un des mets les plus populaires des fêtes. Et la plupart des chiens et des chats seraient d’accord avec leurs humains pour dire que la dinde rôtie est un repas délicieux.</p>
<p>Cependant, la graisse présente dans la peau de la dinde — et les aliments gras qui peuvent l’accompagner, tels que sauce, beurre ou bacon — ne convient pas aux chats et aux chiens. Les animaux de compagnie qui avalent une trop grande quantité de graisses <a href="https://doi.org/10.2460/javma.233.9.1425">peuvent développer une pancréatite</a> — une inflammation du pancréas, organe qui aide à décomposer les graisses, les protéines et les glucides.</p>
<p>La pancréatite entraîne une fuite des enzymes digestives du pancréas, qui finit par se « digérer » lui-même. Si elle n’est pas traitée, cette inflammation peut affecter d’autres organes, tels que les reins et le foie, et même provoquer la formation de caillots sanguins.</p>
<p>Les symptômes les plus courants de la pancréatite sont les vomissements et la diarrhée. Un animal de compagnie qui semble souffrir de pancréatite doit être emmené rapidement à l’hôpital vétérinaire ou aux urgences vétérinaires les plus proches. On y effectuera des analyses sanguines, notamment un test spécifique pour les enzymes pancréatiques appelé immunoréactivité de la lipase pancréatique ou ILP.</p>
<p>Le traitement de cette inflammation consiste principalement à en soigner les symptômes. L’animal reçoit des liquides par intraveineuse pour aider à rétablir l’équilibre des électrolytes, ainsi que des médicaments contre la nausée et la douleur pour arrêter les vomissements. Des antibiotiques, des agents protecteurs du foie et des probiotiques peuvent être nécessaires, ainsi qu’un régime spécial.</p>
<h2>Des oignons, c’est non, et du pain, c’est moyen</h2>
<p>Si la dinde était le seul problème ! De nombreux autres aliments que les gens aiment manger pendant les fêtes peuvent être nocifs pour les animaux de compagnie.</p>
<p>Plusieurs espèces d’allium utilisées pour la cuisine des fêtes, comme le poireau, l’ail, l’oignon, la ciboulette et l’échalote, sont bonnes pour la santé humaine. Pour les chiens et les chats, en revanche, <a href="https://www.scielo.br/j/jvatitd/a/HB5wqsgNcbhcg8cGm3hy95j/?lang=en">elles sont toxiques</a>. Si les animaux en consomment, ils peuvent développer une anémie hémolytique — une baisse du nombre de globules rouges. Les symptômes de la maladie, qui apparaissent généralement quelques jours après l’ingestion d’un aliment, sont les suivants : vomissements, diarrhée, léthargie et jaunisse.</p>
<p>Pour soigner l’anémie hémolytique, les vétérinaires effectuent des analyses sanguines afin de déterminer si une transfusion est nécessaire. Ils traitent les <a href="https://conseilsveterinaire.com/lintoxication-a-loignon-chez-les-carnivores-domestiques-conseils/">symptômes de l’intoxication à l’allium</a> avec une solution par intraveineuse, des antioxydants et des médicaments anti-nauséeux.</p>
<p>Les aliments à la levure, comme certains pains, font aussi partie des repas des fêtes. Il est important de les garder <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1046/j.1435-6935.2003.00068.x">hors de portée de votre animal domestique</a>. La levure peut fermenter dans son estomac et produire des niveaux toxiques d’éthanol. La toxicité de l’éthanol peut entraîner une acidose métabolique chez les animaux et provoquer une chute soudaine de la glycémie, une dépression respiratoire, des convulsions et un arrêt cardiaque.</p>
<p>En général, les propriétaires d’animaux soupçonnent une acidose métabolique lorsqu’il est pratiquement trop tard, car elle présente peu de symptômes apparents. Par conséquent, s’il y a une possibilité qu’un animal ait avalé un type quelconque de pâte de levure cuite ou crue, il faut l’emmener immédiatement aux urgences vétérinaires.</p>
<p>Les animaux peuvent également s’intoxiquer à l’éthanol en lapant des <a href="https://www.centre-antipoison-animal.com/l-alcool.html">cocktails ou de la bière</a>, alors gardez toutes les boissons alcoolisées hors de leur portée.</p>
<h2>Pas de chocolat !</h2>
<p>Mais qu’en est-il de la gâterie que tout le monde aime offrir dans le temps des fêtes, le chocolat ?</p>
<p>Les substances qui font que les humains raffolent du chocolat — les méthylxanthines comme la théobromine et la caféine — <a href="https://www.santevet.com/articles/le-chocolat-est-il-toxique-pour-mon-chien-ou-mon-chat">sont toxiques pour les chiens et les chats</a>. Quand les vétérinaires prodiguent des soins d’urgence pour l’ingestion de chocolat, c’est souvent parce que des enfants ont partagé leur gâterie avec leur animal adoré.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un garçon tenant un chiot est assis avec sa famille pendant l’allumage des bougies lors de la fête d’Hanoucca" src="https://images.theconversation.com/files/501388/original/file-20221215-12-q1vgty.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/501388/original/file-20221215-12-q1vgty.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/501388/original/file-20221215-12-q1vgty.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/501388/original/file-20221215-12-q1vgty.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/501388/original/file-20221215-12-q1vgty.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/501388/original/file-20221215-12-q1vgty.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/501388/original/file-20221215-12-q1vgty.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le chocolat contient des substances toxiques pour les animaux domestiques, mais sans danger pour les humains.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/photo/hanukkah-in-privite-home-royalty-free-image/1358516136?adppopup=true">Nathan Bilow/Photodisc via Getty Images</a></span>
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</figure>
<p>Les animaux domestiques qui avalent du chocolat peuvent faire une <a href="https://doi.org/10.1111/jsap.13329">« intoxication au chocolat »</a> parce que les méthylxanthines s’accumulent dans leur corps et les rendent malades. Voici des symptômes d’une intoxication au chocolat : tremblements, accélération du rythme cardiaque, vomissements, diarrhée, agitation et même convulsions.</p>
<p>Cette intoxication constitue une urgence médicale. Il faut vider l’estomac de l’animal et lui administrer un traitement à l’aide d’une perfusion et de charbon actif. Le vétérinaire voudra connaître le type de chocolat et la quantité que l’animal a ingérés, car certains chocolats, comme le chocolat pâtissier, peuvent avoir des <a href="https://veterinarypartner.vin.com/default.aspx?pid=19239&id=4952115">effets toxiques plus graves</a>.</p>
<p>Le chocolat contient également beaucoup de matières grasses, ce qui ne plaira pas au pancréas du chat ou du chien.</p>
<h2>Raisins et chiens ne font pas bon ménage</h2>
<p>Et les fruits ? Il existe un <a href="https://doi.org/10.1111/vec.13234">fruit très toxique pour les chiens</a> qui figure souvent aux menus des fêtes : le raisin, qu’il soit frais ou déshydraté sous forme de raisin sec.</p>
<p>L’acide tartrique présent dans les raisins peut provoquer une <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/jvim.15884">maladie rénale aiguë</a>. Les signes d’une insuffisance rénale chez un chien sont des vomissements, une diarrhée intermittente et une augmentation de la consommation d’eau.</p>
<p>L’insuffisance rénale aiguë chez le chien constitue une urgence médicale. Si elle est suspectée, l’animal doit être emmené rapidement dans un hôpital vétérinaire. Le traitement se limite généralement à le stabiliser à l’aide d’une solution intraveineuse.</p>
<h2>Un doux poison</h2>
<p>Bien que <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/20473849/">l’intoxication au xylitol</a> soit l’une des urgences les plus courantes que rencontrent les vétérinaires, elle est peu connue des propriétaires d’animaux.</p>
<p>Le xylitol est un édulcorant artificiel souvent utilisé dans les produits sans sucre. S’il est sans danger pour les humains, c’est un poison à action rapide et potentiellement mortel pour les chats et les chiens.</p>
<p>L’ingestion d’une quantité, même minime, de xylitol peut entraîner une <a href="https://www.merckvetmanual.com/toxicology/food-hazards/xylitol-toxicosis-in-dogs?gclid=Cj0KCQiAqOucBhDrARIsAPCQL1Z7BjSSHysndnM5GgbCwm20-2C83Xf-qTr-dkboS_7P_sgPzpQVp9AaAsADEALw_wcB&gclsrc=aw.ds">libération rapide d’insuline par le foie</a> de l’animal, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/15080212/">provoquant une hypoglycémie</a>, c’est-à-dire un taux de glucose sanguin anormalement bas. Dans les 30 minutes qui suivent, des symptômes apparaissent, tels que vomissements, léthargie et convulsions, et perte de la coordination des membres (ataxie).</p>
<p>Le traitement d’urgence d’un animal intoxiqué au xylitol consiste à lui administrer une solution de dextrose par intraveineuse pour augmenter sa glycémie et à surveiller attentivement l’évolution de son état.</p>
<p>Conclusion ? Plusieurs aliments délicieux sans risques pour les humains peuvent être très dangereux pour tous les animaux de compagnie — pas seulement les chats et les chiens, mais aussi les oiseaux, les reptiles et les petites bêtes comme les souris, les hamsters et les gerbilles. Pour que les fêtes soient merveilleuses pour vos amis à poils ou à plumes, offrez-leur des gâteries achetées en animalerie ou chez le vétérinaire, et gardez-les loin du comptoir de la cuisine et de la poubelle.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196844/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Leticia Fanucchi ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Garder les restes de nourriture humaine - et l'alcool- hors de portée des animaux domestiques est un moyen d’éviter les visites d’urgence à l’hôpital vétérinaire lors des fêtes de fin d’année.Leticia Fanucchi, Clinical Assistant Professor of Veterinary Clinical Sciences, Oklahoma State UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1964072022-12-15T18:19:28Z2022-12-15T18:19:28ZCe que les enfants pensent vraiment du père Noël<p>Pour beaucoup d’enfants, l’arrivée du père Noël est le point culminant des festivités de décembre. Mais croient-ils vraiment qu’un homme aux pouvoirs magiques parcourt le globe pour leur apporter leurs cadeaux ?</p>
<p>S’ils y croient, n’est-ce pas une preuve de leur crédulité ou de leur incapacité à faire la distinction entre la fiction et la réalité ? Pour bien faire la part des choses, imaginez cependant un instant votre réaction face au scénario qui suit.</p>
<p>Depuis plusieurs jours, les journaux télévisés diffusent en boucle des reportages sur un individu non identifié qui s’introduit dans les habitations où il dérobe les clés de la voiture avant de partir au volant du véhicule. Le coupable ne laisserait aucune trace, hormis celles que de bottes pleines de boue sur le sol.</p>
<p>Un matin au réveil, vous trouvez des traces de boue chez vous, vous remarquez que vos clés de voiture ont disparu. Vous vous précipitez à la fenêtre et constatez que la voiture n’est plus là. Immédiatement, vous vous dites que l’inconnu dont vous avez entendu parler aux infos vous a rendu une petite visite. Quelques minutes plus tard, vous recevez un appel de votre colocataire, un type sans-gêne, qui vous explique qu’il a voulu se rendre au travail à pied, comme d’habitude, mais qu’il pleuvait tellement qu’il est rentré dans l’appartement avec ses chaussures sales et vous a emprunté votre voiture pour la journée.</p>
<p>Des publicités aux adultes, tout le monde s’évertue à perpétuer le <a href="https://doi.org/10.1016/j.cogdev.2016.04.002">mythe du père Noël</a>. Les parents eux-mêmes emmènent leur progéniture dans les centres commerciaux pour rencontrer un type déguisé qui prend l’enfant sur ses genoux pour qu’il lui récite sa liste de cadeaux. La veille de Noël, ils disséminent dans la maison des preuves irréfutables de l’existence de ce personnage : des bouts de biscuits et un verre de lait à moitié vide que les enfants trouveront le lendemain matin et, le plus important, les cadeaux sous le sapin.</p>
<p>Alors, si les enfants croient à l’existence du père Noël, ce n’est pas parce qu’ils sont plus crédules que vous, mais qu’on les a encouragés dans cette voie. Vous-même, face à des preuves du même ordre, auriez été capable de déduire qu’un criminel s’était introduit chez vous pour voler vos clés de voiture. D’ailleurs, les enfants font parfois preuve de davantage de <a href="https://doi.org/10.1111/cdep.12294">scepticisme</a> que les adultes à l’égard d’allégations et d’affirmations.</p>
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<p>L’adhésion à l’histoire du père Noël pique particulièrement la curiosité du <a href="https://scholar.google.com/citations?user=InLiWyMAAAAJ&hl=en">chercheur spécialisé dans les croyances des enfants</a> que je suis. Je m’intéresse à la représentation qu’ils se font des autres, à leur esprit, et à leur conception de l’extraordinaire. La recherche sur le développement cognitif des enfants nous permet d’entrer dans l’histoire fascinante – et plus nuancée qu’on l’imagine souvent – de cette croyance annuelle.</p>
<h2>Se représenter le monde</h2>
<p>Admettre l’existence du père Noël est une chose. Mais les enfants croient-ils vraiment que le père Noël est capable de faire tout ce que racontent leurs parents et les autres adultes ? Qu’il peut faire le tour de la Terre en une nuit, sur un traîneau tiré par des rennes, et leur apporter des cadeaux à tous ? Ou qu’il sait s’ils ont été gentils ou méchants au cours de l’année écoulée ?</p>
<p>C’est là que l’histoire devient plus intéressante et plus nuancée. Ces croyances dépendent en fait de la conception que les enfants ont du monde, et ces représentations évoluent de façon spectaculaire au cours de l’enfance.</p>
<p>Il existe par exemple des différences individuelles considérables entre les enfants et des évolutions dans leur manière d’envisager les notions de <a href="https://doi.org/10.1016/0010-0285(92)90018-W">planète Terre</a>, de <a href="https://doi.org/10.1016/S0885-2014(00)00031-9">temps et de vitesse</a> chez l’enfant.</p>
<p>Si un jeune enfant croit que la Terre est petite ou qu’elle abrite peu d’habitants, une distribution massive de cadeaux par le père Noël en 24 heures ne lui semble pas si farfelue. Il existe également de grandes différences dans l’idée que les enfants se font de <a href="https://doi.org/10.1080/17405629.2018.1435413">l’esprit</a>. Les jeunes enfants, en particulier, trouvent <a href="https://doi.org/10.1111/cogs.12232">difficile de se représenter quelqu’un d’omniscient</a>, qui <a href="https://doi.org/10.1037/a0037715">connaîtrait chacune de leurs pensées et chacun de leurs mouvements</a>. En maternelle par exemple, ils sont enclins à croire que le père Noël a un esprit exceptionnel, qu’il peut savoir des choses que la plupart des autres adultes ignorent, mais pas tout.</p>
<p>Ainsi, les plus petits croient généralement que le père Noël existe, mais sous une forme plus banale que ce que les adultes laissent entendre.</p>
<h2>Jouer avec les faux-semblants</h2>
<p>Pourtant, même dans les cultures où les récits sur le père Noël et les preuves physiques de son existence sont omniprésents, la plupart des enfants finissent par se rendre compte qu’il n’existe pas. Ce qu’en disent leurs copains peut lentement éroder leur croyance. Ils peuvent aussi surprendre leurs parents qui se régalent des biscuits du père Noël ou déposent les cadeaux sous le sapin.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/ces-livres-de-jeunesse-qui-font-noel-173855">Ces livres de jeunesse qui font Noël</a>
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<p>De plus, à mesure que les enfants se rendent compte de l’ampleur des pouvoirs attribués au père Noël – lorsqu’ils prennent par exemple conscience de la distance qu’il doit parcourir et du nombre de maisons qu’il doit visiter en une seule nuit – <a href="http://dx.doi.org/10.1016/j.cogdev.2014.12.006">ils se mettent à remettre en question ses qualités supposées</a> et finissent par douter de son existence tout court. Vers l’<a href="https://doi.org/10.2466/pr0.1980.46.3.691">âge de huit ans</a>, la plupart <a href="https://doi.org/10.1111/j.1939-0025.1978.tb02566.x">n’y croient plus vraiment</a>.</p>
<p>Alors, pourquoi continuent-ils de participer à ce rituel annuel ? Pourquoi font-ils comme si le père Noël existe vraiment et leur offre des cadeaux parce qu’ils ont été gentils (ce qui va sans dire) ?</p>
<p>La réponse est simple : parce que c’est amusant. C’est un peu comme les amis imaginaires. <a href="https://psycnet.apa.org/record/2001-06861-000">Les enfants qui en ont</a> savent qu’ils ne sont pas réels, mais ils font semblant de jouer avec eux et de parler d’eux à leur entourage parce que c’est une fiction agréable et gratifiante. Considérer que le père Noël est réel présente un avantage supplémentaire puisqu’il leur apporte des jouets chaque année ! Lorsque les enfants plus âgés s’adonnent à cette mythologie, ils jouent le jeu avec les adultes, qui eux-mêmes s’amusent de ce faux-semblant.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/mon-enfant-a-un-ami-imaginaire-et-si-ca-laidait-a-grandir-109274">Mon enfant a un ami imaginaire : et si ça l’aidait à grandir ?</a>
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<p>Ce mensonge a-t-il des conséquences sur les enfants ? Perdent-ils la confiance qu’ils avaient en leurs parents lorsqu’ils découvrent que ceux-ci ont mis en place un stratagème aussi sophistiqué ?</p>
<p>Peu d’études répondent directement à ces questions. <a href="https://doi.org/10.1007/BF02253287">L’une des rares</a> à avoir interrogé les enfants sur leurs réactions a révélé qu’ils éprouvaient plus d’émotions positives que négatives lorsqu’ils apprenaient l’existence du mythe, qu’ils aient découvert le mensonge eux-mêmes ou de la bouche de leurs parents.</p>
<p>Si l’on considère que les enfants sont à même de comprendre qu’il s’agit d’un jeu et qu’ils font semblant sans que leurs parents ne s’en rendent compte, et si l’on considère que toute cette fiction se déroule dans un contexte de plaisir et de convivialité, il y a alors probablement plus à y gagner qu’à y perdre.</p>
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<p><em>Traduit de l’anglais par Karine Degliame-O’Keeffe pour <a href="http://www.fastforword.fr">Fast ForWord</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196407/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les recherches de Jonathan Lane ont été financées par le National Institutes of Health et la John Templeton Foundation.</span></em></p>Si les plus petits croient généralement au père Noël, ils se représentent ce personnage sous une forme bien plus banale que ce qu’en disent les adultes.Jonathan Lane, Assistant Professor of Psychology and Human Development, Vanderbilt UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1761722022-02-02T18:38:00Z2022-02-02T18:38:00ZNutrition : comment faire passer les excès de fin d’année<p><em>Cet article a été écrit en partenariat avec la chaîne santé de l’université de Paris, <a href="https://www.youtube.com/pumsuniv">Pour une meilleure santé</a> (PuMS).</em></p>
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<p>Avec les fêtes de fin d’années, et les fameux repas copieux de saison, ballonnements, digestion compliquée et parfois même kilos en plus peuvent se faire sentir… Face à cette profusion de calories, source d’angoisses pour certains, nous allons ici vous donner quelques clés pour éviter de culpabiliser et profiter de la période. Il est important de redonner un peu de vitalité à notre organisme et de se réajuster doucement après les excès traversés !</p>
<p>Faire grise mine devant une triste assiette à demi vide quand tout le monde festoie autour de soi n’est pas une bonne approche. Il est, concrètement, difficile de trouver le compromis entre plaisir et rigueur lors de ces moments conviviaux. Alors assez d’anticiper les relâchements à venir, on se fait plaisir, sans compter, en écoutant ses sensations ! Car vous allez voir qu’il est facile de retrouver un équilibre quelques jours après.</p>
<p>Mais comment faire pour y remédier et réattribuer à notre organisme son équilibre ? Commençons par l’analyse nutritionnelle d’un repas de Noël traditionnel, qui nous permettra de faire un état des lieux des calories et de la meilleure façon de le faire passer. Des préconisations qui resteront bien sûr de mise tout au long de l’année, pour chaque occasion festive.</p>
<h2>Analyse d’un repas de fêtes type</h2>
<p>Un menu gourmand et digne d’un repas de fête est riche en protéines et matières grasses animales – et en calories, comme attendu (voir tableau). Considérons un menu classique, composé par exemple de cinq huîtres, du foie gras accompagné de sa tranche de pain d’épices et de confit de figue, suivi d’un chapon aux marrons et purée de patate douce avec fagot haricots verts, puis de fromages (avec pain aux fruits) et, pour finir dignement, d’une bûche glacée au chocolat.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/443747/original/file-20220201-20-pw77pl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Quelques exemples : 30g de foie gras valent 146 kcal, 150g de chapon 331kcal, une part de bûche glacée 226kcal" src="https://images.theconversation.com/files/443747/original/file-20220201-20-pw77pl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/443747/original/file-20220201-20-pw77pl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=511&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/443747/original/file-20220201-20-pw77pl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=511&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/443747/original/file-20220201-20-pw77pl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=511&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/443747/original/file-20220201-20-pw77pl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=642&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/443747/original/file-20220201-20-pw77pl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=642&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/443747/original/file-20220201-20-pw77pl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=642&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Tableau récapitulatif des calories ingérées lors d’un repas de fête type.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Manon Clavier</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Avec un total de <a href="https://ciqual.anses.fr/">1 443 kiloscal</a>, presque similaire à la quantité de calories recommandées pour une journée (soit 2 100 pour une femme en moyenne, et 2 600 pour un homme), il faudra les jours suivants porter une attention particulière à votre faim.</p>
<p>Le petit déjeuner du lendemain sera peut-être facultatif : ayant eu un apport exceptionnellement riche la veille, vous n’aurez sûrement pas faim. Écoutez vos sensations, écoutez votre faim et mangez en pleine conscience ! Optez pour une boisson chaude non sucrée et un fruit si vous ressentez un besoin d’énergie.</p>
<p>Reste ensuite à gérer les jours qui suivent…</p>
<h2>Rééquilibrer alimentation et activité physique</h2>
<p>Manger plus léger va de soi. Le meilleur conseil est donc de limiter la consommation de produits gras et sucrés, riches en calories : choisissez une cuisine plus brute, vapeur de préférence, qui conserve mieux les nutriments, et riche en légumes.</p>
<p>Hydratez-vous, et ce, tout au long de la journée. Quelques gorgées à chaque heure. Ajoutez pour stimuler les prises hydriques, quelques rondelles de citron, feuilles de menthe ou encore infusion pour ravir les papilles et ajouter un peu de gaieté. Le plus important est bien d’apporter à votre corps suffisamment d’eau pour favoriser l’élimination des déchets engendrés par les récents excès.</p>
<p>Bien sûr, il importe également de limiter l’alcool et les sodas au maximum. L’objectif étant d’alléger le travail du foie, responsable de la détoxification de notre précieux organisme ! Cet organe sera un des acteurs majeurs pour le réguler.</p>
<p>Attention à quantifier vos matières grasses ajoutées, on s’inspirera d’une cuisine méditerranéenne à base de poissons maigres, comme le cabillaud ou encore la sole, cuisinés en papillote ou vapeur. On privilégiera la viande maigre et cuite au four.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/i0pGFcF0Un4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Veillez à respecter les portions recommandées par le <a href="https://www.mangerbouger.fr/l-essentiel/les-recommandations-sur-l-alimentation-l-activite-physique-et-la-sedentarite">programme nutrition santé</a> et portez une attention particulière aux féculents, toujours plus lourds à digérer que les légumes… Mais attention, « limiter » ne signifie pas supprimer : il conviendra d’en conserver un minimum, tout en gardant l’idée que votre assiette doit contenir deux fois plus de légumes que de féculents.</p>
<p>Autre point : mangez lentement, prenez le temps d’apprécier ce que vous absorbez ! Cela parait trivial, mais la digestion commence dans la bouche par l’intermédiaire de la mastication. Ne pas « bâcler » cette première étape évitera l’apparition de ballonnements, allégeant ainsi le travail digestif et réduira les quantités avalées. Prendre le temps de déguster favorisera également l’apparition du signal de la satiété, avant même la fin de votre repas. Le volume de vos assiettes doit être contrôlé, et voilà une bonne façon de procéder.</p>
<p>Dernier point : bougez ! Les fêtes se traduisent souvent par des repas à rallonge, où règne la sédentarité… Il conviendra, les jours suivants, de <a href="https://www.anses.fr/fr/content/bougez-chez-vous-pratiquer-une-activit%C3%A9-physique-r%C3%A9guli%C3%A8re-contribue-%C3%A0-am%C3%A9liorer-sa-sant%C3%A9">prévoir une activité physique plus soutenue</a> : marche pour aller au travail, vélo pour se déplacer lorsque les distances sont plus importantes, descendre une station de bus ou métro plus tôt, choisir l’escalier plutôt que l’ascenseur, etc.</p>
<p>Autant de petites modifications très simples, mais qui augmenteront votre nombre de pas quotidien et vous feront <a href="https://lemedecinduquebec.org/Media/90310/067-074Croteau0306.pdf">dépenser davantage d’énergie – et brûler les excès de calories</a>.</p>
<h2>Épiphanie, crêpes et galettes…</h2>
<p>Le premier trimestre est ainsi fait que les sollicitations culinaires ne faiblissent pas ! Après l’épiphanie, qui donne lieu à une dégustation de galette (que je vous conseille de réaliser maison d’un point de vue nutritionnel et économique), c’est au tour de la Chandeleur de faire apparition avec une multitude de crêpes…</p>
<p>Une crêpe nature vous apporte en moyenne 40 à 60 kcal. Mais en réalité, il est difficile de définir exactement le nombre de calories tant les variations dans les recettes et dans le choix de la garniture sont grandes : épaisseur de la crêpe, nombre d’œufs utilisés, ajout de sucre ou non dans la recette sont autant de facteurs qui en font varier la valeur nutritionnelle.</p>
<p>Reste la question cruciale de la garniture… Ajoutez en moyenne 110 kcal pour 20g de pâte à tartiner au chocolat et 45 kcal pour une garniture à base de banane écrasée.</p>
<p>En plus de son goût sucré, cette banane vous apportera des fibres, des vitamines et minéraux. Vous pouvez choisir également des garnitures légères comme de la compote maison, un fruit écrasé, de la purée d’oléagineux (noisettes, amandes…) ou encore du chocolat noir fondu.</p>
<p>Pour passer sans encombre l’épreuve crêpe-galette, n’hésitez pas à anticiper cette dégustation avec un repas léger et gourmand, sans excès. Vous pourrez y associer une quarantaine de minutes de marche, le matin ou le soir, pour compenser votre ou vos crêpes du goûter.</p>
<p>On admet de manière générale qu’une personne de 70kg environ va brûler en moyenne 300 calories après 1h de marche sportive à 6km/h. Ainsi, pas de panique si votre gourmandise est associée à une activité physique. Non à la frustration et oui à une alimentation, y compris festive – l’important est d’avoir conscience de ce que l’on mange.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/176172/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Boris Hansel est associé de la société d'informatique médicale IRIADE. Il participe à des projets de recherches financés par la fondation AP-HP.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Manon Clavier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Noël aujourd'hui, Nouvel An et les galettes demain… Les semaines qui arrivent s'annoncent chargées en calorie pour notre organisme. Voici les conseils pour bien s’en remettre !Manon Clavier, Diététicienne nutritionniste - Conférencière et enseignante en « besoins nutritionnels et sciences des aliments » à l’IUT Sénart Fontainebleau, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Boris Hansel, Médecin, Professeur des universités- Praticien hospitalier, Inserm U1148, Faculté de Santé, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1735502021-12-20T18:56:34Z2021-12-20T18:56:34ZNoël, Bacchus et apocalypse : un cocktail très ancien<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/437820/original/file-20211215-13-w30tsq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=44%2C11%2C7304%2C4891&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le lien étroit qui existe entre Noël et l’alcool remonte aux origines de cette fête.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Pour les consommateurs de boissons festives, les nouvelles ne sont pas bonnes à l’approche des fêtes : la <a href="https://globalnews.ca/news/8375338/guinness-supply-chain-crisis-liquor-shortages-holidays/">Guinness ne sera peut-être pas</a> à la carte, ni le <a href="https://dfw.cbslocal.com/2021/10/22/supply-chain-alcohol-shortage-holidays/">vin, puisque le verre nécessaire à sa mise en bouteille</a> se fait de plus en plus rare. Les catastrophes climatiques, comme les inondations en Colombie-Britannique, ont <a href="https://www.cbc.ca/news/business/bc-floods-rail-impact-1.6250554">affaibli des chaînes d’approvisionnement déjà en difficulté</a>.</p>
<p>Au Québec, les tablettes de la SAQ ont été vides durant des semaines <a href="https://www.lapresse.ca/affaires/2021-12-18/employes-des-entrepots/entente-de-principe-acceptee-a-86-3-a-la-saq.php">jusqu'à ce qu'une entente de principe conclue la semaine dernière pour mettre fin au conflit de travail</a> avec les quelque 800 employés d’entrepôts ne permette de poursuivre le réapprovisionnement des succursales.</p>
<p>Au Royaume-Uni, des <a href="https://www.walesonline.co.uk/news/uk-news/trains-full-wine-set-save-22120166">« trains de vin » pour la période des fêtes</a> sont mis à contribution pour éviter que les rayons des supermarchés se vident. Face à la pénurie de tout, des <a href="https://www.cbsnews.com/essentials/supply-chain-issues-holiday-shopping-shortages-2021/">dindes aux jouets</a>, la priorité donnée à la bière et au vin montre le lien étroit qui existe entre Noël et l’alcool.</p>
<p>C’est un lien qui remonte aux origines de cette fête. Bien que les premiers écrits chrétiens n’indiquent pas la date de naissance de Jésus, <a href="https://www.thetablet.co.uk/blogs/1/1673/merry-saturnalia-and-other-myths-about-christmas-that-don-t-seem-to-go-away">sa conception a été associée à l’équinoxe du printemps</a>. Prenant pour hypothèse une grossesse de neuf mois, les chrétiens ont commencé à célébrer sa naissance le 25 décembre.</p>
<p>Il se trouve qu’une fête bien arrosée et quelque peu scandaleuse était déjà présente à cette époque de l’année, du 17 au 23 décembre. <a href="https://herodotushistoryblog.wordpress.com/2016/12/25/io-saturnalia-a-very-roman-christmas/">Les Saturnales</a> sont, dans l’antiquité romaine, une fête en l’honneur du dieu Saturne. Elles semblent étonnamment familières : distribution de cadeaux, rencontres sociales et consommation excessive d’alcool. Sénèque le Jeune (mort en 65 apr. J.-C.) a écrit : « Nous sommes maintenant au mois de décembre, lorsque la plus grande partie de la ville est en effervescence. » Cette fête mettait aussi l’accent sur les renversements sociaux. Par exemple, les <a href="https://www.historyextra.com/period/roman/how-did-the-romans-celebrate-christmas/">esclaves se voyaient servir un repas comme s’ils étaient temporairement les maîtres</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-blues-du-lendemain-de-veille-voici-ce-qui-se-produit-dans-votre-cerveau-129284">Le blues du lendemain de veille : voici ce qui se produit dans votre cerveau</a>
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<h2>L’histoire de Noël</h2>
<p>L’histoire selon laquelle Noël a délibérément été inventé pour « christianiser » les Saturnales circule parfois, mais elle est inexacte d’un point de vue historique. Au contraire, au fur et à mesure que le christianisme est devenu la religion de l’Empire et que les Saturnales ont disparu, les réjouissances du cœur de l’hiver sont passées d’une fête à l’autre de façon très naturelle.</p>
<p>Au Moyen Âge, la danse et la consommation d’alcool étaient tellement synonymes de Noël que les <a href="https://www.historytoday.com/archive/feature/christmas-under-puritans">puritains anglais l’ont interdit de 1644 à 1659</a>. Un prédicateur de l’époque a comparé Noël aux « sacrifices de Bacchus », le dieu romain du vin.</p>
<p>Pourtant, au cœur de ces festivités hivernales, les histoires de justice et d’un monde meilleur perdurèrent. Les <a href="https://www.nationaltrust.org.uk/features/ritual-and-revelry-the-story-of-wassailing">« wassailers » appauvris</a> réclamèrent l’accès à de la nourriture et à un abri, au moins le temps d’une soirée.</p>
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<img alt="Une illustration de Scrooge et du Fantôme des Noëls passés survolant la ville" src="https://images.theconversation.com/files/432912/original/file-20211119-19-1kkbiqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/432912/original/file-20211119-19-1kkbiqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/432912/original/file-20211119-19-1kkbiqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/432912/original/file-20211119-19-1kkbiqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/432912/original/file-20211119-19-1kkbiqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=575&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/432912/original/file-20211119-19-1kkbiqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=575&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/432912/original/file-20211119-19-1kkbiqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=575&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Scrooge et le Fantôme des Noëls passés survolant la ville.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Dans son <a href="https://www.historytoday.com/archive/dickens-and-construction-christmas">Cantique de Noël</a> de 1843, Charles Dickens et son célèbre personnage Scrooge ont participé à une autre réinvention de cette fête. Dans <a href="https://www.publishersweekly.com/978-0-679-41223-6">The Battle for Christmas</a>, l’auteur et historien Stephen Nissenbaum décrit comment des entrepreneurs de l’époque victorienne comme Charles Dickens et ses successeurs du XX<sup>e</sup> siècle ont su apprivoiser cette période de l’année, qui met aujourd’hui l’accent sur les enfants et la consommation de masse.</p>
<p>Stephen Nissenbaum soutient que les réjouissances entre adultes, comme la <a href="https://www.washingtonpost.com/lifestyle/style/the-evolution-of-the-holiday-celebration/2012/12/23/af80e6b6-4874-11e2-820e-17eefac2f939_story.html">surconsommation d’alcool et les relents de scandale</a> lors des fêtes de Noël et des célébrations du Nouvel An font écho au passé bacchanalien de la tradition de Noël.</p>
<p>Grâce à la culture pop, la fête reste intimement associée à l’alcool. En 2016, un billet sur les médias sociaux est devenu viral avec un <a href="https://www.countryliving.com/entertaining/news/a40893/hallmark-drinking-game/">jeu à boire devant les films de Noël de Hallmark</a>. Les cartes de pointage gardent la trace des moments clichés de films pour descendre un verre : quand deux amoureux s’embrassent, quand il commence à neiger et, notamment, quand certains Scrooge font leur « conversion de Noël. »</p>
<h2>Tous des Scrooge</h2>
<p>Malgré la commercialisation de Noël, l’accent mis sur l’inversion entre riches et pauvres n’a pas disparu. Charles Dickens disait que son conte « Cantique de Noël » était <a href="https://charles-dickens.org/a-christmas-carol/">« l’éveil du fantôme d’une idée » en matière de réforme sociale</a>. Le misérable Scrooge est effrayé par le fait que l’attention portée aux autres est l’essence même de la fête.</p>
<p>Comme tous les personnages du même type qui ont suivi, <a href="https://www.patheos.com/blogs/lookingcloser/2011/12/dr-seusss-how-the-grinch-stole-christmas-2000/">du <em>Grincheux</em> de Dr Seuss</a> à Candace Cameron Bure dans <a href="https://www.hallmarkchannel.com/let-it-snow/about"><em>Un millier de flocons</em></a> de Hallmark, en passant par Walter Hobbs du film <a href="https://elf.fandom.com/wiki/Walter_Hobbs"><em>Le lutin</em></a>, le personnage original, à l’instar de Scrooge, se repent de sa posture anti-humaniste.</p>
<p>Pour montrer qu’il fait passer les gens avant les profits, Scrooge organise même un festin de Noël pour son employé maltraité, Bob Cratchit, et sa famille. Scrooge verse à Bob une tasse chaude d’une boisson enivrante appelée <a href="https://www.npr.org/sections/thesalt/2015/12/25/460576292/smoking-bishop-a-boozy-christmas-drink-brimming-with-english-history">« l’évêque fumeur »</a>. Envisageant sa propre mort, Scrooge cherche à améliorer sa vie, et un toast de célébration s’ensuit.</p>
<h2>L’apocalyptisme</h2>
<p>En tant qu’historien et spécialiste du Nouveau Testament, je ne peux m’empêcher de penser à un autre récit antique qui utilisait des visions de catastrophes imminentes pour améliorer les systèmes en place.</p>
<p>L’apocalyptisme était un ancien mouvement juif <a href="https://www.bibleodyssey.org/en/tools/video-gallery/j/jesus-and-apocalyptic-pagels">auquel Jésus a adhéré</a>. Il s’inspirait de traditions hébraïques telles que la <a href="https://www.biblegateway.com/passage/?search=Isaiah%2055&version=NRSV">vision de la fin des temps du Livre d’Isaïe, chapitre 55</a>. Dans ce monde post-apocalyptique attendu, les pauvres achètent du bon vin « sans argent » et vivent éternellement dans un royaume de justice et de paix où l’ordre social est aussi inversé qu’une Saturnale permanente.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/charles-dickens-the-man-who-invented-christmas-plagiarized-jesus-87936">Je me suis déjà demandé si Charles Dickens ne s’était pas inspiré de l’une des paraboles de Jésus</a>. J’ai également écrit sur <a href="https://somethinggrand.ca/pairings-the-bible-and-booze/">l’association des qualités d’un mimosa et de la ferveur anticipatrice</a> dans les premiers textes apocalyptiques juifs et chrétiens.</p>
<p>Ces passages anciens illustrent l’espoir longtemps nourri que les futurs cataclysmes pourraient apporter des cadeaux plus équitables, ce qui, selon les premiers chrétiens, a commencé lors du premier Noël.</p>
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<img alt="Une illustration de la Nativité tirée d’une vieille bible allemande" src="https://images.theconversation.com/files/432914/original/file-20211119-21-aqhvkb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/432914/original/file-20211119-21-aqhvkb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=483&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/432914/original/file-20211119-21-aqhvkb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=483&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/432914/original/file-20211119-21-aqhvkb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=483&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/432914/original/file-20211119-21-aqhvkb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=607&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/432914/original/file-20211119-21-aqhvkb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=607&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/432914/original/file-20211119-21-aqhvkb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=607&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une illustration de la Nativité tirée d’une vieille bible allemande.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<h2>Quand l’alcool a soif d’eau</h2>
<p>Cette année, l’apocalypse, l’alcool et Noël se rejoignent une fois de plus au beau milieu de crises environnementales et sociales. Lors des négociations sur les changements climatiques à Glasgow, le <a href="https://www.scotch-whisky.org.uk/insights/cop26/the-cop26-whisky/">Scotch COP26</a> a été embouteillé à la main « à un jet de pierre des négociations ». La Scotch Whisky Association a utilisé cette édition limitée pour présenter ses « engagements en matière de durabilité ».</p>
<p>L’alcool a soif d’eau ; <a href="https://www.independent.co.uk/climate-change/opinion/alcohol-climate-crisis-environment-b1812946.html">et les distillateurs, les brasseurs et les viticulteurs sont conscients de son impact sur l’environnement</a>. Le brassage d’une pinte de bière nécessite près de 150 litres d’eau, tandis qu’il faut au vin environ deux tiers de cette quantité. L’une des raisons pour lesquelles les Écritures hébraïques font davantage référence au vin qu’à la bière est que la <a href="https://www.thetorah.com/article/shekhar-is-it-wine-or-beer">Palestine antique était une région privée d’eau</a> où la <a href="https://outline.com/8wqwXs">production de vin était bien plus naturelle</a>.</p>
<p>Charles Dickens savait, comme les universitaires en sciences humaines, que les <a href="https://theconversation.com/childrens-books-can-do-more-to-inspire-the-new-generation-of-earth-warriors-97580">histoires façonnent les sociétés</a>. Face à nos propres ténèbres, le « fantôme d’une idée » de Charles Dickens et son récit archétypal d’une conversion de dernière minute pour le bien commun sont plus pertinents que jamais.</p>
<p>À l’instar de Scrooge, nos dirigeants politiques et nos chefs d’entreprise ont un choix à faire : faire passer les gens avant les profits ou ne penser qu’au bilan financier. Comme les <a href="https://theconversation.com/earth-day-at-50-a-look-to-the-past-offers-hope-for-the-planets-future-135885">climatologues le disent depuis longtemps</a>, il est minuit moins une.</p>
<p>Alors que les rayons des supermarchés se vident et que les « trains de vin » circulent, les anciens rêves hivernaux en matière d’égalité et de justice pour l’humanité devront encore attendre.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/173550/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Matthew Robert Anderson reçoit un financement de l'UPFA, l'association des professeurs à temps partiel de l'Université Concordia.</span></em></p>Le lien étroit qui existe entre Noël et l’alcool remonte aux origines de cette fête. Cette année, les deux se rejoignent au beau milieu de crises environnementales et sociales.Matthew Robert Anderson, Affiliate Professor, Theological Studies, Concordia UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1738552021-12-20T18:52:41Z2021-12-20T18:52:41ZCes livres de jeunesse qui font Noël<p>Les premiers textes pour enfants associés à Noël ont été écrits au XIX<sup>e</sup> siècle et opposent souvent la pauvreté, la solitude et le manque à l’opulence générée par la magie et le rêve. L’on peut penser par exemple à <a href="https://www.jose-corti.fr/titres/Contes-pour-les-entants-et-la-maison..html"><em>Hansel et Gretel</em></a> des frères Grimm, mais aussi à <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-pieds-sur-terre/la-petite-fille-aux-allumettes-0"><em>La Petite fille aux allumettes</em></a> de Hans Christian Andersen. Des classiques régulièrement revisités par des auteurs et des artistes, comme <a href="https://www.editionsdesgrandespersonnes.com/portfolio_page/pacovska-kveta/">Květa Pacovská</a>, dont l’œuvre a été couronnée en 1992 par le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Prix_Hans-Christian-Andersen">Prix Hans-Christian-Andersen</a>, en quelque sorte le Nobel du livre pour enfants.</p>
<p>Cette artiste plasticienne a illustré en 2005 un <a href="https://www.lecteurs.com/livre/la-petite-fille-aux-allumettes/1848137">album</a> qui présente l’histoire originale d’Andersen traduite par Danièle Ball-Simon. Les dessins proposés dans cet album sont visuellement très contrastés, permettant au jeune enfant de mieux saisir la situation initiale très dure ainsi que l’échappée dans le monde onirique des visions enchantées.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/438250/original/file-20211217-25-1ifkcll.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/438250/original/file-20211217-25-1ifkcll.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=754&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/438250/original/file-20211217-25-1ifkcll.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=754&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/438250/original/file-20211217-25-1ifkcll.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=754&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/438250/original/file-20211217-25-1ifkcll.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=947&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/438250/original/file-20211217-25-1ifkcll.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=947&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/438250/original/file-20211217-25-1ifkcll.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=947&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.ecoledesloisirs.fr/livre/allumette">L’École des Loisirs</a></span>
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<p>Sur le même thème, un autre artiste, <a href="https://www.tomiungerer.com/">Tomi Ungerer</a> nous propose une réécriture beaucoup plus positive de ce conte dans un petit ouvrage intitulé <a href="https://www.ecoledesloisirs.fr/livre/allumette"><em>Allumette</em></a>. Cette histoire débute dans les mêmes conditions matérielles que l’histoire d’Andersen mais évolue très différemment. Les visions de la jeune héroïne y deviennent réalité et le ciel lui offre tellement de cadeaux et de nourriture qu’elle décide de partager son butin avec toute la ville, réduisant ainsi la pauvreté. Tout comme dans l’original, l’auteur nous propose une lecture engagée contre la pauvreté.</p>
<h2>Des classiques aux modernes</h2>
<p>Dans le même esprit, une des histoires qui a le plus marqué les traditions de Noël est le <a href="https://www.franceculture.fr/oeuvre/contes-de-noel-0"><em>Conte de Noël</em></a>, publié en 1842 par Charles Dickens et qui retrace la nuit de Noël d’Ebenezer Scrooge, un homme avare recevant la visite de trois esprits : les fantômes des Noëls passé, présent et futur. L’expérience va lui permettre de reconnaître ses travers et de véritablement comprendre la signification de Noël.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/PcNLFXSdO5A?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Adaptation par Disney du « Christmas Carol » de Dickens.</span></figcaption>
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<p>Les <a href="https://www.proquest.com/openview/3386838837c498708bc0007c452353a4/1?pq-origsite=gscholar&cbl=1818261">descriptions prolixes des festins</a> ont contribué à ancrer les plats traditionnels dans la culture populaire tels que les marrons, les oranges, citrons et pommes ainsi que la dinde rôtie, les diffusant au-delà des classes les plus aisées. Conseillée pour les enfants qui savent déjà bien lire, cette belle histoire de Noël permet de revenir aux sources des traditions festives.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/438247/original/file-20211217-15-1mzuf2e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/438247/original/file-20211217-15-1mzuf2e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=703&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/438247/original/file-20211217-15-1mzuf2e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=703&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/438247/original/file-20211217-15-1mzuf2e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=703&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/438247/original/file-20211217-15-1mzuf2e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=883&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/438247/original/file-20211217-15-1mzuf2e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=883&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/438247/original/file-20211217-15-1mzuf2e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=883&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD-JEUNESSE/Albums-Junior/Quelqu-un-m-attend-derriere-la-neige#">Gallimard Jeunesse</a></span>
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<p>Le magnifique texte de <a href="https://www.franceculture.fr/personne/timothee-de-fombelle">Timothée de Fombelle</a>, <a href="https://www.gallimard-jeunesse.fr/9782075093668/quelqu-un-m-attend-derriere-la-neige.html"><em>Quelqu’un m’attend derrière la neige</em></a> (2019) travaille lui aussi sur les difficiles questions de solitude et d’inégalités à travers l’histoire d’un livreur de glaces et d’une hirondelle dont les destins vont se croiser pour permettre à un troisième personnage de survivre. C’est un texte touchant qui mêle réalisme et onirisme. Les illustrations douces de <a href="https://www.babelio.com/auteur/Thomas-Campi/237404">Thomas Campi</a> apportent de la profondeur et de la poésie au texte, que ce soit dans les paysages d’Afrique ou dans ceux recouverts de neige.</p>
<p><a href="https://www.bayard-editions.com/jeunesse/lecture-poche/des-7-ans/noel-a-tous-les-etages"><em>Noël à tous les étages</em></a> de <a href="https://www.ecoledesloisirs.fr/auteur/marie-aude-murail">Marie-Aude Murail</a> (publié dans <em>J’aime Lire</em> en 1998 puis republié en format livre en 2017) se déroule aussi au XIX<sup>e</sup> siècle : Jeanne tente de gagner assez d’argent pour aider son frère Hugues qui est gravement malade. Comme dans les autres histoires que nous avons évoquées, le retournement de situation s’opère grâce à la magie de Noël qui permet à Hugues de retrouver la santé et à Jeanne de trouver l’amour.</p>
<h2>Du papier à l’écran</h2>
<p>Cette magie de Noël est au cœur de deux autres textes jeunesse, <a href="https://www.franceculture.fr/oeuvre/comment-le-grinch-vole-noel"><em>Comment le Grinch a volé Noël</em></a> de Dr Seuss (traduit par Stephen Carrière) et <a href="https://www.grasset.fr/livres/le-bonhomme-de-neige-9782246063124"><em>Le Bonhomme de Neige</em></a> de <a href="https://www.babelio.com/auteur/Raymond-Briggs/82692">Raymond Briggs</a>.</p>
<p><em>Comment le Grinch a volé Noël</em> est en fait une réécriture du <em>Conte de Noël</em> de Charles Dickens, car le Grinch a les mêmes caractéristiques qu’Ebenezer Scrooge. Dans cet album écrit en rimes, le Grinch ourdit un plan pour gâcher le Noël des Chous, les habitants de Chouville, en leur volant cadeaux et nourriture de fête.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/SMyF9-FZT_Q?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Bande-annonce du film Le Grinch (2018).</span></figcaption>
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<p>Mais il va vite comprendre que « Noël est blotti/Dans les cœurs et les têtes », bien au-delà des possessions matérielles. L’histoire du Grinch peut être découverte en <a href="https://www.imdb.com/title/tt0060345/">album ou dessin animé</a> ou encore en <a href="https://www.imdb.com/title/tt2709692/">film animé</a>. Ces formats différents ont permis à ce texte de véritablement <a href="https://www.proquest.com/openview/8e6147e654cb7cc71a2684fd8a9474ec/1?pq-origsite=gscholar&cbl=1820942">faire partie de la culture anglophone</a> et de devenir un classique pour Noël.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/438251/original/file-20211217-25-1p73d93.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/438251/original/file-20211217-25-1p73d93.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=846&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/438251/original/file-20211217-25-1p73d93.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=846&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/438251/original/file-20211217-25-1p73d93.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=846&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/438251/original/file-20211217-25-1p73d93.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1063&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/438251/original/file-20211217-25-1p73d93.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1063&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/438251/original/file-20211217-25-1p73d93.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1063&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.grasset.fr/livres/le-bonhomme-de-neige-9782246063124">Grasset Jeunesse</a></span>
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<p>Le deuxième classique de la saison est le très bel album de Raymond Briggs, <em>Le Bonhomme de Neige</em>. Publié pour la première fois en 1978, il propose de magnifiques illustrations pastel organisées en cases de bande dessinée sur la page mais ne contenant aucun texte. C’est donc à l’adulte ou à l’enfant de narrer l’histoire du petit garçon fabriquant un bonhomme qui va prendre vie.</p>
<p>Les aventures des deux héros sont pleines de magie et de rires et permettent aux jeunes enfants qui ne savent pas encore lire de suivre l’histoire à travers les images. <a href="https://vodkaster.telerama.fr/films/le-bonhomme-de-neige/431548">Un film d’animation</a> a été tiré de l’album en 1982 et peut permettre de continuer l’immersion dans ce monde magique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/173855/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Eléonore Cartellier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>D’Andersen à Timothée de Fombelle ou Marie-Aude Murail, retour sur quelques-uns de ces récits qui façonnent notre imaginaire autour des fêtes de fin d’année.Eléonore Cartellier, Docteur en littérature britannique, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1733542021-12-18T15:37:36Z2021-12-18T15:37:36ZPourquoi les repas de famille nous attirent-ils autant qu’ils nous effraient ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/437816/original/file-20211215-25-1cc7h01.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C5%2C668%2C568&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">A l'abri du besoin, Norman Rockwell, entre 1941 et 1945.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.nrm.org/2011/11/place-settings/freedom-from-want_3_5/">Musée Norman Rockwell</a></span></figcaption></figure><p>L’histoire du cinéma, de la peinture, de la littérature, fourmille de scènes de table. On songe au <em>Repas de noce</em> de Brueghel l’Ancien, aux innombrables « cènes » représentant le dernier repas du Christ, à ces tableaux emblématiques de la nation américaine que sont <em>The First Thanksgiving</em> de JLG Ferris, ou <em>Freedom from Want</em> de Norman Rockwell (« A l’abri du besoin »). Shakespeare nous invite au banquet de <em>La Mégère apprivoisée</em>, Fitzgerald nous convie aux fêtes de <em>Gatsby</em>, Virginia Woolf nous fait saliver sur un bœuf en daube dans <em>La Promenade au phare</em>.</p>
<p>Certains auteurs mettent la préparation du repas au cœur du récit, comme Karen Blixen avec <em>Le Festin de Babette</em>, immortalisé au cinéma. Nombreux sont les acteurs qui trouvèrent la consécration dans des films où Thanksgiving jouait un rôle majeur : Al Pacino dans <em>Parfum de femme</em>, Sandra Bullock dans <em>L’Éveil d’un champion</em>, Sigourney Weaver dans <em>La Tempête de glace</em>, Adam Sandler dans <em>Drôle de monde</em>. Notre mémoire collective est nourrie de scènes devenues mythiques, tirées de <em>Barry Lyndon</em> de Kubrick, du <em>Parrain</em> de Coppola, des <em>Incorruptibles</em> de Brian de Palma.</p>
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<p>Le repas partagé ne saurait se concevoir seulement comme l’occasion d’ingérer une source d’énergie. La table signifie toujours plus qu’elle-même ; c’est une figure : elle est métonymique d’un contexte (la richesse de l’hôte, une période de crise), métaphorique d’une attitude (le raffinement, la générosité, l’avarice), symbolique d’une situation (Noël, la nation, le mariage, la rencontre amoureuse).</p>
<p>Mais quelle est la nature exacte de cette trouble fascination que les artistes éprouvent pour le repas partagé ? Pourquoi ressentons-nous, nous-mêmes, une telle excitation à prendre part à un repas de famille, et à en voir une représentation ?</p>
<p>Un premier élément de réponse relève de l’évidence : si nous tenons tant à voir ou à vivre un tel spectacle, c’est que ce que nous mangeons, comment nous le mangeons, avec qui nous le mangeons, où et quand nous le mangeons, structure l’histoire même de l’humanité : les « arts de la table », si l’on peut dire, sont des opérateurs de sociabilité, qui nous rappellent que nous sommes cet animal qui prépare sa nourriture, qui la partage, et qui en parle. Or, l’union sacrée qui semble devoir émerger de ces moments privilégiés peut aussi être mise à mal.</p>
<h2>Un révélateur de dysfonctionnements</h2>
<p>Dans le film <em>Avalon</em>, de Barry Levinson, un repas de famille organisé pour Thanksgiving tourne au drame. Le père donne le coup d’envoi du découpage de la dinde quand son frère arrivé en retard s’écrie indigné : « You cut the turkey ! » (« Tu as découpé la dinde ! »). Dans <em>La Bûche</em> de Danièle Thompson, ou dans <em>Un Conte de Noël</em> d’Arnaud Desplechin, le repas de Noël est l’occasion de raviver les plaies, de faire sortir les fantômes des placards familiaux. Parmi les scènes culte de tels dysfonctionnements, on se souviendra de celle du gigot dans <em>Vincent, François, Paul et les autres</em> de Claude Sautet, de celle du ragoût dans <em>Que la bête meure</em> de Claude Chabrol, de celle du repas de notables dans <em>Coup de tête</em> de Jean‑Jacques Annaud.</p>
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<p>En vérité, il ne saurait y avoir de récit d’un repas collectif sans que le fantasme de l’unité familiale ou sociale ne menace de voler en éclats. Qu’un étranger s’invite, qu’un membre de la famille revienne d’une longue absence, que l’un des convives dise des horreurs, que quelque chose cloche dans une recette ou dans une attitude, qu’un invité ne mange pas, et tout l’ordonnancement symbolique de la fête en sera ébranlé.</p>
<p>Les repas collectifs sont hautement problématiques, dangereux, imprévisibles : caché au milieu des plats circule comme un <em>pharmakon</em>, une énergie agissant comme remède et poison tout à la fois.</p>
<p>D’où l’immense succès, marqué par les multiples adaptations théâtrales, du film <em>Festen</em> de Thomas Vinterberg, dans lequel cette précarité de l’harmonie familiale est placée au cœur même de la représentation, puisque le fils profite du repas de fête pour dénoncer la pédophilie du père. Le poison est le plus violent lorsque les tabous fondamentaux s’effondrent. C’est encore le cas dans <em>Les Incorruptibles</em>, où Al Capone (Robert de Niro) défonce le crâne de l’un des convives à coups de batte de base-ball, dans <em>Hannibal</em>, de Riddley Scott, où le maître de cérémonie (Anthony Hopkins) se délecte du cerveau de l’un des invités.</p>
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<p>Inceste, meurtre, cannibalisme, autant d’interdits majeurs, qui se retrouvent subitement dans l’assiette, visibles, étalés, offerts à la dégustation du spectateur, en une monstrueuse abrogation des lois fondamentales du lien social. Monstrueuse, parce que la transgression des tabous qui crève soudain l’écran coïncide avec le moment le plus symbolique de la vie des hommes : ce moment du partage de la bête sacrifiée (la dinde, par exemple) comme gage de l’alliance sacrée de la communauté.</p>
<h2>Rituel et sacrifice</h2>
<p>Quelques apports théoriques <a href="https://redaprenderycambiar.com.ar/derrida/frances/derrida_manger.htm">seraient utiles</a> à une analyse approfondie des scènes évoquées ci-dessus : <a href="http://palimpsestes.fr/textes_philo/levi_strauss/triangle_culinaire.pdf">Lévi-Strauss sur le « triangle culinaire »</a> (le cru, le cuit, le pourri), où s’affirme une parfaite homologie entre cuisine et langage ; la quatrième partie de <em>Totem et tabou</em>, où <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance/freud-et-la-religion-14-totem-et-tabou">Freud diagnostique la permanence de la structure sacrificielle</a>, comme souvenir inconscient et répétition symbolique de la mise à mort du père de la horde et de sa dévoration par les fils.</p>
<p>Le sacrifice rituel, dont le repas collectif garderait la trace, serait à interpréter comme une mise à mort non criminelle, où se liraient tout à la fois l’aveu du meurtre originel et son rachat.</p>
<p>On comprend dès lors que la représentation comme l’expérience du repas partagé sont surtout une opération sémiotique qui subordonne l’acte de manger à la mise en scène d’un événement : la table fera advenir soit l’harmonie soit la discorde. Il peut arriver que le rituel ne fonctionne pas : que les codes ne soient pas respectés (découper la dinde avant que tous ne soient arrivés, insulter l’hôte, l’assassiner), que le convive ne mange pas (l’anorexique), qu’un étranger se mette à table sans y avoir été invité (le parasite, le revenant), qu’un « trouble-fête » déballe son sac (le secret de famille).</p>
<h2>Quand l’art se met à table</h2>
<p>Sans écarter ces références bien connues, c’est un essai plus confidentiel que nous proposons de relire. Dans son étude sur « l’ivresse des Grecs », Florence Dupont rappelle que l’épopée grecque était chantée lors d’un banquet sacrificiel, d’un <em>symposium</em>, dont la fonction était, par la circulation conjointe des mots et des mets, de renouer la relation des hommes avec la Mémoire divine du monde. Telle aurait été la fonction de la littérature : faire advenir une parole sans auteur, diluée dans l’oralité circulant entre les hommes. Littérature vivante donc, mise en bouche sur un mode poétique, éphémère, proche du moment musical.</p>
<p>Ce type de littérature se distinguerait dès lors de ce que nous nommons aujourd’hui la « littérature », devenue une aventure solitaire et personnelle. Le <em>symposium</em> permettait l’éclatement du principe d’individuation ; la littérature moderne témoigne d’une culture identitaire. En faisant jouer le <em>symposium</em> grec contre la <em>cena</em> romaine, le banquet rituel contre la table gastronomique, Dupont analyse la dégradation culturelle qui aurait <a href="https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1996_num_51_5_410904_t1_1089_0000_001">marqué l’histoire des repas partagés tout autant que celle de la littérature</a>.</p>
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<p>On peut penser que les représentations artistiques du repas partagé nous parlent au plus haut point précisément parce qu’elles mettent en scène ces origines du banquet. Un film comme <em>Un conte de Noël</em> montre bien comment les liens familiaux s’écartèlent entre don de soi inconditionnel et haines individuelles recuites. Les arts jouent sur cette tension qui les fait osciller entre des régimes qui favorisent soit le collectif soit l’individuel. Or, cette tension perceptible dans les représentations ne serait-elle aussi comme une mise en abyme de la relation tendue qui lie l’artiste à l’institution ? L’auteur (dramaturge, romancier, peintre, metteur en scène) est celui qui participe et ne participe pas au banquet, se conduisant lui-même comme un hôte parfait, mais aussi, et en même temps, soit comme un parasite (celui qui s’assoit à table sans y être invité), soit comme un spectre (celui qui sort des coulisses pour révéler ce que les convives n’ont jamais voulu savoir).</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/173354/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Frédéric Regard ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Ce que nous mangeons, comment nous le mangeons, avec qui nous le mangeons, où et quand nous le mangeons… structure l’histoire même de l’humanité.Frédéric Regard, Professeur de littérature anglaise, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1736662021-12-16T20:06:08Z2021-12-16T20:06:08ZPour Noël, évitez de déposer des chèques et des billets sous le sapin<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/437174/original/file-20211213-19-1sx1oes.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=47%2C51%2C1443%2C884&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La valeur d’un cadeau ne se résume pas à sa valeur monétaire.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Fake_one_dollar_with_Santa_Claus.jpg">Lloydoramcdowell / Wikimedia Commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Quel jouet acheter à ma nièce pour Noël ? Pas facile, moi qui n’ai jamais été une petite fille de huit ans. Pour mon frère : une bouteille de whisky. Mais n’a-t-il pas arrêté d’en boire dernièrement ? Et ma tante ? Le Goncourt de l’année, comme toujours. Pas sûr pourtant que l’histoire, cette fois, l’intéresse.</p>
<p>À ma compagne, c’est plus facile, je connais ses goûts et tout ce qu’elle possède déjà. En tout cas, pas d’argent ni aux uns ni aux autres. Éventuellement un chèque-cadeau si je n’ai pas le temps de courir les magasins et les sites Internet. De toute façon lorsqu’elles ne plaisent pas, ces étrennes peuvent se revendre sur Leboncoin. L’économie des cadeaux pour les fêtes est déconcertante !</p>
<p>Au début des années 1990, elle a dérouté un jeune assistant-professeur de l’Université de Yale. Fasciné par la théorie économique du choix rationnel du consommateur, il tique devant la tradition de Noël qui consiste à offrir un bien pour une autre personne <a href="https://www.amherst.edu/media/view/104699/original/christmas.pdf">sans connaître parfaitement ses préférences</a>. En dépensant 50 dollars pour un cadeau à un proche, il est probable que ce dernier aurait acheté avec cette somme quelque chose qui lui aurait plu davantage.</p>
<p>Il demande alors aux étudiants de son cours de microéconomie d’estimer le prix des cadeaux qu’ils ont reçus il y a peu pour Noël, ainsi que ce qu’ils seraient prêts à payer pour obtenir leurs cadeaux s’ils ne les avaient pas reçus. L’un répond, par exemple, que le sweatshirt qu’il a découvert sous le sapin vaut 50 euros dans le commerce, mais qu’il aurait été prêt à payer seulement 43 euros s’il avait eu à l’acheter.</p>
<h2>Perte économique sèche</h2>
<p>Le jeune assistant-professeur observe chez les étudiants interrogés un écart systématique de l’ordre de 20 % entre leurs deux estimations. Appliquant ce ratio au chiffre des ventes réalisées au Noël 1992, il en déduit que l’échange de cadeaux conduit une perte sèche pour la société de plusieurs milliards de dollars. Pour corriger cette allocation inefficace des ressources, il conviendrait selon lui de donner de l’argent plutôt que d’offrir des présents emballés. Un billet de 50 euros plutôt que 7 euros perdus pour un sweatshirt surprise.</p>
<p>Or, son raisonnement économique est erroné et absurde.</p>
<p>Mais avant d’expliquer pourquoi, observons que si son raisonnement avait été juste, la perte de richesse serait encore beaucoup plus grande aujourd’hui. Les dépenses de cadeaux pour les fêtes de Noël ont en effet considérablement augmenté depuis le début des années 1990. La Chine et sa production à bas coût sont passées par là.</p>
<p>Prenons l’exemple des jouets. L’empire du Milieu concentre <a href="https://www.economist.com/graphic-detail/2017/12/25/china-is-still-a-toy-manufacturing-powerhouse">environ les trois quarts de la production mondiale</a>.</p>
<p>Toutes les entreprises du reste de la planète s’y approvisionnent ou bien y fabriquent. Même <a href="https://theconversation.com/economie-du-jouet-le-jeu-de-lego-52608">Lego a fini par y construire une usine</a>. Les consommateurs français apprécient car ils ont ainsi vu le prix des jouets chuter de <a href="http://www.insee.fr/fr/bases-de-donnees/bsweb/graph.asp?idbank=000638945">près d’un cinquième entre 1995 et 2015</a>. Cette tendance vaut également pour les présents que se font les adultes entre eux.</p>
<p><iframe id="LdLeT" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/LdLeT/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Parallèlement à cette baisse unitaire, le budget alloué aux cadeaux de Noël gonfle régulièrement. Aux États-Unis, la dépense par ménage a augmenté de près de <a href="https://think.ing.com/reports/special-report-presents-of-mind-christmas-2016/">40 % au cours des 30 dernières années</a>. Cet emballement n’est pas sans poser problème à certains. Deux Américains sur dix déclarent qu’ils se sont endettés pour Noël. Il faut dire qu’ils sont un peu plus d’un sur deux à considérer que c’est le moment de l’année où ils se permettent de ne pas se soucier de dépenser de l’argent. Il en est peut-être de même pour vous. En tout cas, les experts en marketing et les vendeurs le savent et ils s’en donnent à cœur joie pour nous pousser à la dépense en ces périodes de fin d’année.</p>
<p>Si Joel Waldfogel, puisque c’est le nom de notre jeune assistant-professeur, avait raison en calculant qu’un cinquième des dépenses des cadeaux de Noël s’envolait en fumée en pure perte, l’addition, ou plutôt la soustraction, serait donc devenue encore plus salée aujourd’hui. Il ne faut pas cependant s’en inquiéter car, comme annoncé, il a tort.</p>
<h2>Réciprocité</h2>
<p>Intuitivement, cela ne vous surprendra pas. Imaginez offrir de l’argent à votre compagne ou à votre compagnon sous le sapin plutôt qu’un présent. Il y a peu de chances que sa réaction soit plus positive que devant un cadeau joliment emballé. Même chose pour l’ami qui vous a invité pour le réveillon de la Saint-Sylvestre devant un billet de 10 ou 20 euros que vous lui tendriez sur le pas de la porte au lieu d’une bouteille de vin ou d’un bouquet de fleurs !</p>
<p>Et puis, les cadeaux de Noël sont en général réciproques. Imaginez un échange d’enveloppes entre conjoints, chacune contenant 50 euros. Super, les deux dons s’annulent ! Notez que la situation serait sans doute plus délicate encore si l’un mettait beaucoup moins de billets dans son enveloppe que l’autre…</p>
<p>D’ailleurs, les économistes d’aujourd’hui ne s’y trompent pas. Près de cinquante, la plupart enseignant à Chicago, Harvard, MIT, Stanford et Berkeley, ont été sollicités pour réagir à la <a href="https://www.igmchicago.org/surveys/bah-humbug/">proposition</a> suivante :</p>
<blockquote>
<p>« Donner des présents spécifiques comme cadeaux de fête est inefficace car les bénéficiaires pourraient beaucoup mieux satisfaire leurs préférences avec du cash. »</p>
</blockquote>
<p>Seule une petite minorité s’est déclarée d’accord. Quant aux sept lauréats du prix « Nobel » d’économie interrogés parmi le groupe, ils se sont unanimement prononcés contre.</p>
<p>Les anthropologues auraient été encore plus sûrement unanimes. Fins <a href="https://journals.openedition.org/lectures/520">observateurs du don</a> dans les sociétés traditionnelles et modernes, ils en savent plus que quiconque sur ce sujet complexe. Ils ne peuvent que dénoncer le réductionnisme d’un Joel Waldfogel. Mais en cherchant la réfutation du côté même de l’économie, nous allons pouvoir actualiser nos connaissances sur la théorie du consommateur.</p>
<p>La perte entre le don d’un présent emballé et le don d’argent trouve en effet son origine dans le modèle maintenant dépassé d’un consommateur choisissant de façon parfaitement rationnelle ce qu’il achète : il connaît intimement ses préférences et calcule face à tous les biens et selon ses moyens ce qui maximiserait son plaisir, son utilité, disent les économistes. Du genre <em>Homo œconomicus</em>, il est donc imbattable dans le choix de ses achats.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/437177/original/file-20211213-21-1twe7l5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/437177/original/file-20211213-21-1twe7l5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/437177/original/file-20211213-21-1twe7l5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/437177/original/file-20211213-21-1twe7l5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/437177/original/file-20211213-21-1twe7l5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/437177/original/file-20211213-21-1twe7l5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/437177/original/file-20211213-21-1twe7l5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les cadeaux de Noël sont en général réciproques.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/vintagehalloweencollector/2084765580/">Dave/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Le mérite de Joel Waldfogel serait alors d’avoir le premier mesuré de combien celui qui choisit à la place du consommateur est battu. Sauf que sa démarche n’est pas très canonique. Aux yeux d’un puriste, il commet un sacrilège : il objective l’utilité par une mesure monétaire et il compare l’utilité entre les personnes. Cela revient en quelque sorte à faire de l’argent l’instrument universel de mesure du plaisir et qu’un dollar pour le donateur vaut autant qu’un dollar pour le donataire, alors même que le premier peut être plus riche que le second, ou l’inverse ; une double position contestée par les théoriciens.</p>
<p>Par ailleurs, la théorie du consommateur parfaitement rationnel est battue en brèche par les travaux de psychologie expérimentale et d’économie comportementale, travaux qui se sont multipliés depuis plusieurs dizaines d’années.</p>
<p>Ils ont notamment mis en évidence l’importance de la réciprocité comme interaction sociale. Soit un joueur 1 qui décide quelle part d’un prix de 100 unités il est prêt à offrir à un joueur 2, alors que ce dernier a seulement la possibilité d’accepter ou de refuser la part proposée. La plupart des offres sont comprises entre 42 et 50 % tandis que les <a href="https://www.nber.org/system/files/working_papers/w18687/w18687.pdf">offres à moins de 20 % sont refusées</a>. La théorie prédit pourtant que le joueur 1 devrait par intérêt garder presque tout pour lui et que joueur 2 devrait accepter même une petite part du gâteau car c’est toujours mieux que rien du tout !</p>
<p>Dès lors, il devient également possible de battre le consommateur lui-même. Par exemple, en lui offrant en cadeau un bien ou service auquel il n’aurait pas pensé car il n’en connaissait pas l’existence ou n’en connaissait qu’insuffisamment les caractéristiques et les usages. Sans parler d’autres barrières comme la crainte que son achat soit jugé déplacé aux yeux d’une partie de son entourage.</p>
<h2>Plaisir d’offrir</h2>
<p>Le <a href="https://www.nber.org/system/files/working_papers/w18687/w18687.pdf">modèle théorique du consommateur</a> s’éloigne ainsi aujourd’hui de la parfaite rationalité et cherche à intégrer les affects (sentiments et émotions) et les motivations (dévouement familial, altruisme, socialisation, etc.) qui guident ses choix. Le cadeau emballé peut dès lors être apprécié comme un signal de l’attachement du donateur puisqu’il a réfléchi et a <a href="https://sites.duke.edu/djepapers/files/2016/10/Yao.pdf">passé du temps à le choisir</a>, ou même parce qu’il procure tout simplement quelques minutes passées à découvrir une surprise, le temps d’enlever le ruban et d’ouvrir le paquet.</p>
<p>Bref, la valeur du cadeau ne se résume pas à sa valeur monétaire. D’ailleurs, dès lors que la question posée aux étudiants n’est plus d’estimer le prix du cadeau reçu en l’enjoignant de laisser de côté la valeur sentimentale, mais que l’interrogation porte sur sa valeur totale comprise comme sa valeur matérielle plus sa valeur sentimentale, c’est un <a href="https://www.jstor.org/stable/pdf/116876.pdf">gain et non plus une perte</a> qui apparaît.</p>
<p>En toute rigueur, il conviendrait aussi de comptabiliser la satisfaction du donateur. Ne dit-on pas que le plaisir d’offrir est souvent plus grand que celui de recevoir ? La consommation du cadeau reçu peut être à l’origine aussi d’un <a href="https://www.jstor.org/stable/pdf/116876.pdf">effet positif en retour</a>, comme le sourire et le remerciement du donataire. Sans parler de la réaction d’Annie Hall recevant de son mari joué par Woody Allen une pièce de lingerie fine « Oh mais c’est un cadeau pour toi ! ».</p>
<p>Après ces considérations sur les façons dont nous devrions et dont nous pourrions nous comporter avec nos cadeaux de Noël, il serait peut-être temps d’observer comment nous nous comportons. Que disent les sondages et les enquêtes ?</p>
<p>En premier lieu, les donataires sont dans leur très grande majorité satisfaits des présents qu’ils reçoivent. En Europe, seul un <a href="https://think.ing.com/reports/special-report-presents-of-mind-christmas-2016/">sur sept a recueilli un cadeau qu’il n’apprécie pas</a> ; la France se distinguant par une proportion plus forte. Les donateurs voient donc plutôt juste. Peut-être d’ailleurs pour certains aidés par les suggestions de l’entourage de la personne à qui ils voulaient faire un présent. Ou même en demandant directement ce qu’elle veut pour Noël !</p>
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<p>En second lieu, le don d’argent est très minoritaire – une personne sur 10 en reçoit parmi tous ses cadeaux. Il reste largement dépassé par la carte cadeau. Elle évite de remettre un chèque ou des billets sans âme et réduit les chances d’un cadeau spécifique qui déplairait. Mais elle reporte sur le donataire la tâche d’aller en magasin, qu’il soit en brique ou en ligne. Selon une association de consommateurs, un Américain consacre une <a href="https://www.consumerreports.org/cro/news/2010/11/americans-spend-42-hours-each-on-holiday-shopping-and-partying/index.htm">quinzaine d’heures à magasiner plus trois à emballer</a> les cadeaux.</p>
<p>En dernier lieu, les présents qui ne plaisent pas connaissent toutes sortes de devenirs. Ils restent le plus souvent au fond d’une armoire ou d’un tiroir, mais sont parfois aussi jetés avec les papiers d’emballage, une pratique que les <a href="https://mumbrella.com.au/ing-champions-sustainable-gift-giving-this-christmas-with-give-me-something-good-dreamstarter-campaign-606875">éboueurs de Sydney</a> dénoncent en chœur dans « Give me something good », un clip réalisé par la banque ING pour sensibiliser à ce gâchis.</p>
<p>Pour éviter le gaspillage, les cadeaux peuvent être remis en circulation. De façon traditionnelle, en réoffrant l’air de rien ce que l’on a reçu, en échangeant en boutique, ou en donnant à une organisation caritative.</p>
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<figcaption><span class="caption">« Give Me Something Good » (ING Australia, 2019).</span></figcaption>
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<p>Aujourd’hui, la revente sur Internet a pris le dessus. Pour le 25 décembre 2020 et rien que pour la France, Rakuten annonçait <a href="https://www.lci.fr/economie/revente-de-cadeaux-de-noel-des-objets-remis-en-vente-en-ligne-par-millions-la-france-championne-d-europe-2173835.html">300 000 cadeaux postés mi-journée</a>, eBay estimait le double pour la fin de soirée et Leboncoin plus encore. Plusieurs millions de cadeaux changent ainsi de main pendant les fêtes et quelques jours au-delà. S’il avait connu ces plates-formes d’échanges, notre jeune assistant-professeur d’économie de Yale aurait revu son calcul de perte à la baisse grâce à la réallocation efficace des ressources qu’elles permettent.</p>
<p>Devant l’ampleur commerciale qu’ont prise les fêtes de Noël et l’avalanche de cadeaux qu’elles déclenchent, on peut aussi être tenté de renouer avec une tradition plus sobre et tournée vers son prochain. De nombreuses associations caritatives acceptent des cadeaux pour les redistribuer.</p>
<p>Vous pouvez donner parmi ceux que vous avez reçus ceux qui vous déplaisent ou dont vous disposez déjà. Vous pouvez aussi faire don d’un cadeau qui vous plaît, mais qui plairait plus ou serait plus utile encore à d’autres ; ce ne serait pas une hérésie économique, pas plus qu’envoyer un chèque ou passer un virement à une association caritative !</p>
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<p><em>Note : la littérature économique sur les cadeaux de fêtes est abondante. Vous trouverez une courte recension <a href="https://www.bruegel.org/2018/12/the-microeconomics-of-christmas/">ici</a>. Joel Waldfogel lui-même a publié d’autres articles notamment <a href="https://www.jstor.org/stable/40042886?seq=1#metadata_info_tab_contents">ici</a> et même un <a href="https://press.princeton.edu/books/hardcover/9780691142647/scroogenomics">livre</a>.</em></p>
<p><em>François Lévêque a publié chez Odile Jacob <a href="https://theconversation.com/bonnes-feuilles-lere-des-entreprises-hyperpuissantes-touche-t-elle-a-sa-fin-157831">« Les entreprises hyperpuissantes. Géants et Titans, la fin du modèle global ? »</a>. Son ouvrage a reçu le <a href="https://www.melchior.fr/note-de-lecture/les-entreprises-hyperpuissantes-prix-lyceen-lire-l-economie-2021">prix lycéen du livre d’économie 2021</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/173666/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François Lévêque ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’idée, bien que séduisante d’un point de vue économique car elle permet de maximiser l’utilité de celle ou celui qui reçoit, souffre de nombreux de défauts.François Lévêque, Professeur d’économie, Mines ParisLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1728952021-12-08T20:53:06Z2021-12-08T20:53:06ZDepuis quand offre-t-on des jouets aux enfants à Noël ?<p>Le retour des fêtes de Noël amène beaucoup d’entre nous à se lancer à la recherche de jouets à offrir aux enfants, les nôtres, ou ceux de nos proches et amis. Nous avons souvent entendu dire que, « dans le temps », certains <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/le-cours-de-lhistoire/jouer-en-societe-dou-viennent-les-regles-du-jeu-44-noublie-pas-mon-petit-soulier-une-histoire-du">ne recevaient à Noël qu’une orange</a>. Alors, les jouets à Noël, ce serait tout récent, et réservé aux plus riches ?</p>
<p>Pour répondre à cette question, il faut la décomposer en plusieurs points. <a href="https://cnlj.bnf.fr/sites/default/files/revues_document_joint/PUBLICATION_7022.pdf">Depuis quand</a> offre-t-on des jouets en fin d’année, et à quel moment, pour quelles fêtes ? Qui donnait les jouets avant qu’on ne crée le Père Noël ? Et pourquoi – et comment – celui-ci est-il devenu le principal distributeur de cadeaux ? Si nous voulons y voir plus clair, il faut revenir plus de deux millénaires en arrière, et refaire le parcours de l’offrande de jouets, de la Grèce antique à nos jours.</p>
<h2>Dès l’Antiquité, des jouets en fin d’année</h2>
<p>Lorsqu’on était enfant à Athènes, au V<sup>e</sup> siècle avant J.-C., on pouvait recevoir des jouets en fin d’année, c’est-à-dire en février dans le calendrier de l’époque. Les jouets étaient offerts à l’occasion de deux fêtes, les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Anthest%C3%A9ries">Anthestéries</a> (fête de Dionysos) et les Diasies (fête de Zeus), en souvenir de ces dieux ayant reçu des jouets dans leur enfance. Dès cette époque, il s’agissait de jouets du commerce comme l’atteste Aristophane, dans <em>Les Nuées</em>, pièce jouée en 423 avant J.-C.</p>
<p>Les petits Romains en recevaient au mois de décembre dans une journée des Saturnales appelée les Sigillaria. On jouait aux noix, ancêtres de nos billes, pendant cette période. Pour les étrennes, ce sont des cadeaux d’argent qui accompagnent les vœux pour la nouvelle année, fête sociale et non familiale.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/a-quoi-les-premiers-livres-pour-enfants-ressemblaient-ils-140922">À quoi les premiers livres pour enfants ressemblaient-ils ?</a>
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<p>Le christianisme antique n’est pas à l’origine du don de jouets aux enfants lors de la fête de la Nativité dont la date n’est fixée qu’au IV<sup>e</sup> siècle, période où le 25 décembre reste en concurrence avec le 6 janvier, l’Épiphanie. Le caractère sacré de ces fêtes s’accommoderait mal de la frivolité des joujoux. Pour que l’enfant devienne important, il faudra de longs siècles d’humanisation de la Sainte Famille qui réduira l’écart entre le sacré et le profane. En témoigne l’émergence d’un culte de Saint Joseph, devenant au XV<sup>e</sup> siècle un père « moderne », lavant les langes de son fils et faisant la cuisine.</p>
<p>À la Renaissance, les fêtes de fin d’année font une plus grande place aux enfants, lors de la fête des Saints Innocents (28 décembre), celle de Saint Nicolas (6 décembre), et lors des étrennes.</p>
<h2>Des jouets aux étrennes</h2>
<p>C’est au XVI<sup>e</sup> siècle que semble se mettre en place un élément fondamental : des donateurs sacrés, extérieurs à la famille, offrent des jouets aux enfants, et les parents s’effacent derrière eux. Il faut bien comprendre l’importance de ce fait : en s’effaçant, les parents déchargent les enfants du fardeau de la reconnaissance, ils procèdent à un don « pur », qui n’attend rien en échange. N’allons pas croire que le phénomène se généralise et existe partout au XVI<sup>e</sup> siècle, il vient juste de poindre, et les donateurs sacrés sont loin de concurrencer les parents qui font leurs cadeaux essentiellement aux étrennes. Mais commençons d’abord par Saint Nicolas et l’Enfant Jésus.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/435845/original/file-20211206-15-1q24h62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/435845/original/file-20211206-15-1q24h62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=702&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/435845/original/file-20211206-15-1q24h62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=702&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/435845/original/file-20211206-15-1q24h62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=702&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/435845/original/file-20211206-15-1q24h62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=882&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/435845/original/file-20211206-15-1q24h62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=882&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/435845/original/file-20211206-15-1q24h62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=882&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La Fête de Saint Nicolas, Jan Steen.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jan Steen, Public domain, via Wikimedia</span></span>
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<p>Dès la première moitié du XVI<sup>e</sup> siècle, des témoignages nous apprennent que Saint Nicolas apportait jouets et friandises aux enfants, et même Martin Luther, qui s’oppose au culte des saints, note dans ses dépenses de décembre 1535 l’achat de cadeaux pour ses enfants et ses domestiques le jour de la fête de Saint Nicolas. Même en pays protestant, comme la Hollande, le culte de ce saint persiste et quatre tableaux de <a href="https://www.herodote.net/Une_histoire_bien_emballee-synthese-1880-341.php?resume=1">Jan Steen</a> et Richard Brackenburg, situés entre 1665 et 1685 témoignent d’une fête familiale où nous trouvons déjà une parte des rituels de Noël : famille réunie, chaussures dans la cheminée par où arrivent les jouets.</p>
<p>D’autres pays protestants, comme l’Allemagne et la Suisse, et une région comme l’Alsace, font de l’Enfant Jésus le donateur. Des archives à Strasbourg le montrent dès 1570, dans un sermon de Johannes Flinner, et la ville supprime la Saint-Nicolas tout en gardant le marché des 5-6 décembre avant d’établir le marché de Noël, le Christkindelmarkt, sur la place de la cathédrale. Le pasteur Joseph Conrad Dannhauer évoque ces cadeaux aux enfants comme « une belle poupée et des choses semblables », et il atteste la présence du sapin « on y suspend des poupées et des sucreries », s’indignant du fait que les prières des enfants sont remplies de demandes très matérielles. La fête familiale plus profane que religieuse n’est pas loin !</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/435847/original/file-20211206-27-171q2e5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/435847/original/file-20211206-27-171q2e5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=454&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/435847/original/file-20211206-27-171q2e5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=454&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/435847/original/file-20211206-27-171q2e5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=454&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/435847/original/file-20211206-27-171q2e5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=570&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/435847/original/file-20211206-27-171q2e5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=570&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/435847/original/file-20211206-27-171q2e5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=570&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La Fête de Saint Nicolas, R.Brakenburg.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:R._Brakenburg_Feast_of_St_Nicholas_1685.jpg">Richard Brakenburgh, Public domain, via Wikimedia</a></span>
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<p>Mais dans la France catholique des XVII<sup>e</sup> et XVIII<sup>e</sup> siècle, ce sont les étrennes qui sont le moment privilégié d’offrandes de cadeaux au bénéfice de la famille et des enfants. Les comptes royaux l’attestent, comme ceux de Maris de Médicis en 1556, et le témoignage d’Héroard sur les étrennes reçues par le petit Louis XIII. La coutume existait aussi dans la petite bourgeoisie, et à Paris, à la fin de l’année, des <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1522709p.image">baraques sur les trottoirs</a> offrent à la convoitise des enfants de petits jouets et des sucreries. Ainsi, le don de jouets aux étrennes va de pair avec le commerce de jouets, et celui-ci augmente en suivant la progression de la sensibilité à l’enfance.</p>
<p>Au XVIII<sup>e</sup> siècle, la production de jouets <a href="https://www.fayard.fr/histoire/jouets-de-toujours-9782213607931">monte en puissance</a>, atteignant des millions d’objets par an dans les années 1770-1780 comme nous l’avons montré à partir des archives. À partir de 1760, les « <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb32695181v/date.item.r=">Annonces</a>, Affiches et Avis divers de la Ville de Paris » nous font connaître les meilleures boutiques de jouets de la capitale. Un passage de <em>L’Ami des Enfants</em> d’Arnauld Berquin nous montre, la veille du Jour de l’An, une table couverte de jouets et brillamment éclairée, ce qui est proche de la mise en scène allemande des étrennes décrite par E.T.A. Hoffmann en 1816 dans <em>Casse-Noisette et le roi des rats</em>. Ainsi se met en place une ritualisation familiale de la fête des étrennes en faveur des enfants qui préfigure la future fête de Noël.</p>
<h2>Au XIXᵉ siècle, de nombreux donateurs</h2>
<p>Le don de jouets aux enfants reste majoritairement situé aux étrennes, même si Saint Nicolas est présent dans le nord et nord-est de la France mais de nouveaux donateurs apparaissent, liés à des cultures populaires, comme la Befana, sorcière qui vient à l’Épiphanie, et les Trois Rois Mages à la même date en Sardaigne et en Espagne. Des personnifications profanes apparaissent, peu documentées par des travaux sérieux : le Père Janvier pour les étrennes, le Bonhomme Noël ou Père Noël en France, le Father Christmas anglais et le Weihnachtsmann allemand, qui surgissent avant le Père Noël américain issu de Santa Claus.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1202733411670073345"}"></div></p>
<p>C’est un petit homme grassouillet, doté d’une houppelande rouge à revers de fourrure blanche, habitant le pôle Nord, très humain, serein, rassurant, joyeux, porteur de valeurs positives, familières, universelles, qui invitent à la fête toutes les couches sociales. Son image s’impose fin XIX<sup>e</sup> siècle en Angleterre, au début du XX<sup>e</sup> siècle en France et va l’emporter sur les anciens donateurs car elle permet un syncrétisme efficace.</p>
<p>Sa réussite ne se comprend que parce qu’elle s’appuie sur l’évolution de la place de l’enfant dans la famille et dans la société, et sur la croissance de l’industrie du jouet confortée par la révolution commerciale des Grands Magasins. Ainsi, les étrennes sont devenues une fête commerciale des jouets, depuis le marché du Pont-Neuf (1815-1835) jusqu’à l’apparition des rayons spécialisés de jouets dans les Grands Magasins à partir de 1880.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1418121991383552003"}"></div></p>
<p>C’est dans ces années 1880-1885 que Noël s’impose vraiment comme fête où l’on offre des jouets aux enfants, même si les commerçants visent une période plus large, incluant Noël et les étrennes. Les affiches, les catalogues des Grands Magasins diffusés à des centaines de milliers d’exemplaires, les mises en scène de Noël dans leurs vitrines, tout cela pénètre la culture enfantine, contribuant à faire l’éducation des jeunes consommateurs. Il y a là une démocratisation du modèle bourgeois de consommation, proposé comme un nouvel art de vivre, une « shopping culture ».</p>
<p>La consommation de jouets s’intègre dans la mise en scène de la fête religieuse transformée en mythe, mais cette fête commerciale ne remplace pas la fête familiale, elle y contribue, car sans le système du commerce, le système du don ne pourrait se développer. Et pour que le don de jouets aux enfants soit devenu le cœur du Noël moderne, il a fallu une transformation de notre imaginaire, qu’on doit en grande partie au romantisme allemand relayé en France par Baudelaire et Victor Hugo. Quand Jean Valjean offre à Cosette la plus belle poupée de la baraque de jouets, c’est le plaisir de l’enfant qui est au centre de ce Noël.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/172895/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michel Manson ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les cadeaux de Noël, est-ce une invention de la société de consommation ? Dans la Grèce antique déjà, les enfants recevaient des jouets en fin d’année. Petit voyage historique.Michel Manson, Historien, professeur émérite en sciences de l'éducation, Université Sorbonne Paris NordLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1726352021-11-30T18:57:31Z2021-11-30T18:57:31ZY aura-t-il des semi-conducteurs pour Noël ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/433925/original/file-20211125-13-156gmhh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=150%2C26%2C1047%2C770&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les fabricants de smartphones sont aujourd’hui les entreprises les plus gourmandes en composants dont la production reste sous tension.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Taking_a_photo_of_Christmas_tree_(8302267342).jpg">Takashi Hososhima / Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La <a href="https://theconversation.com/semi-conducteurs-une-penurie-appelee-a-durer-157250">pénurie de semi-conducteurs</a> que le monde connaît depuis maintenant près de deux ans affecte fortement les secteurs utilisateurs qui rencontrent des difficultés à se procurer des composants électroniques à bon prix.</p>
<p>Bien sûr, les tensions entre l’offre et la demande ne sont pas nouvelles dans le secteur et font même l’objet d’une attention particulière depuis plusieurs années maintenant. Comme nous l’avions montré dans un <a href="http://www.theses.fr/2012CAEN0689">travail de recherche</a> en 2012, les ventes de semi-conducteurs se caractérisent en effet par une cyclicité importante. Le secteur nécessite beaucoup de recherche et développement (R&D) et des investissements lourds pour la production. L’offre s’adapte donc difficilement à une demande toujours plus exigeante et changeante.</p>
<p>Cependant, l’accumulation, depuis avril 2020, de <a href="https://www.em-normandie.com/sites/default/files/2021-10/EtudeSemiConducteursEMNormandie.pdf">facteurs aggravants</a> a rendu la situation d’autant plus difficile : mesures de restriction sanitaires, saturation des capacités de production, hausse de la demande, etc. Actuellement, le <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/automobile/la-penurie-de-semi-conducteurs-empechera-renault-de-construire-500000-vehicules-cette-annee-1357442">secteur automobile</a> rencontre par exemple d’importantes difficultés, mais ce n’est pas le seul. Plus largement, des <a href="https://theconversation.com/covid-19-la-crise-dans-les-ports-chinois-va-t-elle-gacher-noel-166606">craintes émergent concernant les fêtes de Noël</a> et les achats qui y sont associés.</p>
<p>Les entreprises utilisatrices de semi-conducteurs dépensaient, en 2020, près de <a href="https://fr.statista.com/infographie/26086/entreprise-qui-achetent-le-plus-de-semi-conducteurs-puces-electroniques-dans-le-monde/">450 milliards de dollars américains</a> pour acheter des puces. Pour comprendre celles qui sont les plus concernées par la pénurie, il suffit de regarder les entreprises les plus gourmandes en semi-conducteurs. Apple est la première d’entre elles. L’entreprise consomme 11,9 % des semi-conducteurs produits dans le monde. Suivent Samsung Electronics (8,1 %), Huawei (4,2 %), Lenovo (18,6 %), Dell Technologies (16,6 %).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/433927/original/file-20211125-27-vsvaag.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/433927/original/file-20211125-27-vsvaag.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/433927/original/file-20211125-27-vsvaag.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=885&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/433927/original/file-20211125-27-vsvaag.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=885&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/433927/original/file-20211125-27-vsvaag.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=885&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/433927/original/file-20211125-27-vsvaag.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1112&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/433927/original/file-20211125-27-vsvaag.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1112&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/433927/original/file-20211125-27-vsvaag.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1112&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.statista.com/infographie/26086/entreprise-qui-achetent-le-plus-de-semi-conducteurs-puces-electroniques-dans-le-monde/">Statista (octobre 2021)</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Sans ambiguïté, pour être certain d’avoir un cadeau sous le sapin le 25 décembre, et surtout sans avoir ruiné le père Noël, il faut éviter de mettre sur sa liste des produits électroniques grand public : téléphones, ordinateurs, tablettes… <a href="https://www.statista.com/study/73477/toys-and-games-in-france-report/">68 % des enfants âgés de 12 à 14 ans en France possèdent un smartphone</a> et 66 % un ordinateur portable/PC, le problème n’est donc pas anodin.</p>
<p>Cependant, d’autres produits de la liste risquent de poser problème. Nintendo a déjà fait savoir qu’ils avaient produit beaucoup moins de consoles Switch que prévu en 2021. C’est l’une des consoles de jeux vidéo les plus recherchées dans le monde, donc l’une de celles les plus présentes sur les listes de Noël.</p>
<p>Les jouets intelligents, mi-jouets, mi-objets connectés, qui possèdent leur propre intelligence grâce à de l’électronique embarquée (robots éducatifs, etc.), sont aussi très nombreux à figurer parmi les cadeaux les plus prisés. Ils représentaient déjà en 2020 un <a href="https://www.statista.com/chart/10389/smart-toys-market-in-danger/">marché en pleine croissance de 8,38 milliards d’euros</a>, selon IDATE DigiWorld.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/433928/original/file-20211125-23-tgssf4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/433928/original/file-20211125-23-tgssf4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/433928/original/file-20211125-23-tgssf4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/433928/original/file-20211125-23-tgssf4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/433928/original/file-20211125-23-tgssf4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/433928/original/file-20211125-23-tgssf4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=537&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/433928/original/file-20211125-23-tgssf4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=537&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/433928/original/file-20211125-23-tgssf4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=537&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.statista.com/chart/10389/smart-toys-market-in-danger/">Statista (2017)</a></span>
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<p>Au-delà de ces objets dont nous avions bien conscience qu’ils devaient être touchés par la crise, une très grande partie de jouets, même les plus simples, contient de l’électronique. La pénurie ne sera donc pas sans conséquence sur leur approvisionnement. Si un jouet possède une quelconque interconnexion, comme une application complémentaire, par exemple, c’est qu’il utilise une puce. S’il bouge « tout seul », fait de la lumière ou du bruit, c’est qu’il utilise une puce.</p>
<p>Il s’avère que cette <a href="https://slickdeals.net/article/news/holiday-toy-shortage-2021-and-how-to-find-toys-in-stock/">industrie du jouet rencontre de grandes difficultés</a> à se fournir en puces. En effet, elle n’a pas le même poids que l’industrie de l’électronique grand public évoquée plus haut ou encore de l’industrie automobile au centre de l’attention depuis plusieurs mois. Les entreprises de ce secteur ont donc moins de pouvoir de négociation. Elles peuvent moins jouer sur les quantités commandées et n’ont pas de relations privilégiées avec les fabricants de semi-conducteurs. De plus, elles ne pratiquent pas les mêmes marges et sont donc particulièrement exposées aux hausses des prix.</p>
<h2>Impact environnemental</h2>
<p>Que faire alors si l’on ne se satisfait pas d’un Noël avec des jouets « traditionnels » et que l’on souhaite malgré tout offrir des produits contenant de l’électronique ?</p>
<p>Le secteur des jeux vidéo est en pleine mutation, passant d’une activité axée sur le produit à un modèle <em>as-a-service</em>. Il est donc possible de jouer, grâce aux services de jeux en streaming, sans console ou ordinateur. Un abonnement ou une carte cadeau pour jeux vidéo en ligne seraient-ils donc la solution ? Malheureusement, les semi-conducteurs sont aussi indispensables pour accéder à ces jeux ou encore pour faire tourner les data centers nécessaires à leur fonctionnement. Au-delà du fait que <a href="https://dl.acm.org/doi/10.1145/3401335.3401366">l’impact environnemental de ces pratiques reste préoccupant</a>, elles interviennent aussi sur la demande croissante de puces électroniques.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/ossMJYlGi-E?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Mathilde Aubry décrypte la pénurie de semi-conducteurs (Xerfi canal, octobre 2021).</span></figcaption>
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<p>Il reste une solution pour les consommateurs : se tourner vers des produits de seconde main ou reconditionnés. Toutefois, <a href="https://www.statista.com/statistics/1194673/used-or-refurbished-children-products-christmas-shopping-intention-france/">seulement 21 % des Français</a> pensent acheter ce type de produits en plus grande quantité cette année que l’an dernier.</p>
<p>Finalement et au risque de mécontenter les enfants (mais aussi les adultes) avides de jeux intégrant des semi-conducteurs, la pénurie devrait plutôt pousser les consommateurs à s’interroger sur leurs choix… Les impacts environnementaux liés à la fabrication de semi-conducteurs et la nécessité d’en limiter la production sont <a href="https://ecoinfo.cnrs.fr/2010/10/20/le-silicium-les-impacts-environnementaux-lies-a-la-production/">connus depuis longtemps</a>. De plus, nous croulons sous les déchets électroniques : nous en avons, par exemple, produit, en 2019, <a href="https://globalewaste.org/map/">21 kg par personne en France</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/172635/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mathilde Aubry ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les difficultés d’approvisionnement en puces électroniques pourraient amener les smartphones, consoles, ou encore jouets intelligents à manquer sous le sapin cette année.Mathilde Aubry, Enseignant-chercheur en économie, EM NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1666062021-08-24T18:57:38Z2021-08-24T18:57:38ZCovid-19 : la crise dans les ports chinois va-t-elle gâcher Noël ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/417426/original/file-20210823-19-175tgpt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C2%2C1599%2C1092&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le coût du transport d’un conteneur a été multiplié par 10&nbsp;depuis le début de la crise sanitaire.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/imo-un/43021259971">Flickr / International Maritime Organization</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Vous n’avez peut-être jamais entendu parler de Ningbo-Zhoushan, mais si vous trouvez chez vous un objet fabriqué en Chine, il est fort probable qu’il ait été livré depuis cette ville. Chaque année, quelque 29 millions de conteneurs transitent par le <a href="https://www.statista.com/statistics/264171/turnover-volume-of-the-largest-container-ports-worldwide/">deuxième port le plus actif du pays</a>, qui surplombe la mer de Chine orientale à quelque 200 km au sud de Shanghai.</p>
<p>Mi-août, <a href="https://theloadstar.com/global-port-congestion-building-busy-ningbo-terminal-shut-for-sixth-day/">plus de 50 navires</a> attendaient d’accoster. En effet, le terminal de Ningbo-Meishan, par lequel passe environ un cinquième des volumes totaux du port, a été fermé pendant une semaine après qu’un membre du personnel a été testé positif à la Covid-19. Dans l’attente de sa réouverture, de nombreux navires ont été détournés vers d’autres ports.</p>
<p>Or, le cas de Ningbo-Zhoushan ne constitue que la partie émergée de l’iceberg des problèmes que rencontre actuellement transport maritime mondial. La Chine possède huit des dix ports les plus fréquentés au monde, et ils fonctionnent aujourd’hui à <a href="https://splash247.com/ships-divert-from-ningbo-with-no-timeframe-given-for-terminal-to-reopen/">capacité réduite</a> en raison des restrictions sanitaires. De Shanghai à Hongkong en passant par Xiamen, les navires se placent dans de <a href="https://www.straitstimes.com/business/economy/china-port-congestion-worsens-as-ningbo-shuts-for-seventh-day">longues files d’attente</a> pour décharger, et les déviations de Ningbo ne font qu’aggraver la situation.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/416578/original/file-20210817-16-ykandg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Carte de la Chine" src="https://images.theconversation.com/files/416578/original/file-20210817-16-ykandg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/416578/original/file-20210817-16-ykandg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=445&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/416578/original/file-20210817-16-ykandg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=445&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/416578/original/file-20210817-16-ykandg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=445&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/416578/original/file-20210817-16-ykandg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=559&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/416578/original/file-20210817-16-ykandg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=559&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/416578/original/file-20210817-16-ykandg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=559&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Ningbo-Zhoushan, à 200 km au sud de Shanghai, est le deuxième port le plus actif de Chine.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-vector/china-political-map-capital-beijing-national-303543287">Peter Hermes Furian</a></span>
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<p>La côte ouest des États-Unis connaît également une <a href="https://www.seatrade-maritime.com/ports-logistics/over-30-containerships-queued-los-angeleslong-beach-ports">forte congestion</a>. De nombreux navires sont aujourd’hui ancrés dans la baie de San Pedro en Californie, en attendant d’accéder aux ports de Los Angeles et de Long Beach.</p>
<p>Cette situation a fait grimper en flèche les tarifs d’expédition des conteneurs ces dernières semaines. Le coût du transport d’un conteneur de 40 pieds (environ 12 mètres) de la Chine vers l’Europe s’élève actuellement à environ 14 000 dollars (environ 12 000 euros), soit <a href="https://fbx.freightos.com/">dix fois plus qu’en temps normal</a>.</p>
<p>Combien de temps cette situation va-t-elle durer ? Et quels effets secondaires peut-on redouter ?</p>
<h2>Une demande qui repart en flèche</h2>
<p>Notons d’abord que la situation reste sensiblement différente de celle de 2020. À l’époque, les restrictions avaient également affaibli la capacité de manutention des marchandises des ports, mais le problème était moindre car la demande mondiale de produits de consommation avait fortement chuté au début de la pandémie.</p>
<p>Désormais, alors que de nombreux pays ont vacciné un grand nombre de personnes et que leur économie redémarre, la demande est repartie de plus belle et les ports ne parviennent pas à y faire face.</p>
<p>À cela se sont ajoutés d’autres problèmes, notamment le <a href="https://theconversation.com/apres-lever-given-les-implications-du-blocage-du-canal-de-suez-pour-le-commerce-mondial-158137">blocage du canal de Suez</a> au mois de mars dernier. Les navires étaient restés bloqués pendant près d’une semaine après l’échouage de l’énorme porte-conteneurs Ever Given. Ils ont ensuite été soumis à une pression plus forte que d’habitude pour retourner rapidement en Asie après avoir finalement atteint leurs destinations en Europe et en Amérique. En conséquence, nombre d’entre eux <a href="https://jalopnik.com/the-ever-given-saga-ends-while-the-shipping-container-s-1847387421">n’ont pas attendu d’être entièrement chargés</a> de conteneurs d’expédition vides.</p>
<p>Cela a contribué à une pénurie de conteneurs en Asie. Ils sont en conséquence devenus plus chers, ce qui a obligé les compagnies maritimes à appliquer des taux de fret plus élevés pour couvrir le coût.</p>
<p>Dans le même temps, les conditions météorologiques ont causé des problèmes au cours de l’été. Ces dernières semaines, le port de Yangtian, dans le sud de la Chine, et une partie du port de Shanghai ont été temporairement <a href="https://gcaptain.com/typhoons-pose-latest-supply-chain-threat-as-china-ports-shut/">fermés en raison d’alertes aux typhons</a>.</p>
<p>La situation des transports a en outre été aggravée commercialement par les grands importateurs qui ont décidé d’affréter leurs propres navires. C’est par exemple ce qu’a fait <a href="https://www.tradewindsnews.com/containerships/home-depot-charters-containership-for-first-time-amid-disruption-chaos/2-1-1024644">Home Depot</a>, le grand distributeur américain de produits de bricolage, en juin dernier, par exemple.</p>
<h2>Menace sur Noël</h2>
<p>Ces derniers jours, les tarifs ont <a href="https://fbx.freightos.com/">légèrement baissé</a>. L’indice Freightos Baltic est ainsi passé de 10 380 dollars à 9 568 dollars par conteneur de 20 pieds (6 mètres environ). Il reste cependant difficile de savoir si ce retournement sera durable. Tout dépendra des évolutions de la pandémie et des mesures de restriction qui les accompagneront en Chine comme dans les autres grandes nations portuaires.</p>
<p>On peut néanmoins avancer que, dans l’immédiat, la crise du transport maritime viendra alimenter le scénario d’une inflation qui repart à la hausse, les importateurs <a href="https://oecdecoscope.blog/2021/06/19/how-will-rising-shipping-cost-affect-inflation-in-oecd-countries/">répercutant les coûts d’expédition sur les clients</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/416577/original/file-20210817-20-dm6h2r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/416577/original/file-20210817-20-dm6h2r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/416577/original/file-20210817-20-dm6h2r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=175&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/416577/original/file-20210817-20-dm6h2r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=175&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/416577/original/file-20210817-20-dm6h2r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=175&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/416577/original/file-20210817-20-dm6h2r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=220&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/416577/original/file-20210817-20-dm6h2r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=220&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/416577/original/file-20210817-20-dm6h2r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=220&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><a class="source" href="https://fbx.freightos.com/">Évolution du Freightos Index depuis fin 2019.</a></span>
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<p>Si le problème des frais d’expédition perdure, il pourrait en outre alimenter les discussions dans les conseils d’administration sur le rôle de la Chine comme centre manufacturier du monde. Alors que les relations entre la Chine et l’Occident sont déjà au plus mal et que l’on évoque une <a href="https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/mondialisation-le-recentrage-regional-des-economies-se-confirme-476803.html">mondialisation qui cède la place à une régionalisation</a>, le « nearshoring », la fabrication de biens de consommation plus proche de leurs zones de débouchés, pourrait prendre l’ampleur.</p>
<p>Mais avant cela, les retards dans les rotations interrogent sur l’approvisionnement en biens de consommation en vue de Noël. Comme il faut 35 jours pour relier la Chine à l’Europe, les porte-conteneurs doivent en effet se mettre en route vers la mi-octobre au plus tard pour livrer les produits qui seront offerts lors des fêtes de fin d’année.</p>
<p>Autrement dit, plus cette crise du transport maritime se prolonge, plus Noël sera menacé. Cela pourrait devenir un énorme sujet d’actualité dans les semaines à venir, alors que tout le monde attend avec impatience une saison festive « normale » et que de nombreux détaillants ont désespérément besoin d’une bonne fin d’année pour compenser ce qu’ils ont perdu à cause des restrictions liées à la Covid-19.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/166606/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Stavros Karamperidis a reçu des financements de EU Horizon 2020, EPSRC, ESRC, et Innovate UK. </span></em></p>Le transport maritime mondial tourne au ralenti en Asie. Sans amélioration d’ici octobre, les cadeaux pourraient être moins nombreux sous les sapins européens et américains…Stavros Karamperidis, Lecturer in Maritime Economics, University of PlymouthLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1522862020-12-22T19:57:06Z2020-12-22T19:57:06ZPas encore d’idée cadeau pour vos enfants et adolescents ? La recherche en marketing peut vous aider<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/376089/original/file-20201221-23-1vnphrv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C14%2C964%2C651&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La liste au Père Noël reflète-t-elle vraiment les désirs de vos enfants&nbsp;?</span> <span class="attribution"><span class="source">Pressmaster / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Que devrions-nous offrir à nos enfants à l’occasion des fêtes ? Plutôt un jouet ou une expérience, comme une sortie dans un parc d’attractions ou un billet pour un événement ?</p>
<p>Pour répondre à cette question – que certains se posent encore peut-être en cette fin d’année –, nous avons mené un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0167811620300045">travail de recherche</a>, dont les conclusions ont été publiées dans l’International Journal of Research in Marketing, qui compare le niveau de bonheur que les enfants tirent des biens matériels avec le niveau de bonheur qu’ils tirent de leurs expériences.</p>
<h2>Deuxième « secousse » de bonheur</h2>
<p>Il en ressort que tout dépend en réalité de l’âge de l’enfant. En effet, en vieillissant, le fait de donner aux enfants quelque chose qu’ils peuvent vivre au lieu d’un objet tangible les rend plus heureux. Dans le cadre de trois études menées auprès d’enfants et d’adolescents, nous avons ainsi démontré que les enfants de 3 à 12 ans tirent plus de bonheur des biens matériels que des expériences. À l’inverse, les enfants plus âgés (adolescents de 13 à 17 ans) tirent plus de satisfaction de leurs expériences que de leurs biens.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/376091/original/file-20201221-23-u0ykyc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/376091/original/file-20201221-23-u0ykyc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/376091/original/file-20201221-23-u0ykyc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/376091/original/file-20201221-23-u0ykyc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/376091/original/file-20201221-23-u0ykyc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/376091/original/file-20201221-23-u0ykyc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/376091/original/file-20201221-23-u0ykyc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Avant l’âge de 12 ans, les enfants apprécieront davantage un bien matériel en cadeau.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Gutesa/Shutterstock</span></span>
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<p>Certes, les enfants apprécient les expériences du moment (sinon Disneyland n’aurait pas autant de succès), mais lorsqu’on leur demande ce qui les rend heureux, ils ont tendance à nommer leurs possessions plus que leurs expériences passées.</p>
<p>Comment l’expliquer ? Bien après que les enfants aient déballé leurs peluches et jouets, il y aurait encore un rappel physique pour leur donner une « secousse » de bonheur lorsqu’ils vivent l’expérience. Cependant, les jeunes enfants ne peuvent pas voir ou toucher les expériences après qu’elles ont pris fin, ce qui rend plus difficile pour eux l’appréciation des expériences longtemps après avoir vécu l’événement.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/376090/original/file-20201221-13-nkieqj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/376090/original/file-20201221-13-nkieqj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/376090/original/file-20201221-13-nkieqj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/376090/original/file-20201221-13-nkieqj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/376090/original/file-20201221-13-nkieqj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=377&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/376090/original/file-20201221-13-nkieqj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=377&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/376090/original/file-20201221-13-nkieqj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=377&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une journée d’activités ou un voyage pour un week-end sont des cadeaux qui ont l’avantage de faire vivre aux adolescents une seconde « secousse de bonheur » après Noël.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bonsales/Shutterstock</span></span>
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<p>Comme la mémoire se développe avec le temps, il est probable que les enfants, en particulier les jeunes de moins de 13 ans, ne tirent pas autant de bonheur de leurs expériences passées que de leurs possessions. Mais avec l’âge, la création de nouveaux souvenirs et l’exploration de nouveaux centres d’intérêt peuvent devenir bien plus précieuses que l’acquisition de nouveaux biens.</p>
<h2>Compétences sociales</h2>
<p>Outre l’amélioration de la mémoire avec l’âge, les enfants affinent également ce que nous appelons leurs compétences « en matière de <a href="https://www.scienceshumaines.com/quand-l-enfant-acquiert-la-theorie-de-l-esprit_fr_5223.html">théorie de l’esprit</a> ». Ces dernières font référence à la capacité à comprendre que les autres peuvent avoir des croyances différentes des siennes, ce qui est étroitement lié à l’empathie et aux compétences sociales. Ainsi, à mesure que ces aptitudes se développent, les expériences partagées peuvent être mieux comprises pour leur valeur dans l’amélioration des relations avec les autres.</p>
<p>Nous identifions également dans nos travaux les moyens à disposition des parents pour aider leurs jeunes enfants à valoriser leurs expériences. Il existe notamment une solution facile et peu coûteuse : prendre des photos ou des vidéos de promenades en famille, jouer dans la neige et les fêtes d’anniversaire. Les enfants apprécieront en effet probablement davantage ces expériences s’il y a quelque chose qui leur rappelle l’événement. De plus, ils pourront apprendre la valeur sociale des expériences partagées.</p>
<p>Pour ce qui des adolescents, les parents ne doivent pas oublier qu’ils peuvent toujours apprécier de recevoir des cadeaux expérientiels, même si leur liste de souhaits se compose essentiellement d’objets matériels. Une journée d’activités partagées, ou un voyage pour un week-end, sont donc des cadeaux qui ont toutes les chances de ravir leurs destinataires. À quelques jours de Noël, avis aux retardataires !</p>
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<p><em>Cette contribution, publiée en anglais sur le site <a href="https://www.hec.edu/en/knowledge/articles/why-experiences-might-make-better-gifts-older-children">Knowledge@HEC</a>, s’appuie sur l’article de recherche intitulé « Age <a href="https://www.hec.edu/en/knowledge/articles/why-experiences-might-make-better-gifts-older-children">differences in children’s happiness</a> from material goods and experiences : The role of memory and theory of mind » de Tina M. Lowrey, L.J. Shrum, Lan Chaplin, Ayalla A. Ruvio, et Kathleen D. Vohs</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/152286/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Un article de recherche démontre qu’il vaut mieux privilégier un bien matériel pour un enfant de moins de 12 ans et une expérience au-delà.Tina Lowrey, Professeur de marketing, HEC Paris Business SchoolL. J. Shrum, Professeur de marketing, HEC Paris Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1522942020-12-21T19:50:07Z2020-12-21T19:50:07ZPourquoi les enfants croient-ils (ou pas) au Père Noël ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/376132/original/file-20201221-21-1nhyyxl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C11%2C1908%2C1158&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">A l'âge de 5 ans, plus de quatre enfants sur cinq pensent que le Père Noël existe vraiment.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/illustrations/christmas-motif-4695299/">Image by Frauke Riether from Pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>La saison des fêtes de fin d’année est arrivée, avec tous les mythes qui l’accompagnent, au premier rang desquels on trouve bien sûr le Père Noël. C’est à cette époque que l’on raconte aux enfants l’histoire d’un homme éternel, qui habite au Pôle Nord, est au courant de ce que désire chaque enfant tout autour du monde, conduit un traîneau tiré par des rennes volants et entre dans les maisons par la cheminée – cheminée qui n’existe pas chez la plupart des enfants !</p>
<p>Étant donné les multiples absurdités et contradictions de cette histoire, il est surprenant que les enfants, même très jeunes, y adhèrent. Cependant, les recherches menées dans mon laboratoire montrent que <a href="http://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/15248372.2011.554929">83 % des enfants de 5 ans</a> pensent que le Père Noël est une personne réelle. Comment cela s’explique-t-il ?</p>
<h2>Un avantage de l’évolution ?</h2>
<p>Au fondement de ce paradoxe, on retrouve une question fondamentale sur le jeune enfant, considéré comme un être intrinsèquement crédule, par opposition à ce qu’on définirait comme un être rationnel.</p>
<p>Dans un <a href="https://utexas.app.box.com/s/3blu93waj8noakhtkyowhmqyal2xarw8">essai</a> publié en 1995, le célèbre auteur et étholoque <a href="https://richarddawkins.net/">Richard Dawkins</a> a affirmé que les enfants étaient enclins à croire quasiment tout ce qu’on leur dit. Il a même suggéré que ce serait un avantage acquis au cours de l’évolution.</p>
<p>Il l’a illustré de manière très convaincante en prenant <a href="https://utexas.app.box.com/s/3blu93waj8noakhtkyowhmqyal2xarw8">l’exemple</a> d’un jeune enfant vivant près d’un marais infesté d’alligators. Il a fait valoir que l’enfant sceptique – qui évaluerait d’un œil critique les conseils de ses parents l’enjoignant à ne pas aller nager dans ce marais – a beaucoup moins de chances de survivre que celui qui suit sans réfléchir les recommandations de ses parents.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/ce-que-les-enfants-pensent-vraiment-du-pere-noel-196407">Ce que les enfants pensent vraiment du père Noël</a>
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<p>Cette façon de voir les jeunes enfants comme des <a href="http://www.psupress.org/books/titles/0-271-01702-3.html">être crédules</a> est assez largement partagée, notamment par le philosophe du XVIII<sup>e</sup> siècle <a href="https://plato.stanford.edu/entries/reid/">Thomas Reid</a>, et par des spécialistes en psychologie du développement, qui assurent que les enfants sont fortement enclins à <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3507998/">faire confiance</a> à ce que les gens leur disent.</p>
<h2>Pas si différents des adultes ?</h2>
<p>Pourtant, les recherches menées dans mon laboratoire montrent que les enfants sont des <a href="http://www.jstor.org/stable/1132282?seq=1#page_scan_tab_contents">consommateurs d’information rationnels</a> et réfléchis. En réalité, ils ont recours aux mêmes outils que les adultes pour évaluer ce qu’ils doivent croire ou non.</p>
<p>Quels sont donc ces outils et comment pouvons-nous savoir que les enfants les possèdent ? Concentrons-nous sur trois d’entre eux. Le premier est l’attention portée au contexte dans lequel s’intègre l’information. Le deuxième est la tendance à évaluer l’information nouvelle par rapport aux connaissances préalables dont on dispose. Le troisième est la capacité à évaluer l’expertise d’autres personnes.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/8LVonkl-bm8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Si le Père Noël n’existait pas, faudrait-il le dire à ses enfants ? (Brut, 2018).</span></figcaption>
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<p>Arrêtons-nous d’abord à ce qui relève du contexte. Imaginons que vous lisez un article sur une nouvelle espèce de poissons, que nous appellerons des « surnits », dans deux situations très différentes. Dans le premier cas, votre médecin a beaucoup de retard et vous restez dans la salle d’attente à lire un exemplaire du <em>National Geographic</em>, magazine officiel d’une société scientifique.</p>
<p>Dans l’autre cas, vous tombez sur un compte rendu de cette découverte en feuilletant le <em>National Enquirer</em>, un tabloïd américain distribué dans les supermarchés, alors que vous faites la queue à l’épicerie.</p>
<p>C’est grosso modo le type de situation <a href="http://www.jstor.org/stable/4139274?seq=1#page_scan_tab_contents">que nous avons essayé de reproduire avec des enfants</a>. Nous avons abordé avec eux le sujet de ces animaux dont ils n’avaient jamais entendu parler. Avec certains, nous avons partagé la nouvelle en l’insérant dans un cadre fantastique, en leur disant que les dragons ou les fantômes collectionnaient ces poissons. Avec les autres, nous avons évoqué les « surnits » en prenant un contexte scientifique, où ils seraient utilisés par des médecins ou des scientifiques.</p>
<p>Les enfants, de quatre ans à peine, étaient plus enclins à affirmer que les « surnits » existaient vraiment lorsqu’ils en entendaient parler dans un contexte scientifique plutôt que dans un contexte fantastique.</p>
<h2>Du bon usage de l’expertise</h2>
<p>L’une des principales façons dont nous, adultes, apprenons de nouvelles choses, est d’en <a href="http://www.jstor.org/stable/3696543?seq=1#page_scan_tab_contents">entendre parler</a> par d’autres. Imaginez que vous ayez vent de l’existence d’une nouvelle espèce de poisson par l’intermédiaire d’un biologiste marin – plutôt que par votre voisin qui aime surtout parler d’histoires d’extraterrestres. Votre évaluation de l’expertise et de la fiabilité de ces sources consolidera ou non votre conviction de la réalité de ce poisson.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-cadeaux-font-ils-vraiment-le-bonheur-des-enfants-175878">Les cadeaux font-ils vraiment le bonheur des enfants ?</a>
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<p>Dans une autre recherche, <a href="http://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/15248372.2015.1061529">nous avons présenté</a> aux enfants de nouvelles espèces d’animaux, tantôt plausibles (comme un poisson vivant dans l’océan), tantôt incroyables (par exemple un poisson vivant sur la lune), ou improbables (un poisson aussi gros qu’une voiture). Puis, nous leur avons offert le choix soit de vérifier par eux-mêmes que l’espèce existe, soit de le demander à quelqu’un. On leur a aussi fait écouter les comptes rendus d’un gardien de zoo, pour le rôle de l’expert, ou d’un chef cuisinier (dans le rôle du personnage non expert).</p>
<p>Nous avons constaté que les enfants ajoutaient foi aux espèces plausibles et rejetaient les espèces incroyables. Ils prenaient leur décision en comparant les nouvelles informations à leurs connaissances préalables. Pour les animaux improbables – ceux qui pouvaient exister mais qui étaient rares ou étranges – les enfants avaient beaucoup plus de chances d’y croire lorsque le gardien du zoo affirmait qu’ils existaient que lorsque le chef cuisinier le faisait.</p>
<p>En d’autres termes, les enfants font appel à leur expertise, tout comme les adultes.</p>
<h2>L’implication des parents</h2>
<p>Si les enfants sont si intelligents, pourquoi donc croient-ils au Père Noël ?</p>
<p>La raison est simple : leurs parents et bien d’autres personnes se donnent beaucoup de mal pour entretenir le mythe du Père Noël. Une étude récente a évalué que <a href="http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0885201416300375">84 % des parents</a> emmenaient leur enfant rencontrer deux sosies du Père Noël au moins pendant la saison des fêtes.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1202733411670073345"}"></div></p>
<p>« The Elf on the Shelf » – initialement un album parlant de ces lutins qui regardent si les enfants sont sages et en informent le Père Noël – est désormais une franchise multimillionnaire. Et il existe des <a href="https://about.usps.com/holidaynews/letters-from-santa.htm">services postaux</a> qui assurent des réponses personnalisées aux lettres des enfants.</p>
<p>Pourquoi nous sentons-nous obligés de faire tant d’efforts ? Pourquoi l’oncle Jack insiste-t-il pour monter faire quelques pas sur le toit la veille de Noël et y faire tinter des clochettes ?</p>
<p>Tout simplement parce que les enfants sont loin d’être irréfléchis et ne croient pas tout ce qu’on leur dit. Nous, les adultes, devons donc multiplier les preuves : les cloches sur le toit, les pères Noël vivants au centre commercial, la carotte à moitié mangée le matin de Noël.</p>
<h2>Les indices évalués par les enfants</h2>
<p>Compte tenu de tous ces efforts, il serait presque irrationnel de la part des enfants de ne pas croire au Père Noël. En adhérant au mythe, ils exercent en fait leurs capacités de réflexion scientifique.</p>
<p>Tout d’abord, ils évaluent leurs sources d’information. Comme le montre un <a href="https://labs.la.utexas.edu/woolley/">projet</a> mené dans mon laboratoire, ils se fient plus facilement à un adulte qu’à un enfant pour juger de ce qui est réel ou non.</p>
<p>Ensuite, pour statuer sur l’existence du Père Noël, ils se réfèrent à un certain nombre de preuves, comme le verre de lait vide et les biscuits retrouvés à moitié mangés le matin de Noël. Concernant d’autres êtres fantastiques, comme les sorcières d’Halloween, les enfants utilisent des indices similaires <a href="http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1467-7687.2004.00366.x/full">pour étayer</a> leurs croyances.</p>
<p>Enfin, à mesure que leurs capacités de compréhension s’étoffent, les enfants <a href="http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0885201414000720">s’arrêtent</a> sur sur certains des points absurdes du mythe du Père Noël : comment un homme corpulent peut-il bien descendre dans une cheminée étroite, comment des animaux pourraient-ils voler…</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1248461260653342721"}"></div></p>
<p>Certains parents se demandent s’ils nuisent à leurs enfants en leur relayant la croyance au Père Noël. Des philosophes et des blogueurs ont mis en avant un certain nombre d’arguments contre la perpétuation d’un « mensonge », certains assurant que cela pouvait induire une <a href="http://theweek.com/articles/664507/stop-lying-kids-about-santa">méfiance permanente</a> envers les parents et les autres autorités.</p>
<p>Alors que faire ?</p>
<p>Rien ne prouve que la <a href="http://link.springer.com/article/10.1007/BF02253287">croyance</a> dans le Père Noël puisse affecter de manière significative la confiance que les enfants ont en leurs parents. Par ailleurs, non seulement ils ont en main tous les outils nécessaires pour découvrir la vérité, mais le fait de s’intéresser au Père Noël peut aussi leur donner une chance d’exercer ces capacités.</p>
<p>Donc, si vous pensez qu’il est amusant pour vous et votre famille de convier la figure du Père Noël à vous accompagner pendant les fêtes, vous ne devriez pas hésiter. Vos enfants s’en sortiront bien. Et peut-être même apprendront-ils quelque chose.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/152294/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jacqueline D. Woolley a reçu des fonds du National Institute of Child Health and Human Development.</span></em></p>Raconter aux enfants l’histoire du Père Noël revient-il à sous-estimer leurs compétences ? Et si cela leur permettait au contraire d’exercer leur esprit critique ?Jacqueline D. Woolley, Professor and Department of Psychology Chair, The University of Texas at AustinLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1520262020-12-21T19:40:33Z2020-12-21T19:40:33ZUne brève histoire du chocolat et de ses surprenantes vertus pour la santé<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/374774/original/file-20201214-13-1i2x020.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C3679%2C2467&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pour allier plaisir et santé, optons pour le chocolat noir. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/4ewSZirtA7U">Sigmund / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le chocolat sous toutes ses formes est un plaisir, que comme beaucoup, je m’octroie presque quotidiennement. Mais le <a href="https://www.wired.com/2010/07/0707chocolate-introduced-europe/">chocolat tel qu’on le déguste aujourd’hui est très différent</a> de celui qui était disponible en Europe, en provenance d’Amérique du Sud, vers le XVI<sup>e</sup> siècle.</p>
<p>Pour le peuple aztèque, le cacao était consommé sous forme de boisson et revêtait une grande importance culturelle et médicinale. Il était presque considéré comme une <a href="https://www.mdpi.com/2072-6643/5/5/1573">panacée</a> qui pouvait guérir diverses affections, notamment la fièvre, la diarrhée, la fatigue, l’angine et la carie dentaire.</p>
<p>La croyance aztèque selon laquelle le cacao était un élixir divin était probablement due à l’idée qu’il était un cadeau de Quetzalcoatl, le dieu aztèque du <a href="https://www.ancient.eu/Quetzalcoatl/">vent et de la sagesse</a>. C’est peut-être la raison pour laquelle le botaniste suédois Carl Linnaeus a nommé la plante <a href="http://powo.science.kew.org/taxon/urn:lsid:ipni.org:names:320783-2"><em>Theobroma cacao</em></a>, d’après les mots grecs anciens « theos » signifiant dieu et « broma » signifiant nourriture – « nourriture des dieux ».</p>
<p>Il est cependant plus probable que la raison de tout bénéfice potentiel soit due à la forte concentration de polyphénols trouvés dans le cacao naturel – connus sous le nom de flavanols de cacao. Les polyphénols sont des composés antioxydants présents dans les fruits et légumes qui protègent l’organisme contre les radicaux libres, dont un excès a été lié à <a href="https://link.springer.com/content/pdf/10.1007/s12291-014-0446-0.pdf">diverses maladies</a>. Ainsi, même si le cacao n’est pas la panacée, les recherches montrent qu’il est plus qu’un simple plaisir coupable.</p>
<h2>Un passé riche</h2>
<p>Le responsable présumé de l’intégration du cacao en Europe est <a href="https://academic.oup.com/jn/article/130/8/2057S/4686320">Hernan Cortes</a>, un conquistador espagnol (soldat et explorateur) de retour du « Nouveau Monde ».</p>
<p>En 1518, Cortes et ses hommes arrivèrent dans ce qui est aujourd’hui le Mexique et se sont dirigés vers la capitale aztèque de Tenochtitlan. Pendant leur séjour au Mexique, les Espagnols ont dégusté une boisson amère appelée <a href="http://nahuatlstudies.blogspot.com/2015/01/chicolatl-not-xocolatl.html%22">« chikolatl »</a>. Cette boisson contenait des fèves de cacao torréfiées qui étaient écrasées, puis bouillies dans de l’eau avec des épices et du piment.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/354657/original/file-20200825-18-a0bzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Une femme aztèque qui fait du chocolat" src="https://images.theconversation.com/files/354657/original/file-20200825-18-a0bzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/354657/original/file-20200825-18-a0bzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=982&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/354657/original/file-20200825-18-a0bzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=982&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/354657/original/file-20200825-18-a0bzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=982&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/354657/original/file-20200825-18-a0bzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1234&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/354657/original/file-20200825-18-a0bzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1234&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/354657/original/file-20200825-18-a0bzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1234&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Une femme aztèque faisant couler du chocolat d’un récipient à un autre.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/History_of_chocolate#:~:text=The%20Aztecs%20believed%20that%20cacao,with%20spices%20or%20corn%20puree.">Wikimedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La première exposition à la boisson n’a pas été une réussite pour les Espagnols, qui l’ont jugée trop amère et presque désagréable. Mais ayant vu Montezuma II, roi des Aztèques, consommer la boisson environ <a href="https://academic.oup.com/jn/article/130/8/2057S/4686320">50 fois par jour</a>, Cortes s’est intéressé au potentiel du cacao et a cherché à le ramener en Espagne après sa conquête.</p>
<p>Une fois en Europe, les fèves de cacao ont été broyées et mélangées à du miel et du sucre, devenant ainsi une boisson populaire parmi <a href="https://www.nationalgeographic.com/history/magazine/2016/01-02/chocolate-in-europe/#:%7E:text=Sacred%20to%20the%20Maya%20in,drink%20in%20all%20of%20Europe.&text=In%20May%201502%2C%20Christopher%20Columbus,voyage%20to%20the%20New%20World">l’élite</a>. Finalement, au XIX<sup>e</sup> siècle, la première tablette de chocolat a été fabriquée par <a href="http://museums.bristol.gov.uk/narratives.php?irn=13619">Joseph Fry and Sons</a>, créant ce que nous connaissons aujourd’hui sous le nom de chocolat.</p>
<h2>De la fève à la tablette</h2>
<p>Alors que les fèves de cacao sous leur forme naturelle contiennent une grande quantité de composés antioxydants, les processus impliqués dans la transformation des fèves en barres chocolatées réduisent la teneur en flavanol du cacao, diminuant ainsi les propriétés antioxydantes du cacao.</p>
<p>En effet, la <a href="https://pubs.acs.org/doi/abs/10.1021/jf801670p?casa_token=lcO6BpbsFZEAAAAA%3Ak45pRr8FRUV83oa7rD8arYFKAvJE4sk_IGqbU7RdedxGho_i2xcdk_-C70Hqw2YTiWtQgf0RdkijiA&">recherche</a> montre que la poudre de cacao naturelle contient presque dix fois plus de flavanols que le cacao qui a subi ce processus.</p>
<p>Quant aux tablettes de chocolat, le chocolat noir contient presque toujours une plus grande concentration de flavanols que le <a href="https://pubs.acs.org/doi/abs/10.1021/jf201398t?casa_token=6LmaTxFWPrEAAAAA:4ER160pNryCfJUt0_W-eOwTlUkheJzlT_lGOsZR8rYxLgWNr6s61DYMClatYO0R5gUpCYEhu7D8PUA">chocolat au lait</a>. Par exemple, une portion de 25 g de chocolat noir à fort pourcentage (plus de 75 %) peut contenir plus de 80 mg de flavanols de cacao, contre environ 10 mg ou moins par 25 g pour une barre de chocolat au lait.</p>
<h2>Les vertus du chocolat pour la santé</h2>
<p>Des recherches ont montré que le chocolat noir et les produits à base de cacao contenant au moins 200 mg de flavanols de cacao peuvent améliorer <a href="https://efsa.onlinelibrary.wiley.com/doi/pdf/10.2903/j.efsa.2014.3654">l’élasticité des vaisseaux sanguins</a>, ce qui favorise la circulation sanguine. Et la consommation régulière de flavanols de cacao – <a href="https://journals.lww.com/jhypertension/Abstract/2015/02000/Cocoa_consumption_dose_dependently_improves.15.aspx">même à des doses de 80 mg par jour</a> – améliore la capacité des vaisseaux sanguins à se dilater ou à s’étendre, ce qui aide le corps à réguler la pression sanguine et le flux sanguin vers les organes.</p>
<p>On pense que cela est dû au fait que les flavanols de cacao augmentent la concentration d’oxyde nitrique bioactif. Il s’agit d’une molécule impliquée dans l’élargissement des vaisseaux sanguins qui a également des propriétés anti-inflammatoires et <a href="https://www.cvphysiology.com/Blood%20Flow/BF011">réduit la formation de caillots sanguins</a>, ce qui peut avoir des <a href="https://www.sciencedaily.com/releases/2015/09/150910110832.htm">effets bénéfiques sur la pression sanguine</a>.</p>
<p>Les flavanols de cacao peuvent également augmenter le flux sanguin vers le <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27849355/#:%7E:text=Abstract,BNDF%20levels%20(in%20animals).">cerveau</a>, ce qui peut améliorer les <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/0269881109106923?casa_token=cdaHPGD2n2UAAAAA:uI-a0xeSwbhUs_VUfQ_wFoPbC1lHYY4W_WtGSqiAUqd7Ahecp8mrqXPETtrJZ7fUFLZh1ovP5PA">performances cognitives</a>. Et ils pourraient contribuer à réduire le <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3575938/">déclin cognitif</a> en protégeant le cerveau des dommages causés par les radicaux libres.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Chocolat aux fèves de cacao" src="https://images.theconversation.com/files/354651/original/file-20200825-15-yun97v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=49%2C57%2C5414%2C3579&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/354651/original/file-20200825-15-yun97v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/354651/original/file-20200825-15-yun97v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/354651/original/file-20200825-15-yun97v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/354651/original/file-20200825-15-yun97v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/354651/original/file-20200825-15-yun97v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/354651/original/file-20200825-15-yun97v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le chocolat sous toutes ses formes.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/chocolate-cacao-beans-158318549">Andreas Kraus/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Outre leurs avantages cardiovasculaires et cognitifs, les flavanols de cacao pourraient également contribuer à améliorer la <a href="https://journals.humankinetics.com/view/journals/ijsnem/aop/article-10.1123-ijsnem.2020-0057/article-10.1123-ijsnem.2020-0057.xml">récupération musculaire</a> après un <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s40279-017-0849-1">exercice physique intense</a>, grâce à leurs puissants <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4696435/">effets antioxydants et anti-inflammatoires</a>. Une <a href="https://journals.humankinetics.com/view/journals/ijsnem/aop/article-10.1123-ijsnem.2020-0057/article-10.1123-ijsnem.2020-0057.xml">étude récente</a> a montré qu’une seule dose élevée de 1245 mg de flavanols de cacao (15 g de poudre de cacao à forte teneur en flavanols) améliorait légèrement la récupération musculaire.</p>
<p>La prochaine fois que vous aurez envie de chocolat, choisissez une variété noire à fort pourcentage ou une poudre de cacao naturelle pour ses bienfaits potentiels sur la santé.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/152026/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Liam Corr ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En cette période de fêtes, beaucoup d’entre nous allons craquer pour des chocolats. Essayons de préférer le chocolat noir !Liam Corr, PhD Researcher in the Department of Health Sciences, University of HuddersfieldLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1514312020-12-20T21:52:47Z2020-12-20T21:52:47ZJésus a-t-il échappé à une tentative de meurtre alors qu’il était bébé ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/376013/original/file-20201220-15-jjvdii.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=64%2C7%2C4740%2C4085&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Nicolas Poussin, « Le massacre des Innocents », vers 1630. Musée Condé, Chantilly.
</span> </figcaption></figure><p>L’évangile selon Matthieu nous raconte un fameux épisode de la vie de Jésus, juste après sa naissance : le massacre des Innocents. Le roi de Judée de l’époque, Hérode le Grand (vers 72-4 av. J.-C.), apprend, par des mages arrivés à Jérusalem, qu’un « roi des Juifs » vient de naître. Il fait aussitôt rechercher l’enfant car il voit en lui un concurrent susceptible de lui ravir son trône. Il « entra dans une grande fureur et envoya tuer, dans Bethléem, tous les enfants jusqu’à deux ans », écrit Matthieu (Mt 2, 16). Mais Joseph, père de Jésus, prévenu par un ange, parvient à prendre la fuite en Égypte, en compagnie de Marie et du bébé. Ils <a href="https://www.info-bible.org/lsg/40.Matthieu.html">ne reviennent en Judée qu’après la mort d’Hérode, quelques mois plus tard</a>.</p>
<p>On peut remarquer que l’histoire du massacre cadre bien avec ce que l’on sait, par ailleurs, de la cruauté prêtée à Hérode. Le roi, peut-être atteint d’une forme de délire paranoïaque dans les dernières années de son règne, était allé jusqu’à faire exécuter trois de ses propres enfants : Aristobule et Alexandre en 7 av. J.-C., puis Antipater en 4 av. J.-C., comme le raconte <a href="https://www.lhistoire.fr/livres/un-nouvel-h%C3%A9rode">l’historien antique Flavius Josèphe</a>.</p>
<p>L’Hérode historique était donc bien un massacreur de jeunes princes innocents et le récit de la tuerie de Bethléem se fonde sur un contexte qui le rend vraisemblable, mais non véridique. Pourquoi donc avoir inventé cette histoire ?</p>
<h2>Œdipe, le bébé pendu par les pieds</h2>
<p>D’anciens mythes grecs, bien connus à l’époque de Jésus, racontaient comment un enfant condamné à mort finissait tout de même par s’en sortir après avoir déjoué les tentatives de meurtre de ses ennemis. </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/376016/original/file-20201220-19-l9t6pu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/376016/original/file-20201220-19-l9t6pu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/376016/original/file-20201220-19-l9t6pu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/376016/original/file-20201220-19-l9t6pu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/376016/original/file-20201220-19-l9t6pu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/376016/original/file-20201220-19-l9t6pu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/376016/original/file-20201220-19-l9t6pu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Oedipe abandonné, enluminure de la Fleur des Histoires de jean mansel, seconde moitié du XVe siècle.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>La légende d’Œdipe constituait le prototype de ces récits, sorte de roman d’apprentissage du futur chef, <a href="https://www.leslibraires.fr/livre/1319766-dipe-ou-la-legende-du-conquerant-marie-delcourt-les-belles-lettres">comme l’a montré Marie Delcourt (<em>Œdipe ou la légende du conquérant</em>, Liège, Paris, Les Belles Lettres, 1981)</a>.</p>
<p>Laïos, roi de Thèbes, apprend par un oracle qu’il sera tué par son propre fils. Il tente d’empêcher que la prophétie ne se réalise, en cessant toute relation sexuelle avec Jocaste, sa femme. Mais celle-ci, vexée, le fait boire et s’unit à lui alors qu’il est ivre. Neuf mois plus tard, lorsqu’elle accouche, Laïos arrache l’enfant des bras de sa mère. Il escalade une montagne, voisine de Thèbes, et y abandonne le bébé, après l’avoir pendu par les pieds à un arbre. Laïos a cloué les talons de l’enfant avant de lui passer une corde autour des mollets. A priori aucune chance que le petit survive. Il doit rapidement mourir de soif ou dévoré par des bêtes sauvages.</p>
<p>Sauf que c’est évidemment le contraire qui se produit, sans quoi, il n’y aurait pas de légende. Le mythe raconte une histoire qui échappe à la logique des hommes. Il s’agit de montrer que le bébé n’est pas n’importe qui : il est le protégé d’un grand dieu.</p>
<p>Un berger, passant sur la montagne, découvre l’enfant, le libère et l’emmène dans sa ville : Corinthe. Le roi local se désespérait justement de ne pas avoir de fils. Il adopte le petit et le nomme Œdipe, c’est-à-dire « Pieds-enflés », en raison des blessures infligées par les clous de Laïos. L’enfant est sain et sauf. Il a survécu, contre toute attente. Le bébé aux pieds cloués est maintenant qualifié pour un brillant avenir de chef.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/376017/original/file-20201220-13-m1iokn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/376017/original/file-20201220-13-m1iokn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=807&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/376017/original/file-20201220-13-m1iokn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=807&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/376017/original/file-20201220-13-m1iokn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=807&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/376017/original/file-20201220-13-m1iokn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1014&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/376017/original/file-20201220-13-m1iokn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1014&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/376017/original/file-20201220-13-m1iokn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1014&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Frederick Goodal, « La découverte de Moïse », 1862.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/7/7a/The_Finding_of_Moses.jpg">Wikimedia</a></span>
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</figure>
<h2>Romulus et Moïse, les bébés sauvés des eaux</h2>
<p>De la même manière, dans la légende romaine, le petit Romulus et son frère Rémus sont abandonnés sur le Tibre avant d’être sauvés par une louve, animal envoyé par le dieu Mars, qui vient les allaiter. Le divin père de Romulus, futur fondateur et roi de Rome, n’a pas l’intention de voir périr son enfant. Romulus a une mission terrestre à accomplir : il est prédestiné par les Cieux, <a href="http://remacle.org/bloodwolf/historiens/Tite/index.htm">comme le suggère l’historien latin Tite-Live</a>.</p>
<p>Ce schéma légendaire se trouve également dans la Bible, jetant un pont entre la mythologie gréco-romaine et le judaïsme. Le petit Moïse échappe de justesse à ses assassins égyptiens, envoyés par le pharaon, tyran cruel, qui veut faire tuer tous les fils des Hébreux (Exode 1). Sa mère l’abandonne sur le Nil dans une caisse en papyrus. Heureusement, le bébé est sauvé des eaux par la fille du pharaon qui le découvre et l’adopte comme son fils. Étonnant retournement ! Moïse accède au statut de prince d’Égypte, de même qu’Œdipe est recueilli par le roi de Corinthe dont il devient le fils adoptif. Le schéma narratif de l’enfant persécuté qui s’en sort finalement est un modèle universel.</p>
<h2>Le storytelling de l’enfant persécuté</h2>
<p>Dans les années 50 av. J.-C., ce même storytelling est exploité par Jules César qui raconte qu’il a échappé, dans sa jeunesse, aux persécutions du dictateur romain Sylla, <a href="http://remacle.org/bloodwolf/historiens/suetone/cesar.htm">comme le rapporte l’historien latin Suétone (<em>Vie de César</em>, 1)</a>.</p>
<p>Plus proche encore chronologiquement de Jésus, l’empereur Auguste, reprend à son tour le même schéma légitimateur. « Quelques mois avant la naissance d’Auguste, il se produisit à Rome, dans un lieu public, un prodige annonçant que la nature allait enfanter un roi pour le peuple romain : le Sénat épouvanté décréta que l’on n’élèverait aucun des enfants mâles nés cette année-là », <a href="http://remacle.org/bloodwolf/historiens/suetone/auguste.htm">écrit Suétone (<em>Vie d’Auguste</em>, 94)</a>.</p>
<p>Mais la décision du Sénat n’est pas appliquée, car les femmes de plusieurs sénateurs sont alors enceintes. C’est ainsi que le futur Auguste aurait finalement été sauvé.</p>
<p>Il est intéressant de remarquer que Suétone nous donne le nom de l’inventeur de cette fable : Julius Marathus, affranchi et conseiller d’Auguste, rédacteur du Journal officiel de l’Empire. Il s’agit donc bien d’un mythe officiel dont la signification est politico-religieuse. Le storytelling de l’enfant qui échappe au meurtre est un stéréotype servant à légitimer le leader destiné à fonder de nouvelles règles, normes sociales et institutions : Moïse avec les Tables de la Loi, Auguste avec l’instauration du régime impérial.</p>
<p>Il pouvait donc être intéressant pour Matthieu d’offrir à ses lecteurs une nouvelle version de ce schéma narratif, dès lors qu’il cherchait à présenter Jésus comme un législateur et un réformateur, venu refonder la société juive. Jésus annonce l’émergence d’un monde nouveau, et il possède toute légitimité pour le faire. C’est ce que signifie l’histoire du massacre des Innocents, calquée sur les récits légitimateurs du passé. Jésus est le nouveau Moïse, ou encore l’Auguste des Juifs, fondateur d’une ère nouvelle.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/376018/original/file-20201220-13-6yjhlz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/376018/original/file-20201220-13-6yjhlz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/376018/original/file-20201220-13-6yjhlz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/376018/original/file-20201220-13-6yjhlz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/376018/original/file-20201220-13-6yjhlz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/376018/original/file-20201220-13-6yjhlz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/376018/original/file-20201220-13-6yjhlz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Friedrich Herlin de Nördlingen, Circoncision de Jésus. Retable de Rothenburg, 1466.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/7/76/CirconcisionRothenburg.jpg">Wikimedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Jésus exfiltré en Égypte ou circoncis à Jérusalem ?</h2>
<p>Mais le récit du massacre est en contradiction avec l’épisode de la circoncision de Jésus au Temple, « huit jours » après sa naissance, relatée par l’évangile selon Luc (Lc 2, 21). Comment peut-on imaginer que Jésus puisse aller se faire circoncire à Jérusalem, capitale du méchant roi Hérode, une semaine à peine après avoir échappé à sa tentative de meurtre ? Pourquoi la menace aurait-elle disparu tout d’un coup ?</p>
<p>Luc ignore le massacre des Innocents, tandis que l’incohérence entre les évangiles de Matthieu et Luc nous prouve que <a href="https://www.lhistoire.fr/livres/j%C3%A9sus-aux-quatre-visages">divers récits concurrents sur la naissance du Christ ont circulé parallèlement</a>.</p>
<hr>
<p><em>Christian-Georges Schwentzel a écrit <a href="https://www.editions-vendemiaire.com/catalogue/christian-georges-schwentzel/les-quatre-saisons-du-christ-christian-georges-schwentzel/">« Les Quatre saisons du Christ, un parcours politique dans la Judée romaine »</a>, éditions Vendémiaire, 2018</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/151431/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian-Georges Schwentzel ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si l’on en croit l’évangile selon Matthieu, Jésus aurait échappé à une tentative d’assassinat, juste après sa naissance, à Bethléem. Ce fameux épisode est-il historique?Christian-Georges Schwentzel, Professeur d'histoire ancienne, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1520472020-12-18T14:53:44Z2020-12-18T14:53:44ZMangerez-vous de la tourtine à Noël ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/375837/original/file-20201218-21-nhmcv9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4757%2C2667&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">poutinetort</span> </figcaption></figure><p>J’ai vu récemment une invention culinaire qui m’a laissée songeuse, la <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1756235/restaurant-pate-viande-patates-saguenay">tourtine</a>. Le plat, comme son nom l’indique, est un hybride de tourtière et de poutine. Du fromage en grains et de la sauce typiques de la poutine sont ajoutés à la garniture de la tourtière, en plus d’ingrédients festifs comme la viande effilochée et l’incontournable foie gras.</p>
<p>La tourtine connaît un succès tel que ses créateurs, les propriétaires du restaurant Baron BBQ, à Saint-Ambroise au Saguenay, ont été dépassés par la demande. Ils <a href="https://www.tvanouvelles.ca/2020/12/11/la-folie-de-la-tourtine-sempare-des-quebecois">ont dû réorienter toute leur production et ont doublé leur personnel</a>.</p>
<p>Au-delà du <em>buzz</em> marketing (que l’on souhaite à tous les acteurs de la restauration en ces temps de crise), le phénomène demande à être interprété. Le plat, proposé juste au moment des fêtes de fin d’année, semble réinventer deux de nos classiques culinaires. Comment comprendre cette réinvention, quel rapport traduit-elle au patrimoine gastronomique québécois ?</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/en-temps-de-pandemie-voici-ce-que-dit-notre-engouement-pour-les-conserves-146636">En temps de pandémie, voici ce que dit notre engouement pour les conserves</a>
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<p>Dans le cadre de mes recherches, je m’intéresse aux représentations culturelles de la nourriture et de la cuisine. Comment cet imaginaire gastronomique résonne-t-il avec nos identités individuelles et collectives, avec nos aspirations et nos quêtes de sens ?</p>
<h2>Pas le premier croisement culinaire</h2>
<p>La tourtine n’est pas le premier exemple d’un mets qui combine des préparations existantes. Dans le registre populaire, le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pizza-ghetti">pizzaghetti</a> a connu des heures fastes il y a quelques décennies dans les restaurants de cuisines dites « italienne et canadienne ». Une vérification sur Internet permet de constater que cette invention québécoise est toujours proposée par plusieurs établissements et qu’on en trouve même dans la section des produits surgelés des supermarchés.</p>
<p>Un autre croisement inventif, le <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Cronut">cronut</a>, connaît un succès qui ne se dément pas depuis 2013. C’est une pâtisserie dont la pâte feuilletée comme celle d’un croissant est passée à la friture et garnie comme un beigne – évidemment appelé <em>donut</em> aux États-Unis… et en France. Le cronut est à l’image de son créateur Dominique Ansel, un Français vivant aux États-Unis qui a opté pour le métissage des traditions.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/374868/original/file-20201214-20-pgsgqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/374868/original/file-20201214-20-pgsgqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/374868/original/file-20201214-20-pgsgqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/374868/original/file-20201214-20-pgsgqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/374868/original/file-20201214-20-pgsgqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/374868/original/file-20201214-20-pgsgqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/374868/original/file-20201214-20-pgsgqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un cronut d’octobre fourré de confiture de canneberges maison et de ganache de pistache de la boulangerie Dominique Ansel New York.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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<p>Le croisement de préparations culinaires distinctes est toujours révélateur. Le pizzaghetti dévoile sans doute un enthousiasme naïf face aux traditions gastronomiques italiennes que nous n’hésitions pas à jeter pêle-mêle dans la même assiette. Le cronut présente quant à lui la rencontre de la France et du Nouveau Monde, de la longue durée historique et de l’innovation, de la boulange artisanale et du snack.</p>
<h2>Un mets traditionnel</h2>
<p>Mais que dit la combinaison que propose la tourtine ? Pour le comprendre, il faut examiner les deux plats qui la composent. La tourtière autant que la poutine sont emblématiques de la tradition culinaire du Québec, et on peut même y voir des plats nationaux. Elles portent cependant des significations bien distinctes.</p>
<p><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tourti%C3%A8re">La tourtière</a> constitue une des pièces de résistance de nos tables de Noël et du Nouvel An. Elle repose sur les ressources locales et, selon la région, on peut la préparer à la viande d’élevage, au gibier ou même au poisson. Elle semble ainsi liée à un territoire, et même à un terroir.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/374863/original/file-20201214-19-1sw9iio.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/374863/original/file-20201214-19-1sw9iio.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/374863/original/file-20201214-19-1sw9iio.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/374863/original/file-20201214-19-1sw9iio.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/374863/original/file-20201214-19-1sw9iio.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/374863/original/file-20201214-19-1sw9iio.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/374863/original/file-20201214-19-1sw9iio.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La tourtière est un mets incontournable du temps des fêtes et peut certainement être hissé au rang de plat national québécois.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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<p>De plus, le mets suscite des débats, ce qui est un signe de son importance culturelle. Son nom vient-il vraiment des oiseaux aujourd’hui disparus appelés tourtes qui servaient supposément à la confectionner, ou plutôt du récipient dans lequel était moulé la pâte ? Son origine est-elle française ou britannique ? La vraie tourtière est-elle celle du Lac-Saint-Jean, qui contient des patates, celle qui ne renferme que du hachis de porc et de veau (parfois appelée « pâté à la viande »), ou encore la cipâte du Bas-du-Fleuve ? Il y a autour de la tourtière un travail des représentations qui indique <a href="https://www.erudit.org/en/journals/rabaska/2012-v10-rabaska0402/1013567ar.pdf">que le mets occupe une vraie place dans la gastronomie québécoise</a>.</p>
<p>C’est aussi un plat qui, à défaut d’être cuisiné dans les foyers, est encore aujourd’hui très aimé par les consommateurs, surtout lors des Fêtes. Le marché saisonnier de la tourtière prête-à-manger (fraîche ou congelée) traverse les catégories, rassemblant des producteurs artisanaux, des joueurs intermédiaires comme les épiceries de niche, et évidemment le secteur de la grande distribution. Le mets est un incontournable et peut certainement être hissé au rang de plat national québécois.</p>
<h2>Un plat canaille</h2>
<p>Le cas de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Poutine_(plat)">poutine</a> est bien différent. Son histoire est beaucoup plus récente, puisqu’elle naît à la fin des années 50 dans la région agricole du Centre-du-Québec, berceau du fromage en grains qui en est l’ingrédient indispensable. Elle ne devient populaire que dans les années 80, à la faveur d’une diffusion urbaine qui en change aussi les conditions de consommation. Elle acquiert à ce moment le statut iconique qui est encore le sien : c’est un aliment de restauration rapide sans prétention et même un peu canaille, une éponge à bière que l’on engloutit volontiers après une soirée arrosée avant d’aller dormir.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/374862/original/file-20201214-17-1dolxs0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/374862/original/file-20201214-17-1dolxs0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/374862/original/file-20201214-17-1dolxs0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/374862/original/file-20201214-17-1dolxs0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/374862/original/file-20201214-17-1dolxs0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/374862/original/file-20201214-17-1dolxs0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/374862/original/file-20201214-17-1dolxs0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La poutine est un aliment de restauration rapide, convivial, joyeux et associé à la vie nocturne.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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<p>Les significations que porte la poutine sont très éloignées de celles de la tourtière. Elle est empreinte d’un certain imaginaire rural <em>vintage</em>, mais aussi de valeurs telles que l’américanité, l’excès joyeux et la vie nocturne. Bien que son histoire soit récente, la poutine fait désormais partie du patrimoine culinaire québécois.</p>
<h2>Quand la modernité rencontre la tradition</h2>
<p>Qu’arrive-t-il quand on mêle la tourtière et la poutine ? Ce geste peut heurter les puristes, et je ne suis pas convaincue qu’il soit gastronomiquement probant. Mais il a toutefois l’intérêt de conjoindre des représentations liées à chacun des plats : l’histoire de plus longue durée rencontre la modernité, le repas familial croise la collation nocturne prise entre amis. La tourtine modernise la tourtière, ou elle traditionnalise la poutine.</p>
<p>Mais bien sûr tout cela n’est pas simple. L’invention culinaire est une réinterprétation du patrimoine, mais elle manifeste un désir plutôt qu’un fait, et il faut y voir un travail de l’imaginaire bien plus que des significations arrêtées.</p>
<p>La tourtine, et son succès auprès des consommateurs, révèlent peut-être qu’en cette année pandémique, nous sentons le besoin de repenser les plats emblématiques du temps des fêtes. Il n’y aura pas de grandes tablées familiales et de ripailles interminables. Nos festins seront plus modestes. Pour certains, les fêtes seront marquées par des conditions personnelles et professionnelles difficiles, voire par la maladie ou le deuil.</p>
<p>Dans ce contexte, nous voulons garder la tradition qui nous lie au passé, si précieuse et rassurante en des temps incertains. Mais pourquoi ne pas y ajouter quelque chose de ludique, un peu d’humour et d’invention, l’excès joyeux et le souvenir des repas amicaux pris au-dehors… C’est ce que propose la tourtine.</p>
<p>Je serais bien étonnée qu’elle devienne notre nouveau plat national, mais pour l’instant, elle répond à un besoin. J’ai presque envie de dire qu’elle donne à rêver.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/152047/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Geneviève Sicotte a reçu du financement du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH) et du Fonds de recherche du Québec – Société et culture (FRQSC)</span></em></p>L’invention culinaire est une réinterprétation du patrimoine. Le succès de la tourtine révèle qu’en cette année de Covid, nous sentons le besoin de repenser les plats emblématiques du temps des fêtes.Geneviève Sicotte, Professeure, Études françaises, Concordia UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1520522020-12-17T19:36:43Z2020-12-17T19:36:43ZSix à table à Noël : pourquoi le gouvernement aurait dû communiquer sur un réveillon sans les beaux-parents !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/374869/original/file-20201214-19-nqhwjb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=52%2C4%2C946%2C559&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’appel à «&nbsp;sauver Noël&nbsp;» a été présenté comme étant une condition pour ne pas «&nbsp;perdre&nbsp;» cette fête, ce qui peut être considéré comme une erreur de communication.</span> <span class="attribution"><span class="source">DisobeyArt / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Nous ne sommes pas des individus rationnels. Notre prise de décision est affectée par de nombreuses erreurs systématiques que nous faisons. Ces erreurs systématiques sont appelées des biais psychologiques, et ils rendent imparfait notre calcul cognitif.</p>
<p>En particulier, en fonction de la manière dont l’information à laquelle nous avons accès nous est présentée, nous allons la percevoir différemment, et ceci est appelé « l’effet de cadrage » (ou de framing) : nos choix seront orientés, en fonction d’un simple cadrage, qui a des connotations qui peuvent être perçues comme ayant des conséquences positives ou négatives.</p>
<p>Dans un cadrage positif, on a l’impression qu’un gain est possible et peut être attendu à la suite de notre choix ; dans un cadrage négatif, on anticipe une perte. Il est donc naturel de comprendre que nous allons préférer des choix qui nous donnent l’impression de gagner plutôt que de perdre quelque chose, même si, mathématiquement parlant, il s’agit de la même situation.</p>
<p>L’exemple typique, qui a été popularisé par la <a href="https://www.researchgate.net/publication/269892420_L%27individu_face_au_risque_l%27apport_de_Kahneman_et_Tversky">théorie des perspectives</a>, et qui est surprenant d’actualité, est celui dans lequel les individus doivent se prononcer sur le choix d’un traitement pour 600 personnes en proie à une maladie potentiellement mortelle, traitement qui est présenté soit dans un cadrage positif comme permettant de sauver 200 vies, soit dans un cadrage négatif, menant à la mort de 400 personnes.</p>
<p>Effectivement, mathématiquement, les effets sont donc les mêmes. Cependant, les individus sont 72 % à choisir le traitement lorsque celui-ci est présenté dans une perspective de gain (sauver des vies) et seulement 22 % lorsqu’il est présenté dans une perspective de perte (de vies humaines).</p>
<h2>Cadrage négatif</h2>
<p>Cet effet est populaire et souvent pris en considération dans les campagnes de communication, et l’appliquer aujourd’hui permettrait au gouvernement de faire accepter plus facilement la règle de « six à table à Noël » aux Français. Comment ?</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/al23xc8I94U?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Le premier ministre Jean Castex recommande pas plus de 6 adultes à table pour Noël (Le Parisien, 3 décembre 2020).</span></figcaption>
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<p>Alors que pendant de longs mois l’effort de confinement et des gestes barrières a été bâti sur un appel à la responsabilisation et à la contribution au bien commun, et que cette situation était cadrée de manière positive, nous sommes actuellement dans un cadrage négatif. Malheureusement, l’appel à « sauver Noël » en réduisant le nombre de convives à six à table sans les enfants a été perçu par les Français comme une possibilité de perdre justement cette fête, qui est celle des rassemblements familiaux, perdre quelque chose telle que l’on l’a connue (perdre donc, pas « sauver », malgré la présence du mot).</p>
<p>En comparaison avec la sortie du premier confinement, lorsque la « libération » s’est faite naturellement, sans des appels à sauver quelque chose que l’on pourrait perdre, cette sortie (partielle) de déconfinement est assortie d’un nombre, le « six à table », ce qui change la donne.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/375132/original/file-20201215-21-1vv88hd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/375132/original/file-20201215-21-1vv88hd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/375132/original/file-20201215-21-1vv88hd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=615&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/375132/original/file-20201215-21-1vv88hd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=615&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/375132/original/file-20201215-21-1vv88hd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=615&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/375132/original/file-20201215-21-1vv88hd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=772&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/375132/original/file-20201215-21-1vv88hd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=772&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/375132/original/file-20201215-21-1vv88hd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=772&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Ménages selon la structure familiale.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/3676599?sommaire=3696937">Insee (2019)</a></span>
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<p>Regardons les statistiques : la taille moyenne d’un foyer en France est <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/3676599?sommaire=3696937">légèrement au-dessus de deux personnes</a> ; les Français ont l’habitude de passer Noël avec les enfants et les petits-enfants. On aurait donc de toute manière anticipé des repas de réveillon de 6 adultes à tables en moyenne dans les familles élargies. Donc le chiffre 6, on le tenait, il n’y avait pas besoin de communiquer dessus. Qui plus est, un <a href="https://fr.statista.com/statistiques/627078/fetes-fin-annee-noel-aimer-france/">Français sur trois</a> déclare ne pas aimer passer cette fête dans des repas obligatoires de famille, en particulier avec la belle famille. Il y aurait donc eu toute une partie de la population qui n’aurait pas visité la belle famille à cette époque.</p>
<p>Mais en communiquant sur la possibilité de perdre cette fête et le fameux repas de Noël, le cadrage négatif opère : gagner la possibilité de passer Noël en famille élargie nous aurait (peut-être) procuré de la satisfaction, mais dans une moindre mesure que l’insatisfaction que provoquerait une perte similaire.</p>
<h2>« Passez Noël sans vos beaux-parents ! »</h2>
<p>La conséquence : on s’y accroche coûte que coûte, on va éviter de perdre, on va donc « sauver » Noël, au prix de faire en sorte d’être six ou plus de six en trichant. En effet, <a href="https://pubsonline.informs.org/doi/abs/10.1287/mnsc.2015.2313">nos recherches montrent</a> que lorsqu’on a quelque chose à perdre, on est prêt à tricher pour ne pas le perdre. On est donc prêt à dépasser la règle de six à table.</p>
<p>Peut-on encore faire quelque chose ? Nous sommes passés d’une situation d’appel à la responsabilisation à une situation d’évitement de la tricherie. Il faudrait donc se concentrer sur des outils comportementaux simples qui ont prouvé leur efficacité. En effet, il est démontré que les individus restent moins enclins à tricher si la situation est cadrée positivement, si le rappel des règles vertueuses est opéré, si leurs actions sont visibles, si les individus se sentent efficaces et impliqués dans leur prise de décision.</p>
<p>Premièrement, <a href="https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/1745691615598512">faire appel au sens de l’identité partagée et rendre cette identité visible</a>. Il faut donner à voir par des photos, de la présence sur les réseaux, des communautés et des signes externes les familles qui passent Noël ensemble. En rendant visible l’identité d’un groupe vertueux (ceux qui respectent les consignes du gouvernement) et la norme sociale existante, on signale que le gain des uns n’est pas la perte des autres, que les rassemblements de famille ne sont pas un jeu à somme nulle dans lequel le fait que certains gagnent équivaut forcément au fait que certains autres perdent. On annulerait donc le cadrage négatif et on réduirait la possibilité de tricher.</p>
<p>Deuxièmement, remplacer « distanciation sociale » par « distanciation physique » en insistant sur des modes alternatifs de fêter Noël en famille élargie, et en insistant et en rappelant les gains que l’on pourrait espérer. Il est difficile de s’imaginer le premier ministre Jean Castex faire usage de l’humour de second degré, mais un cadrage positif de type « cette année, vous avez la possibilité de passer Noël sans la belle-famille » aurait un effet signal de rappel de gains et satisfaction possibles tout en ayant un comportement vertueux et de longue durée.</p>
<p>La distanciation physique permettrait une gestion des émotions en évitant les tensions découlant de décisions en urgence ; en effet, les individus prennent des décisions plus égoïstes en urgence, sont plus susceptibles de tricher : à peu près à la même époque à laquelle le Titanic a coulé, un <a href="https://www.pnas.org/content/107/11/4862.short">autre grand paquebot a coulé, le Lusitania</a>. À la différence du premier, qui a coulé pendant des heures, le second a sombré en quelques minutes. Le bilan humain a été très différent : sur le Titanic, la règle « les femmes et les enfants d’abord » a été mise en place, contrairement au Lusitania, où, dans l’urgence, ont survécu surtout les hommes jeunes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/152052/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Angela Sutan a reçu des financements de l'ANR à travers le dispositif ISITE d'UBFC. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Rustam Romaniuc a reçu des financements de l'ANR à travers le dispositif ISITE d'UBFC.</span></em></p>La recherche en économie comportementale montre que de justifier une règle par les risques qu’il y a à la transgresser incite les individus à la contourner.Angela Sutan, Professeur en économie comportementale, Burgundy School of Business Rustam Romaniuc, Professeur associé en économie comportementale, Burgundy School of Business Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.