tag:theconversation.com,2011:/us/topics/organisation-des-nations-unies-onu-20684/articlesOrganisation des Nations unies (ONU) – The Conversation2024-03-21T17:32:29Ztag:theconversation.com,2011:article/2256272024-03-21T17:32:29Z2024-03-21T17:32:29ZHaïti s’est enfoncé dans la crise. Voici quatre solutions pour l’aider à s’en sortir – et cela prendra du temps<p>L’état de crise est complet en Haïti. <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2033413/haiti-onu-espere-arrivee-force-multinationale-1er-trimestre-2024">Une mission internationale conduite par le Kenya</a> devait arriver début 2024, avant d’être <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2056617/kenya-mission-haiti-suspension-police?depuisRecherche=true">suspendue</a> en raison de la situation désastreuse dans le pays. </p>
<p>Dernier coup d’éclat : la <a href="https://www.ledevoir.com/monde/ameriques/808900/peu-espoir-haiti-apres-demission-ariel-henry">démission du premier ministre nommé Ariel Henry</a>, le 11 mars 2024. Cela a amené une certaine accalmie, mais en l’absence de solutions politiques concertées, cette dernière pourrait n’être que de courte durée.</p>
<p>Nombre de pays soutiennent actuellement la création d’un <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2056691/haiti-ariel-henry-demission-reactions-violence-quatre-questions?depuisRecherche=true">conseil présidentiel de transition</a>. Les États-Unis ont <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2056268/haiti-crise-violence-caricom-aide-humanitaire?depuisRecherche=true">débloqué 133 millions de dollars</a>, et les Nations-Unies devraient initier <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2057355/haiti-port-au-prince-troubles-tirs-gang-violence?depuisRecherche=true">« un pont aérien »</a> entre Haïti et la République dominicaine afin de faciliter l’entrée de l’aide humanitaire.</p>
<p>Ces actions de la communauté internationale peuvent-elles mettre fin à l’instabilité politique et institutionnelle en Haïti ? </p>
<p>Ancien fonctionnaire de l’administration publique haïtienne, pour laquelle j’ai travaillé pendant huit ans, je suis aujourd’hui chercheur et chargé d’enseignement à l’École nationale d’administration publique. Mon co-auteur a enseigné la conception et la mise en œuvre des politiques publiques en Haïti. Les analyses et conclusions que nous présentons sont tirées de nos expériences professionnelles et de nos travaux de recherche. </p>
<h2>Haïti au milieu du chaos</h2>
<p>En juillet 2018, des vagues de violences ont secoué Haïti. La population protestait contre la montée des prix des carburants. Ces mouvements de contestations ont servi de précédents au développement d’un phénomène dénommé <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Haitian_crisis_(2018%E2%80%93present)">« peyi lock »</a>, ou blocage du pays, devenu récurrent depuis. Il entraîne une mise à l’arrêt de <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2054218/haiti-urgence-attaques-gangs?depuisRecherche=true">tous les secteurs prioritaires</a>, comme les écoles ou les banques. <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2053907/gangs-assaut-prison-port-prince-evasions">Les prisons</a> ont aussi été prises d’assaut. </p>
<p>La crise est multidimensionnelle : <a href="https://www.banquemondiale.org/fr/country/haiti/overview">politique, économique</a>, sécuritaire, <a href="https://www.lapresse.ca/international/caraibes/2024-03-09/haiti/la-situation-humanitaire-toujours-plus-precaire-a-port-au-prince.php">humanitaire</a>. Selon l’UNICEF, <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2057901/unicef-haiti-mad-max-gangs?depuisRecherche=true">80 %</a> de la capitale, Port-au-Prince, seraient contrôlés par les gangs criminels, avec à leur tête le <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2054894/jimmy-barbecue-cherizier-haiti-g9">désormais célèbre Jimmy « Barbecue » Chérizier</a>. </p>
<p>Les 8 et 9 mars 2024, la crise a atteint son apogée lorsque des bandes rivales ont cherché à prendre le <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2056027/crise-haiti-entrevue-ambassadeur-canada?depuisRecherche=true">contrôle d’infrastructures névralgiques</a>, <a href="https://fr.africanews.com/2024/03/05/haiti-des-gangs-prennent-dassaut-laeroport-6-policiers-tues/">dont le principal aéroport international et le port</a>. </p>
<h2>Une crise politique qui s’inscrit dans le temps</h2>
<p>L’ancien président Jovenel Moïse, <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1015480/haiti-jovenel-moise-president-election-crise-politique">élu en 2017</a>, n’avait pas déclenché d’élections durant tout son quinquennat. Cela a fragilisé les institutions publiques, déjà chancelantes, et la stabilité <a href="https://www.lapresse.ca/international/caraibes/2021-05-06/pas-de-financement-ni-d-observateurs-europeens-pour-le-referendum-en-haiti.php">sécuritaire du pays</a>.</p>
<p>Son <a href="https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/1941">assassinat</a> le 7 juillet 2021, qui s’inscrit dans l’histoire politique mouvementée du pays, n’a fait qu’accélérer cette débâcle. La présidence est vacante depuis. </p>
<p>La crise actuelle ne date pas d’hier. Ses racines remontent à l’indépendance d’Haïti, en <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9volution_ha%C3%AFtienne">1804</a>. Depuis cette date, le pays a connu de nombreuses crises politiques.</p>
<p>La <a href="https://peacekeeping.un.org/fr/mission/minustah">MINUSTAH</a>, mission des Nations-Unies arrivée en Haïti en juin 2004, après le <a href="https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/762">renversement du Président Jean-Bertrand Aristide</a> le 29 février de cette année-là, avait pour objectif notamment de contribuer au renforcement de la Police nationale d’Haïti (PNH) pour faire régner l’ordre public, alors que sévissait un climat de crise et d’instabilité.</p>
<p>Cinq ans après le départ définitif de la MINUSTAH en 2019, le climat sécuritaire est délétère, voire apocalyptique. </p>
<p>La <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Mission_des_Nations_unies_pour_la_stabilisation_en_Ha%C3%AFti#:%7E:text=Bien%20que%20la%20Mission%20de,bloqu%C3%A9e%20par%20des%20v%C3%A9hicules%20arm%C3%A9s.">composition de l’effectif</a> de la MINUSTAH constitue un des facteurs expliquant l’échec de la mission. Elle mobilisait 8 756 militaires et 3 555 policiers provenant de plus de 63 pays ayant chacun leurs façons de faire et d’opérer. Dans de telles conditions, il était difficile, voire impossible, d’assurer une cohérence dans les actions de la mission internationale. Par ailleurs, l’effectif militaire et constabulaire de la MINUSTAH était composé majoritairement des membres de pays où le respect des droits humains est souvent bafoué. </p>
<p>Il ne faut donc pas se surprendre que des ONG aient dénoncé tout au long de la présence de la MINUSTAH des <a href="https://archipel.uqam.ca/13765/1/M16426.pdf">cas de non-respect des droits humains</a>. La MINUSTAH est une des missions les plus controversées de l’histoire de l’ONU. Elle a fait l’objet de plusieurs allégations d’exploitation et d’abus sexuels. </p>
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<a href="https://theconversation.com/apres-seisme-voici-comment-des-enfants-ha-tiens-ont-ete-abandonnes-par-leur-pere-casque-bleu-129118">Après-séisme : voici comment des enfants haïtiens ont été abandonnés par leur père Casque bleu</a>
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<h2>Repenser la mobilisation de communauté internationale à Haïti</h2>
<p>Une <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2057043/haiti-caricom-pression-transition-conseil-president?depuisRecherche=true">rencontre</a> initiée par la CARICOM (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Communaut%C3%A9_carib%C3%A9enne">Communauté caribéenne</a>) s’est tenue le 11 mars en Jamaïque. Elle a réuni plusieurs acteurs internationaux pour discuter de la crise actuelle en Haïti et favoriser la création d’un Conseil présidentiel de transition, mandaté entre autres pour organiser les prochaines élections. </p>
<p>La société civile haïtienne a déjà nommé <a href="https://lenouvelliste.com/article/247301/pierre-jean-raymond-andre-et-rene-jean-jumeau-les-deux-observateurs-au-conseil-presidentiel">ses observateurs</a> au sein de ce conseil présidentiel de transition. Mais le premier ministre démissionnaire, Ariel Henry, affirme toujours <a href="https://lenouvelliste.com/article/247304/ariel-henry-attend-de-recevoir-officiellement-les-noms-des-membres-du-conseil-presidentiel-pour-publication-dans-le-moniteur">attendre de la CARICOM les noms des membres de ce conseil</a> pour l’officialiser. Il semble donc que la crise soit, encore une fois, en voie de s’enliser.</p>
<p>Nous croyons que le désastre politique, sécuritaire et humanitaire que connaît Haïti requiert une mobilisation de la communauté internationale. Cette mobilisation doit cependant être repensée. </p>
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À lire aussi :
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<p>Le pays étant affaibli sur le plan institutionnel, un accompagnement doit être planifié sur le long terme et viser une autonomie des institutions de manière progressive. Au cours des dernières décennies, les appuis apportés à Haïti ont privilégié le <a href="https://occah.uqam.ca/publications/haiti-mieux-comprendre-le-bilan-mitige-de-laction-humanitaire-internationale/">canal des ONG</a>. Ce choix ne contribue malheureusement pas à renforcer les capacités institutionnelles des entités publiques. Ainsi, une fois que les ONG partent, il devient difficile pour les acteurs locaux de prendre le relais. </p>
<p>Notre connaissance du terrain nous invite plutôt à préconiser une démarche non imposée et respectueuse des intérêts et des besoins stratégiques d’Haïti. Nous pensons que le pays peut sortir de la crise à condition de compter sur une administration publique forte et sur une aide internationale coordonnée, menée par des pays dont les institutions respectent les droits humains. </p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/crise-en-ha-ti-le-salut-passe-par-une-administration-publique-forte-126570">Crise en Haïti : le salut passe par une administration publique forte</a>
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<p>Cette aide doit sortir des sentiers battus et prioriser une approche participative, en intégrant les objectifs des Haïtiens pour leur pays. À la suite du séisme du 12 janvier 2010, la communauté internationale avait conduit des interventions non ordonnées, <a href="https://espace.enap.ca/id/eprint/447/">sans tenir compte des spécificités du contexte local</a>. Le constat d’échec n’avait donc rien d’étonnant. </p>
<p>Le soutien à apporter à Haïti par la communauté internationale doit s’inscrire dans la durée. Le passage de la MINUSTAH confirme que des interventions ponctuelles de type humanitaire ou d’urgence ne peuvent être efficaces. Nous pensons que l’aide à apporter à Haïti doit être pensée non pas en années, mais en décennies.</p>
<p>On doit privilégier une approche multidimensionnelle pour solidifier, stabiliser et pérenniser les institutions publiques de l’État. Il ne suffit pas simplement d’appuyer la police nationale pour que l’ordre revienne. Ce sont toutes les institutions qui sont à rebâtir.</p>
<h2>Les responsabilités des Haïtiens</h2>
<p>En Haïti, les acteurs politiques et ceux de la société civile ont la responsabilité d’être proactifs dans la proposition de solutions viables. Nous croyons que le comportement attentiste souvent manifesté par l’élite intellectuelle haïtienne doit être révolu. Nous proposons ainsi qu’une concertation de toutes les forces vives de la nation, impliquant notamment la diaspora, est indispensable pour le renouveau du pays. C’est avec ces forces vives que doit composer l’aide internationale dans une démarche de soutien et d’autodétermination, plutôt que d’imposition comme le montre bien l’économiste américain, spécialiste de l’économie du développement, <a href="https://penguinshop.ca/products/9780143038825">William Easterly, dans cet essai</a>.</p>
<p>Il nous apparaît donc aujourd’hui qu’il faut adopter une démarche en quatre temps pour sortir Haïti de la crise qui la caractérise :</p>
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<li><p>Former une force internationale dont les pays membres sont respectueux des droits humains.</p></li>
<li><p>Déployer cette force pour soutenir la police nationale et ramener l’ordre, la paix et la sécurité dans le pays, ce qui inclut traduire en justice les criminels qui orchestrent actuellement le désordre dans le pays.</p></li>
<li><p>Organiser des États généraux pour concerter ces forces vives de la société civile et mettre sur pied un plan visant à rebâtir les institutions publiques du pays et à les pérenniser.</p></li>
<li><p>Contribuer à la formation des agents de l’État et au développement des structures et processus qui seront nécessaires pour pérenniser les institutions publiques.</p></li>
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<p>Ce plan est réalisable, à notre avis, à condition que les pays qui accepteront d’intervenir se résoudront à y demeurer quelques décennies.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/225627/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Haïti peut sortir de la crise à condition de compter sur une administration publique forte et sur une aide internationale coordonnée, menée par des pays qui respectent les droits humains.Emmanuel Sael, Docteur en administration publique et chargé d'enseignement, École nationale d'administration publique (ENAP)Jean-François Savard, Professeur agrégé, École nationale d'administration publique (ENAP)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2166832024-02-28T15:03:18Z2024-02-28T15:03:18ZSelon l’ONU, les personnes ayant une déficience intellectuelle sont exploitées au Canada<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/563030/original/file-20231201-23-6d3hsp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C0%2C995%2C747&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Il est très difficile, voire impossible, de savoir exactement combien de personnes ayant une déficience intellectuelle sont dans des plateaux de travail au Canada.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Le Canada a <a href="https://www.ohchr.org/fr/press-releases/2023/09/canada-anchor-fight-against-contemporary-forms-slavery-human-rights-un">récemment été blâmé par Tomoya Obokata, le Rapporteur spécial des Nations unies sur les formes contemporaines d’esclavage</a>. En cause ? Les manquements de ses programmes d’immigration économique. </p>
<p>Toutefois, cela n’était pas le seul reproche que le Rapporteur spécial avait à formuler : les <a href="https://www.ohchr.org/sites/default/files/documents/issues/slavery/sr/statements/eom-statement-canada-sr-slavery-2023-09-06.pdf">conditions dans lesquelles travaillent des personnes ayant une déficience intellectuelle</a> ont également attiré son attention. </p>
<p>En tant que chercheur sur les questions touchant la sécurité financière et l’emploi des personnes en situation de handicap, et personne travaillant dans le domaine des politiques publiques, je vous propose un éclairage sur une pratique controversée, mais encore répandue au Canada : les plateaux de travail.</p>
<h2>Que sont les plateaux de travail ?</h2>
<p>Relativement inconnus du grand public, les plateaux de travail en déficience intellectuelle sont un <a href="https://link.springer.com/book/10.1057/9781137540317">legs historique de la ségrégation et de l’exploitation qu’ont connues ces personnes</a>, partout en Amérique du Nord. Contrairement à l’institutionnalisation, qui a relativement reculé, les plateaux de travail sont encore bien en vie, malgré les appels répétés à leur fermeture tant <a href="https://inclusioncanada.ca/wp-content/uploads/2020/12/English-Position-Employment.pdf">au Canada</a> <a href="https://www.sqdi.ca/wp-content/uploads/2022/09/Orientations_et_Demandes_SQDI_2022_FR_WEB.pdf">qu’au Québec</a>. </p>
<p>Les plateaux de travail sont <a href="https://irisinstitute.ca/wp-content/uploads/sites/2/2021/09/Help-wanted-Full-Report-FR.pdf">généralement caractérisés</a> comme étant des programmes dans lesquels :</p>
<p>– des personnes ayant un handicap (particulièrement celles ayant une déficience intellectuelle) sont rassemblées, sans être mélangées avec des personnes n’étant pas en situation de handicap ; </p>
<p>– ces personnes fournissent une forme de travail sans être rémunérées ou en recevant un montant forfaitaire (quelques dollars par jour) ;</p>
<p>– les différentes lois et normes du travail ne s’appliquent pas, incluant les normes sur le salaire minimum. </p>
<p>Historiquement, l’objectif de ces programmes était <a href="https://psycnet.apa.org/record/2013-11700-001">avant tout de former des personnes très éloignées du milieu de travail</a> dans un contexte plus propice. Le raisonnement était que si l’on amenait ces personnes à effectuer des tâches répétitives dans un environnement non compétitif et plus « protégé » du reste de la société, elles finiraient par développer des aptitudes de travail pour peut-être éventuellement intégrer le marché régulier de l’emploi. </p>
<p>Toutefois, loin de favoriser l’inclusion en emploi, la participation qui était à la base temporaire devient bien souvent permanente, ce qui soulève des questions éthiques, politiques et sociales sur la pratique. </p>
<h2>Des programmes utilisés partout au Canada</h2>
<p><a href="https://irisinstitute.ca/wp-content/uploads/sites/2/2021/09/Help-wanted-Full-Report-FR.pdf">Dans un rapport de recherche publié en 2022</a>, l’Institut de recherche et de développement sur l’inclusion et la société dressait l’état de la situation entourant les plateaux de travail au Canada. Toutes les provinces étudiées (Ontario, Colombie-Britannique, Nouvelle-Écosse, Québec, Territoires du Nord-Ouest) avaient des plateaux de travail dans lesquels des personnes fournissaient une prestation de travail sans recevoir de juste compensation. </p>
<p>Pire, dans bien des cas, la <a href="https://irisinstitute.ca/wp-content/uploads/sites/2/2021/09/Help-wanted-Appendix-EN.pdf">participation de ces personnes aux plateaux de travail pouvait se compter en années</a>, voire en dizaines d’années. Loin d’une mesure temporaire, les plateaux de travail sont devenus à la fois une source de financement <a href="https://irisinstitute.ca/wp-content/uploads/sites/2/2021/09/Help-wanted-Full-Report-FR.pdf">pour des organismes qui reçoivent des subventions gouvernementales</a>, mais aussi une forme de répit pour des familles qui manquent cruellement de services. </p>
<p>Il est très difficile, voire impossible, de savoir exactement combien de personnes ayant une déficience intellectuelle sont dans des plateaux de travail au Canada (les statistiques étant difficiles à trouver, ou tout simplement inexistantes). Toutefois, comme le Québec publie des données financières et démographiques à jour, il est possible d’étudier le cas de cette province.</p>
<h2>Le cas du Québec</h2>
<p>Le Québec a divisé ses programmes d’employabilité pour les personnes en situation de handicap entre le ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MESS) et le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). En théorie, le MSSS s’occupe des personnes en situation de handicap jugées « plus loin du marché du travail », alors que le MESSS s’occupe des personnes étant plus prêtes à l’emploi. </p>
<p>Cependant, dans les faits, ce que les organismes communautaires sur le terrain rapportent, et ce que la recherche en cours semble faire émerger (données préliminaires), est qu’un nombre important de personnes qui devraient se trouver dans les services du MESS finissent dans des plateaux de travail. <a href="https://www.vgq.qc.ca/Fichiers/Publications/rapport-cdd/167/cdd_tome-novembre2020_ch03_web.pdf">Le rapport du Vérificateur général du Québec sur l’employabilité des jeunes en situation de handicap</a> dresse un portrait de la situation.</p>
<p>Ultimement, le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec continue de financer très largement les plateaux de travail dans la province. </p>
<p><iframe id="kMsNn" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/kMsNn/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Entre 2013-2014 et 2020-2021, ce ne sont pas moins de 165M$ de fonds publics qui ont été investis dans ces programmes.</p>
<p>Une autre raison pouvant expliquer la prévalence des plateaux de travail au Québec est le fait que les prestataires du Programme de solidarité sociale <a href="https://theconversation.com/au-quebec-comme-ailleurs-au-canada-les-programmes-dassistance-sociale-sont-des-trappes-a-pauvrete-211968">n’ont pas de droit de travailler pour plus que 200$ par mois</a>. </p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/au-quebec-comme-ailleurs-au-canada-les-programmes-dassistance-sociale-sont-des-trappes-a-pauvrete-211968">Au Québec, comme ailleurs au Canada, les programmes d’assistance sociale sont des « trappes à pauvreté »</a>
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<p>En effet, le fait que le chèque d’assistance sociale soit coupé dollar pour dollar passé cette limite est souvent évoqué comme justification pour ne pas payer les personnes participant aux plateaux de travail.</p>
<h2>Quelles pistes pour le futur des plateaux de travail au Canada ?</h2>
<p>Quelles sont donc les pistes pour s’assurer que les droits des personnes participant à des plateaux de travail soient respectés ?</p>
<p>Plusieurs organisations plaident pour un meilleur encadrement des plateaux de travail. Un premier pas serait d’avoir des <a href="https://www.sqdi.ca/wp-content/uploads/2022/09/Orientations_et_Demandes_SQDI_2022_FR_WEB.pdf">objectifs clairs de formation et une durée de participation limitée dans le temps</a>, afin de s’assurer que ces programmes répondent réellement à un besoin de développement de compétences professionnelles et sociales.</p>
<p>De plus, les <a href="https://irisinstitute.ca/wp-content/uploads/sites/2/2021/09/Help-wanted-Full-Report-FR.pdf">législations provinciales et territoriales devraient être mises à jour</a> afin de garantir que toutes les personnes en situation de handicap bénéficient des mêmes droits que le reste de la population. </p>
<p>Par ailleurs, à terme, les gouvernements devraient <a href="https://irisinstitute.ca/wp-content/uploads/sites/2/2021/09/Help-wanted-Full-Report-FR.pdf">rediriger les fonds publics</a> utilisés pour les plateaux vers des programmes d’embauche inclusive (<a href="https://www.youtube.com/watch?v=ocSrgOhQPv4">comme cela a été fait au Nouveau-Brunswick, par exemple</a>) et vers des activités stimulantes pour les adultes en situation de handicap partout au Canada. Les organisations communautaires qui donnent du répit aux familles et créent ces espaces de socialisation et d’apprentissage devraient également recevoir un juste financement, afin de ne pas générer davantage de drames humains <a href="https://engagezvousaca.org/accueil/les-revendications/">pour des organismes déjà largement sous-financés</a>.</p>
<p>D’autres mesures sont cruciales, comme s’assurer que les programmes d’assistance sociale autorisent les prestataires à travailler, ne serait-ce qu’à temps partiel. Le nouveau Programme de revenu de base entré en vigueur en 2023 au Québec est un bon exemple de changement positif en la matière, puisqu’il <a href="https://www.quebec.ca/famille-et-soutien-aux-personnes/aide-sociale-et-solidarite-sociale/programme-revenu-base">permet aux prestataires de travailler à temps partiel</a>. D’autres provinces, comme la <a href="https://www2.gov.bc.ca/gov/content/family-social-supports/services-for-people-with-disabilities/disability-assistance/on-disability-assistance/annual-earnings-exemption">Colombie-Britannique</a> et <a href="https://ottawa.ctvnews.ca/odsp-earning-exemption-increases-but-it-s-not-as-beneficial-as-it-seems-advocates-1.6255430">l’Ontario</a>, ont également commencé à rendre les règles de leurs programmes plus flexibles, mais il reste encore beaucoup de chemin à faire.</p>
<p>Autre aspect important : il faut s’assurer de la mise en place d’une réelle transition planifiée entre l’école et la vie active des jeunes adultes en situation de handicap. Les provinces ayant travaillé sur ce dernier point, comme le Nouveau-Brunswick, <a href="https://www.abilitynb.ca/wp-content/uploads/2020/11/Tacit-Elements-Ability-NB-Employment-and-Disability-Final-Copy-UPDATE-CASE-1.pdf">ont démontré qu’une transition bien réalisée peut être grandement bénéfique pour l’ensemble de la population</a>. Et bien que le Québec ait <a href="https://www.education.gouv.qc.ca/references/tx-solrtyperecherchepublicationtx-solrpublicationnouveaute/resultats-de-la-recherche/detail/article/transition-de-lecole-vers-la-vie-active-teva/">son propre programme de transition école-vie active (TEVA)</a>, le programme se limite encore à des « guides » dont la mise en place reste largement laissée à la bonne volonté des directions d’école, notamment <a href="https://www.ophq.gouv.qc.ca/fileadmin/centre_documentaire/Etudes__analyses_et_rapports/Finances_par_l_Office/RAP_Chantal_Desmarais_teva_jeunes-handicapes.pdf">faute d’une « structure interministérielle clairement définie »</a> et d’obligations claires.</p>
<h2>Le Canada doit respecter ses obligations internationales</h2>
<p>La situation est telle que de plus en plus d’organisations au Canada (dont <a href="https://inclusioncanada.ca/">Inclusion Canada</a> et People First of Canada, les deux plus grandes organisations représentant les personnes ayant une déficience intellectuelle au Canada), qualifient la participation de personnes ayant une déficience intellectuelle dans les plateaux de travail comme étant de <a href="http://invisibleinstitutions.com/invisible-institutions-podcast-episode-2">« l’exploitation »</a>.</p>
<p>Si l’on en croit les différentes organisations de défense des droits, le Canada violerait donc ses obligations internationales. En effet, la <a href="https://www.ohchr.org/fr/instruments-mechanisms/instruments/convention-rights-persons-disabilities">Convention relative aux droits des personnes handicapées</a> proscrit explicitement l’exploitation des personnes en situation de handicap (art. 16), et fait plutôt la promotion du droit à l’emploi et au travail sur la base de l’égalité avec les autres travailleurs et travailleuses (art. 27).</p>
<p>Il est plus que temps que le terme « travail » ne soit plus synonyme d’« exploitation » pour les personnes ayant une déficience intellectuelle partout au pays.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216683/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Samuel Ragot est étudiant au doctorat en travail social à l'Université McGill et analyste sénior aux politiques publiques à la Société québécoise de la déficience intellectuelle. </span></em></p>Au Québec et au Canada, les personnes ayant une déficience intellectuelle sont encore souvent exploitées – via les plateaux de travail – selon l’ONU et les organisations de défense des droits.Samuel Ragot, PhD Candidate - Candidat au doctorat, McGill UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2221122024-02-08T10:39:34Z2024-02-08T10:39:34ZComment l’industrie fossile influence les négociations mondiales sur le plastique<p>Le pétrole règne en maître sur l’univers des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/pollution-plastique-81856">plastiques</a>, dont près de 99 % proviennent encore de cette ressource fossile. Leur production a doublé entre 2000 et 2019, atteignant <a href="https://www.oecd.org/fr/environnement/la-pollution-plastique-ne-cesse-de-croitre-tandis-que-la-gestion-et-le-recyclage-des-dechets-sont-a-la-traine.htm">460 milliards de tonnes par an</a>.</p>
<p>Ces plastiques, qui ne se décomposent pas facilement, se retrouvent dans les océans, contaminent les sols et perturbent les écosystèmes, entraînant une <a href="https://www.zero-dechet-sauvage.org/articles/plastique-sante-couts-caches">détérioration de l’environnement et de la santé humaine</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pourquoi-la-pollution-plastique-des-cotes-est-largement-sous-estimee-147269">Pourquoi la pollution plastique des côtes est largement sous-estimée</a>
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<p>En 2022, l’Assemblée des Nations unies pour l’Environnement a donc adopté une <a href="https://www.unep.org/fr/actualites-et-recits/communique-de-presse/journee-historique-dans-la-campagne-de-lutte-contre-la">résolution historique</a> visant à élaborer un instrument international juridiquement contraignant sur la pollution plastique, pour lequel un comité intergouvernemental de négociation (CIN) a été mis en place.</p>
<p>Cinq réunions sont prévues sur une période de deux années. La première a eu lieu en Uruguay en décembre 2022, la deuxième en juin 2023 à Paris et la troisième en novembre 2023, au Kenya. La quatrième est planifiée à Ottawa en avril 2024 et la dernière n’est pas encore fixée, mais le texte final doit être prêt en 2025, <a href="https://www.20minutes.fr/planete/4038119-20230526-pollution-plastique-plus-vers-traite-mondial-tout-comprendre-negociations-vont-ouvrir-paris">l’objectif étant de ne plus avoir de pollution plastique en 2040</a>.</p>
<p>Depuis le début, États pétroliers et industrie fossile entendent bien peser dans ces débats afin d’en maîtriser l’issue.</p>
<h2>À Paris, des discussions entravées</h2>
<p>Au démarrage de la réunion à Paris, un groupe de pays – principalement producteurs de pétrole – a entravé les discussions en revisitant des questions de procédures déjà abordées <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1983678/petrole-pollution-accord-paris-bouteille">lors de la première négociation</a>. Leur objectif était de ne pas attaquer le fond du problème, en se focalisant sur les aspects de procédures.</p>
<p>Les délégations de la Russie, de l’Inde, de la Chine, de l’Arabie saoudite, de l’Iran, du Brésil, du Venezuela, d’Oman, de Dubaï et d’Égypte, ont ainsi refusé que le futur traité soit approuvé par un vote à la majorité des deux tiers, si jamais un consensus n’était pas trouvé. En face, une majorité de pays défend le vote comme ultime recours, afin de passer outre une minorité de blocage.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Cette action étonnante, qui a conduit <a href="https://www.leparisien.fr/environnement/negociations-sur-la-pollution-plastique-dernier-jour-pour-arracher-un-compromis-02-06-2023-SF3NNIBESNGGVHHQUFC4ODEMJY.php">à un échec diplomatique</a>, a été vécue comme une prise d’otage par les participants. Société civile et groupes de défense des droits ont exprimé leurs préoccupations quant à l’influence exercée par le lobbying de groupes industriels comme l’American Chemistry Council et Plastics Europe. Leur présence a d’ailleurs été recensée par le média d’investigation <em>Mediapart</em>, qui a décompté, <a href="https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/020623/dans-les-negociations-sur-le-plastique-les-industriels-ont-depeche-190-lobbyistes">lors des pourparlers à Paris</a>, pas moins de 190 représentants de l’industrie.</p>
<h2>Au Kenya, des négociations qui patinent</h2>
<p>À Nairobi, qui accueillait du 13 au 19 novembre 2023 la troisième session de négociations du traité plastique, les discussions pouvaient se baser sur un avant-projet ou « version zéro » du texte, qui recensait thème par thème les différentes options avancées par les pays lors des réunions précédentes. De la limitation de la production à la gestion des déchets en passant par des interdictions de substances.</p>
<p>Les négociations n’ont toutefois pas permis d’aboutir à une version épurée du texte, ni même de donner mandat au secrétariat pour la préparation d’un premier projet de texte. C’est donc une « version zéro » gonflée de nouvelles options qui en est ressortie, rendant la suite des négociations plus complexes et les risques de blocages <a href="https://www.lesechos.fr/monde/enjeux-internationaux/traite-mondial-contre-le-plastique-les-negociations-patinent-2030285">encore plus importants</a>.</p>
<p>Ce résultat s’explique par l’opposition de deux approches sur l’objet et le champ du futur traité.</p>
<h2>Deux approches qui s’opposent</h2>
<p>D’un côté, celle promue par la <a href="https://www.tf1info.fr/environnement-ecologie/climat-qu-est-ce-que-la-coalition-de-la-haute-ambition-qui-veut-mettre-fin-a-la-pollution-plastique-d-ici-2040-2258586.html">coalition de haute ambition</a> pour mettre fin à la pollution plastique, présidée par la Norvège et le Rwanda, et rassemblant 60 pays de l’OCDE (sans les États-Unis), de la région Amérique latine-Caraïbes, d’Afrique, des petits États insulaires en développement et les Émirats arabes unis.</p>
<p>La coalition s’appuie sur la résolution de l’ANUE donnant mandat pour traiter l’ensemble du cycle plastique et plaide donc pour un traité ambitieux couvrant l’amont (production de polymères) comme l’aval (gestion rationnelle des déchets).</p>
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<p>De l’autre, celle portée par une coalition annoncée par l’Iran en début de session, qui réunit notamment l’Arabie saoudite, la Chine, la Russie, l’Iran, Cuba et Bahreïn : elle entend limiter le champ du traité à la gestion des déchets et s’oppose à toute régulation de la production.</p>
<p>La présence d’États producteurs de pétrole ainsi que de nombreux représentants de l’industrie parmi les observateurs a pu également créer le sentiment que le souci de défendre les intérêts de la pétrochimie et de l’industrie plastique était particulièrement fort.</p>
<h2>Les COP, hauts lieux de lobbying</h2>
<p>Cette configuration se retrouve dans les coulisses des sommets mondiaux sur le climat. La COP28 qui s’est déroulée à Dubaï du 30 novembre au 13 décembre 2023 sous la présidence controversée <a href="https://www.20minutes.fr/planete/4056734-20231008-cop28-monde-peut-debrancher-systeme-energetique-actuel-selon-president">du sultan Ahmed Al-Jaber</a>, ministre de l’Industrie et des Technologies avancées et PDG du groupe pétrolier Abu Dhabi National Oil Company, en est l’acmé.</p>
<p>Le sultan Al-Jaber a proclamé l’accord évoquant pour la première fois une sortie des énergies fossiles <a href="https://theconversation.com/apres-la-cop28-fin-de-partie-pour-les-energies-fossiles-219859">comme « historique »</a>. Le texte final appelle à une « transition hors des énergies fossiles » pour lutter contre le réchauffement climatique, visant à accélérer l’action afin de parvenir à la neutralité carbone d’ici 2050.</p>
<p>Selon un rapport publié le mardi 5 décembre 2023 <a href="https://www.globalwitness.org/en/press-releases/record-number-fossil-fuel-lobbyists-granted-access-cop28-climate-talks/">par l’ONG Global Witness</a>, la COP a atteint un record en termes de présence de lobbyistes liés aux énergies fossiles. Leur nombre s’élève à 2 456, une augmentation significative par rapport aux 636 lors de la COP27 à Sharm el Sheikh et aux 503 de Glasgow en 2021.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-echapper-a-la-malediction-de-la-rente-fossile-218546">Comment échapper à la malédiction de la rente fossile ?</a>
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<h2>États et lobbys, des liaisons dangereuses</h2>
<p>Les groupes de pression jouent un rôle crucial pour représenter divers intérêts, mais leur influence soulève des questions sur la transparence et l’équité dans l’accès aux décideurs politiques.</p>
<p>Ceux des grandes entreprises s’opposent à l’environnement, car la transition vers une économie respectueuse du climat, de la santé et de la biodiversité les obligerait à revoir leurs modes de fonctionnement. ExxonMobil, Shell, Chevron, BP et Total, ont dépensé un milliard de dollars en lobbying depuis l’accord de Paris sur le climat entre 2015 et 2019, selon <a href="https://influencemap.org/report/How-Big-Oil-Continues-to-Oppose-the-Paris-Agreement-38212275958aa21196dae3b76220bddc">l’ONG britannique InfluenceMap</a>.</p>
<p>En février 2019, l’ONG Corporate Europe Observatory (CEO) a également mis en évidence dans un <a href="https://corporateeurope.org/sites/default/files/captured-states-exec-summary-fr.pdf">rapport</a> la relation symbiotique entre les États membres de l’Union européenne et les groupes de pression privés, qui conduit à la défense des intérêts privés au détriment de l’intérêt public et explique le manque de prise en compte des enjeux environnementaux dans les décisions politiques, voire des décisions qui aggravent la situation lors de la signature de traités commerciaux.</p>
<p>Des enquêtes journalistiques et des poursuites judiciaires ont souligné le fait que certaines grandes entreprises du secteur énergétique connaissaient les impacts potentiels du changement climatique tout en finançant des campagnes de désinformation pour semer le doute sur le réchauffement climatique. Des documents internes d’Exxon Mobil ont révélé au public en 2015 que la société était consciente des risques liés <a href="https://trustmyscience.com/scientifiques-exxonmobil-avaient-predit-avec-precision-rechauffement-climatique-annees-1970/">au changement climatique dès les années 1970</a>.</p>
<h2>Quelles perspectives à Ottawa ?</h2>
<p>Dans ce tumulte entre l’industrie fossile, le climat et la pollution plastique, les négociations internationales s’avèrent être un pas de deux complexe.</p>
<p>Les aspirations à éradiquer la pollution plastique d’ici à 2040 se heurtent à des blocages diplomatiques inattendus et à <a href="https://www.vie-publique.fr/en-bref/291790-pollution-plastique-pas-daccord-au-kenya-pour-un-traite-international">l’influence massive des lobbyistes des énergies fossiles</a>.</p>
<p>Alors que la prochaine session de l’ANUE en <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/traite-sur-la-pollution-plastique-de-faibles-avancees-a-nairobi.N2196878">avril 2024</a> approche, la question demeure : cette réunion sera-t-elle le début d’une vraie transformation ou un nouvel acte dans ce drame environnemental en cours ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222112/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Shérazade Zaiter est membre d'Avocats sans Frontières et du Centre International de Droit Comparé de l'Environnement.</span></em></p>Une 4ème session de négociations est prévue en avril à Ottawa pour élaborer un instrument international juridiquement contraignant sur la pollution plastique.Shérazade Zaiter, Juriste International- Auteure, Université de LimogesLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2220152024-01-29T08:32:00Z2024-01-29T08:32:00ZLe procès pour génocide intenté contre Israël est le moment le plus glorieux de la politique étrangère de l'Afrique du Sud depuis trois décennies<p>Le 11 janvier 2024, l'Afrique du Sud a <a href="https://www.icj-cij.org/case/192">traduit</a> Israël devant la Cour internationale de justice (CIJ) pour violation de la <a href="https://www.un.org/fr/genocideprevention/genocide-convention.shtml">Convention sur le génocide de 1948</a>. Cette accusation porte sur les bombardements indiscriminés et le siège de Gaza par Israël à la suite de l'attaque meurtrière du 7 octobre contre Israël par le Hamas, qui a coûté la vie à 1 200 Israéliens.</p>
<p>Plus de 25 000 Palestiniens, dont au moins la moitié sont des enfants, <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2043356/gaza-plus-25000-morts-israel-poursuit-bombardements">auraient été tués</a> dans les attaques de représailles israéliennes. Le siège a provoqué une crise humanitaire, avec des civils ayant du mal à se procurer de la nourriture et n'ayant pas accès aux hôpitaux, qui ont été <a href="https://www.aa.com.tr/fr/monde/gouvernement-de-gaza-isra%C3%ABl-a-d%C3%A9truit-plus-de-61-des-maisons-dans-la-bande-de-gaza/3079004">presque totalement détruits</a>.</p>
<p>L'équipe d'avocats sud-africains a plaidé auprès de la Cour pour l'instauration de <a href="https://theconversation.com/south-africas-genocide-case-against-israel-expert-sets-out-what-to-expect-from-the-international-court-of-justice-220692">mesures provisoires</a> - des ordonnances temporaires visant à mettre fin à des dommages irréparables, incluant un cessez-le-feu immédiat - pendant que la Cour examine le bien-fondé de l'affaire.</p>
<p>En tant qu'observateurs des relations internationales de l'Afrique du Sud, nous considérons cette initiative comme le couronnement de la politique étrangère du pays depuis la fin de l'apartheid en 1994.</p>
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Read more:
<a href="https://theconversation.com/south-africas-foreign-policy-under-ramaphosa-has-seen-diplomatic-tools-being-used-to-provide-leadership-as-global-power-relations-shift-218966">South Africa's foreign policy under Ramaphosa has seen diplomatic tools being used to provide leadership as global power relations shift</a>
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<p>La libération de l'Afrique du Sud est parfois présentée comme le <a href="https://global.oup.com/academic/product/postscripts-on-independence-9780199479641?cc=us&lang=en&%20;">dernier acte</a> de la décolonisation du XXe siècle : l'apogée de la solidarité du <a href="https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMDictionnaire/1517">tiers-monde</a>. La nouvelle approche du pays en matière de politique étrangère symbolisait les espoirs des pays qui luttaient pour la liberté. Le document de discussion de l'ANC (aujourd'hui au pouvoir) de 1994 <a href="https://www.anc1912.org.za/policy-documents-1994-foreign-policy-perspective-in-a-democratic-south-africa/">déclarait</a> : </p>
<blockquote>
<p>une Afrique du Sud démocratique sera solidaire de tous ceux dont la lutte se poursuit.</p>
</blockquote>
<h2>De Mandela à Ramaphosa</h2>
<p>Nelson Mandela, le premier président de l'Afrique du Sud démocratique, <a href="https://www.dakaractu.com/Les-combats-de-Mandela-pour-la-paix-et-la-justice-en-Afrique_a57484.html">plaidait en faveur des droits de l'homme</a>, parfois même aux dépens des <a href="https://www.icirnigeria.org/mandela-begged-abacha-not-to-execute-ken-saro-wiwa-and-companions/">partenaires africains</a>. Cette promesse initiale a été progressivement mise en veilleuse. </p>
<p>En 1995, par exemple, Mandela a supplié le chef d'État militaire nigérian de l'époque <a href="https://www.liberation.fr/planete/1998/06/09/nigeria-mort-brutale-du-dictateur-abacha-le-chef-d-etat-aurait-ete-victime-d-une-crise-cardiaque_240764/">Sani Abacha</a> d'épargner la vie de <a href="https://www.universalis.fr/encyclopedie/ken-saro-wiwa/">Ken Saro-Wiwa</a> et de huit autres militants Ogoni. Ils étaient des critiques de l'inaction du gouvernement nigérian à l'égard des compagnies pétrolières étrangères qui causent des dommages à l'environnement, ils furent accusés d'avoir assassiné des chefs ogoni. Les supplications de Mandela étaient restées lettre morte et ils furent <a href="https://www.hrw.org/legacy/french/reports/nigeria96/6.htm">exécutés</a>.</p>
<p>Dans sa <a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1995/11/12/le-commonwealth-suspend-le-nigeria-apres-la-pendaison-d-opposants-l-ecrivain-ken-saro-wiwa-et-huit-autres-militants-de-la-cause-ogonie-ont-ete-executes-vendredi-10-novembre_3883656_1819218.html">réponse cinglante</a>, Mandela avait demandé que le Nigeria soit exclu du Mouvement des non-alignés et du Commonwealth jusqu'à ce qu'il établisse un régime démocratique. L'Afrique du Sud avait également rappelé son ambassadeur à Lagos pour consultations.</p>
<p>Depuis la fin des années 1990, sous les présidences successives de Thabo Mbeki, Jacob Zuma et Cyril Ramaphosa, le gouvernement sud-africain a souvent apporté son soutien à des régimes autoritaires dans le Sud, souvent au détriment des luttes populaires. Parmi les exemples, on peut citer la <a href="https://www.theguardian.com/world/2011/sep/27/dalai-lama-banned-south-africa">Chine</a>, la <a href="https://www.actionsa.org.za/human-rights-will-be-the-light-that-guides-actionsas-foreign-policy/">Russie</a>, le <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2017/07/07/arrestation-d-al-bachir-la-cpi-juge-que-l-afrique-du-sud-a-manque-a-son-devoir-mais-s-abstient-de-sanction_5157268_3212.html">Soudan</a> et le <a href="https://www.aljazeera.com/opinions/2023/6/8/south-africa-is-failing-and-its-failing-zimbabwe-too">Zimbabwe</a>. </p>
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Read more:
<a href="https://theconversation.com/south-africa-and-russia-president-cyril-ramaphosas-foreign-policy-explained-198430">South Africa and Russia: President Cyril Ramaphosa's foreign policy explained</a>
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<p>La politique étrangère sud-africaine est souvent décrite comme <a href="https://open.uct.ac.za/items/9dbfd78a-e95b-469c-8131-f2bd263f385d">incohérente</a>, <a href="https://www.jstor.org/stable/10.18772/22010105027.14">peu claire et peu sincère</a>. </p>
<p>La Palestine demeure le seul dossier de libération d'un peuple sur lequel le soutien de l'Afrique du Sud a été indéniablement constant. </p>
<h2>Solidarité avec la Palestine</h2>
<p>Pendant la guerre froide, les États sud-africain de l'apartheid et israélien ont <a href="https://www.sahistory.org.za/archive/unspoken-alliance-israels-secret-relationship-apartheid-south-africa-sasha-polakow-suransky">collaboré</a> sur des questions militaires, diplomatiques et nucléaires. Les mouvements de libération de ces deux pays - à savoir l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) et le Congrès national africain (ANC) - pratiquaient une forme alternative d'internationalisme. Il s'agissait d'un internationalisme subversif, inspiré par la solidarité des peuples du tiers-monde. </p>
<p>En 1974, lorsque le chef de l'OLP, Yasser Arafat, <a href="https://www.un.org/unispal/wp-content/uploads/1974/11/a238ec7a3e13eed18525624a007697ec_French.pdf">s'est adressé</a> à l'Assemblée générale des Nations unies, devenant ainsi le premier dirigeant de mouvements de libération à le faire, il a demandé que ce droit soit étendu à d'autres mouvements de libération. Arafat avait profité de l'occasion pour dénoncer le régime d'apartheid avec la même véhémence que celle qu'il mettait à critiquer Israël.</p>
<p>Deux ans plus tard, le président de l'ANC de l'époque, <a href="https://theconversation.com/south-africas-anc-is-celebrating-the-year-of-or-tambo-who-was-he-85838">Oliver Tambo</a>, a pris la parole devant la même instance et a <a href="http://www.gutenberg-e.org/pohlandt-mccormick/pmh03i.html">salué</a> le leadership d'Arafat sur cette question tout en exprimant sa “solidarité inébranlable” avec les Palestiniens.</p>
<p>Outre le soutien diplomatique, les deux mouvements partageaient les mêmes tactiques de résistance.</p>
<p>La faction d'Arafat au sein de l'OLP, le Fatah, a aidé l'ANC et d'autres mouvements de résistance <a href="https://global.oup.com/academic/product/armed-struggle-and-the-search-for-state-9780198292654?lang=en&cc=gb">à acquérir des formations et des armes</a>. Il est important de noter que les relations entre Tambo et Arafat étaient basées sur la confiance. En 1988, Tambo a demandé à Arafat de l'aider à obtenir des fonds des pays du Moyen-Orient et a demandé à l'OLP de devenir l'administrateur financier des fonds provenant de cette région. </p>
<h2>Le pilier</h2>
<p>Cette cohérence d'approche et de soutien s'est reflétée dans le dossier de l'Afrique du Sud devant la Cour Internationale de Justice, ramenant ainsi la promesse de libération au coeur de la conscience nationale sud-africaine. Cette initiative illustre une clarté souvent négligée dans la politique étrangère du pays en raison de ses <a href="https://open.uct.ac.za/items/9dbfd78a-e95b-469c-8131-f2bd263f385d">incohérences</a> qui ont abouti à des choix contradictoires au 21e siècle. </p>
<p>Elle reste fidèle aux <a href="https://www.foreignaffairs.com/articles/south-africa/1993-12-01/south-africas-future-foreign-policy">principes fondateurs</a> de la politique post-apartheid. Non seulement cela était nécessaire dans l'approche du pays sur les questions internationales, mais cela revêt également une importance capitale pour la restauration de l'estime de soi. </p>
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Read more:
<a href="https://theconversation.com/south-africas-foreign-policy-new-paper-sets-the-scene-but-falls-short-on-specifics-188253">South Africa's foreign policy: new paper sets the scene, but falls short on specifics</a>
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<p><a href="https://theconversation.com/south-africas-legal-team-in-the-genocide-case-against-israel-has-won-praise-who-are-they-221019">L'équipe sud-africaine</a> à La Haye comprenait des opposants au gouvernement de l'ANC. Alors que les membres de l'équipe exposaient les arguments juridiques et éthiques contre les ambitions génocidaires d'Israël, la nation les observait avec espoir. </p>
<p>Pouvait-on enfin s'attendre à ce que sa diplomatie soit à la hauteur des idéaux élevés que le pays s'était fixés à la fin de l'apartheid? </p>
<p>La comparution de l'Afrique du Sud devant la Cour internationale de Justice confirme le besoin de retrouver la boussole morale que le gouvernement de l'ANC a <a href="https://pari.org.za/new-book-state-capture-in-south-africa-how-and-why-it-happened/">perdue</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222015/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>The authors do not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and have disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>La uestions palestine demeure le seul dossier de libération d'un peuple sur lequel le soutien de l'Afrique du Sud a été indéniablement constant.Peter Vale, Senior Research Fellow, Centre for the Advancement of Scholarship, University of Pretoria., University of PretoriaVineet Thakur, Assistant Professor, International Relations, Leiden UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2207272024-01-11T14:27:15Z2024-01-11T14:27:15ZIsraël devant la Cour internationale de justice : celle-ci est-elle devenue un substitut à un Conseil de sécurité dysfonctionnel ?<p>Le 29 décembre, l’Afrique du Sud a déposé devant la <a href="https://www.icj-cij.org/fr/accueil">Cour internationale de justice</a> (CIJ), une <a href="https://www.icj-cij.org/sites/default/files/case-related/192/192-20231228-app-01-00-en.pdf">Requête introductive d’instance</a> contre l’État d’Israël. </p>
<p>La Requête stipule que ses actions dans la bande de Gaza, initiées au nom de son droit à la légitime défense, dans la foulée des attaques menées par le Hamas le 7 octobre 2023, revêtaient « un caractère génocidaire ».</p>
<p>La CIJ a tenu des audiences publiques sur la requête le 11 et 12 janvier à La Haye. </p>
<p>Le fait que <a href="https://theconversation.com/south-africas-genocide-case-against-israel-expert-sets-out-what-to-expect-from-the-international-court-of-justice-220692">l’Afrique du Sud ait choisi de déposer sa requête devant la CIJ</a> n’est pas anodin. En effet, non seulement le bureau du procureur de la <a href="https://www.icc-cpi.int/fr">Cour pénale internationale</a>, qui enquête sur la situation en Palestine depuis plusieurs années, <a href="https://theconversation.com/la-guerre-a-gaza-la-cour-penale-internationale-et-la-lutte-contre-limpunite-219523">n’aboutit pas à des résultats concrets</a>, mais le Conseil de sécurité, l’organe qui devrait être le principal garant du maintien de la paix et de la sécurité internationale, apparaît foncièrement <a href="https://theconversation.com/gaza-war-deadlock-in-the-security-council-shows-that-the-un-is-no-longer-fit-for-purpose-219772">dysfonctionnel</a>. </p>
<p>À l’inverse, la CIJ en est venue à jouer un rôle de plus en plus diligent. <a href="https://www.ejiltalk.org/provisional-but-not-always-pointless-compliance-with-icj-provisional-measures/">Au cours des 10 dernières années</a>, la Cour a ainsi prononcé plus d’ordonnances (11) que durant ses cinquante premières années d’existence (10).</p>
<p>Mes travaux sur la <a href="https://www.pulaval.com/livres/de-la-responsabilite-de-proteger-les-populations-menacees-l-emploi-de-la-force-et-la-possibilite-de-la-justice">responsabilité de protéger</a> et sur le <a href="https://www.cairn.info/annuaire-francais-de-relations--9782376510550-page-95.htm">droit de la guerre</a> m’ont conduit à porter une attention particulière aux modes alternatifs de règlement des différends, notamment par l’intermédiaire des tribunaux internationaux. Deux organes sont fréquemment mentionnés : la Cour internationale de justice et la Cour pénale internationale (CPI).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Des personnes sont assises de chaque côté dans une vaste pièce" src="https://images.theconversation.com/files/568670/original/file-20240110-30-2p1xe4.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/568670/original/file-20240110-30-2p1xe4.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/568670/original/file-20240110-30-2p1xe4.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/568670/original/file-20240110-30-2p1xe4.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/568670/original/file-20240110-30-2p1xe4.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/568670/original/file-20240110-30-2p1xe4.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/568670/original/file-20240110-30-2p1xe4.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La Cour internationale de justice lors d’une audience.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(UN Photo/CIJ-ICJ/Frank van Beek)</span></span>
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<h2>Des compétences différentes</h2>
<p>La CIJ est le principal organe judiciaire de l’Organisation des Nations unies (ONU). Elle dispose d’une compétence universelle sur les différends d’ordre juridique pouvant survenir entre États. </p>
<p>De son côté, la CPI tire sa compétence d’un traité entré en vigueur en 2002, et dont Israël n’est pas signataire. Ses responsabilités sont d’enquêter et de poursuivre des personnes physiques pour crimes graves de droit international (crimes contre l’humanité, crimes de guerre, génocides et crimes d’agression).</p>
<p>Alors que la CIJ doit être sollicitée par un État avant de pouvoir se saisir d’un contentieux, comme c’est le cas avec la démarche engagée par l’Afrique du Sud, la CPI dispose de l’autorité pour ouvrir une enquête et éventuellement déposer une accusation contre un individu.</p>
<h2>Avant Israël, la Russie</h2>
<p>Dans sa requête contre Israël, l’Afrique du Sud avance que les actions de l’État hébreu (et son défaut de prendre des mesures pour contrecarrer les incitations « directes et publiques » à commettre de telles actions) témoigneraient « de l’intention spécifique… d’entraîner la destruction d’une partie substantielle de la population palestinienne en tant que partie d’un groupe national, racial et ethnique plus large de Palestiniens dans la Bande de Gaza ». </p>
<p>De ce fait, avance l’Afrique du Sud, Israël contreviendrait aux « obligations » lui incombant en vertu de la <a href="https://www.ohchr.org/fr/instruments-mechanisms/instruments/convention-prevention-and-punishment-crime-genocide">Convention pour la prévention et la Répression du Crime de Génocide</a>, dont elle est signataire. </p>
<p>La question que la CIJ est appelée à trancher consiste uniquement, selon l’Afrique du Sud, à déterminer si les actions qui sont identifiées dans la Requête sont ou non « susceptibles de relever des dispositions » de la Convention. La Cour n’a pas à se prononcer sur le fond à ce stade. Le cas échéant, cela pourrait prendre des années. </p>
<p>On se rappellera qu’une <a href="https://icj-cij.org/sites/default/files/case-related/182/182-20220227-APP-01-00-FR.pdf">Requête</a> similaire avait également été déposée par l’Ukraine contre la Russie dans la foulée de l’« opération militaire spéciale » initiée par cette dernière le 24 février 2022. </p>
<p>La Russie était alors accusée d’avoir mensongèrement allégué « que des actes de génocide avaient été commis dans les oblasts ukrainiens de Louhansk et de Donetsk » afin de lui permettre de justifier une intervention armée. L’Ukraine affirmait que cette intervention avait engendré « des violations graves et généralisées des droits de la personne de la population ukrainienne ». Dès le 16 mars 2022, la CIJ rendait son <a href="https://www.icj-cij.org/sites/default/files/case-related/182/182-20220316-ord-01-00-fr.pdf">Ordonnance</a> et intimait à la Russie de « suspendre immédiatement les opérations militaires ».</p>
<h2>Les limites de la CIJ</h2>
<p>Dans le cas de la requête de l’Afrique du Sud, une ordonnance de la CIJ pourrait suivre au cours des prochaines semaines étant donné l’urgence de la situation.</p>
<p>Or, il ne faut pas faire preuve de trop d’optimisme. Car même dans le cas où la Cour indiquerait comme mesure conservatoire la suspension immédiate des opérations militaires, comme elle l’a fait dans le cas de l’Ukraine, et même si cette ordonnance avait bel et bien un « caractère obligatoire », comme l’a avancé la Cour en 2001 dans une autre <a href="https://icj-cij.org/sites/default/files/case-related/104/104-20010627-JUD-01-00-FR.pdf">affaire</a>, cela ne signifierait pas que la situation sur le terrain soit appelée à changer. </p>
<p>Malgré leur caractère obligatoire, les mesures d’exécution sont souvent difficiles à mettre en œuvre dans des situations hautement sensibles et controversées.</p>
<h2>Le nouveau rôle des pays tiers</h2>
<p>Ce qui est relativement nouveau, c’est que la Cour internationale de justice accepte désormais d’entendre des requêtes, telle celle parrainée par l’Afrique du Sud, présentées par un État partie à un traité ou une convention, qui allèguent un manquement à ses obligations <em>erga omnes partes</em>. De telles obligations reposent en effet sur les valeurs que les États partagent en commun et que tout État a donc un intérêt à faire respecter, sans égard au fait d’avoir ou non soi-même subi les conséquences d’un manquement.</p>
<p>Ainsi, en 2019, la Gambie a déposé une <a href="https://icj-cij.org/sites/default/files/case-related/178/178-20191111-APP-01-00-FR.pdf">Requête</a> contre le Myanmar, concernant ses actions envers les membres de la communauté rohingya. C’est aussi sur cette base d’obligations <em>erga omnes partes</em> que le Canada et les Pays-Bas ont déposé en juin 2023 une <a href="https://www.icj-cij.org/sites/default/files/case-related/188/188-20230608-req-01-00-fr.pdf">Requête</a> contre la Syrie l’accusant de contrevenir à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.</p>
<p>La reconnaissance par la CIJ de telles obligations <em>erga omnes partes</em> revendiquées par un État n’étant pas directement impliqué apparaît comme une innovation majeure. Elle permet, à défaut d’empêcher en amont qu’un État ne contrevienne à ses obligations, de lui rappeler en aval et publiquement ses obligations. </p>
<h2>Assumer un rôle émergent en maintien de la paix</h2>
<p>Au-delà de la question qu’aura à trancher la Cour, le plus important reste le rôle que les États semblent désormais vouloir lui faire jouer en lui soumettant de telles requêtes. La CIJ a compétence en matière de règlement pacifique des différends et, par extension, elle a un rôle à jouer dans le maintien de la paix et de la sécurité internationale. Mais si ses ordonnances ne sont pas suivies d’effets, sont-elles seulement destinées à marquer les esprits, ce qui contribuerait à politiser la justice internationale ?</p>
<p>S’il est certes douteux qu’une ordonnance incite un État à mettre un terme à sa conduite et à ses activités sur le terrain, la procédure elle-même demeure toutefois importante. Elle peut permettre de documenter une situation et d’établir les faits d’une manière telle qu’il pourrait être plus difficile d’en faire abstraction par la suite. </p>
<p>Ainsi, dans le cas de la Syrie, l’<a href="https://www.icj-cij.org/sites/default/files/case-related/188/188-20231116-ord-01-00-fr.pdf">Ordonnance</a> rendue par la Cour la sommait de prendre « toutes les mesures en son pouvoir afin de prévenir les actes de torture et autres… traitements cruels, inhumains ou dégradants », et lui intimait de « prendre des mesures effectives pour prévenir la destruction et assurer la conservation de tous les éléments de preuve relatifs aux allégations ». Ces éléments pourraient ultérieurement être utilisés dans le cadre de procédures judiciaires ou afin de justifier des réparations.</p>
<p>À cet égard, la Cour pourrait également faciliter la création et l’accès au terrain d’une mission visant à établir les faits et à documenter les circonstances. Il s’agit là d’un aspect important du règlement des différends qui peut contribuer au maintien de la paix et de la sécurité internationale. </p>
<p>Le défi pour la Cour consistera à assumer ce rôle émergent en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationale et à naviguer à travers ces questions d’interprétation qui demeurent éminemment politiques. Les décisions que les juges ont à prendre seront capitales pour le futur d’un ordre international qui apparaît pour le moment bien désordonné.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220727/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-François Thibault ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La Cour internationale de justice élargit de plus en plus son mandat, palliant au dysfonctionnement du Conseil de sécurité, qui devrait être le principal garant du maintien de la paix dans le monde.Jean-François Thibault, Professeur en relations internationales, École des hautes études publiques, Université de MonctonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2197672023-12-18T16:52:40Z2023-12-18T16:52:40ZÀ Gaza et en zone de guerre, les travailleurs humanitaires sont à risque de traumatismes et de blessures morales<p>Alors que les travailleurs humanitaires à Gaza tentent d’assurer <a href="https://www.forbes.com/sites/brianbushard/2023/11/10/more-than-100-un-employees-killed-in-gaza-as-death-toll-climbs/?sh=f265bad500d9">leur propre sécurité</a>, ils font aussi face à d’importants obstacles dans l’acheminement de vivres aux civils.</p>
<p>Les vivres actuellement acheminés sont largement insuffisants. Ainsi, les travailleurs humanitaires se <a href="https://www.theguardian.com/world/2023/nov/03/doctors-and-aid-workers-fight-to-survive-in-gaza-abandoned">sentent impuissants face aux immenses besoins</a>. </p>
<p>Par conséquent, ils peuvent être contraints à prendre des décisions difficiles, par exemple de décider à qui distribuer le peu de nourriture, d’eau et de ressources disponibles, se sentir abandonnés sur le terrain ou voir des situations qui transgressent profondément leurs valeurs. En raison des défis moraux auxquels ils sont confrontés à Gaza, et ailleurs dans le monde, les travailleurs humanitaires font face à un risque important de blessure morale.</p>
<p>Une <a href="https://www.ptsd.va.gov/professional/treat/cooccurring/moral_injury.asp">blessure morale</a> est un type de traumatisme psychologique qui survient après des événements qui sont tellement incompatibles avec les valeurs et attentes morales d’une personne qu’ils remettent en question les croyances fondamentales sur la justice, sur la capacité d’une personne à être un être moral et sur ce qui est bon ou juste.</p>
<h2>Des choix très difficiles</h2>
<p>Les travailleurs humanitaires sont constamment confrontés sur le plan moral. Avec une équipe de chercheurs, <a href="https://doi.org/10.3389/fpsyg.2023.1171629">j’ai récemment mené une étude pour mieux comprendre quels sont les effets psychologiques de ces défis moraux</a>. Dans le cadre de cette étude, nous avons consulté 243 travailleurs humanitaires en leur posant des questions sur leur travail, sur les événements blessants moralement qu’ils ont pu vivre et sur leur santé mentale. La plupart d’entre eux travaillaient en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie.</p>
<p>Nous avons constaté que 81 % des travailleurs humanitaires ont vécu au moins un événement qui était traumatisant parce qu’il transgressait des croyances morales importantes. Certains événements étaient liés aux actions des travailleurs humanitaires eux-mêmes, par exemple, en ayant eu du mal à décider comment allouer et utiliser des ressources lorsqu’elles sont insuffisantes.</p>
<p>Une autre étude a révélé que des <a href="https://doi.org/10.1111/j.1467-7717.2011.01232.x">travailleurs humanitaires dans le domaine médical</a> ressentaient un profond malaise lorsqu’il devait choisir les patients gravement malades à traiter (et ceux à ne pas traiter). Ce type de décisions n’a pas d’issue positive possible.</p>
<p>Dans d’autres cas, les travailleurs humanitaires peuvent avoir fait quelque chose qu’ils croyaient juste, pour finalement découvrir que leurs décisions ont eu des conséquences négatives inattendues. Par exemple, en décidant de distribuer de la nourriture aux femmes et aux enfants en premier, et que ceux-ci ont été victimes d’agressions. Notre étude a identifié que les événements vécus comme des trahisons étaient ceux les plus fréquemment rapportés comme blessants. </p>
<p>Notre recherche montre que les travailleurs humanitaires ont le plus souvent été perturbés par les événements dont ils ont été témoins. Ils <a href="https://doi.org/10.1177/1534765609332325">peuvent avoir du mal à comprendre</a> certaines pratiques culturelles qui sont contraires à leurs valeurs, ou bien des comportements en situation de survie, et remettre en question leurs croyances morales lorsqu’ils voient des atrocités ou des traitements inhumains. </p>
<p>D’autres événements difficiles sur le plan moral surviennent lorsque des travailleurs humanitaires ont le sentiment d’avoir été trahis, par exemple lorsque leur organisation ou un dirigeant ne les a pas suffisamment protégés. Environ 27 % des travailleurs humanitaires ont fait état d’au moins un événement perturbant qui leur a donné le sentiment d’avoir été trahis.</p>
<h2>Les impacts des blessures morales</h2>
<p>Les personnes exposées à des événements blessants moralement sont à risque de développer une blessure morale. On sait grâce aux recherches menées sur les anciens combattants qu’une blessure morale est caractérisée par de <a href="https://doi.org/10.1037/gpr0000018">très fortes émotions de colère, de dégoût, de honte ou de culpabilité</a>.</p>
<p>Les personnes affectées par une blessure morale présentent souvent des <a href="https://doi.org/10.1002/jts.22362">symptômes de dépression, d’anxiété et de stress post-traumatique</a>. Elles peuvent s’isoler de leurs proches ou avoir des comportements d’auto-sabotage. Elles ont souvent des pensées négatives sur elles-mêmes ou les autres. Par exemple, elles peuvent se sentir faibles ou avoir des idées suicidaires, et avoir l’impression d’être brisée ou que leur vie n’a plus de sens.</p>
<p>Les événements blessants sur le plan moral semblent être un facteur de risque important pour les travailleurs humanitaires. Notre recherche suggère qu’une proportion notable pourrait souffrir de blessure morale. De fait, nous avons trouvé que ces événements étaient associés de manière significative à plus de symptômes de stress post-traumatique et de dépression. Les événements confrontant sur le plan moral contribuaient plus fortement aux difficultés psychologiques que les événements où leur sécurité a été compromise.</p>
<h2>Aider les travailleurs humanitaires</h2>
<p>Les travailleurs humanitaires évoluent dans des environnements complexes et souvent chaotiques. Ils sont très <a href="https://doi.org/10.1080/21577323.2015.1093565">résilients</a>, mais la nature de leur travail implique inévitablement des défis moraux et, par conséquent, des risques de blessure morale. Néanmoins, les individus et les organisations peuvent mettre en place certaines mesures pour réduire ce risque.</p>
<p>Premièrement, aider les travailleurs humanitaires à prendre des décisions difficiles pourrait contribuer à réduire leur fardeau personnel. Par exemple, la recherche menée sur d’autres professions à haut risque, comme les <a href="https://www.moralinjuryguide.ca/Documents/Moral-Injury-Guide.pdf">travailleurs de la santé durant la pandémie de Covid-19</a>, suggère que la prise de décision en équipe, la cohésion et la discussion régulière de défis moraux pourraient réduire le risque de blessure morale.</p>
<p>Deuxièmement, les problèmes qui ne sont pas nommés ne peuvent pas être réglés. Il est donc important de mieux faire connaître les blessures morales en tant que risque professionnel lié à l’aide humanitaire. Les organisations humanitaires doivent mieux préparer leurs travailleurs à cet aspect de leur travail. Il est important de bien communiquer aux travailleurs humanitaires qu’ils peuvent remettre en question la moralité de certains événements et avoir de la difficulté à comprendre leurs propres actions, celles des autres et les événements qui sont perçus comme des trahisons. Cela est essentiel pour réduire la stigmatisation et valider les expériences des travailleurs humanitaires.</p>
<p>Troisièmement, la honte, le dégoût, la colère et la culpabilité sont des signes d’un fonctionnement moral sain. Se reconnecter à ses valeurs personnelles et aux raisons qui ont motivé le choix de travailler dans le domaine de l’aide humanitaire peut être une bonne façon de commencer à dénouer ces émotions.</p>
<p>Les <a href="https://doi.org/10.1016/j.janxdis.2013.10.005">résultats de notre étude</a> suggèrent par ailleurs que des événements blessants moralement sont liés à une croissance psychologique pour les travailleurs humanitaires. Tout en étant douloureux, ces événements peuvent les amener à revoir leurs objectifs de vie, à développer une nouvelle compréhension de ce qui est important à leurs yeux, ainsi qu’une plus grande force personnelle. Ils sentent que leurs relations sociales sont plus intimes ou plus significatives, et ont une plus grande appréciation de la vie.</p>
<p>La recherche sur le bien-être psychologique de ces travailleurs est essentielle pour mieux les soutenir dans leurs fonctions et dans le travail qu’ils accomplissent.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/219767/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michelle Dewar a bénéficié du soutien financier du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada et du Fonds de recherche du Québec en société et culture.
</span></em></p>Les travailleurs humanitaires doivent souvent faire des choix difficiles. Les organisations doivent être conscientes de l’impact mental sur leur personnel et lui apporter leur soutien.Michelle Dewar, Doctorante en psychologie (Ph.D/D.ps), Université du Québec à Montréal (UQAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2180872023-12-15T15:29:17Z2023-12-15T15:29:17ZCOP28 : un accord inédit, mais sans l’urgence d’agir<p>Lors de la <a href="https://unfccc.int/cop28">COP28</a> qui vient de se terminer à Dubaï, la communauté internationale avait la lourde responsabilité de produire un bilan de la mise en œuvre de <a href="https://unfccc.int/fr/a-propos-des-ndcs/l-accord-de-paris">l’Accord de Paris</a>, huit ans après son adoption. </p>
<p>Ce bilan avait pour but <a href="https://unfccc.int/fr/themes/global-stocktake/about-the-global-stocktake/pourquoi-le-bilan-mondial-est-un-moment-critique-pour-l-action-climatique#tab_home">d’évaluer les progrès collectifs, d’actualiser et de renforcer les mesures prises pour lutter contre les changements climatiques</a>.</p>
<p><a href="https://unfccc.int/sites/default/files/resource/GST_2.pdf">La décision adoptée</a> à Dubaï par la communauté internationale relève du compromis. C’est une COP qui a su éviter l’échec, sans pour autant annoncer des changements substantiels nécessaires pour éviter le pire.</p>
<p>Chercheurs et chercheures à l’UQAM, à l’Université d’Ottawa et à l’Université Laval, nous étions observateurs et observatrices pour le <a href="https://www.cqde.org/fr/">Centre québécois du droit de l’environnement</a> et le <a href="https://www.uottawa.ca/faculte-droit/common-law/centre-droit-environnement-durabilite-mondiale">Centre du droit de l’environnement et de la durabilité mondiale</a>. Nous avons suivi la COP28 à distance et en personne. Voici les éléments clés que nous en retenons.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/cop-27-une-decision-historique-et-un-terrible-statu-quo-194151">COP 27 : une décision historique… et un terrible statu quo</a>
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<h2>Une organisation logistique qui en a exclu plusieurs</h2>
<p>La COP28 restera dans les mémoires des délégués non-VIP présents sur place comme un événement où les déplacements et l’orientation sur l’immense site d’Expo City Dubaï étaient difficiles. Cela a rendu la participation aux rencontres et aux événements ardue. Le nombre d’entre eux annulés ou retardés, sans préavis, était également notable.</p>
<p>Lorsqu’au bout de ce <a href="https://www.lalibre.be/planete/environnement/2023/12/04/avec-plus-de-88000-accredites-la-cop28-cest-disneyworld-cest-trop-grand-il-y-a-trop-dinformations-en-meme-temps-L326BHKHAVFSZC3AACV4HP4CN4/">parcours du combattant</a>, le ou la délégué lambda parvenait à se rendre à un événement ou une rencontre en cours, l’accès à la salle pouvait encore lui être refusé, faute de places assises disponibles, très limitées. Il ou elle pouvait aussi se heurter à la barrière de la langue, puisque les traductions dans les langues officielles des Nations unies, autres que l’anglais, n’étaient pas systématiques. </p>
<p>Les rares manifestants ont dû composer avec les <a href="https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2023/12/global-cop28-agreement-to-move-away-from-fossil-fuels-sets-precedent-but-falls-short-of-safeguarding-human-rights/">restrictions à l’espace civique</a> et les changements à l’agenda qui <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/environnement/2023-12-09/la-presse-a-la-cop28/la-plus-aseptisee-de-toutes-les-cop.php">limitaient leur marge de manœuvre et leur impact</a>.</p>
<p>Autant d’obstacles qui, en pratique, traduisaient un certain manque d’inclusion et d’équité.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/nous-etions-a-la-cop26-voici-nos-constats-sur-ses-resultats-en-demi-teinte-172031">Nous étions à la COP26 : voici nos constats sur ses résultats en demi-teinte</a>
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<h2>L’avenir des énergies fossiles : verre à moitié vide ou à moitié plein ?</h2>
<p>Les négociations sur le sort des énergies fossiles ont été âpres entre le Nord et le Sud. Fruit d’un compromis, le <a href="https://unfccc.int/sites/default/files/resource/cma2023_L17_adv.pdf">texte adopté mercredi</a> invite le monde à « transitionner hors des énergies fossiles […], d’une manière juste, ordonnée et équitable, en accélérant l’action dans cette décennie cruciale, afin d’atteindre la neutralité carbone en 2050 ». </p>
<p>L’accord final n’évoque donc plus la sortie des énergies fossiles (phase-out), mais une transition hors de celles-ci (transitioning away). Cette formule imprécise et vague laisse perplexe, même si le texte a le mérite de mentionner pour la première fois toutes les énergies fossiles.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/cop28-voici-les-fondements-scientifiques-pour-une-elimination-rapide-des-combustibles-fossiles-219565">COP28 : voici les fondements scientifiques pour une élimination rapide des combustibles fossiles</a>
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<p>Le texte appelle aussi à <a href="https://unfccc.int/sites/default/files/resource/cma2023_L17_adv.pdf">« tripler la capacité des énergies renouvelables au niveau mondial » et à « accélérer »</a> le développement du nucléaire, en tant que source d’électricité qui génère peu de carbone. L’accord de Dubaï est donc inédit, mais il n’apparaît pas historique dans la mesure où l’urgence climatique suppose des décisions plus ambitieuses, courageuses et contraignantes.</p>
<h2>Finances climatiques : un énième échec et une lueur d’espoir</h2>
<p>Une nouvelle fois, la communauté internationale n’a pas été capable de mobiliser les 100 milliards de dollars par année nécessaires pour financer l’atténuation des changements climatiques. Il faut rappeler que <a href="https://unstats.un.org/sdgs/tierIII-indicators/files/13.a.1_Background.pdf">cet objectif devait être atteint en 2020</a>, à la suite d’un engagement pris à la COP15, en 2009.</p>
<p>Au premier jour de la COP28 (c’est suffisamment rare pour être noté), un accord sur <a href="https://unfccc.int/sites/default/files/resource/cp2023_L1_cma2023_L1_adv.pdf">l’opérationnalisation d’un fonds pour les pertes et les préjudices</a> a néanmoins été adopté. Ce dernier a pour but de financer les dommages inévitables résultant des changements climatiques. Malgré tout, peu de pays développés se sont engagés à financer ce fonds. <a href="https://www.theguardian.com/environment/2023/dec/06/700m-pledged-to-loss-and-damage-fund-cop28-covers-less-than-02-percent-needed">Environ 700 millions de dollars ont été promis, comparativement aux 400 milliards annuels qui seraient nécessaires</a>.</p>
<p>La concrétisation du fonds « pertes et préjudices » outille certes la communauté internationale, mais cela ne garantit pas que les contributions financières seront à la hauteur des besoins. Et, nous l’avons vu avec l’historique de la finance climatique, les États ne se bousculent pas pour sortir le chéquier.</p>
<h2>Une COP aux allures de foire commerciale</h2>
<p>Entre les salles d’exposition pour les voitures électriques, les conférences sur les opportunités d’affaires générées par la transition énergétique et les occasions de réseautage, la COP28 avait des airs de <a href="https://www.courrierinternational.com/article/climatiques-les-folles-nuits-de-la-cop28">sommet pour les gens d’affaires</a>, plus nombreux que jamais à participer à une COP Climat. </p>
<p>Près de <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/12/05/cop28-a-dubai-presence-massive-des-lobbyistes-des-energies-fossiles_6203988_3244.html">2500 lobbyistes affiliés au secteur des énergies fossiles</a> étaient accrédités pour l’événement, <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/environnement/cop/infographies-cop28-a-dubai-la-presence-massive-et-sans-precedent-des-lobbyistes-des-energies-fossiles_6224418.html">certains faisant partie des délégations officielles des États</a>. Présentes aux négociations et ayant un accès privilégié aux négociations, l’influence de ces personnes sur le processus a été déplorée par les autres membres de la société civile.</p>
<p>Les entreprises et institutions financières présentes à la COP28 ont insisté sur la nécessité de davantage mobiliser le secteur privé et de miser sur les mécanismes de marché et leur potentiel, afin de faciliter la transition énergétique en créant des opportunités pour toutes et tous. </p>
<p>Toutefois, certains projets ne sont pas <em>bankable</em>, selon les institutions financières. Les projets fondés sur une valeur sociale ou environnementale ne sont pas forcément dotés d’une grande valeur monétaire. Peut-on alors les laisser décider de prioriser certains projets plus économiquement porteurs, lorsque le bien commun est en jeu ?</p>
<h2>Un bilan canadien assombri par les tensions sur le plan national</h2>
<p>Le ministre canadien de l’Environnement et du changement climatique, Steven Guilbeault, a qualifié l’accord conclu lors de la COP28 de <a href="https://www.canada.ca/fr/environnement-changement-climatique/nouvelles/2023/12/le-canada-contribue-a-lobtention-de-resultats-historiques-sur-le-plan-de-lambition-climatique-et-de-lenergie-propre-a-la-cop28.html">consensus historique pour s’éloigner des énergies fossiles et garder en vie l’objectif de limiter à 1,5° le réchauffement de la planète</a>. </p>
<p>Il a agi au cours des négociations comme <a href="https://www.canada.ca/fr/environnement-changement-climatique/nouvelles/2023/11/le-ministre-guilbeault-est-a-la-tete-de-la-delegation-canadienne-a-la-conference-des-nations-unies-sur-les-changements-climatiques-cop28-afin-denco.html">l’un des ministres facilitateurs pour les moyens de mise en œuvre (par exemple, le soutien financier)</a>, plaçant le Canada dans un rôle d’avant-plan lors de cette COP. Il a en outre annoncé la publication d’un <a href="https://www.canada.ca/fr/services/environnement/meteo/changementsclimatiques/plan-climatique/plafonnement-emissions-secteur-petrolier-gazier/cadre-reglementaire.html">cadre réglementaire national pour plafonner les émissions de GES du secteur pétrolier et gazier</a>.</p>
<p>Cependant, ce rôle de premier plan et cette annonce notable n’auront pas été suffisants pour effacer les tensions fortes sur le plan national. L’Alberta, d’ailleurs récipiendaire <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/environnement/2023-12-06/cop28/l-alberta-remporte-le-prix-satirique-fossile-du-jour.php">d’un des prix « Fossile du jour » remis par le Réseau Action Climat</a>, n’a pas tardé à critiquer l’annonce d’un plafonnement des émissions de GES, la <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/environnement/2023-12-07/industrie-petrogaziere/ottawa-veut-reduire-les-emissions-du-tiers.php#">qualifiant d’attaque envers l’économie albertaine</a>. La Saskatchewan, présentant elle aussi plusieurs divergences sur les politiques environnementales, a de son côté loué <a href="https://ici.radio-canada.ca/sujet/changements-climatiques/actualites/document/nouvelles/article/2028670/cop28-jim-reiter-ecologie-industrie">son propre pavillon sur le site de la COP28</a> plutôt que de partager l’espace du gouvernement fédéral. </p>
<p>Le Québec s’est relativement fait discret, mais il a toutefois profité de l’événement pour annoncer son nouveau rôle de coprésident de l’Alliance « Au-delà du pétrole et du gaz », avec le Costa Rica et le Danemark. L’accomplissement des engagements climatiques canadiens ne sera pas facilité par ces fortes divergences entre les provinces, et sur les moyens à mettre en œuvre pour les atteindre.</p>
<h2>Cap sur Bakou</h2>
<p>Le bilan de cette COP varie selon si l’on voit le verre à moitié plein, ou à moitié vide… Au moins, il y a un verre et un contenu. Il y a eu des avancées notables, même si l’ambition sur les énergies fossiles a été limitée alors que le temps presse. </p>
<p>Dubaï semble avoir manqué l’occasion de constituer une véritable rupture dans la manière de lutter contre les changements climatiques. Les regards se tournent désormais vers Bakou, en Azerbaïdjan, où se déroulera la COP29. Le profil de ce pays pétrolier et autoritaire devrait faire couler beaucoup d’encre.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218087/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lynda Hubert Ta est membre du Centre du droit de l'environnement et de la durabilité mondiale de l'Université d'Ottawa, duquel elle a reçu un financement pour participer à la COP 28.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Les recherches de Nessan Akemakou sont financées par le Forum de l'Université d'Ottawa sur le droit et la gouvernance de l'eau. Nessan est par ailleurs président de L'Afrique des Idées, un think tank indépendant et à but non lucratif.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Les recherches doctorales de Rachel Nadeau sont financées par le Fonds de recherche du Québec - Société et culture. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Alexandre Lillo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La décision adoptée à Dubaï par la communauté internationale relève du compromis. C’est une COP qui a su éviter l’échec, sans pour autant annoncer des changements substantiels pour éviter le pire.Alexandre Lillo, Professeur au Département des sciences juridiques, Université du Québec à Montréal (UQAM)Lynda Hubert Ta, Professeur en droit, L’Université d’Ottawa/University of OttawaNessan Akemakou, Chercheur postdoctoral, L’Université d’Ottawa/University of OttawaRachel Nadeau, Candidate au doctorat, Université Laval, Université LavalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2197802023-12-14T18:58:13Z2023-12-14T18:58:13ZDevrait-on envisager une administration transitoire pour Gaza ?<p>Le massacre perpétré contre Israël par le Hamas le 7 octobre dernier constitue un nouveau chapitre de la tragédie qu’est le conflit israélo-palestinien.</p>
<p>Depuis plus de 75 ans, on a vu trop d’occasions de parvenir à une paix durable être gâchées, que ce soit par l’intransigeance des uns, les excès extrémistes des autres, l’engagement asymétrique d’une tierce partie ou même le désintérêt mondial pour le conflit.</p>
<p>Le 12 décembre, 153 membres de l’Assemblée générale des Nations unies, dont le <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/politique/2023-12-12/israel-et-le-hamas-en-guerre/le-canada-vote-pour-un-cessez-le-feu-aux-nations-unies.php">Canada</a>, ont voté en faveur d’une <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2034516/cessez-feu-guerre-gaza-israel-onu">résolution pour un cessez-le-feu</a>. <a href="https://www.bbc.com/news/live/world-middle-east-67687628?ns_mchannel=social&ns_source=twitter&ns_campaign=bbc_live&ns_linkname=6578d92a87855b2dac7d421c%26US%20votes%20against%20resolution%2C%20UK%20abstains%262023-12-12T22%3A05%3A31.507Z&ns_fee=0&pinned_post_locator=urn:asset:2e285aa8-1cc6-4cc4-a867-38f595685178&pinned_post_asset_id=6578d92a87855b2dac7d421c&pinned_post_type=share">Dix membres ont voté contre la résolution</a>, dont Israël et les États-Unis. Vendredi,les <a href="https://www.ledevoir.com/monde/803492/etats-unis-bloquent-onu-appel-cessez-feu-humanitaire-immediat-gaza">États-Unis ont opposé leur veto</a> à une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies réclamant un cessez-le-feu.</p>
<p>Pourtant, le président américain Joe Biden <a href="https://www.washingtonpost.com/opinions/2023/11/18/joe-biden-gaza-hamas-putin/">a exprimé récemment son intention de résoudre le conflit</a> :</p>
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<p>otre objectif ne doit pas être simplement d’arrêter la guerre en cours, mais d’y mettre un terme définitif. </p>
</blockquote>
<p>Ces développements, qui comprennent la détermination apparente des États-Unis à reprendre leurs efforts pour instaurer une paix durable entre Israéliens et Palestiniens pendant que des milliers de personnes meurent dans le conflit, nécessitent une réflexion sur ce que serait la ligne de conduite la plus efficace.</p>
<h2>La moins mauvaise solution</h2>
<p>Il est évident que les chances de succès peuvent sembler faibles. Mais y a-t-il d’autres options ? Un retour au statu quo d’avant le 7 octobre consisterait à accepter la répétition à plus ou moins long terme d’un nouveau cycle de violence effroyable.</p>
<p>L’élimination de la menace posée par le Hamas ne peut se faire par une nouvelle occupation de la bande de Gaza par Israël, et encore moins par la disparition de tous les Palestiniens de l’enclave, comme le <a href="https://www.washingtonpost.com/world/2023/11/17/israel-government-right-gaza-endgame-conquest/">suggèrent</a> les éléments les plus radicaux de la scène politique israélienne.</p>
<p><a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2023-12-08/palestinian-authority-working-with-us-on-postwar-plan-for-gaza">Le retour</a> d’une <a href="https://pune.news/international/unpopular-ineffective-palestinian-authority-cant-drive-two-state-solution-97139/">autorité palestinienne inefficace</a> et moribonde à la suite des opérations militaires des Forces de défense israéliennes à Gaza n’est pas crédible et est voué à l’échec.</p>
<p>Les pays arabes de la région <a href="https://carnegieendowment.org/2023/11/03/there-might-be-no-day-after-in-gaza-pub-90920">ne veulent pas prendre en charge</a> la sécurité et l’administration de Gaza, et l’ingérence d’une seule grande puissance étrangère comme les États-Unis constituerait une forme d’impérialisme.</p>
<p>Devant ces options inenvisageables, la meilleure solution – ou la moins mauvaise – semble être de mettre en place une administration transitoire à Gaza avec trois objectifs : assurer la sécurité, œuvrer à la reconstruction et jeter les bases d’une stabilité politique et d’un développement économique.</p>
<p>Ce modèle a fait ses preuves lors de la mission de pacification et de reconstruction au <a href="https://peacekeeping.un.org/mission/past/unmiset/background.html">Timor oriental</a> en 1999 <a href="https://unmik.unmissions.org/mandate">et au Kosovo</a> la même année. Les Nations unies pourraient même envisager de réactiver leur <a href="https://www.un.org/fr/about-us/trusteeship-council">Conseil de tutelle</a>, inactif depuis 1994.</p>
<h2>Conditions nécessaires</h2>
<p>Pour garantir sa légitimité et disposer d’un mandat, une telle administration devrait reposer sur deux piliers impliquant le Conseil de sécurité des Nations unies : un accord régional en vertu du chapitre VIII de la <a href="https://www.un.org/fr/about-us/un-charter/chapter-8">Charte des Nations unies</a> et la mise en œuvre d’une force d’imposition de la paix en vertu du chapitre VII afin de rétablir l’ordre et d’assurer la sécurité.</p>
<p>Une telle approche multinationale donnerait de l’espoir aux Gazaouis et rassurerait le gouvernement israélien sur le fait que le Hamas et d’autres groupes extrémistes ne pourront revenir.</p>
<p>À long terme, elle pourrait même favoriser l’émergence d’une administration du territoire pleine et fonctionnelle, offrant la perspective concrète d’une solution politique à ce vieux conflit avec la création d’un État palestinien (qui commencerait par Gaza et s’étendrait à la Cisjordanie).</p>
<p>Le succès d’une telle approche, comme ce fut le cas par le passé en Bosnie et au Kosovo (avec la participation de l’OTAN et de l’Union européenne), repose sur l’instauration d’une force de maintien de la paix dotée d’un mandat fort du Conseil de sécurité de l’ONU.</p>
<p>Cette force devrait être suffisamment importante pour assurer la sécurité et, si nécessaire, imposer la paix – ce qui signifie au moins 50 000 soldats de l’ONU bien armés, bien coordonnés, avec des règles d’engagement claires, fournis par les pays participants (sans la Russie, pour des raisons évidentes) et placés sous un commandement unique désigné par le Conseil, comme cela a été le cas pendant la <a href="https://www.unc.mil/About/About-Us/">guerre de Corée</a>.</p>
<p>Cette dernière exigence est primordiale pour empêcher que ne se reproduise le scénario catastrophique de <a href="https://academic.oup.com/book/276/chapter-abstract/134840604?redirectedFrom=fulltext">l’intervention ratée en Somalie</a> en 1993. La création d’une telle structure militaire bien intégrée et bien organisée est absolument essentielle pour éviter toute paralysie décisionnelle.</p>
<h2>Perspectives économiques</h2>
<p>Reconstruire Gaza et offrir des perspectives économiques à ses habitants nécessitera évidemment des ressources financières considérables.</p>
<p>Une administration transitoire, ou même un <a href="https://research.un.org/en/docs/tc/reform">Conseil de tutelle remanié</a>, devraient amasser des sommes importantes et rendre compte régulièrement de l’utilisation de ces fonds (ainsi que de l’évolution de la sécurité dans la région).</p>
<p>Les fonds pourraient être fournis par les puissances occidentales habituelles, mais aussi les riches pays du Golfe, qui seraient peut-être disposés à aider financièrement les Palestiniens sans avoir à s’impliquer outre mesure sur le plan politique, afin de ne pas nuire à l’amélioration de leurs relations avec Israël.</p>
<p>Des institutions internationales telles que le Fonds monétaire international, la Banque mondiale et le <a href="https://www.undp.org/fr">Programme des Nations unies pour le développement</a> devraient également participer – une tâche plus facile si elle s’inscrit dans un cadre et une mission sous l’égide des Nations unies.</p>
<h2>Le retour du Canada ?</h2>
<p>Les plus cyniques ou les plus pessimistes diront que la mise en place d’une telle initiative est trop complexe et vouée à l’échec.</p>
<p>Nous suggérons au premier ministre Justin Trudeau qu’il se porte à la défense d’une telle administration transitoire, qu’il parcoure le monde pour en vanter les mérites, s’engage à ce que le Canada participe activement à la création d’une force internationale de maintien de la paix et propose au Conseil de sécurité la relance du Conseil de tutelle pour Gaza.</p>
<p>Il devrait solliciter le soutien de notre puissant voisin et convaincre les États-Unis d’investir dans l’infrastructure de commandement de cette nouvelle mission, ce qui contribuerait probablement à rassurer Israël sur le sérieux d’une telle approche.</p>
<p>M. Trudeau pourrait obtenir l’appui de l’Europe et tenter de rallier les dirigeants des pays du Sud, notamment le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva et le premier ministre indien Narendra Modi (ce qui pourrait aussi servir à apaiser les tensions entre le Canada et l’Inde).</p>
<p><a href="https://musee-clemenceau.fr/clemenceau/biographie/">Georges Clemenceau, chef du gouvernement français à la fin de la Première Guerre mondiale</a>, a affirmé qu’il était plus facile de faire la guerre que la paix. La durée du conflit israélo-palestinien en témoigne.</p>
<p>Mais compte tenu de l’ampleur de la violence qui a enflammé la région à partir du 7 octobre, il est urgent que le monde trouve un moyen d’instaurer une paix durable entre Israéliens et Palestiniens.</p>
<p>Les pertes horribles et incessantes de vies humaines nous obligent à faire preuve d’ambition. La sécurité de l’ensemble du Moyen-Orient est en jeu, et le fait de passer à l’action pourrait contribuer à apaiser les tensions au sein des sociétés occidentales, de plus en plus divisées par le conflit.</p>
<p>C’est aussi l’occasion pour le Canada de <a href="https://www.cbc.ca/player/play/2677447276">faire un véritable « retour » sur la scène internationale</a>. Participer à la résolution du conflit correspond parfaitement aux valeurs canadiennes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/219780/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La meilleure solution - ou la moins mauvaise - pour résoudre le conflit israélo-palestinien passe par la mise en place d'une administration transitoire à Gaza. Voici comment cela pourrait fonctionner.Julien Tourreille, Chargé de cours en science politique et chercheur à la Chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques, Université du Québec à Montréal (UQAM)Charles-Philippe David, Président de l'Observatoire sur les États-Unis de la Chaire Raoul-Dandurand et professeur de science politique, Université du Québec à Montréal (UQAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2193392023-12-08T16:29:31Z2023-12-08T16:29:31ZLes mots de la COP : dictionnaire portatif des négociations climatiques à Dubaï<p>La ville de Dubaï est l’une des principales places financières contemporaines ainsi qu’un lieu emblématique de la production d’énergies fossiles. Elle accueille, du 30 novembre au 12 décembre 2023, la COP28. Ce rendez-vous, qui réunit représentants des États, lobbyistes et autres acteurs de la société civile, est consacré à la discussion de la menace climatique à laquelle est exposée l’humanité.</p>
<p>Les termes employés au cours de ce sommet et les <a href="https://www.carbonbrief.org/interactive-tracking-negotiating-texts-at-cop28-climate-summit/">énoncés qui figureront dans la résolution finale</a> – âprement discutée par les diplomates chaque année – ne manqueront pas d’être parfois techniques. Et en réalité, les bras de fer se jouent sur des subtilités de langage moins anodines qu’elles n’y paraissent, qui échappent souvent au grand public.</p>
<p>Ce très bref dictionnaire vise à apporter un éclairage sur le sens des « mots de la COP » et sur la réalité qui se cache derrière ces derniers.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/bonnes-feuilles-climat-30-mots-pour-comprendre-et-agir-189843">Bonnes feuilles : « Climat, 30 mots pour comprendre et agir »</a>
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<h2>Accord de Paris</h2>
<p><a href="https://theconversation.com/fr/topics/accord-de-paris-23135">Accord international adopté lors de la COP21</a> en 2015, visant à limiter le réchauffement climatique à moins de 2 °C (et si possible 1,5 °C) par rapport aux niveaux préindustriels.</p>
<p>Cet accord impose aux pays signataires de formuler à intervalles réguliers des prévisions concernant leurs trajectoires d’émissions de gaz à effet de serre (voir NDC, ci-dessous).</p>
<p>Il ne les engage en revanche nullement à faire converger ces trajectoires vers des niveaux compatibles avec l’objectif des 2 °C – jugé désormais inatteignable par une <a href="https://media.nature.com/original/magazine-assets/d41586-021-02990-w/19817644">majorité d’experts interrogés à ce sujet en 2021</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/accord-de-paris-cinq-ans-apres-ou-en-sommes-nous-151555">Accord de Paris : cinq ans après, où en sommes-nous ?</a>
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<h2>Adaptation</h2>
<p>Ensemble des actions mises en œuvre pour faire face aux conséquences inévitables du changement climatique. L’ONU a estimé dans son dernier rapport consacré à ce sujet que le financement de l’adaptation au changement climatique est actuellement <a href="https://www.unep.org/fr/resources/rapport-2023-sur-le-deficit-de-ladaptation-au-climat">10 à 18 fois inférieur à ce qu’il devrait être</a> pour que cette dernière soit efficace.</p>
<p>Les financements actuels sont par ailleurs souvent orientés vers des <a href="https://theconversation.com/climate-adaptation-projects-sometimes-exacerbate-the-problems-they-try-to-solve-a-new-tool-hopes-to-correct-that-213969">projets de « maladaptation »</a>, dont les <a href="https://theconversation.com/barrages-et-reservoirs-leurs-effets-pervers-en-cas-de-secheresses-longues-111583">mégabassines</a> sont un exemple emblématique. Ces dernières permettent aux agriculteurs de faire face aux sécheresses à court terme, mais contribuent à l’épuisement rapide des nappes phréatiques.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/face-a-lurgence-climatique-ladaptation-cest-des-maintenant-159870">Face à l’urgence climatique, l’adaptation, c’est dès maintenant !</a>
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<h2>AOSIS (<em>Alliance of Small Island States</em>)</h2>
<p>Regroupement des <a href="https://theconversation.com/1-5-c-un-objectif-irrealiste-52190">petits États insulaires menacés par la montée du niveau de la mer</a>. Il est peu probable que ces États soient entièrement engloutis par la montée des eaux dès le XXI<sup>e</sup> siècle. Bon nombre d’entre eux pourraient néanmoins <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/sciadv.aap9741">devenir inhabitables</a> en raison de l’incursion progressive de l’eau de mer dans les aquifères, dont l’intégrité est indispensable à la survie des espèces et de la population locale.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/climat-lepineuse-question-de-la-responsabilite-historique-des-pays-industrialises-193511">Climat : l’épineuse question de la responsabilité historique des pays industrialisés</a>
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<h2>Atténuation</h2>
<p>Actions visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre pour ralentir le changement climatique. Malgré les nombreux engagements pris en ce sens depuis les années 1990, les efforts actuels n’ont pas permis d’endiguer la hausse des émissions. <a href="https://ieep.eu/news/more-than-half-of-all-co2-emissions-since-1751-emitted-in-the-last-30-years/">Plus de la moitié</a> des gaz à effet de serre rejetés dans l’atmosphère par les êtres humains ont ainsi été émis entre 1990 et 2020.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-emissions-de-co-dorigine-fossile-ont-atteint-un-nouveau-record-en-2023-219133">Les émissions de CO₂ d’origine fossile ont atteint un nouveau record en 2023</a>
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<h2>Biocarburants</h2>
<p>Carburants de substitution produits à partir de sources biologiques (matière première d’origine végétale, animale ou encore issue de déchets). Les biocarburants représentent aujourd’hui environ <a href="https://www.iea.org/reports/renewables-2022/transport-biofuels">5 % des carburants employés dans les transports</a>.</p>
<p>Leur production requiert cependant la <a href="https://theconversation.com/pour-une-huile-de-palme-durable-soutenir-les-petits-producteurs-et-encadrer-les-grandes-plantations-75653">mobilisation d’espaces agricoles extrêmement étendus</a>, ce qui conduit parfois les producteurs à <a href="https://reporterre.net/La-demande-en-biocarburants-va-fortement-pousser-la-deforestation">contribuer à la déforestation</a> et limite drastiquement la croissance de leur usage.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/carburants-de-synthese-biocarburants-kerosene-vert-de-quoi-parle-t-on-exactement-125391">Carburants de synthèse, biocarburants, kérosène vert… De quoi parle-t-on exactement ?</a>
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<h2>Bouquet énergétique (ou mix énergétique)</h2>
<p>Composition des différentes sources d’énergie utilisées dans un pays ou une zone géographique définie. Les énergies fossiles représentaient dans les années 1990 environ 80 % du bouquet énergétique mondial – un chiffre <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/06/08/en-2020-les-energies-fossiles-occupaient-80-du-mix-energetique-soit-la-meme-part-que-trente-ans-auparavant_6129392_3232.html">resté stable</a> au cours des 30 dernières années.</p>
<p>Le bouquet énergétique ne doit pas être confondu avec le bouquet électrique, qui concerne uniquement les sources d’énergie destinées à la production d’électricité. En France, l’énergie nucléaire représente ainsi environ 70 % du bouquet électrique, mais <a href="https://www.ouest-france.fr/environnement/nucleaire/quelle-est-la-part-du-nucleaire-dans-le-mix-energetique-des-principaux-pays-du-monde-97ca60e6-2c23-11ec-8e7d-0373d7df7446">moins de 40 % du bouquet énergétique</a>, encore largement dominé par les énergies fossiles.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/nucleaire-eolien-quelle-evolution-du-discours-mediatique-en-france-208259">Nucléaire, éolien : quelle évolution du discours médiatique en France ?</a>
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<h2>COP (Conférence des Parties)</h2>
<p>Réunion annuelle des pays signataires de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (voir UNFCCC, ou CCNUCC) consacrée aux discussions climatiques internationales. Les COP accueillent ainsi les chefs d’État et leurs représentants, un certain nombre d’associations ainsi que divers lobbys – notamment issus du secteur des énergies fossiles.</p>
<p>Entre la COP1 organisée à Berlin en 1995 et la COP 28, actuellement organisée à Dubaï et présidée par Sultan Al-Jaber, PDG de la principale entreprise pétrolière émiratie, les émissions annuelles de CO<sub>2</sub> ont augmenté de <a href="https://www.lefigaro.fr/economie/le-scan-eco/dessous-chiffres/climat-les-emissions-mondiales-de-co2-ont-augmente-de-55-en-vingt-ans-20190419">plus de 50 %</a> au niveau mondial.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/a-quoi-servent-les-cop-une-breve-histoire-de-la-negociation-climatique-218366">À quoi servent les COP ? Une brève histoire de la négociation climatique</a>
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<h2>Compensation carbone</h2>
<p>Mécanisme visant à compenser les émissions de gaz à effet de serre par le financement de projets censés permettre la réduction de la quantité de CO<sub>2</sub> présente dans l’atmosphère.</p>
<p>Les entreprises les plus émettrices peuvent ainsi se procurer auprès d’organismes agréés des « crédits carbone », investis par exemple dans des initiatives de reforestation. Mais plus de 90 % des certificats délivrés n’auraient aucune valeur et n’ont <a href="https://www.courrierinternational.com/une/une-du-jour-le-marche-des-compensations-carbone-est-un-scandale-climatique">donné lieu à aucune initiative</a> permettant d’assurer une réelle diminution du CO<sub>2</sub> présent dans l’atmosphère.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/histoire-des-credits-carbone-vie-et-mort-dune-fausse-bonne-idee-212903">Histoire des crédits carbone : vie et mort d'une fausse bonne idée ?</a>
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<h2>Développement durable</h2>
<p>Concept développé dans les années 1970 renvoyant à un « développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ». De nombreuses entreprises se réclament aujourd’hui d’une démarche de développement durable, par exemple <a href="https://www.liberation.fr/environnement/climat/greenwashing-totalenergies-vise-par-une-enquete-pour-pratiques-commerciales-trompeuses-20230126_TI3N74TWMNFHXMINYW3Z5FWIUM/">Total</a> ou <a href="https://lesjours.fr/obsessions/pollutions-locales/ep13-lafarge/">Lafarge</a> en France.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/mesurer-le-developpement-durable-est-ce-possible-195992">Mesurer le développement durable, est-ce possible ?</a>
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<h2>Extinction de masse</h2>
<p>Événement bref – à l’échelle des temps géologique tout du moins – au cours duquel une grande partie des espèces vivant sur Terre disparaissent. La planète a déjà connu <a href="https://theconversation.com/extinctions-de-masse-comment-la-vie-rebondit-48271">cinq grandes extinctions de masse</a>.</p>
<p>Une <a href="https://www.mnhn.fr/fr/actualites/sixieme-extinction-de-masse-la-disparition-des-especes-a-ete-largement-sous-estimee">sixième extinction de masse</a> est actuellement en cours selon les scientifiques, notamment sous l’effet du réchauffement climatique – mais aussi de la déforestation et de la pollution. Cette extinction étant d’origine anthropique, elle est parfois décrite comme la <a href="https://issues.fr/aurelien-barrau-et-les-chiffres-de-leffondrement/">première extermination de masse du vivant</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/a-propos-des-grandes-crises-dextinction-81531">À propos des grandes crises d’extinction</a>
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<h2>GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat)</h2>
<p>Organisation scientifique chargée de produire à intervalles réguliers un état des lieux concernant les connaissances sur le changement climatique. Le GIEC a joué un rôle décisif dans la diffusion des informations relatives au climat au cours des trois dernières décennies.</p>
<p>Ses résumés pour les décideurs, principale source d’information pour les dirigeants tout comme pour la société civile, sont cependant <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/03/20/le-rapport-de-synthese-du-giec-un-guide-pratique-pour-desamorcer-la-bombe-a-retardement-climatique_6166256_3244.html">relus et amendés</a> par les représentants des États, qui exercent donc une influence importante sur le choix des formulations retenues et des données présentées.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/nouveau-rapport-du-giec-toujours-plus-documente-plus-precis-et-plus-alarmant-178378">Nouveau rapport du GIEC : toujours plus documenté, plus précis et plus alarmant</a>
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<h2>Finance verte</h2>
<p>Financements destinés à soutenir des projets contribuant à la lutte contre le changement climatique. De nombreuses structures se sont ainsi engagées dans le « désinvestissement », mouvement qui consiste à se retirer de tout investissement dans les énergies fossiles.</p>
<p>Ces dernières ont pourtant été financées à hauteur de <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/environnement/crise-climatique/infographies-crise-climatique-en-2022-les-grandes-banques-ont-verse-673-milliards-de-dollars-aux-producteurs-d-energies-fossiles_5764847.html">673 milliards de dollars</a> par les banques en 2022.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/energies-fossiles-le-desinvestissement-naffecte-pas-encore-negativement-la-rentabilite-boursiere-185417">Énergies fossiles : le désinvestissement n’affecte pas (encore) négativement la rentabilité boursière</a>
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<h2>Fonds vert pour le climat</h2>
<p>Mécanisme financier rattaché à l’ONU et destiné à aider les pays les moins riches à faire face aux conséquences du changement climatique. La décision de créer ce Fonds date de la COP15, qui a eu lieu en 2009 à Copenhague. Ce Fonds devait atteindre 100 milliards de dollars en 2020 – un objectif qui n’a pas été atteint.</p>
<p>L’essentiel des sommes accordées a par ailleurs <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/10/25/climat-l-objectif-de-100-milliards-de-dollars-pour-les-pays-du-sud-atteignable-en-2023_6099859_3244.html">pris la forme de prêts</a> et non de dons réels et contribue donc à accroître l’endettement des pays les moins fortunés.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/fonds-vert-pour-le-climat-des-projets-malgre-tout-105356">Fonds vert pour le climat, des projets malgré tout</a>
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<h2>Géo-ingénierie</h2>
<p>Ensemble de techniques visant à modifier délibérément le climat de la Terre pour contrer les effets du changement climatique. Les projets de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/geo-ingenierie-40114">géo-ingénierie</a> incluent par exemple la fertilisation des océans par injection de sulfates de fer (qui pourrait conduire à la <a href="https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/oceanographie-geoingenierie-fertiliser-oceans-fer-idee-toxique-23060/">disparition de l’essentiel de la vie marine</a>), l’injection d’aérosols sulfatés dans l’atmosphère (qui pourrait entraîner un <a href="https://climate.envsci.rutgers.edu/pdf/2008JD010050small.pdf">hiver volcanique à l’échelle mondiale</a>), ou encore <a href="https://www.novethic.fr/actualite/environnement/climat/isr-rse/la-geoingenierie-pour-sauver-la-planete-deployer-des-ombrelles-solaires-dans-l-espace-150022.html">l’installation d’un parasol géant dans l’espace</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/bonnes-feuilles-ils-voulaient-refroidir-la-terre-160317">Bonnes feuilles : « Ils voulaient refroidir la Terre »</a>
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<h2>NDC ou CDN (Contributions déterminées au niveau national)</h2>
<p><a href="https://theconversation.com/contributions-nationales-50286">Engagements individuels pris par chaque pays signataire</a> de l’accord de Paris pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre. Une partie de ces contributions sont conditionnelles : elles ne seront mises en œuvre qu’à condition que soit accordé un soutien financier international – qui fait pour l’instant <a href="https://www.un.org/fr/climatechange/raising-ambition/climate-finance">largement défaut</a>.</p>
<p>La mise en œuvre des seules NDC inconditionnelle – c’est-à-dire financées directement par les États eux-mêmes – devrait <a href="https://fr.euronews.com/green/2023/11/20/le-monde-sur-une-trajectoire-de-rechauffement-catastrophique-29-c-alerte-lonu">conduire à un réchauffement de 2,9 °C</a>. Il existe cependant un écart important entre les engagements formulés par les États et les politiques publiques qu’ils implémentent effectivement : le niveau de réchauffement dépassera donc largement les 3 °C au cours du XXI<sup>e</sup> siècle en l’absence de changement de cap.</p>
<h2>Pertes et dommages</h2>
<p>Destructions engendrées par le dérèglement du climat. Un fonds de compensation des pertes et dommages à destination des pays vulnérables a été adopté dans les premiers jours de la COP28 – ce qui représente un immense progrès.</p>
<p>L’OMS prévoit cependant qu’<a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/climate-change-and-health">au moins 250 000 personnes périront chaque année</a> entre 2030 et 2050 en raison du dérèglement climatique, dont elle n’a pris en compte que les effets les plus directs.</p>
<p>Ces vies étant sacrifiées en toute connaissance de cause par les États les plus émetteurs, certains vont jusqu’à penser que l’inaction climatique à l’origine de ces « pertes et dommages » devrait en fait être considérée comme un <a href="https://www.humanite.fr/en-debat/maxime-combes/maxime-combes-la-procrastination-des-gouvernements-est-un-crime-climatique-715188">crime climatique</a> – voire comme une forme d’atrocité de masse, étant donné l’ampleur des destructions auxquelles elle ne peut manquer de conduire.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/cop28-un-an-apres-la-percee-sur-les-pertes-et-dommages-en-egypte-pays-riches-et-pays-pauvres-toujours-divises-218445">COP28 : un an après la percée sur les « pertes et dommages » en Egypte, pays riches et pays pauvres toujours divisés</a>
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<h2>« Phase out », « phase down », « unabated »</h2>
<p>Processus visant à éliminer progressivement l’usage de combustibles fossiles – tout l’enjeu étant de s’accorder sur ce que peut ici signifier le terme « progressivement ».</p>
<p>Plutôt qu’une élimination progressive (« phase out ») du charbon, la COP26 avait retenu, à la suite d’une <a href="https://www.france24.com/fr/europe/20211114-cop26-charbon-pertes-et-pr%C3%A9judices-d%C3%A9forestation-que-contient-le-pacte-de-glasgow">intervention conjointe</a> de la Chine, de l’Inde et de l’Arabie saoudite, la formule plus prudente de « phase down ». Cette expression renvoie à la simple réduction – progressive, cela va sans dire – de la consommation d’énergies fossiles.</p>
<p>Les États pourraient cependant s’entendre prochainement sur le <em>phasing out of unabated fossil fuel</em>, le terme « unabated » renvoyant aux seules énergies fossiles dont la production n’inclut aucun procédé de capture ou de destruction du carbone. Le choix d’une telle formulation permettrait donc aux producteurs de poursuivre leurs activités extractives tout en s’engageant à recourir à des technologies dont le déploiement à grande échelle est pourtant des <a href="https://www.lemonde.fr/climat/article/2021/04/10/climat-les-fausses-promesses-des-technologies-de-captage-du-carbone_6076305_1652612.html">plus incertains</a>.</p>
<h2>Protocole de Kyoto</h2>
<p>Accord international signé en 1997 pour assurer la réduction des émissions de gaz à effet de serre des pays industrialisés. Le protocole prévoyait une baisse des émissions de ces pays de l’ordre de 5 % en une quinzaine d’années – là où le GIEC avait recommandé dès son premier rapport une diminution d’au moins 60 %.</p>
<p>Le Canada et les États-Unis ont cependant jugé le protocole de Kyoto trop ambitieux, et s’en sont donc finalement retirés.</p>
<h2>Puits de carbone</h2>
<p>Écosystèmes naturels (océans et forêts par exemple) ou technologies capables d’absorber le dioxyde de carbone présent dans l’atmosphère. Les capacités d’absorption des puits naturels sont limitées. Certains d’entre eux pourraient même devenir, une fois dépassés les niveaux de saturation, des sources d’émissions additionnelles.</p>
<p>Les incendies canadiens de 2023 ont ainsi conduit à l’émission d’un <a href="https://www.liberation.fr/environnement/climat/canada-les-incendies-de-foret-de-cet-ete-ont-emis-lequivalent-de-plus-dun-milliard-de-tonnes-de-co2-20230812_LUJG5EK54JFCDHH4CIU5PV2PWA/">milliard de tonnes de CO<sub>2</sub></a> dans l’atmosphère – soit autant que les émissions annuelles du Japon, cinquième plus grand émetteur mondial. Quant aux puits artificiels, ils n’existent pour l’instant qu’au stade expérimental, et ne devraient donc pouvoir être déployés à large échelle au cours des décennies à venir.</p>
<h2>Résilience</h2>
<p>Capacité d’un système à absorber un choc puis à trouver un nouvel état d’équilibre. De nombreux pays ambitionnent d’atteindre une forme de « résilience climatique » qui leur permettrait de faire face aux destructions engendrées par la multiplication des catastrophes climatiques.</p>
<p>Ce discours est parfois dénoncé comme cynique par certaines victimes des destructions climatiques. Une survivante de l’ouragan Katrina avait ainsi déclaré <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-3-031-07301-4_1">plusieurs années après le sinistre</a> : « Cessez de dire que je suis résiliente – car à chaque fois que vous affirmez « Oh, ils sont résilients », vous vous donnez la possibilité de continuer à me faire subir quelque chose d’autre ».</p>
<h2>UNFCCC ou CCNUCC (Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques)</h2>
<p>Accord international signé lors du Sommet de la Terre à Rio en 1992, visant à stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Après plus de 30 années de hausse constante des émissions de gaz à effet de serre, une écrasante majorité des pays producteurs d’énergies fossiles prévoit de <a href="https://www.citepa.org/fr/2023_11_a02/">continuer à augmenter sa production</a> au moins jusqu’en 2030.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-echapper-a-la-malediction-de-la-rente-fossile-218546">Comment échapper à la malédiction de la rente fossile ?</a>
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<h2>Zéro émissions nettes</h2>
<p>Objectif visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre à un niveau suffisamment bas pour qu’elles soient entièrement compensées par les mécanismes naturels ou technologiques d’absorption de carbone. La plupart des scénarios censés permettre la limitation du réchauffement à 2 °C reposent sur cette idée et supposent ainsi sur le déploiement massif et rapide de techniques de <a href="https://theconversation.com/la-capture-et-le-stockage-du-carbone-comment-ca-marche-192673">capture et de stockage du carbone</a>, bien que leur développement soit hautement incertain (voir Puits de carbone).</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/une-france-zero-carbone-en-2050-pourquoi-le-debat-sur-la-sobriete-est-incontournable-172185">Une France zéro carbone en 2050 : pourquoi le débat sur la sobriété est incontournable</a>
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<img src="https://counter.theconversation.com/content/219339/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gaspard Lemaire ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les négociations climatiques s’appuient sur un jargon parfois technique, qu’il est indispensable de connaître pour cerner les enjeux de la COP28. Un bref abécédaire des mots les plus importants.Gaspard Lemaire, Doctorant au sein de la Chaire Earth du Centre Jean Bodin, Université d'AngersLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2183662023-11-29T17:25:45Z2023-11-29T17:25:45ZÀ quoi servent les COP ? Une brève histoire de la négociation climatique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/561019/original/file-20231122-19-ml4xqa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La COP21 de 2015, qui a vu la signature de l'accord de Paris, est l'un des moments charnières dans l'histoire récente de la diplomatie climatique.</span> <span class="attribution"><span class="source">UN Photo / Rick Bajorna</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Chaque année, la <a href="https://christiandeperthuis.fr/c-comme-cop-de-glasgow/">COP (ou Conférence des Parties) sur le climat</a> réunit pendant deux semaines des délégués venus du monde entier. Pour les représentants des États, c’est l’occasion de négocier les accords climatiques, comme le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/protocole-de-kyoto-22542">protocole de Kyoto</a> (1997) ou l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/accord-de-paris-23135">accord de Paris</a> (2015). De multiples évènements parallèles réunissent experts, représentants de la société civile et acteurs du monde économique. À l’extérieur de l’enceinte officielle, les militants battent le pavé, avec leurs pancartes dénonçant l’inertie des dirigeants face à l’urgence climatique.</p>
<p>Hautement médiatisées, les COP attirent de <a href="https://www.carbonbrief.org/analysis-how-delegations-at-cop-climate-summits-have-changed-over-time/">plus en plus de monde</a> : près de 10 000 personnes en 1997 à Kyoto pour mettre au point le protocole du même nom, plus de 30 000 à Paris en 2015. La barre des 40 000 a été franchie <a href="https://theconversation.com/que-retenir-de-la-cop26-171796">à Glasgow en 2021</a>.</p>
<p>À quoi servent ces grands-messes annuelles ? Pour mieux comprendre, opérons un petit retour en arrière.</p>
<h2>Aux origines de la diplomatie climatique</h2>
<p>Si le lien entre les rejets de CO<sub>2</sub> et le réchauffement de la planète a été <a href="https://theconversation.com/ecrire-une-autre-histoire-du-dereglement-climatique-168164">établi dès 1896 par le Nobel de chimie Svante Arrhenius</a>, la question a ensuite été ignorée des politiques pendant près d’un siècle. La création en 1988 du <a href="https://theconversation.com/nouveau-rapport-du-giec-toujours-plus-documente-plus-precis-et-plus-alarmant-178378">GIEC, le Groupement intergouvernemental d’experts sur le climat</a>, va totalement changer la donne.</p>
<p>Le <a href="https://www.ipcc.ch/reports/">premier rapport d’évaluation du GIEC</a> paraît en 1990. Il présente les premiers scénarios climatiques qui anticipent, si rien n’est fait pour contrôler des émissions de gaz à effet de serre (GES), un réchauffement global de 4 à 5 °C à l’horizon 2100. Il recommande, sur le modèle de ce qui a été fait quelques années auparavant <a href="https://theconversation.com/diplomatie-scientifique-une-arme-majeure-sous-employee-en-france-74190">pour protéger la couche d’ozone</a>, l’adoption d’une « convention cadre » et de « protocoles additionnels » pour coordonner l’action des États.</p>
<p>Deux ans après la publication du rapport, se tient en 1992 à Rio le <a href="https://theconversation.com/cop-50019">« Sommet de la Terre »</a>, une conférence décennale des Nations unies sur l’environnement. Ce sommet historique débouche sur l’adoption de trois conventions internationales sur la biodiversité, la désertification et le climat.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/561035/original/file-20231122-21-wc2ljh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561035/original/file-20231122-21-wc2ljh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=395&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561035/original/file-20231122-21-wc2ljh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=395&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561035/original/file-20231122-21-wc2ljh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=395&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561035/original/file-20231122-21-wc2ljh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=497&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561035/original/file-20231122-21-wc2ljh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=497&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561035/original/file-20231122-21-wc2ljh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=497&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le sommet de la Terre à Rio en 1992.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Michos Tzovaras/UN</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>La Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC, ou UNFCCC en anglais) est le traité international fondateur de la négociation climatique. Elle fixe un objectif ultime : stabiliser la concentration atmosphérique des GES à un niveau limitant les « perturbations anthropiques dangereuses du système climatique ». La Convention laisse toutefois le soin aux futurs textes d’application de préciser ce niveau.</p>
<p>Elle introduit le principe de la <a href="https://theconversation.com/inegalites-face-au-changement-climatique-la-balle-est-dans-le-camp-des-plus-riches-116616">« responsabilité commune mais différenciée »</a> face au réchauffement global. En ratifiant la Convention, chaque partie reconnaît porter une part de la responsabilité qui doit être différenciée suivant le degré de développement. La Convention liste en annexe les pays développés (pays occidentaux et Japon) qui portent la plus lourde responsabilité.</p>
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<p>La Convention climat ne se contente pas d’énoncer des principes généraux. Elle met aussi en place une gouvernance, avec un secrétariat, des organes techniques basés à Bonn en Allemagne, et un organe suprême : la Conference of the Parties (COP) qui doit se réunir au moins une fois par an. Dans les COP, chaque pays, quelle que soit sa taille ou sa puissance économique, dispose d’une voix et les décisions se prennent au consensus.</p>
<p>Deux ans après la conférence de Rio, la Convention climat est ratifiée par un nombre suffisant de pays pour entrer en vigueur en mars 1994. La première COP sera convoquée à Berlin en décembre. Les négociations climatiques sont lancées.</p>
<h2>L’ère des COP, de Berlin à l’accord de Paris</h2>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/561040/original/file-20231122-27-gj99px.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561040/original/file-20231122-27-gj99px.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561040/original/file-20231122-27-gj99px.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561040/original/file-20231122-27-gj99px.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561040/original/file-20231122-27-gj99px.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561040/original/file-20231122-27-gj99px.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561040/original/file-20231122-27-gj99px.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Angela Merkel, alors ministre de l’Environnement de l’Allemagne, à la COP1 de Berlin, en 1994.</span>
<span class="attribution"><span class="source">UNFCC/X</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>C’est une jeune ministre de l’environnement, inconnue du public, qui préside la première COP : une certaine Angela Merkel, qui fait là ses premiers pas diplomatiques. Sa tâche est assez simple : la COP1 donne un mandat de deux ans à un groupe de négociateurs pour compléter la Convention de 1992 par un texte d’application.</p>
<p>En décembre 1997, c’est chose faite : la COP3 adopte le protocole de Kyoto, premier texte d’application de la Convention de 1992. Ce protocole introduit des engagements contraignants pour les pays développés et les pays de l’ex-bloc soviétique, qui doivent réduire de 5 % leurs émissions de GES entre 1990 et 2008-2012.</p>
<p>Pour faciliter l’atteinte de cet objectif, des mécanismes de flexibilité reposant sur des échanges de quotas ou crédits carbone sont introduits, <a href="https://theconversation.com/le-retour-des-etats-unis-dans-laccord-de-paris-forcement-une-bonne-nouvelle-pour-le-climat-150345">sous la pression des négociateurs américains</a> qui y voient une façon d’alléger la contrainte pesant sur les États-Unis.</p>
<p>Les négociations semblent alors être bien parties. Mais pour entrer en vigueur, le Protocole de Kyoto doit être ratifié par un nombre suffisant de pays représentant un certain volume d’émissions…</p>
<h2>Quand les États se renvoient la balle</h2>
<p>En mars 2001, le Président Bush, nouvellement élu à la Maison Blanche, annonce que les États-Unis ne ratifieront pas un protocole qui n’est pas contraignant pour la Chine et les autres pays émergents. Et c’est alors que la diplomatie climatique se complique.</p>
<p>Car sans la signature des États-Unis, il faut avoir celle de la Russie pour atteindre le quorum permettant à Kyoto d’entrer en application. Cela donne un grand pouvoir de négociation au Président Poutine qui ne va pas se priver de l’utiliser. La Douma <a href="https://theconversation.com/le-scepticisme-de-la-russie-vis-a-vis-du-changement-climatique-explique-par-son-histoire-scientifique-142743">finit par ratifier le protocole en novembre 2004</a> et le protocole de Kyoto entre en application début 2005.</p>
<p>Mais sans la participation des États-Unis et avec l’accélération des émissions de la Chine et des autres pays émergents d’Asie, il couvre désormais moins d’un tiers des émissions mondiales de GES. Il faut donc trouver les voies d’un élargissement des accords climatiques.</p>
<p>De 2005 à 2009, l’Union européenne préconise donc d’élargir le protocole de Kyoto aux pays émergents après 2012, ce qui permettrait un retour des États-Unis. Cette tentative échoue en 2009 à la COP15 de Copenhague.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/561073/original/file-20231122-27-atag2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561073/original/file-20231122-27-atag2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561073/original/file-20231122-27-atag2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561073/original/file-20231122-27-atag2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561073/original/file-20231122-27-atag2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561073/original/file-20231122-27-atag2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561073/original/file-20231122-27-atag2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">À la COP15 de Copenhague, en 2009.</span>
<span class="attribution"><span class="source">UN Photo/Mark Garten</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Les grands pays émergents ne veulent pas d’un super-Kyoto, mais font une contre-proposition : un accord universel où chaque pays déposerait librement sa contribution avec un engagement de transfert financier des pays riches. Le Président Obama se rallie à ce schéma avec une promesse de transfert de 100 milliards de dollars par an de pays riches vers les pays pauvres.</p>
<p>En 2010, on renoue les fils de la négociation à la COP de Cancún sur ces nouvelles bases. L’année suivante, la COP17 de Durban confie un nouveau mandat à un groupe de négociateurs, de quatre ans cette fois, pour parvenir à un accord universel au plus tard en 2015 à la COP21.</p>
<p>Une grande incertitude pèse alors sur la possibilité de parvenir à un tel accord universel. À tel point que les candidatures ne sont pas légion pour héberger la COP21. La France se porte candidate. Sous la houlette de Laurent Fabius, le réseau du Quai d’Orsay est mobilisé. Son action est facilitée par l’engagement des Présidents Obama et Xi Jinping qui se prononcent à deux reprises à l’amont de la conférence en faveur d’un tel accord.</p>
<h2>Les premiers pas de l’accord de Paris</h2>
<p>Nouveau texte d’application de la convention de 1992, <a href="https://theconversation.com/accord-de-paris-sur-le-climat-lambition-na-pas-ete-sacrifiee-52255">l’accord de Paris est adopté le 12 décembre 2015</a>. Sa forme juridique n’est pas un protocole, mais une annexe de la décision de la COP21, ce qui facilitera sa ratification, notamment par les États-Unis. Comme en témoigne le nombre des chefs d’État sur la photo de famille, c’est un beau succès diplomatique.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/561084/original/file-20231122-29-dmvrez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561084/original/file-20231122-29-dmvrez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=339&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561084/original/file-20231122-29-dmvrez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=339&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561084/original/file-20231122-29-dmvrez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=339&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561084/original/file-20231122-29-dmvrez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=426&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561084/original/file-20231122-29-dmvrez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=426&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561084/original/file-20231122-29-dmvrez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=426&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Plus de 150 chefs d’État et de Gouvernement ont participé à la COP21 à Paris.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Agência Brasil/Wikicommons</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>En matière climatique, l’accord précise en premier lieu les objectifs de long terme : limiter le réchauffement global bien en dessous de 2 °C en visant 1,5 °C. Pour y parvenir, l’article 4 précise qu’il faut atteindre rapidement le pic des émissions pour viser la neutralité climatique, conformément aux scénarios <a href="https://www.ipcc.ch/report/ar5/syr/">du 5ᵉ rapport d’évaluation du GIEC</a>, publié en amont de la conférence.</p>
<p>Les objectifs de réduction des émissions de GES sont déclinés en « contributions déterminées au plan national » (NDC), que les pays déposent sur un registre des Nations unies et doivent réviser au moins une fois tous les cinq ans à la hausse, au vu d’un bilan global.</p>
<p>Au titre de la différenciation de la responsabilité, les financements climatiques devront être accrus, les 100 milliards de dollars par an à partir de 2020 étant considérés comme un socle minimal amené à être fortement augmenté.</p>
<p>Contrairement au Protocole de Kyoto, l’accord de Paris entre très rapidement en application, le 4 novembre 2016. Moins d’un an après la COP21, mais… quelques jours avant l’élection présidentielle américaine. Nouvellement élu, Donald Trump retire les États-Unis de l’Accord de Paris en mars 2017. L’histoire serait-elle en train de se répéter ?</p>
<p>Pas tout à fait, compte tenu des règles de sortie de l'accord de Paris, impliquant au moment de la décision américaine qu’<a href="https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/climat/4-ans-pour-que-les-etats-unis-sortent-de-l-accord-de-paris-apres-la-decision-de-trump_113497">un délai de quatre ans soit révolu pour que ce retrait devienne effectif</a> : le temps d’élire un nouveau président ! L’une des premières décisions de Joe Biden à la Maison Blanche a été de signer un décret ramenant les États-Unis dans la maison onusienne.</p>
<p>Car l’épisode trumpien n’a pas fait dérailler l’accord de Paris. À la COP26 de Glasgow, retardée d’un an pour cause de Covid-19, la quasi-totalité des pays, États-Unis inclus, <a href="https://unfccc.int/news/cop26-update-to-the-ndc-synthesis-report">avait déposé sur le registre des Nations unies leur contribution à l’accord de Paris</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/cinq-ans-apres-laccord-de-paris-30-ans-apres-le-premier-rapport-du-giec-enfin-lacceleration-pour-laction-climatique-mondiale-151556">Cinq ans après l’accord de Paris, 30 ans après le premier rapport du GIEC, enfin l’accélération pour l’action climatique mondiale ?</a>
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<h2>La suite de l’histoire est à écrire</h2>
<p>À la COP28 de Dubaï, les négociateurs vont examiner le tout premier bilan global de l’accord de Paris, préparé par le secrétariat de Bonn. C’est sur cette base que la négociation s’engagera avant le dépôt du prochain jeu de contributions nationales pour la prochaine période quinquennale démarrant en 2025.</p>
<p>Le <a href="https://unfccc.int/documents/631600">rapport technique</a> que vont trouver les délégations est sans équivoque. Si tous les pays mettent bien en œuvre leurs contributions nationales, les émissions mondiales cesseront de croître à partir de 2025 – voire diminueront même d’environ 10 % entre 2019 et 2030 dans le meilleur des cas (zone en rouge sur le graphique). C’est loin d’être suffisant pour rejoindre les trajectoires d’émission du GIEC limitant le réchauffement climatique en dessous de 2 °C.</p>
<p>Par ailleurs, au plan des financements climatiques, le <a href="https://www.oecd.org/environment/growth-accelerated-in-the-climate-finance-provided-and-mobilised-in-2021-but-developed-countries-remain-short.htm">bilan établi par l’OCDE</a> est sans équivoque. Sur les 100 milliards promis de longue date par les pays riches, 10 manquent encore à l’appel en 2021.</p>
<p>Pour rattraper le temps perdu, il va donc falloir fortement rehausser l’ambition des NDC d’ici 2025 et surtout s’assurer des conditions de leur mise en œuvre. Cela implique de mobiliser davantage d’investissements proclimat et de diriger une plus large part de ces investissements vers les pays moins avancés. Simultanément, il faut tarir ceux dirigés vers les énergies fossiles et parallèlement renforcer les actions en faveur des <a href="https://theconversation.com/mesurer-linvisible-la-dure-tache-de-calculer-le-stock-et-le-flux-de-carbone-dune-foret-212810">forêts</a> et de l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/agro-ecologie-33625">agroécologie</a>.</p>
<p>Mission impossible dans le contexte actuel de dégradation des relations internationales ? Deux ans avant la COP21, peu d’observateurs pariaient sur l’adoption d’un accord universel <a href="https://www.lesechos.fr/2015/12/les-trois-folles-journees-qui-ont-failli-faire-chavirer-la-cop21-263957">comme celui de Paris</a>, et pourtant. La COP28 peut-elle apporter quelques bonnes surprises ? Réponse mi-décembre à Dubaï.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218366/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian de Perthuis ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>À quoi servent les COP ? Certains mettent en doute leur utilité. Du sommet de Rio à la COP28, un retour historique permet de mieux saisir les enjeux de la négociation climatique…Christian de Perthuis, Professeur d’économie, fondateur de la chaire « Économie du climat », Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2187572023-11-29T17:25:40Z2023-11-29T17:25:40ZCOP28 : les négociations climatiques sont-elles entrées dans l'ère du pur spectacle ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/562187/original/file-20231128-23-zmqe81.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La COP28 saura-t-elle, comme Atlas, porter le monde à bout de bras pour sortir de la crise climatique ?</span> <span class="attribution"><span class="source">Climate Alliance / Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span></figcaption></figure><p>Le 30 novembre marque le début de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/cop28-147549">COP28</a>, une nouvelle saison de négociations climatiques mondiales. Malgré l’attention médiatique croissante sur ce rendez-vous annuel, une question persiste : l’effervescence réussira-t-elle à convaincre les pays de mettre en place des actions significatives pour protéger le climat ? Ou la montagne va-t-elle encore accoucher d’une souris ?</p>
<p>Les COP, ou conférences des parties, ont joué un rôle essentiel en réunissant tous les pays du monde à s’engager dans l’objectif crucial de limiter le dérèglement climatique. Elles sont fondées sur la <a href="https://unfccc.int/fr/processus-et-reunions/qu-est-ce-que-la-ccnucc-la-convention-cadre-des-nations-unies-sur-les-changements-climatiques">Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques</a> de 1992, et chaque année ouvre un cycle de négociations où les pays sont censés faire le bilan des actions entreprises et décider des actions à venir.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/a-quoi-servent-les-cop-une-breve-histoire-de-la-negociation-climatique-218366">À quoi servent les COP ? Une brève histoire de la négociation climatique</a>
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<p>C’est lors de la COP21 en 2015 que l’<a href="https://unfccc.int/fr/a-propos-des-ndcs/l-accord-de-paris">accord de Paris</a> a été trouvé, engageant tous les pays, pour la première fois, à limiter le réchauffement de la planète à un niveau « nettement inférieur » à 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels et à poursuivre les « efforts pour le limiter » à 1,5 °C.</p>
<p>Cependant, <a href="https://theconversation.com/cinq-ans-apres-laccord-de-paris-30-ans-apres-le-premier-rapport-du-giec-enfin-lacceleration-pour-laction-climatique-mondiale-151556">l’espoir suscité par l’accord de Paris</a> est aujourd’hui terni par un contexte extrêmement pessimiste entourant la COP28, convoquée à Dubaï jusqu’au 12 décembre 2023.</p>
<p>Trois séries de faiblesses émergent, concernant respectivement les acteurs présents à la table des négociations, les sujets débattus, et enfin le calendrier de la réunion.</p>
<h2>Belles paroles et vains engagements moraux</h2>
<p>Malgré les quelque 70 000 participants attendus à la COP28, deux acteurs majeurs manquent à l’appel : les présidents américain, Joe Biden, et chinois, Xi Jinping, qui ont conclu un <a href="https://www.nytimes.com/2023/11/14/climate/us-china-climate-agreement.html">accord</a> sur les investissements en énergies renouvelables quelques semaines avant la COP28. Leur absence jette une ombre sur l’ambition des deux plus grands émetteurs mondiaux, qui représentent à eux seuls 38 % des émissions.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/de-rio-a-duba-les-rivalites-entre-les-etats-unis-et-la-chine-dans-les-negociations-climatiques-218411">De Rio à Dubaï : les rivalités entre les États-Unis et la Chine dans les négociations climatiques</a>
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<p>Selon la <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/09644016.2018.1442388">littérature scientifique</a>, ces pays, ainsi que l’Union européenne, sont perçus comme des leaders des négociations climatiques. Or, cette année, les principaux pays font profil bas et même l’Union européenne sera représentée par un commissaire néerlandais conservateur, <a href="https://www.ouest-france.fr/environnement/climat/portrait-qui-est-wopke-hoekstra-ex-de-shell-et-mckinsey-et-nouveau-monsieur-climat-de-lue-d48b6bc6-6748-11ee-a5bb-3c3a0f3f3a5e">Wopke Hoekstra</a>, ayant un passé peu proche de l’ambition climatique.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/562402/original/file-20231129-29-w4uyiv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/562402/original/file-20231129-29-w4uyiv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/562402/original/file-20231129-29-w4uyiv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/562402/original/file-20231129-29-w4uyiv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/562402/original/file-20231129-29-w4uyiv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/562402/original/file-20231129-29-w4uyiv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/562402/original/file-20231129-29-w4uyiv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’activiste Greta Thunberg, ici représentée sur une fresque murale à Bristol, au Royaume-Uni, est rapidement devenue un symbole de l’action climatique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Duncan Cumming/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span>
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<p>Du côté de l’ambition, ce sont le pape, le roi Charles III du Royaume-Uni et le secrétaire général des Nations unies qui vont donner le « la » des actions à entreprendre. Les questions éthiques ont aussi permis à <a href="https://www.mdpi.com/2071-1050/13/20/11326">Greta Thunberg</a> de mobiliser la jeunesse en masse pour lui donner voix à la table des négociations.</p>
<p>Mais sur la question climatique, la moralité a montré ses limites : aucun de ces acteurs n’a un pouvoir réel de décision, et si leur présence donne de la visibilité à la négociation, <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5744595/">leur pouvoir n’est que d’ordre moral</a>.</p>
<p>Quelques semaines avant la COP28, le roi Charles III a été <a href="https://www.theguardian.com/politics/2023/nov/07/anti-green-measures-in-kings-speech-are-desperate-political-play-by-sunak">obligé d’annoncer</a> au parlement britannique le programme du gouvernement qui prétend donner de nouvelles licences de forage pétrolier et gazier en mer du Nord. Alors que le roi se présente comme un fervent défenseur du climat, ces mesures sont en opposition directe avec la <a href="https://www.ipcc.ch/sr15/">limite de 1,5 °C</a> qu’il faudrait respecter pour éviter des dégâts majeurs. Autrement dit, les beaux discours ne suffisent pas à sauver la planète.</p>
<h2>Le double jeu pétrolier du Sultan Al-Jaber</h2>
<p>Plusieurs évaluations de l’ONU – comme <a href="https://www.unep.org/resources/emissions-gap-report-2023">l’édition 2023 de l’Emissions Gap Report du Programme des Nations unies pour l’environnement</a> (PNUE), ou même les <a href="https://unfccc.int/documents/631600">engagements actuels pris par les États dans le cadre de l’accord de Paris</a> – ont montré que les engagements actuels nous placent sur une trajectoire d’augmentation des températures comprise entre 2,5 et 2,9 °C, bien au-delà des objectifs fixés par l’accord de Paris.</p>
<p>Or, le président de la COP, le Sultan Al-Jaber, est en proie à des conflits d’intérêts majeurs en ce qui concerne la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Alors qu’il est censé guider la rédaction des décisions de la négociation d’une manière neutre et indépendante, Al-Jaber représente aussi le pays hôte, les Émirats arabes unis, en tant que <a href="https://theconversation.com/comment-le-magnat-du-petrole-qui-preside-la-cop28-compte-porter-les-ambitions-des-pays-du-sud-216655">CEO de la compagnie pétrolière nationale, Adnoc</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/562404/original/file-20231129-29-hh00vu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/562404/original/file-20231129-29-hh00vu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/562404/original/file-20231129-29-hh00vu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/562404/original/file-20231129-29-hh00vu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/562404/original/file-20231129-29-hh00vu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/562404/original/file-20231129-29-hh00vu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/562404/original/file-20231129-29-hh00vu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le Sultan Al-Jaber en janvier 2023 à l’occasion d’une réunion internationale.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Craig Strydom/Wikicommons</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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</figure>
<p>Plusieurs enquêtes ont d’ailleurs montré que les Émirats envisagent d’<a href="https://www.theguardian.com/environment/2023/apr/04/revealed-uae-plans-huge-oil-and-gas-expansion-as-it-hosts-un-climate-summit">augmenter les exploitations</a> de pétrole et de gaz, et que des tractations commerciales ont même lieu <a href="https://www.theguardian.com/environment/2023/nov/27/cop28-host-uae-planned-promote-oil-deals-climate-talks">pendant les réunions</a> prévues pour la COP.</p>
<p>Selon des <a href="https://climate-reporting.org/cop28-president-oil-climate/">documents confidentiels obtenus par le Centre for Climate Reporting</a>, les Émirats arabes unis ont ainsi préparé des réunions d’affaires privées impliquant Adnoc avec les délégations de plus de 27 gouvernements étrangers avant le sommet.</p>
<p>D’autres sujets seront aussi discutés. Les risques du dérèglement climatique sur la santé et l’alimentation feront l’objet d’une attention particulière dans le <a href="https://www.cop28.com/en/schedule">programme</a>, mais comme c’est la première fois que ces sujets sont débattus, aucune décision importante n’est attendue.</p>
<p>Les négociations sur les marchés carbone, permettant aux pollueurs d’acheter des crédits verts censés compenser leurs émissions, seront entachées par le <a href="https://www.newyorker.com/magazine/2023/10/23/the-great-cash-for-carbon-hustle">scandale</a>, ayant mené à la surestimation des émissions évitées <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.ade3535">calculées dans le cadre des certificats de compensation carbone</a>.</p>
<h2>Des financements introuvables pour le Sud</h2>
<p>Enfin, le sujet de l’adaptation des communautés aux effets du dérèglement climatique a laissé la place à des sujets tout aussi importants, mais plus pessimistes comme la question du financement des <a href="https://unfccc.int/fr/node/227693#loss-and-damage">« pertes et dommages »</a>. <a href="https://theconversation.com/solidarite-nord-sud-financements-debats-sur-le-1-5-c-methane-ce-quil-faut-retenir-de-la-cop27-194988">Alors que l’adaptation cherche à anticiper</a> les problèmes en se préparant à un monde plus chaud, le fond des pertes et dommages acte le fait que quelqu’un doit payer les pots cassés du changement climatique.</p>
<p>Mais qui paie quoi ? Depuis les négociations de l’année dernière en Égypte, la question des responsabilités n’est toujours <a href="https://theconversation.com/cop28-un-an-apres-la-percee-sur-les-pertes-et-dommages-en-egypte-pays-riches-et-pays-pauvres-toujours-divises-218445">pas tranchée</a>. Aujourd’hui premier pollueur mondial, la Chine ne veut pas financer la reconstruction des pays les plus pauvres, et reste considérée comme un pays « en développement » par l’ONU.</p>
<p>De même, lors des négociations, les pays riches ne font <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/11/07/climat-a-l-approche-de-la-cop28-les-motifs-de-crispation-se-multiplient_6198668_3244.html">aucune concession</a> sur l’activation du fonds en cas de nécessité, les objectifs financiers à terme, ou même les échéances de mise en route…</p>
<p>L’<a href="https://direct.mit.edu/glep/article/23/3/95/116660/Tactical-Opposition-Obstructing-Loss-and-Damage">étude</a> des négociations climatiques montre que les tactiques de blocage sont nombreuses. Elles cherchent à limiter la portée des décisions en rendant le langage ambigu, en réduisant la transparence des processus de décision et en proposant des solutions non opérationnalisables. Tout se passe comme si l’argent pour financer l’action climatique était toujours plus cher que celui pour financer les nouvelles exploitations de pétrole et de gaz.</p>
<h2>Climat, guerre, inflation, d’une crise à l’autre</h2>
<p>Enfin, la question du calendrier importe beaucoup dans les négociations climatiques. Une <a href="https://www.cambridge.org/core/books/change-in-global-environmental-politics/3385DEB4375F0BC5C8EC22662BA7E0CF">étude de l’histoire récente des négociations climatiques</a> a montré que les meilleures décisions sont prises quand il existe une convergence des attentes de la part des différents acteurs. Or, la guerre en Ukraine, le conflit israélo-palestinien, et même les problèmes économiques mondiaux accaparent actuellement l’attention et l’intérêt du monde, en dépit du climat.</p>
<p>En même temps, le pouvoir des figures de l’action climatique est limité. Depuis sa prise de poste en 2017, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, fait tout pour garder le sujet à l’agenda, en visitant, par exemple, les lieux les plus touchés par le dérèglement climatique. Après avoir visité les <a href="https://time.com/longform/sinking-islands-climate-change/">îles du Pacifique</a> en 2019, Guterres a visité l’<a href="https://twitter.com/antonioguterres/status/1728467550957142044">Antarctique</a> quelques jours avant le début de la COP28 afin de mettre en lumière l’effondrement de la banquise.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1539541721809313792"}"></div></p>
<p>Mais le pouvoir du chef de l’ONU se limite à donner une vitrine aux acteurs ambitieux, sans blâmer les inactifs ni sanctionner les pollueurs. Le paradoxe de ce type de démarche est que, à l’instar de ce qui s’est passé lors du <a href="https://twitter.com/ipinst/status/1722678653816086915">Sommet de l’ambition climatique de 2023</a>, le monde prend conscience des solutions à mettre en œuvre, mais personne ne prend la responsabilité d’agir.</p>
<p>En somme, l’ambition climatique a besoin de pouvoir, de ressources, et de l’attention des populations. On peut garder le sujet à l’agenda, mais le vrai pouvoir revient aux États qui prennent les décisions.</p>
<p>Comme le <a href="https://direct.mit.edu/glep/article/22/4/173/112962/It-s-a-Performance-Not-an-Orchestra-Rethinking">résument</a> bien des experts des négociations climatiques à l’ONU, les COP sont désormais plus des « spectacles » qu’une véritable orchestration de bonnes résolutions. Comme le montre bien l’exemple des négociations bilatérales entre les États-Unis et la Chine, les grandes décisions se prennent de plus en plus en coulisses, en dehors des arènes onusiennes. Or, la gouvernance mondiale du climat risque de perdre de son importance, si elle ne parvient pas à résoudre les problèmes mondiaux.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218757/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Luis Rivera-Vélez a reçu des financements du Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS) dans le cadre du projet "First Things First! How to keep the United Nations environmental agenda in times of crisis?" dirigé par Dr. Lucile Maertens.</span></em></p>La COP28, un échec annoncé ? Certains éléments invitent au pessimisme, avant même le début officiel de négociations qui tiennent de plus en plus du grand spectacle. Les vraies tractations, elles, sont ailleurs.Luis Rivera-Vélez, Postdoctoral research fellow at University of Lausanne and research associate at the Center for International Studies CERI, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2150872023-10-29T18:10:37Z2023-10-29T18:10:37ZEst-il encore temps d’empêcher l’exploitation minière des fonds marins ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/553268/original/file-20231011-24-qvyhmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=296%2C14%2C1497%2C1057&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une belle méduse dans les eaux profondes du Pacifique.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/noaaphotolib/39695067002/">NOAA Photo Library / Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p>Faut-il autoriser l'exploitation minière des fonds marins ? La France organisera avec le Costa Rica la <a href="https://ocean-climate.org/unoc2025-fr/">prochaine Conférence des Nations unies sur les océans</a> : elle se tiendra à Nice en juin 2025. De son côté, la Norvège n'a pas attendu pour <a href="https://www.euractiv.fr/section/energie-climat/news/la-norvege-se-lance-dans-la-prospection-miniere-des-grands-fonds-marins/">autoriser, le 9 janvier dernier, la prospection minière</a> – se limitant pour l'instant à la seule exploration, l'extraction n'étant pas encore autorisée à ce stade – dans les fonds marins de l'Arctique.</p>
<p>L’enjeu du rendez-vous de 2025 est donc crucial : il s’agit de faire adopter formellement un moratoire sur l’exploitation minière des grands fonds marins, <a href="https://theconversation.com/peche-pollution-rechauffement-comment-les-sciences-marines-peuvent-nous-aider-a-sauvegarder-locean-175532">afin de protéger l’écosystème des océans</a> et de freiner le réchauffement climatique.</p>
<p>Un engagement sur lequel la France s’est affichée à la pointe, du moins dans le discours : le président Macron avait déclaré vouloir faire de la protection de l’Océan une <a href="https://www.lesechos.fr/monde/enjeux-internationaux/cop-27-emmanuel-macron-veut-interdire-lexploitation-des-fonds-marins-1876783">priorité de son mandat</a>. Sa position a toutefois varié et demeure ambiguë. Mais le pays apparaît aussi, pour l’instant, trop isolé à défendre le sujet sur la scène internationale.</p>
<p>Deux logiques opposées s’affrontent actuellement concernant les fonds marins, dernière « frontière » de la planète qui ne soit pas encore totalement explorée. D’un côté, la <a href="https://theconversation.com/de-lespace-aux-oceans-les-nouvelles-frontieres-minieres-158734">logique commerciale et prédatrice</a> des multinationales minières, de l’autre la logique humaniste qui considère les fonds marins et le sous-sol des océans comme un patrimoine appartenant à toute l’humanité. Et à ce titre estime qu’ils doivent être gérés par l’ONU et ses agences, dans l’esprit du multilatéralisme et du bien commun. Laquelle l’emportera ?</p>
<h2>L’ONU affaiblie à Kingston</h2>
<p>En juillet 2023 <a href="https://theconversation.com/entre-appetits-extractifs-et-biodiversite-lavenir-des-fonds-marins-au-coeur-de-tensions-210730">s’est tenue à Kingston</a> en Jamaïque une réunion de <a href="https://www.un.org/fr/chronicle/article/lautorite-internationale-des-fonds-marins-et-lexploitation-miniere-des-grands-fonds-marins">l’Agence internationale des fonds marins</a> (AIFM), qui dépend de l’ONU. Elle s’est achevée par un « sursis » fragile pour les défenseurs de la protection des océans.</p>
<blockquote>
<p>« Si aucun feu vert n’a été accordé au démarrage de l’activité, le projet de code minier n’est pas enterré. Ni moratoire ni code minier](https://www.actu-environnement.com/ae/news/exploitation-miniere-sursis-fonds-marins-42320.php4) : l’avenir de l’exploitation des fonds marins reste en suspens ».</p>
</blockquote>
<p>Le Chili, le Costa Rica, l’Allemagne ou encore la Nouvelle-Zélande, et plus récemment le Canada, la Suède, la Suisse, l’Irlande, le Brésil, la Finlande et le Portugal, ont milité en faveur du moratoire. La France et le <a href="https://theconversation.com/justice-climatique-ce-nouveau-front-ouvert-par-les-petits-etats-insulaires-a-lonu-203135">Vanuatu</a>, plus engagés, ont défendu l’idée d’une interdiction totale. En revanche, les États-Unis, le Mexique et la Norvège, ainsi que la petite île de Nauru, poussent coûte que coûte en faveur de l’exploitation minière.</p>
<p>L’ONU semble pour l’instant trop faible pour imposer la logique humaniste face aux appétits aiguisés des grandes entreprises et de leurs actionnaires. Mais rien n’est encore perdu, comme l’ont montré de récentes avancées.</p>
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<h2>Un nouvel accord ambitieux</h2>
<p>Quelques semaines avant le sommet de Kingston, en juin 2023, les 193 États membres de l’ONU adoptaient en effet un <a href="https://documents-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/LTD/N23/177/29/PDF/N2317729.pdf">accord juridiquement contraignant sur la haute mer et la biodiversité marine</a>.</p>
<p>Après près 20 ans de négociations enflammées, il reconnaît le caractère essentiel de la haute mer, qui <a href="https://www.un.org/fr/climatechange/science/climate-issues/ocean">génère 50 % de l’oxygène que nous respirons et absorbe 25 % du gaz carbonique</a> provenant des activités humaines. Or, dans cette zone caractérisée par un régime juridique dit de « liberté », l’activité humaine augmente dangereusement d’année en année.</p>
<p>Ce traité vise à assurer la gestion des océans au nom des générations actuelles et futures, conformément à la Convention sur le droit de la mer. Ses 75 articles ont pour objectif de <a href="https://news.un.org/fr/story/2023/06/1136227">protéger le milieu marin, maintenir l’intégrité des écosystèmes océaniques et conserver la valeur</a> inhérente à la diversité biologique marine.</p>
<p>Il s’agit notamment de préserver l’océan des produits chimiques toxiques et des millions de tonnes de déchets plastiques qui y sont déversés chaque année, affectant dramatiquement la faune et la flore marine. En effet, <a href="https://news.un.org/fr/story/2023/06/1136227">plus de 17 millions de tonnes de plastique</a> ont rejoint les océans en 2021, et ce chiffre s’accroît chaque année.</p>
<p>À tel point qu’il pourrait y avoir, selon l’ONU, <a href="https://news.un.org/fr/story/2023/06/1136227">plus de plastique que de poissons dans la mer d’ici à 2050</a>, si rien n’est fait pour inverser la tendance. Le traité vise aussi à réduire la surexploitation des poissons, à faire diminuer la température des océans, à préserver les petites îles. Le but étant d’atteindre l’objectif, fixé par l’ONU lors de la COP15, de protéger 30 % de l’océan d’ici à 2030.</p>
<h2>Seul 1 % de la haute mer protégé</h2>
<p>Il s’agit aussi de préserver des appétits commerciaux les ressources précieuses, situées à 4 000 mètres de profondeur, à savoir des nodules polymétalliques, riches en manganèse, cobalt, cuivre et nickel.</p>
<p>Comme l’explique <a href="https://www.un.org/fr/chronicle/article/lautorite-internationale-des-fonds-marins-et-lexploitation-miniere-des-grands-fonds-marins">Michael Lodge, secrétaire général de l’Autorité internationale des fonds marins</a>, outre ces nodules ce sont aussi les sulfures hydrométalliques qui sont convoités pour leur richesse en cuivre, en fer, en zinc, en argent et en or. Toutes ces substances sont en effet indispensables à la fabrication des ordinateurs, téléphones portables, et plus largement les circuits électroniques intégrés.</p>
<p>Le nouveau traité adopté en juin 2023 permettra de créer des aires marines protégées dans les eaux internationales. Une mesure salutaire, lorsque l’on sait que <a href="https://www.novethic.fr/actualite/environnement/biodiversite/isr-rse/traite-sur-la-haute-mer-pourquoi-cet-accord-etait-inespere-151385.html">seulement 1 % de la haute mer fait aujourd’hui l’objet de mesures de conservation</a>.</p>
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<img alt="pieuvre sur fond noir" src="https://images.theconversation.com/files/552966/original/file-20231010-21-k3ny64.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=365%2C14%2C1549%2C1057&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/552966/original/file-20231010-21-k3ny64.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/552966/original/file-20231010-21-k3ny64.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/552966/original/file-20231010-21-k3ny64.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/552966/original/file-20231010-21-k3ny64.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/552966/original/file-20231010-21-k3ny64.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/552966/original/file-20231010-21-k3ny64.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La pieuvre Dumbo est l’une des innombrables espèces qui vivent dans les profondeurs extrêmes de l’océan. Leurs nageoires, qui ressemblent aux oreilles de l’éléphant de Disney, les aident à se propulser dans l’eau.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/oceanexplorergov/14142089822/in/photolist-2hXYqBs-vcXdBp-nxFUAS-2oB1ve5-uxyqF2-w6wh87-HCWh6i-Jsi7Yp-z1L676-vbPvqb-HCWjxx-23QPHxu-pLgzAq">NOAA Ocean Exploration</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une entrée en vigueur qui tarde</h2>
<p>Mais la mise en pratique du traité risque de prendre du temps : le texte doit d’abord être vérifié par les services juridiques des États membres et traduit dans les six langues officielles de l’ONU, avant d’être officiellement adopté lors d’une autre session. Il devra ensuite être ratifié par au moins 60 gouvernements pour devenir juridiquement contraignant. Le précédent traité, signé en 1982, avait mis <a href="https://www.un.org/depts/los/convention_agreements/texts/unclos/unclos_f.pdf">12 ans avant d’entrer en vigueur</a>…</p>
<p>Signe encourageant, <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/03/05/un-accord-sur-la-protection-de-la-haute-mer-obtenu-a-l-onu_6164184_3244.html">l’Union européenne a promis 40 millions d’euros pour faciliter la ratification du traité</a> et sa mise en œuvre initiale. Lors de la réunion mondiale « Notre océan » qui s’est déroulée début mars 2023 au Panama, les participants se sont engagés à verser près de 20 milliards de dollars pour la protection des océans.</p>
<p>Il est important que la conférence de Nice en 2025 soit l’occasion de promouvoir la ratification du traité de juin 2023, si possible même d’obtenir son entrée en vigueur. L’enjeu est de taille, car les intérêts économiques privés sont à la manœuvre, poussant en faveur d’une exploitation minière des océans.</p>
<p>En 2022, l’AIFM a ainsi autorisé <a href="https://metals.co/">l’entreprise minière canadienne <em>The Metals Company</em></a>, sous prétexte de « test », à envoyer un bulldozer dans les fonds marins entre Hawaï et le Mexique, ce qui lui a permis de <a href="https://www.lepelerin.com/ecologie/lactualite-environnement/exploitation-miniere-des-fonds-marins-les-abysses-menaces-7789https:/lemarin.ouest-france.fr/secteurs-activites/oil-gas/quatorze-tonnes-de-nodules-polymetalliques-preleves-4-380-metres-de-fond-44957">collecter 14 tonnes de nodules polymétalliques</a>, dégradant du même coup gravement l’écosystème.</p>
<h2>Inquiétude des ONG</h2>
<p>Dans une tribune collective signée le 10 juillet 2023, des responsables de grandes associations et ONG environnementales françaises ont lancé l’alarme : « le 10 juillet 2023 pourrait rester dans l’histoire comme une date fatidique pour l’océan. En effet, à partir d’aujourd’hui, la <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/opinion-exploitation-miniere-des-fonds-marins-la-menace-se-concretise-1960532">porte est ouverte à l’exploitation minière des grands fonds, sans normes ni réglementation (code minier)</a>) ».</p>
<p>Les signataires expliquent que, désormais, « une entreprise peut demander à l’AIFM une licence provisoire d’exploitation commerciale des grands fonds ». « Cette aberration, rendue possible par une faille dans les procédures de l’institution intervient alors que les négociations sur le cadre réglementaire de ces activités n’ont pas encore abouti. »</p>
<p>Les signataires de la lettre ouverte appellent l’Union européenne à ce que le <a href="https://www.mineralinfo.fr/fr/actualite/actualite/publication-du-reglement-europeen-sur-matieres-premieres-critiques">Règlement européen sur les matières premières critiques</a>, publié en mars 2023, ne devienne pas « une porte d’entrée aux matériaux exploités en eaux profondes » et qu’au contraire, ce texte puisse « permettre de <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/opinion-exploitation-miniere-des-fonds-marins-la-menace-se-concretise-1960532">bloquer toute possibilité d’importer ces minerais dans l’Union</a> ». L’Europe et la France ont donc un rôle exemplaire à jouer, et tout se décidera lors de la conférence de Nice en 2025.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/215087/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Chloé Maurel ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La communauté internationale reste divisée sur la protection de la haute mer et la mise en œuvre des quelques mesures protectrices sur lesquelles elle s’accorde reste lente face à l’urgence d’agir.Chloé Maurel, SIRICE (Université Paris 1/Paris IV), Université Paris 1 Panthéon-SorbonneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2143212023-10-16T13:57:12Z2023-10-16T13:57:12ZLe logement est bien plus qu’un bien marchand. Et la crise actuelle ne se réduit pas à équilibrer l’offre et la demande<p>La crise du logement est un défi mondial : près de 1,6 milliard de personnes vivent dans des conditions précaires ou inadéquates. Et ce nombre pourrait même doubler d’ici 2030, selon l’<a href="https://unhabitat.org/news/13-jul-2023/the-world-is-failing-to-provide-adequate-housing">UN Habitat</a>. </p>
<p>Le Canada n’est pas épargné. Amplifiée par la pandémie de Covid-19, la demande de logements y surpasse largement l’offre. D’ici 2030, <a href="https://www.cmhc-schl.gc.ca/professionnels/marche-du-logement-donnees-et-recherche/recherche-sur-le-logement/rapports-de-recherche-en-habitation/accroitre-loffre-de-logements/penurie-de-logements-au-canada--resoudre-la-crise-de-labordabilite">3,5 millions de logements supplémentaires seront nécessaires</a>. Et pour y faire face, les initiatives gouvernementales se multiplient. </p>
<p>En tant que professeur en études urbaines à l’Université du Québec à Montréal, je m’intéresse à la manière dont les villes canadiennes contribuent aux <a href="https://www.sosve.org/objectifs-de-developpement-durable-post-2015/">17 Objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies</a>, notamment le 11<sup>e</sup>, qui vise à rendre les villes inclusives, sûres, résilientes et durables.</p>
<h2>Les gouvernements se mobilisent</h2>
<p>En septembre 2023, le gouvernement du Canada a annoncé une <a href="https://www.canada.ca/fr/ministere-finances/nouvelles/2023/09/bonification-du-remboursement-de-la-tps-pour-immeubles-dhabitation-locatifs-afin-de-construire-plus-dappartements-pour-les-locataires.html">exonération de la TPS</a> pour la construction de nouveaux immeubles locatifs, dans l’optique d’alléger les coûts pour les constructeurs. Cette initiative s’ajoute à celles de la <a href="https://www.cmhc-schl.gc.ca/strategie-nationale-sur-le-logement/questce-que-la-strategie#strategyfr">Stratégie nationale sur le logement</a> lancée en 2018, un plan de 82 milliards de dollars étalé jusqu’en 2028. Ce plan englobe des subventions pour de nouveaux logements abordables, la rénovation, le soutien au logement communautaire et la promotion de la recherche en matière de logement. </p>
<p>Les gouvernements provinciaux et municipaux sont également à pied d’œuvre. Par exemple, l’<a href="https://news.ontario.ca/mmah/en">Ontario</a> multiplie les soutiens financiers aux projets immobiliers. Le Québec propose, entre autres, une <a href="https://www.revenuquebec.ca/fr/citoyens/votre-situation/faible-revenu/programme-allocation-logement/">Allocation-Logement</a> aux ménages les moins aisés. Et la Colombie-Britannique a instauré la <a href="https://news.gov.bc.ca/releases/2023HOUS0059-000851">Housing Supply Act</a>, adoptée en 2022, visant à mieux cibler les besoins en logement en collaboration avec les municipalités. </p>
<p>Plusieurs villes, comme <a href="https://globalnews.ca/news/9738121/toronto-multiplex-policy-housing/">Toronto</a>, <a href="https://www.cbc.ca/news/canada/british-columbia/multiplex-housing-vancouver-1.6967977">Vancouver</a>, <a href="https://montreal.ca/articles/metropole-mixte-les-grandes-lignes-du-reglement-7816">Montréal</a> et <a href="https://www.lesoleil.com/actualites/actualites-locales/la-capitale/2023/09/27/un-plan-ambitieux-pour-contrer-la-crise-du-logement-UHZAPO6FXFGIDHBI255E4KY2E4/">Québec</a>, adoptent des stratégies pour augmenter la densité et favoriser la construction de logements sociaux et locatifs, collaborant souvent avec des <a href="https://www.cmhc-schl.gc.ca/professionnels/financement-de-projets-et-financement-hypothecaire/programmes-de-financement/toutes-les-opportunites-de-financement/fonds-dinnovation-pour-le-logement-abordable#:%7E:text=Le%20Fonds%20d%27innovation%20a,municipaliti%C3%A9s%2C%20provinces%20et%20territoires">entités communautaires</a> pour innover.</p>
<p>L’objectif de ces mesures ? Faire passer le taux d’inoccupation des logements de <a href="https://assets.cmhc-schl.gc.ca/sites/cmhc/professional/housing-markets-data-and-research/housing-research/research-reports/2022/housing-shortages-canada-solving-affordability-crisis-fr.pdf">1,9 % au Canada et de 1,7 % dans les grandes villes du Québec à une fourchette de 3 à 4 %</a>, considérée comme un équilibre entre l’offre et la demande de logements.</p>
<h2>La valeur sociétale du logement</h2>
<p>Cependant, la crise du logement ne se réduit pas simplement à une équation où il suffit d’équilibrer l’offre et la demande. Agir sur l’offre, en stimulant la construction et sur la demande, en fournissant des aides financières aux ménages, peut avoir un impact temporaire. Mais ces mesures ne ciblent que les symptômes de la crise, et non ses causes fondamentales. </p>
<p>Pourquoi ? Parce que le logement est bien plus qu’un bien marchand : il représente un foyer, un espace de vie et un élément structurant du tissu urbain, social et économique. Sa valeur sociétale dépasse ainsi sa valeur marchande, avec des implications sur l’accès aux services et aux lieux d’emploi, sur la stabilité de la population et l’attractivité urbaine, sur la santé physique et mentale ainsi que sur la compétitivité des entreprises locales.</p>
<p>La crise actuelle ne provient pas seulement d’un manque absolu de logements, mais surtout d’une pénurie relative de logements adaptés aux revenus de la majorité des habitants de chaque ville. À <a href="https://assets.cmhc-schl.gc.ca/sites/cmhc/professional/housing-markets-data-and-research/market-reports/rental-market-report/rental-market-report-2022-fr.pdf">Montréal</a>, par exemple, le taux d’inoccupation pour les logements abordables pour les ménages les moins fortunés est seulement de 1 %. En revanche, pour les ménages à revenus moyens et élevés, il est de 5,4 %. À <a href="https://assets.cmhc-schl.gc.ca/sites/cmhc/professional/housing-markets-data-and-research/market-reports/rental-market-report/rental-market-report-2022-fr.pdf">Québec et à Gatineau</a>, la situation est similaire, montrant que la compétition pour accéder à un logement est plus rude pour les individus et les familles les plus exposés à la crise.</p>
<p>La vision mercantile de la propriété a érodé sa valeur sociétale, transformant ce qui était autrefois un rêve en un simple outil d’investissement où l’objectif est d’acheter, rénover, fixer un loyer en fonction de l’investissement et séduire une population plus aisée.</p>
<h2>Des conséquences pour les citoyens et les entreprises</h2>
<p>Les conséquences sont nombreuses. D’une part, les prix élevés des propriétés ont transformé beaucoup de citoyens en locataires à long terme, écartant leur rêve de propriété. Cette situation crée une tension sur le nombre de logements locatifs disponibles, particulièrement pour les étudiants et les nouveaux arrivants. L’écart croissant entre les loyers des logements vacants et ceux occupés a aussi ralenti le taux de roulement, comme illustré à <a href="https://assets.cmhc-schl.gc.ca/sites/cmhc/professional/housing-markets-data-and-research/market-reports/rental-market-report/rental-market-report-2022-fr.pdf">Québec et à Gatineau</a>. </p>
<p>Les populations économiquement précaires subissent les effets les plus sévères, devant opter pour des logements basés sur leur capacité financière plutôt que leurs besoins. Cela se traduit par une baisse de la qualité de vie, des trajets plus longs vers les lieux de travail et de services ainsi que des coûts de transport augmentés. </p>
<p>Enfin, cette situation impacte directement le développement économique régional. L’augmentation rapide des loyers par rapport aux salaires peut diminuer la compétitivité des entreprises locales qui peinent à attirer et retenir les talents. Cette situation peut entraîner une baisse de la productivité (par exemple, des employés stressés par leurs finances), des temps de trajet plus longs pour les employés (choisissant de vivre en périphérie où le coût de logement est moindre), un frein à l’innovation régionale (avec moins d’entrepreneurs prêts à prendre des risques dans des zones chères) et la migration des talents vers des régions plus abordables.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="homme noir travaille de la maison" src="https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les employeurs pourraient contribuer financièrement aux coûts du logement des employés en télétravail.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<h2>Des solutions existent</h2>
<p>Pour aborder la crise, le logement doit avant tout être considéré comme un service sociétal essentiel et non seulement comme un bien marchand. Quatre pistes de solution peuvent compléter les interventions publiques actuelles.</p>
<p><strong>Ajuster les loyers aux réalités économiques locales.</strong> En plus des mesures gouvernementales actuelles visant à stimuler l’offre (par plus de constructions) et la demande (par l’aide financière aux ménages), l’idée est d’établir une fourchette de loyers acceptable en fonction des capacités financières des résidents locaux. Les propriétaires dépassant cette fourchette pourraient être soumis à des mesures fiscales, dont les recettes permettraient de soutenir des logements plus abordables. Un tel calcul peut paraître complexe, mais pas impossible à réaliser en travaillant, par exemple, avec le milieu universitaire. C’est pourquoi l’instauration d’un registre des loyers, comme le suggèrent <a href="https://www.lesoleil.com/opinions/point-de-vue/2023/09/17/crise-du-logement-manque-de-vision-des-gouvernements-LUYQVANSXVHTDAOV5FVKEGDH4A/">14 maires et mairesses au Québec</a>, est pertinente.</p>
<p><strong>Faire des employeurs des alliés.</strong> L’accès à un logement est devenu un atout pour attirer et retenir la main-d’œuvre. Les employeurs pourraient offrir des primes « logement » aux employés à faibles revenus. Pour ceux en télétravail, les employeurs pourraient contribuer financièrement aux coûts du logement (loyers et dépenses liées au travail). Comme de telles mesures contribuent au succès des entreprises, elles pourraient être appuyées par les agences de développement économique.</p>
<p><strong>Soustraire les groupes vulnérables de la compétition.</strong> Les jeunes, les familles monoparentales, les personnes âgées, les Premières Nations et les nouveaux arrivants doivent être soustraits de la compétition pour le logement, car ils ne sont pas en position de concurrence équitable. Des taxes sur certains logements de luxe, par exemple, permettraient de générer des fonds dédiés aux logements de ces groupes. </p>
<p>Enfin, des alternatives comme les résidences intergénérationnelles ou les micrologements temporaires pourraient être encouragées. Ces modèles offrent des solutions abordables et adaptées à divers besoins temporaires, surtout en milieu urbain. </p>
<p>Considérer le logement simplement comme un bien marchand à la merci des forces du marché est réducteur. Il a une profonde valeur sociétale, et c’est en la reconnaissant et en la préservant que nous aborderons la crise de front.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214321/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Juste Rajaonson ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La crise du logement ne peut pas être résolue simplement en équilibrant l’offre et la demande. Il faut plutôt repenser le logement comme un service sociétal plutôt que comme un simple bien marchand.Juste Rajaonson, Professeur en études urbaines, Université du Québec à Montréal (UQAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2130312023-09-11T13:56:41Z2023-09-11T13:56:41ZVoici comment contenir la Chine et la Russie, superpuissances frappées d’allégations d’atrocités<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/546710/original/file-20230831-27-66cu2d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=9%2C0%2C3051%2C2018&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le président chinois Xi Jinping et son homologue russe Vladimir Poutine portent un toast lors de leur dîner au Kremlin, à Moscou, en mars 2023. </span> <span class="attribution"><span class="source">(Pavel Byrkin, Sputnik, Kremlin Pool Photo via AP)</span></span></figcaption></figure><p>En Afrique du Sud, lors de la dernière réunion des BRICS, un groupe de puissances économiques comprenant le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud, le président russe <a href="https://www.cnn.com/2023/08/20/europe/putin-brics-no-show-analysis-hnk-intl/index.html">Vladimir Poutine brillait par son absence</a>.</p>
<p>Parce que la Cour pénale internationale a émis un <a href="https://www.theguardian.com/world/2023/mar/17/icc-arrest-warrant-vladimir-putin-explainer">mandat d’arrêt</a> contre lui plus tôt cette année en raison d’atrocités présumées sur des enfants ukrainiens, Moscou s’inquiétait visiblement que Poutine soit <a href="https://www.euronews.com/2023/08/21/putin-was-meant-to-be-at-a-summit-in-south-africa-this-week-why-was-he-asked-to-stay-away">arrêté</a> s’il se rendait à Johannesburg.</p>
<p>Les atrocités de masse comprennent les génocides, les crimes contre l’humanité, le nettoyage ethnique et les crimes de guerre. Parmi tous les défis du monde actuel, l’urgence de prévenir les atrocités de masse s’impose.</p>
<p>En 2023, nous faisons face à un nombre sans précédent de personnes déplacées de force, <a href="https://www.unhcr.org/refugee-statistics/insights/explainers/100-million-forcibly-displaced.html">plus de 100 millions</a>, phénomène attribuable en partie <a href="https://www.unrefugees.org/emergencies/ukraine/">à un flot</a> exacerbé par l’invasion russe en Ukraine.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-chine-ne-doit-pas-faconner-lavenir-des-droits-de-la-personne-a-lonu-137043">La Chine ne doit pas façonner l’avenir des droits de la personne à l’ONU</a>
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<h2>Stagnation du progrès</h2>
<p>Bien qu’il y ait eu des réussites en matière de réduction des violations des droits de la personne, comme l’adoption de la doctrine <a href="https://www.un.org/fr/genocideprevention/">Responsabilité de protéger</a> des Nations unies et la création de la <a href="https://www.cfr.org/backgrounder/role-international-criminal-court">Cour pénale internationale</a>, de récents événements préoccupants indiquent non seulement une stagnation du progrès, mais une régression.</p>
<p>Le fait de voir deux membres du Conseil de sécurité de l’ONU, la Chine et la Russie, être accusés d’atrocités de masse est particulièrement troublant.</p>
<p>La Chine est devenue de plus en plus <a href="https://www.dw.com/en/how-are-chinas-neighbors-viewing-beijings-military-plans/a-64921927">belliqueuse et agressive</a>, menaçant ses voisins et persécutant ses minorités. Les mesures de Beijing contre sa population musulmane ouïghoure ont soulevé l’indignation mondiale, <a href="https://www.ushmm.org/genocide-prevention/countries/china/case-study/current-risks/chinese-persecution-of-the-uyghurs">à la suite d’allégations</a> de génocide, de travail forcé, de détentions de masse, de répression culturelle et de destruction de mosquées.</p>
<p>De façon similaire, l’invasion russe de l’Ukraine a soulevé de graves préoccupations en matière de violation des droits de la personne. De nombreux <a href="https://www.raoulwallenbergcentre.org/images/reports/2023-07-26-Genocide-Ukraine-Report.pdf">chercheurs et experts</a> prêtent une intention génocidaire à l’armée russe en raison du massacre de civils dans des villes ukrainiennes <a href="https://www.nytimes.com/2022/12/22/video/russia-ukraine-bucha-massacre-takeaways.html">comme à Boutcha</a>, des cas généralisés de torture confirmés par les <a href="https://www.ohchr.org/en/press-releases/2023/06/widespread-use-torture-russian-military-ukraine-appears-deliberate-un-expert">Nations unies</a> et des <a href="https://www.ohchr.org/en/press-releases/2023/02/targeted-destruction-ukraines-culture-must-stop-un-experts">tentatives continues qui semblent destinées à détruire</a> la culture ukrainienne.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une femme vêtue d’une robe bleue à motifs regarde un grand mur commémoratif sur lequel sont gravés des noms d’Ukrainiens" src="https://images.theconversation.com/files/545781/original/file-20230831-8940-rglzfg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/545781/original/file-20230831-8940-rglzfg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/545781/original/file-20230831-8940-rglzfg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/545781/original/file-20230831-8940-rglzfg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/545781/original/file-20230831-8940-rglzfg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/545781/original/file-20230831-8940-rglzfg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/545781/original/file-20230831-8940-rglzfg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Une femme dans une robe aux motifs bleus devant une murale honorant les gens tués par les troupes russes à Boutcha, en Ukraine. Boutcha a été occupée par les forces russes pendant environ un mois au début de l’invasion.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Jae C. Hong)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Les liens entre la Chine et la Russie</h2>
<p>L’alliance émergente entre les régimes autoritaires de Chine et de Russie est très préoccupante. Le président chinois Xi Jinping, lors de son récent voyage à Moscou, <a href="https://www.nbcnews.com/news/world/xi-putin-pledge-new-world-order-chinese-leader-leaves-russia-rcna76048">a dit à Poutine</a> :</p>
<blockquote>
<p>Il y a des changements qui ne sont pas arrivés depuis 100 ans. Ensemble, nous provoquons ces changements. </p>
</blockquote>
<p>L’idée d’un futur ordre mondial façonné par ces deux autocrates donne une nouvelle profondeur <a href="https://www.sparknotes.com/lit/1984/quotes/character/obrien/">à cette célèbre citation</a> du romancier anglais George Orwell : « Si vous voulez un portrait de l’avenir, imaginez une botte écrasant un visage humain, à jamais. »</p>
<p>Alors que Poutine et Xi s’efforcent de transformer l’ordre international, chaque pays doit réfléchir à la grave menace qui pèse sur les droits de la personne, les normes démocratiques et l’essence même de la <a href="https://www.un.org/en/about-us/un-charter">Charte de l’ONU</a>, particulièrement à l’égard des actes d’agression</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1637828614879150082"}"></div></p>
<p>Le fait de voir de grandes puissances se comporter ainsi confirme l’effritement de l’engagement mondial à prévenir ces atrocités.</p>
<p>La situation actuelle souligne l’urgence de raviver les flammes du progrès et de veiller au maintien des normes et des institutions des droits de la personne.</p>
<p>Il incombe à la communauté internationale de réaffirmer son engagement à prévenir les atrocités de masse, peu importe le statut géopolitique et la puissance économique des coupables. Cela passera par quatre piliers.</p>
<h2>Quatre moyens de faire respecter les droits de la personne</h2>
<ol>
<li><p>La sensibilisation et l’éducation doivent être améliorées pour amplifier la voix des populations présumément ciblées par la Russie et la Chine. Les populations informées peuvent faire pression sur leur gouvernement pour faire respecter les droits de la personne et obliger les criminels à rendre des comptes. Elles peuvent également exiger que les <a href="https://www.business-humanrights.org/en/latest-news/china-83-major-brands-implicated-in-report-on-forced-labour-of-ethnic-minorities-from-xinjiang-assigned-to-factories-across-provinces-includes-company-responses/">entreprises arrêtent de faire affaire</a> avec les deux pays jusqu’à ce que leurs politiques et leurs comportements changent. Moscou et Beijing font tout leur possible <a href="https://www.nytimes.com/interactive/2021/06/22/technology/xinjiang-uyghurs-china-propaganda.html">pour diffuser de la propagande</a> <a href="https://press.un.org/en/2023/sc15226.doc.htm">et de la désinformation</a> à l’échelle mondiale.</p></li>
<li><p>Des initiatives diplomatiques doivent être lancées pour veiller à ce que les <a href="https://time.com/6160282/arab-world-complicit-china-repression-uighurs/">intérêts économiques</a> n’éclipsent pas la nécessité de prévenir les atrocités de masse. Les pays doivent se regrouper pour contrer les plans d’hégémonie mondiale de Moscou et de Beijing, qui sonneraient le glas des droits de la personne et de la démocratie.</p></li>
<li><p>L’importance de renforcer les mécanismes de justice est capitale. La Cour pénale internationale doit avoir le pouvoir d’enquêter et de poursuivre tous les responsables, peu importe leur statut. Cela inclut l’exploration de moyens que la Cour pourrait utiliser même lorsqu’elle fait face à des <a href="https://www.reuters.com/world/europe/icc-member-states-say-russia-putting-prosecutor-wanted-list-is-deplorable-2023-05-20/">sanctions et à des menaces</a>.</p></li>
<li><p>Les pays doivent continuer de faire respecter <a href="https://legal.un.org/repertory/art51.shtml">l’article 51</a> de la Charte de l’ONU, « le droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective, dans le cas où un membre des Nations unies est l’objet d’une agression armée » et soutenir l’Ukraine dans ses efforts pour stopper l’invasion génocidaire russe. De fausses déclarations de négociations de paix masquent <a href="https://www.newyorker.com/news/essay/the-war-in-ukraine-is-a-colonial-war">l’intention russe de recoloniser</a> l’Ukraine, ce qui se produira seulement par la violence de masse et la destruction de l’identité ukrainienne. Cela enverra également un message à Beijing que <a href="https://www.telegraph.co.uk/world-news/2023/08/19/china-helping-arm-russia-helicopters-drones-metals-xi-putin/">son soutien</a> à l’invasion russe de l’Ukraine, sans parler d’une potentielle <a href="https://www.scmp.com/news/china/military/article/3230014/mainland-china-airs-documentary-signalling-military-preparation-taiwan-attack-and-willingness">attaque chinoise</a> sur Taïwan, s’accompagnera de conséquences.</p></li>
</ol>
<p>La communauté internationale doit reconnaître que des superpuissances commettent des atrocités et que cela fait peser une menace concrète sur la paix et la sécurité dans le monde.</p>
<p>Les pays qui commettent des génocides à l’intérieur et à l’extérieur de leurs frontières, sans oublier <a href="https://www.washingtonpost.com/world/2021/12/08/china-detains-journalists-dangers-2021-report/">l’emprisonnement de journalistes</a>, de <a href="https://www.bbc.com/news/world-europe-66408444">leaders de l’opposition politique</a> et de <a href="https://www.hrw.org/russia-government-against-rights-groups-battle-chronicle">groupes de la société civile</a>, représentent un danger pour l’humanité.</p>
<p>Lorsqu’ils sont membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU et qu’ils se concertent, ils représentent une menace totalitaire à prendre au sérieux.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/213031/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Kyle Matthews a reçu des fonds du gouvernement du Canada (ministère du Patrimoine canadien) et de la Konrad Adenauer Stiftung. Il est affilié au Canadian Global Affairs Institute, au Conseil international du Canada et à la Fondation BMW.</span></em></p>Deux membres du Conseil de sécurité des Nations unies – la Chine et la Russie – sont soupçonnés d’avoir perpétré de graves atrocités. Voici comment la communauté internationale doit agir.Kyle Matthews, Executive Director, The Montréal Institute for Genocide and Human Rights Studies, Concordia UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2107302023-08-20T20:00:18Z2023-08-20T20:00:18ZEntre appétits extractifs et biodiversité, l’avenir des fonds marins au cœur de tensions<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/540795/original/file-20230802-25-sax2j0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=258%2C34%2C1652%2C1023&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La pieuvre Dumbo en 2019 lors d’une exploration des fonds marins au sud-est des États-Unis.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/7/71/Dumbo_Octopus_%2849203817176%29.jpg">Dumbo Octopus / Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p>L’Autorité internationale des fonds marins (AIFM), qui n’a pas l’habitude d’être sous le feu des projecteurs, fait aujourd’hui l’objet de polémiques autour de l’exploitation minière des grands fonds marins.</p>
<p>Cette institution, créée dans le sillage de la <a href="https://treaties.un.org/pages/ViewDetailsIII.aspx?src=TREATY&mtdsg_no=XXI-6&chapter=21&Temp=mtdsg3&clang=_fr">Convention des Nations Unies sur le droit de la mer</a> de Montego Bay et du <a href="https://treaties.un.org/Pages/ViewDetails.aspx?src=IND&mtdsg_no=XXVII-1-e&chapter=27&clang=_fr">protocole de 1994</a>, a pour rôle de <a href="https://theconversation.com/peche-pollution-rechauffement-comment-les-sciences-marines-peuvent-nous-aider-a-sauvegarder-locean-175532">gouverner les ressources marines non vivantes et promouvoir la recherche scientifique</a> pour les fonds marins de la zone, c’est-à-dire tous les fonds marins situés dans les eaux internationales.</p>
<p>Jusqu’alors, les fonds marins en haute mer demeuraient préservés des activités minières. Mais dans le contexte d’une <a href="https://theconversation.com/pourquoi-parle-t-on-de-criticite-des-materiaux-105258">transition énergétique</a> qui pourrait susciter une <a href="https://theconversation.com/de-lespace-aux-oceans-les-nouvelles-frontieres-minieres-158734">demande accrue en minerais</a>, ils aiguisent de plus en plus les appétits extractifs, notamment sur le cobalt, le nickel, le cuivre ou le manganèse.</p>
<p>Alors que viennent de se tenir le Conseil et l’Assemblée de l’AIFM, auxquels nous avons assisté, revenons sur les dynamiques qui orientent les négociations et sur les <a href="https://theconversation.com/peche-ce-que-la-science-nous-dit-de-limpact-du-chalutage-sur-les-fonds-marins-172325">possibilités de protection</a> ou d’exploitation des fonds marins.</p>
<h2>À Kingston, une session en trois temps</h2>
<p>L’AIFM s’est réunie en juillet, quelques semaines après la conclusion d’un accord placé sous le signe de la Convention du droit de la mer : le <a href="https://oceans-and-fisheries.ec.europa.eu/news/historic-achievement-treaty-high-seas-adopted-2023-06-19_en">traité pour la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité en haute mer</a>, qui sera ouvert à signatures à partir de septembre.</p>
<p>Les eaux internationales sont donc en ce moment au cœur d’une intense activité diplomatique. À Kingston, où se tenait la réunion, étaient présents une partie des 168 États membres de la convention, ainsi que de nombreux observateurs, ONG environnementalistes, représentants de l’industrie extractive ou scientifiques entendant éclairer les négociations.</p>
<p>Pour comprendre le contexte, soulignons que l’AIFM est un monde en soi. Dans un premier temps, sa Commission juridique et technique (CJT) s’est réunie pour un travail d’expertise. Elle fait toutefois l’objet de critiques par de nombreuses délégations, émises lors des négociations que nous avons observées, lui faisant grief d’être trop peu transparente, de concentrer ses travaux autour des enjeux d’exploitation, et de ne pas réussir à faire preuve de sa capacité à défendre l’environnement marin.</p>
<p>Dans un second temps, c’est l’organe exécutif de l’institution, son Conseil, qui a débattu pendant deux semaines, avant de laisser l’Assemblée de l’Autorité, son organe délibératif, discuter fin juillet.</p>
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<h2>Des discussions sous tension</h2>
<p>Au sein du Conseil, des lignes antagoniques se sont opposées. Les tenants d’une adoption rapide des règles, régulations et procédures (RRP) pour l’exploitation minière, souhaitent d’un côté accélérer le tempo. Ils le veulent soit par opportunité, pour se laisser la possibilité d’engager des projets d’exploitation des grands fonds marins à l’avenir, soit dans le but que l’AIFM rédige ce « Code minier » afin d’accomplir son mandat, puisqu’elle est en effet chargée d’élaborer ces RRP encadrant l’exploitation.</p>
<p>De l’autre, une coalition de pays pousse pour l’adoption d’une pause de précaution, <a href="https://www.lemonde.fr/en/environment/article/2023/07/10/seabed-mining-growing-calls-for-a-precautionary-pause_6047615_114.html">d’un moratoire voire d’une interdiction</a> : c’est par exemple le cas du Chili, de la France, du Brésil ou du Vanuatu. Ils invoquent l’article 145 de la Convention du droit de la mer, relatif à la protection effective de l’environnement marin.</p>
<p>De ces négociations ont finalement émergé deux décisions qui relèvent d’un consensus minimal : elles rappellent qu’aucune exploitation ne saurait être approuvée avant l’adoption des règles en la matière, et que l’AIFM entend tâcher de continuer à élaborer ces régulations et procédures.</p>
<p>L’opposition a néanmoins ressurgi lors de l’Assemblée, moment attendu par les ONG et la coalition informelle des « Amis de l’Océan », favorables à davantage de précautions. Cinq jours durant, les dialogues ont toutefois erré sur la possibilité d’un vrai débat, la Chine faisant montre d’une forte réticence à l’égard de cette idée.</p>
<p>Après de vifs échanges, les deux décisions ont finalement été séparées de l’agenda lors de la dernière journée pour que les discussions puissent se tenir en 2024.</p>
<h2>Une île du Pacifique à l’assaut des fonds marins</h2>
<p>La tension qui régnait au cours de cette session remonte aux principes de création de l’AIFM, fondée sur un double objectif : l’autorité a été à la fois chargée d’organiser l’exploitation des fonds marins, tout en ayant pour obligation de protéger l’environnement marin.</p>
<p>Deux dynamiques ont renforcé cette contradiction. La première vient de Nauru, <a href="https://brill.com/view/journals/estu/37/3/article-p375_1.xml?language=en">île du Pacifique qui a déclenché un dispositif</a> visant à engager l’exploitation des grands fonds marins dans la zone – la « règle des deux ans », établie par l’Accord de 1994 lié à la Convention du droit de la mer. Cette procédure initiée en juin 2021 implique que le Conseil devait adopter avant juillet 2023 des règles pour encadrer l’exploitation minière – ce qu’il n’a pas fait.</p>
<p>La règle prévoit, dans ce cas, la possibilité pour les contractants de l’AIFM de soumettre des plans d’exploitation temporaires. Nauru dispose alors d’un moyen de pression pour l’adoption de ce « Code minier » et n’entend pas attendre indéfiniment pour faire valoir ce droit.</p>
<h2>Une place nouvelle pour la biodiversité</h2>
<p>La seconde dynamique, en sens contraire, vient de l’adoption en juin 2023 par les Nations-Unies, d’un accord portant sur la biodiversité au-delà des juridictions nationales (BBNJ). Elle survient six mois après une décision de la COP de la Convention sur la diversité biologique (CDB) qui demandait à ce que l’institution s’assure d’éviter les dommages à la faune marine.</p>
<p>Alors que l’océan est en proie à des transformations rapides et inquiétantes liées aux activités humaines, le contexte des négociations à l’AIFM, marqué par une environnementalisation des politiques internationales, où la protection des milieux de vie devient un enjeu central des discussions, a changé profondément ces dernières années.</p>
<p>Ces deux dynamiques renforcent donc les contradictions initiales contenues dans le mandat de l’AIFM et explique pour partie le déroulement plus tendu qu’à l’accoutumée des échanges dans cette enceinte auparavant policée.</p>
<h2>Le poids croissant de la science</h2>
<p>L’irruption de la science dans les débats est toujours plus grande, et les incertitudes et méconnaissances accroissent cette tension. En effet, un consensus scientifique établit désormais que la connaissance autour des milieux potentiellement affectés par l’exploitation est insuffisante, compte tenu des conséquences irréversibles de celle-ci.</p>
<p>Car à travers les travaux scientifiques, c’est la réalité matérielle, économique et physique du changement climatique et de la sixième extinction de masse des espèces qui s’invite dans les discussions, <a href="https://theconversation.com/face-a-la-sixieme-extinction-de-masse-la-solution-du-droit-du-vivant-163515">et pose la question de l’habitabilité de la planète</a>.</p>
<p>Mais ces débats interrogent aussi quant au risque, dans de nombreuses arènes internationales, de l’affaiblissement du cadre multilatéral : l’AIFM en est un unique de gouvernement d’un espace commun à l’humanité. Sans régulation, les dynamiques d’exploitation seraient d’autant moins maîtrisables, même si l’idéal était de les éviter complètement.</p>
<h2>Le développement durable, concept dépassé ?</h2>
<p>Demeure une difficulté : la Convention du droit de la mer est née au moment où se formulait et se diffusait le paradigme du développement durable, lequel supposait la possibilité de concilier croissance économique, progrès sociaux et protection de l’environnement. L’actuelle aggravation des dynamiques de destruction des milieux de vie invite à reconsidérer ce paradigme.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/540720/original/file-20230802-21-4yqk9v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/540720/original/file-20230802-21-4yqk9v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=443&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/540720/original/file-20230802-21-4yqk9v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=443&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/540720/original/file-20230802-21-4yqk9v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=443&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/540720/original/file-20230802-21-4yqk9v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=557&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/540720/original/file-20230802-21-4yqk9v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=557&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/540720/original/file-20230802-21-4yqk9v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=557&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Avec 9,5 millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive situés sous 1000 mètres de profondeur, la France la plus grande ZEE en zone de grands fonds marins du monde.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/ddie/9393580227/in/photolist-fj5y8M-ssAttB-8A2Gup-e4qinG-h8vp53-aoFNWu-uC7REa-b9JVrH-iiii2t-pnbsZR-oURZUV-dYWbMM-9xcWaZ-aGHt8V-9YubE5-biNsvn-9Yoh83-9YmVLE-pv5bhp-BrXFrs-ph9tLm-7Woq3y-bpqs3m-9pbnbj-hLkiVy-oT2x7d-roE2v8-9pt67g-d1RpE1-b1XvyZ-iYEE3Z-8Rob1z-aaRRqF-aTYMnM-pvQEWD-e6s6wK-qWRZfu-kkT4ML-n2JBXt-bgtphg-7QM8Rk-hjERgi-i32e62-hjX8r1-8cqC8D-qPFg7E-8vpnB6-8prxm5-jR5kwT-dTtv3G">Daniel Dietrich/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>De fait, lors des discussions de cette semaine à l’AIFM, des <a href="https://theconversation.com/sinspirer-des-traditions-polynesiennes-pour-preserver-locean-118060">membres de communautés locales et indigènes du Pacifique</a> ont fait entendre une autre voix. Eux défendent le lien spécifique qui les unit à l’océan, leur milieu d’existence, et veulent que les générations futures le maintiennent – discours qui rejoint les conclusions scientifiques bien que ses fondements soient très différents.</p>
<p>Du côté des partisans de l’exploitation minière, qui pensent les projets à partir de projections à la hausse de la demande en minerais, une telle perspective est jugée absurde. Lues ensemble, ces deux positions antagonistes reflètent la question qui travaille l’AIFM, comme nos sociétés : celle des modes de production et de consommation dans un environnement global en tension.</p>
<h2>Les modes de production en débat</h2>
<p>La reconduction de ces modes de production et de consommation pourrait en effet, comme le pensent les industriels, mener à la nécessité de l’exploitation minière dans les grands fonds marins.</p>
<p>Mais leur transformation vers une économie des communs s’éloignant du principe d’accumulation remettrait en cause cette nécessité future.</p>
<p>À l’AIFM, tous les travaux doivent reposer sur le principe de patrimoine commun de l’humanité, selon l’article 136 de la Convention du droit de la mer. L’urgence provoquée par la dégradation des conditions de l’existence sur Terre pèse sur les discussions.</p>
<p>Cette institution n’est pas seule à y être confrontée et ne se chargera pas de l’entièreté du problème. Mais elle pourrait contribuer à mieux considérer la question de la préservation de nos milieux de vie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210730/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierre-Yves Cadalen a reçu des financements du projet ANR LifeDeeper, pour l'étude des grands fonds marins, dans le cadre d'un projet postdoctoral, pour financer cette enquête d'observation. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Tiago Pires da Cruz ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’Autorité internationale des fonds marins, qui s’est réunie à Kingston en juillet, est tiraillée entre des missions et des visions contradictoires.Pierre-Yves Cadalen, Docteur en science politique - relations internationales, Université de Bretagne occidentale Tiago Pires da Cruz, Doctorant Gouvernance Globale de l'Océan, Sciences Po BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2083362023-07-04T20:09:43Z2023-07-04T20:09:43ZL’ONU est-elle une organisation démocratique ?<p>S’il est toujours délicat d’affirmer qu’un pays est démocratique ou non, et dans quelle mesure, de nombreuses organisations s’efforcent de classer les États du monde selon leur niveau de démocratie. Ces classements diffèrent légèrement l’un de l’autre, mais l’on constate globalement que, sur les <a href="https://www.un.org/fr/about-us/member-states">193 membres de l’ONU</a>, environ la moitié sont généralement <a href="https://www.democracymatrix.com/ranking">considérés comme étant non démocratiques</a>.</p>
<p>Parmi ces régimes non démocratiques, certains jouent, de façon constante ou plus ponctuelle, un rôle majeur au sein des Nations unies : la Russie et la Chine, bien sûr, membres permanents du Conseil de sécurité, mais aussi, par exemple, l’Arabie saoudite, qui a pu il y a quelques années placer un de ses diplomates <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/onu-l-arabie-saoudite-prend-la-tete-du-conseil-des-droits-de-l-homme-et-provoque-la-colere-des-associations_1093837.html">à la tête du panel du Conseil des droits de l’homme</a>, ou l’Iran, qui a été <a href="https://www.lefigaro.fr/international/l-iran-elue-a-la-commission-de-la-condition-de-la-femme-de-l-onu-20210422">élu en 2021 à la Commission de la condition de la femme</a>, avant d’en être <a href="https://news.un.org/fr/story/2022/12/1130617">exclu en décembre 2022</a>, du fait du déchaînement de violence du régime contre un mouvement de contestation interne qui exigeait notamment davantage de liberté pour les Iraniennes.</p>
<p>Aujourd’hui, le <a href="https://www.ohchr.org/fr/hr-bodies/hrc/about-council">Conseil des droits de l’homme de l’ONU</a>, organe dont on pourrait s’attendre à ce qu’il n’accueille que des pays exemplaires en matière de droits humains, compte parmi ses <a href="https://www.ohchr.org/en/hr-bodies/hrc/membership">47 États membres</a>, élus par l’Assemblée générale pour des périodes de trois ans, la Chine, Cuba, le Gabon, la Russie, l’Érythrée, le Qatar ou encore les Émirats arabes unis…</p>
<p>Est-ce à dire que l’ONU et ses organes ne sont pas démocratiques ?</p>
<h2>Le Conseil des droits de l’homme est-il crédible ?</h2>
<p>Le système de vote pour être élu au Conseil des droits de l’homme fait l’objet de nombreuses critiques, car les pays négocient et se mettent d’accord pour décider qui se présente, souvent sans rencontrer d’opposition.</p>
<p>En octobre 2020, l’ONU a certes <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2020/10/14/l-onu-refuse-l-entree-de-l-arabie-saoudite-a-son-conseil-des-droits-de-l-homme_6055977_3210.html">refusé l’entrée de l’Arabie saoudite à son Conseil des droits de l’homme</a>, mais la Chine et la Russie, régimes autoritaires, ont, quant à elles, été élues.</p>
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<p>Plus récemment, en octobre 2022, le Conseil des droits de l’homme a renoncé à organiser un <a href="https://news.un.org/fr/story/2022/10/1128597">débat sur la situation des droits de l’homme dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang</a> (Chine), débat qui avait été réclamé par une dizaine d’États démocratiques, dont les États-Unis, le Canada, l’Australie, le Royaume-Uni, la France et plusieurs autres pays européens. Cette discussion devait constituer un suivi du <a href="https://legrandcontinent.eu/fr/2022/09/03/pourquoi-le-rapport-de-lonu-sur-les-violations-des-droits-de-lhomme-au-xinjiang-est-il-crucial/">rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme</a> (HCDH), qui avait dénoncé de possibles crimes contre l’humanité contre les Ouïghours et d’autres minorités musulmanes au Xinjiang.</p>
<p>Le vote, par 19 voix contre, 17 pour et 11 abstentions, a décidé que ce débat n’aurait pas lieu. La République populaire de Chine a voté contre, bien entendu, suivi par plusieurs pays d’Afrique et d’Asie, ainsi que par des pétromonarchies comme le Qatar et les Émirats arabes unis. C’est historique : c’est seulement la deuxième fois en 16 ans d’histoire du Conseil qu’une motion est rejetée.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1578033384580079616"}"></div></p>
<p>Le Conseil est, en effet, une <a href="https://www.cairn.info/revue-relations-internationales-2008-4-page-91.htm">instance assez récente</a>, au regard des presque 78 ans d’existence de l’ONU : créé en 2006, il <a href="https://www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_2006_num_52_1_3946">succède</a> à l’ancienne <a href="https://www.ohchr.org/fr/hr-bodies/sc/sub-commission">Commission des droits de l’homme</a>, qui s’était déjà discréditée par sa passivité et son indulgence envers les dictatures. En effet, de nombreux États dictatoriaux, notamment africains, tiraient profit de ce qu’ils étaient membres de cette commission pour échapper aux critiques et aux rapports dénonçant leurs manquements.</p>
<p>Le Conseil des droits de l’homme apparaît largement impuissant face aux dictatures, notamment du fait du caractère non contraignant des mesures qu’il adopte. En effet, le Conseil n’adresse que des recommandations, qui peuvent être suivies par les États ou non.</p>
<p>Toutefois, le Conseil se défend en indiquant que le simple fait de dénoncer un État pour ses pratiques contraires aux droits humains aurait un impact international : ce procédé de <a href="https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/0022343313510014">« naming and shaming »</a> pousserait les États à se conformer aux règles internationales pour préserver leur réputation. Il organise régulièrement, pour chaque État, un <a href="https://www.ohchr.org/fr/hr-bodies/upr/upr-main">examen périodique universel</a> qui contraint chaque pays à présenter un bilan de son respect des droits humains et à répondre aux critiques adressées sur ce point par les autres membres.</p>
<p>Certains États, <a href="https://www.whitehouse.gov/briefings-statements/president-donald-j-trump-standing-human-rights-u-n/">à commencer par les États-Unis</a>, militent pour une réforme du Conseil qui <a href="https://theconversation.com/le-conseil-des-droits-de-lhomme-de-lonu-instance-utile-ou-coquille-vide-146618">exclurait les États coupables de violations flagrantes des droits humains</a>. Toutefois, une telle réforme n’est pas près d’aboutir. En effet, quelle serait la légitimité d’une institution qui adopterait des recommandations contre des États qui ne pourraient jamais y siéger ? Et sur quels critères un État serait-il désigné comme <a href="https://asiepacifique.fr/conseil-des-droits-de-homme-onu/">« respectant les droits de l’homme »</a> et donc digne d’être membre du Conseil ?</p>
<p>Il n’empêche que le 7 avril 2022, la Russie a été <a href="https://news.un.org/fr/story/2022/04/1117912">suspendue du Conseil des droits de l’homme de l’ONU</a>, par 93 votes à l’Assemblée générale, contre 24 dans le sens opposé et 58 abstentions. Du fait de la résolution de 2006 qui a créé le Conseil des droits de l’homme, l’Assemblée générale peut suspendre un pays s’il commet des violations flagrantes et systématiques des droits de l’homme. Ce n’est que la deuxième fois, après la <a href="https://press.un.org/fr/2011/AG11050.doc.htm">Libye en 2011</a> qu’un membre est exclu de l’organe onusien chargé des droits humains.</p>
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<h2>Supprimer le droit de veto ?</h2>
<p>Moscou, qui use et abuse de son droit de veto (elle l’a utilisé 152 fois au total depuis 1946, soit presque autant que les quatre autres membres du Conseil de sécurité) devrait-elle en être privée ? En avril 2022, Volodymyr Zelensky a réclamé qu’elle soit <a href="https://www.bfmtv.com/international/asie/russie/guerre-en-ukraine-la-russie-pourrait-elle-etre-exclue-de-l-onu-comme-le-demande-kiev_AN-202212270192.html">exclue du Conseil de sécurité de l’ONU</a>, et qu’elle perde donc son droit de veto. L’Ukraine fait valoir que la Russie occuperait illégalement le siège permanent au Conseil de sécurité qui avait été attribué en 1945 à l’URSS (laquelle n’existe plus). Pourtant, il n’existe aucune procédure de confiscation du droit de veto ou d’exclusion d’un membre permanent du Conseil de sécurité. En effet, il faudrait que la Russie elle-même soit d’accord…</p>
<p>Selon la <a href="https://www.un.org/fr/about-us/un-charter/full-text">Charte des Nations unies</a>, « si un membre de l’Organisation enfreint de manière persistante les principes énoncés dans la présente Charte, il peut être exclu de l’Organisation par l’Assemblée générale sur recommandation du Conseil de sécurité ». Toutefois, cette disposition ne concerne pas les membres du Conseil de sécurité.</p>
<p>L’unique solution pour qu’un membre quitte le Conseil de sécurité serait qu’il se retire de lui-même. Une option inenvisageable ne serait-ce parce que, grâce au droit de veto, la <a href="https://www.bfmtv.com/international/asie/russie/guerre-en-ukraine-la-russie-pourrait-elle-etre-exclue-de-l-onu-comme-le-demande-kiev_AN-202212270192.html">Russie s’évite notamment une saisine par le Conseil de sécurité de la Cour pénale internationale</a> pour les <a href="https://www.bfmtv.com/international/europe/angleterre/crimes-de-guerre-le-royaume-uni-forme-des-juges-ukrainiens_AN-202212140428.html">« crimes de guerre »</a> dont ses dirigeants sont accusés.</p>
<p>On l’aura compris : l’Assemblée générale, où chacun des États membres dispose d’une voix, est un organe démocratique, mais le Conseil de sécurité, composé de 15 États dont les 5 membres permanents dotés du droit de veto, l’est moins.</p>
<p>Le droit de veto, qui a été utilisé 265 fois depuis la création de l’ONU, <a href="https://ledrenche.fr/veto-conseil-de-securite-onu/">paralyse l’institution et nuit à son efficacité</a>. De plus, il n’est pas justifié que cinq pays, qui ne représentent que 30 % de la population mondiale, disposent du pouvoir exorbitant de <a href="https://www.nouvelobs.com/debat/20220507.OBS58127/guerre-en-ukraine-faut-il-supprimer-le-droit-de-veto-a-l-onu.html">dire non à une décision prise par la majorité</a> des 193 États membres.</p>
<p>Mais est-il possible de réformer l’ONU pour rendre son fonctionnement plus démocratique ? C’est le Conseil de sécurité qui dispose du pouvoir exécutif, l’Assemblée générale n’ayant en réalité qu’un pouvoir consultatif. Pour démocratiser l’ONU, il faudrait donc donner plus de pouvoir à l’Assemblée générale.</p>
<p>Depuis quelques années, des voix s’élèvent pour réclamer une réforme du droit de veto. Kofi Annan, secrétaire général de l’ONU de 1997 à 2006, a proposé à la fin de son mandat une suspension du droit de veto quand sont discutées des situations où des crimes de masse sont en cours. <a href="https://onu.delegfrance.org/5-choses-a-savoir-sur-la-france-et-le-veto">La France a elle-même porté officiellement cette proposition depuis 2013</a>. Cette initiative est soutenue aujourd’hui par une centaine de pays, soit la majorité des États membres de l’ONU.</p>
<h2>Malgré tout, l’ONU est porteuse des valeurs universelles de la démocratie</h2>
<p>Le caractère démocratique de l’ONU tient surtout aux valeurs qu’elle véhicule, dans ses grands textes normatifs.</p>
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<p>Lorsque les fondateurs de l’ONU ont rédigé la Charte des Nations unies en 1945, <a href="https://www.un.org/fr/global-issues/democracy">ils n’y ont pas inclus le mot « démocratie »</a>. Et pour cause : pour ne prendre que les cinq membres du Conseil de sécurité, il aurait été compliqué de considérer comme démocratiques l’URSS de Staline, la Chine de Mao, mais aussi les États-Unis ségrégationnistes et la France et le Royaume-Uni colonialistes…</p>
<p>Cependant, l’ONU a adopté par la suite de grands textes qui affirment clairement les valeurs démocratiques : la <a href="https://www.un.org/fr/universal-declaration-human-rights/">Déclaration universelle des droits de l’homme</a> en 1948, et en 1966 le <a href="https://www.ohchr.org/fr/treaty-bodies/ccpr/background-international-covenant-civil-and-political-rights-and-optional-protocols">Pacte international relatif aux droits civils et politiques</a>, qui proclame la liberté d’expression (Article 19), la liberté de réunion pacifique (Article 21) et la liberté d’association (Article 22) ; ou encore la <a href="http://www.un.org/womenwatch/daw/cedaw/text/fconvention.htm">Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes</a> (1979) qui proclame les droits des femmes, et impose aux États parties de les respecter.</p>
<p>De plus, le <a href="https://www.ohchr.org/fr/ohchr_homepage">HCDH</a>, créé en 1993, a vocation à défendre les droits humains, et a soutenu des programmes de justice transitionnelle dans plus de 20 pays au cours des années 2010. L’ONU fournit également chaque année une <a href="https://www.un.org/fr/global-issues/democracy">assistance électorale à environ 60 pays</a> pour organiser des élections libres et démocratiques. Enfin, le <a href="http://www.un.org/democracyfund/">Fonds des Nations unies pour la démocratie</a> (FNUD) soutient des projets qui visent à renforcer le libre jeu de la démocratie dans le monde.</p>
<p>L’ONU n’hésite pas, en outre, à rappeler à l’ordre certains de ses États membres les plus puissants pour leur attitude par rapport aux droits humains : ainsi, à plusieurs reprises récemment, l’Organisation a critiqué la France pour son <a href="https://www.cgt.fr/comm-de-presse/lonu-critique-la-france-sur-sa-politique-dimmigration">non-respect des droits des migrants et réfugiés</a> et des <a href="https://www.ohchr.org/fr/2019/02/france-un-experts-denounce-severe-rights-restrictions-gilets-jaunes-protesters">droits des manifestants</a>. Le 30 juin 2023, la porte-parole du HCDH, Ravina Shamdasani, a appelé la France à « s’attaquer sérieusement aux <a href="https://news.un.org/fr/story/2023/06/1136572">profonds problèmes de racisme et de discrimination</a> parmi les forces de l’ordre », suite à la mort du jeune Nahel abattu par un policier.</p>
<p>Malgré ses limites et ses insuffisances, <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/09/26/non-l-onu-ne-sert-pas-a-rien_5360561_3232.html">l’ONU reste l’organisation internationale la plus à même de diffuser la démocratie</a> et de défendre les droits humains, et doit être soutenue et respectée pour pouvoir mener son action pacificatrice et progressiste.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/208336/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Chloé Maurel ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le poids écrasant des cinq membres du Conseil de sécurité rend difficile de qualifier l’ONU d’organisation démocratique. Mais elle a adopté des textes dont il ne faut pas sous-estimer l’importance.Chloé Maurel, SIRICE (Université Paris 1/Paris IV), Université Paris 1 Panthéon-SorbonneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2067182023-06-07T19:38:52Z2023-06-07T19:38:52ZLa diplomatie des sommets est-elle utile ?<p>Les sommets internationaux se succèdent à une vitesse étourdissante. L’actualité récente a braqué le projecteur sur plusieurs de ces grands raouts : le <a href="https://www.consilium.europa.eu/fr/meetings/international-summit/2023/05/19-21/">G7 à Hiroshima</a> (19-21 mai), le <a href="https://theconversation.com/bachar-al-assad-a-la-ligue-arabe-le-retour-du-pestifere-syrien-sur-la-scene-internationale-205693">sommet de la Ligue arabe à Djeddah</a> (19 mai), le <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-actu/joe-biden-ouvre-son-sommet-pour-la-democratie-20230329">sommet pour la démocratie</a> (à Washington, les 29-30 mars), sans oublier le tout récent <a href="https://www.consilium.europa.eu/fr/meetings/international-summit/2023/06/01/">sommet de la Communauté politique européenne à Chisinau</a>, le 1<sup>er</sup> juin, tenu alors qu’au même moment les <a href="https://www.nessma.tv/fr/internationale/actu/les-ministres-des-affaires-etrangeres-des-brics-se-reunissent-au-cap-pendant-deux-jours/454852">ministres des Affaires étrangères des BRICS</a> se réunissaient au Cap. Il y aura bientôt le <a href="https://www.nato.int/cps/fr/natohq/news_214116.htm">sommet de l’OTAN à Vilnius</a> les 11-12 juillet, puis celui du <a href="https://www.g20.org/en/g20-india-2023/new-delhi-summit/">G20 à Delhi</a>, les 9-10 septembre.</p>
<p>Bref, on assiste à une véritable inflation de sommets, ce qui semble indiquer que les parties prenantes y trouvent un intérêt certain. Comment ces rassemblements des dirigeants de la planète se déroulent-ils et, surtout, quelle est leur valeur ajoutée réelle ?</p>
<h2>Vienne 1815, Paris 1919 : les références</h2>
<p>Un sommet est une réunion des chefs d’État et de gouvernement où – normalement – se prennent des décisions importantes. <a href="https://www.herodote.net/9_juin_1815-evenement-18150609.php">Le Congrès de Vienne</a> (1814-1815), que l’on peut considérer comme le <a href="https://www.un.org/en/chronicle/article/congress-vienna-present-day-international-organizations">premier sommet international de tous les temps</a>, réunit les puissances victorieuses de l’époque (Autriche, Angleterre, Prusse, Russie) et dessine un nouvel équilibre européen qui subsistera, bon an mal an, jusqu’à 1914.</p>
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<p>Un peu plus d’un siècle après le Congrès de Vienne, la <a href="https://ehne.fr/fr/encyclopedie/th%C3%A9matiques/relations-internationales/pratiques-diplomatiques-contemporaines/la-conf%C3%A9rence-de-la-paix-de-1919">Conférence de Paris de 1919</a> est celle des vainqueurs de la Première Guerre mondiale. Le <a href="https://mjp.univ-perp.fr/traites/1919versailles.htm">traité de Versailles</a> qui y est rédigé est le fruit des négociations conduites au château de Versailles de janvier à juin 1919 entre les trois chefs des principales puissances (Woodrow Wilson, Lloyd George et Georges Clemenceau).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/530350/original/file-20230606-25-lkg420.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/530350/original/file-20230606-25-lkg420.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=559&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/530350/original/file-20230606-25-lkg420.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=559&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/530350/original/file-20230606-25-lkg420.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=559&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/530350/original/file-20230606-25-lkg420.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=702&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/530350/original/file-20230606-25-lkg420.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=702&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/530350/original/file-20230606-25-lkg420.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=702&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La signature du Traite de Versailles.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Extrait d’une vue stéréoscopique, auteur anonyme, photographe de l’armée française</span></span>
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<p>Le Congrès de Vienne puis la Conférence de Paris contiennent déjà en germes les postulats qui sont à la base de tout <a href="https://www.cairn.info/le-multilateralisme--9782707153333-page-73.htm">sommet</a> : un sommet est, d’abord, un exercice interétatique, et l’agenda est entièrement déterminé par la volonté des États participants, qui s’entendent pour faire prévaloir leurs vues. Il faut ensuite que les chefs d’État ou de gouvernement soient présents, car le succès d’un sommet dépend de la connivence existant entre eux : la diplomatie des sommets n’est pas la diplomatie multilatérale. C’est une diplomatie de nature oligarchique ou excluante : le G20 exclut 174 États (tous les États de l’ONU qui ne sont pas membres du G20). Au point qu’on a forgé le terme de <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/histoire-et-geopolitique/geopolitique-et-strategie/temps-des-humilies_9782738147233.php">« minilatéralisme »</a> pour décrire cette forme de gouvernance oligarchique. Enfin, ce qu’on recherche dans un sommet, c’est une vision commune, que chaque État s’engage à mettre en œuvre.</p>
<h2>Sommets réguliers et sommets extraordinaires</h2>
<p>Il est possible de distinguer les deux principales catégories de sommets : les sommets réguliers et les sommets extraordinaires.</p>
<p>Les premiers s’inscrivent dans une relation bilatérale ou minilatérale classique, marquée par une certaine périodicité : citons, entre autres exemples, les <a href="https://www.france-allemagne.fr/Archives-Les-sommets-franco,1670.html">sommets franco-allemands</a>, qui se tiennent deux fois par an, les <a href="https://www.francophonie.org/le-sommet-84">sommets bisannuels des États francophones</a> ou encore ceux des <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-eco/asie-pacifique-debut-du-sommet-de-l-apec-en-pleines-tensions-sur-l-ukraine-et-la-coree-du-nord-20221118">États de l’Asie-Pacifique</a> (APEC) et de <a href="https://www.nato.int/cps/fr/natohq/topics_50115.htm">l’OTAN</a>.</p>
<p>Ces sommets reposent sur des règles de fonctionnement bien huilées du fait de leur fréquence. Ils exigent des dirigeants qui y participent un certain niveau de préparation dans la mesure où ils seront soumis au jugement de leurs pairs. Ils facilitent les accords entre les chefs de gouvernement et d’État concernés car ceux-ci ont la possibilité, en échangeant directement, de conclure des négociations qui avaient pu être ralenties ou bloquées par les pesanteurs bureaucratiques. Ils définissent une temporalité, qui est celle séparant chronologiquement deux sommets. L’objectif est alors de terminer une négociation au sommet suivant. Enfin la visibilité (d’aucuns diront la scénographie) des sommets présente l’avantage d’inciter les dirigeants à faire de leur mieux pour surmonter les obstacles persistants et afficher des résultats concrets.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/530360/original/file-20230606-29-h0dwoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/530360/original/file-20230606-29-h0dwoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/530360/original/file-20230606-29-h0dwoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/530360/original/file-20230606-29-h0dwoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/530360/original/file-20230606-29-h0dwoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/530360/original/file-20230606-29-h0dwoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/530360/original/file-20230606-29-h0dwoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le 30 juin 2022, le premier ministre hongrois Viktor Orban, accompagné de ses ministres de la Défense et des Affaires étrangères, arrive au sommet de l’OTAN à Madrid. Rare occasion d’échanges entre la Hongrie et l’ensemble des autres membres de l’Alliance, avec lesquels elle est en désaccord sur la question de l’attitude à adopter vis-à-vis de la guerre en Ukraine.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/spain-madrid-30-june-2022-hungarys-2197424339">Belish/Shutterstock</a></span>
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<p>Les sommets extraordinaires, pour leur part, sont des événements diplomatiques qui, en principe, ne se produisent qu’une fois. L’un des plus fameux fut le <a href="https://www.lefigaro.fr/histoire/archives/2018/09/16/26010-20180916ARTFIG00121-17-septembre-1978-les-accords-de-camp-david-visa-pour-la-paix-israelo-egyptienne.php">sommet de Camp David</a> entre Israël et l’Égypte, en septembre 1978. Les Accords de Camp David signés à cette occasion débouchèrent sur un <a href="http://www.isd.sorbonneonu.fr/blog/ce-jour-dans-lhistoire-le-traite-de-paix-israelo-egyptien-du-26-mars-1979/">traité de paix bilatéral israélo-égyptien en mars 1979</a>. À la différence des sommets réguliers, ce type de sommet est soumis à la pression du temps. On ne peut pas reporter les points non conclus à un prochain sommet.</p>
<p>En amont du sommet, tout sera fait pour éviter l’échec. Ainsi, dans le domaine du désarmement nucléaire, les négociations entamées en 1969 à Helsinki sous la dénomination SALT (Strategic Arms Limitation Talks) avançaient avec peine. Mais l’annonce du <a href="https://www.cairn.info/revue-historique-2009-4-page-897.htm">sommet Nixon-Brejnev à Moscou en mai 1972</a> eut un effet d’accélération. Les <a href="https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/126">accords SALT</a> furent conclus entre les États-Unis et l’URSS en mai 1972, coïncidant avec le sommet de Moscou.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/bonnes-feuilles-brejnev-lantiheros-153946">Bonnes feuilles : « Brejnev, l’antihéros »</a>
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<p>Ces sommets extraordinaires sont souvent aussi des occasions de développer des liens personnels entre responsables politiques. On constate que les dirigeants américains sont friands d’organiser des sommets dans des lieux de semi-villégiature (Camp David, le <a href="https://www.latimes.com/archives/la-xpm-1992-05-04-mn-972-story.html">ranch des Reagan</a>, celui de <a href="https://www.letemps.ch/monde/ranch-crawford-jiang-zemin-rassurer-george-bush">George W. Bush</a>) où la priorité est donnée non pas tant aux réunions de travail qu’aux promenades et moments de détente, où les dirigeants sont supposés fendre l’armure et devenir plus… humains.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/530364/original/file-20230606-21-rsjkz0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/530364/original/file-20230606-21-rsjkz0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=441&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/530364/original/file-20230606-21-rsjkz0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=441&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/530364/original/file-20230606-21-rsjkz0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=441&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/530364/original/file-20230606-21-rsjkz0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=554&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/530364/original/file-20230606-21-rsjkz0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=554&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/530364/original/file-20230606-21-rsjkz0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=554&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">George W. Bush, Vladimir Poutine et leurs épouses pendant une balade dans le ranch des Bush à Crawford, Texas, le 4 novembre 2001.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://georgewbush-whitehouse.archives.gov/news/releases/2001/11/images/20011116.html">Eric Draper/Whitehouse.gov</a></span>
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<p>Les sommets du G7 (G8 jusqu’à l’exclusion de la Russie en 2014) sont préparés longtemps à l’avance par les sherpas, véritables « experts en sommets », ayant rang de vice-ministre ou de secrétaire d’État, parfois de conseiller diplomatique (<a href="https://www.liberation.fr/ecrans/1998/06/12/jacques-attali-conseiller-d-etat-ex-sherpa-de-mitterrand_241214/">Jacques Attali</a> fut le sherpa de François Mitterrand). Le terme est emprunté au vocabulaire des guides de montagne dans l’Himalaya. Les sherpas sont eux-mêmes assistés par des <a href="https://jp.ambafrance.org/1ere-reunion-des-sous-Sherpas">« sous-sherpas »</a>, l’un économique et financier, l’autre diplomatique. Les sherpas forment une communauté d’experts qui se rencontrent régulièrement et coordonnent les préparatifs des sommets. Leur proximité avec les chefs d’État ou de gouvernement fait d’eux des experts influents et incontournables.</p>
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<p><a href="https://www.cairn.info/revue-mondes1-2014-1-page-151.htm">Analysant le rôle des sherpas</a>, Noël Bonhomme explique que les « réunions des sherpas connurent une codification croissante marquée par le mimétisme vis-à-vis des sommets tant dans la durée que dans l’organisation du travail. […] Experts d’un domaine (les questions économiques) et chargés d’une mission spécifique (préparer les discussions), ils furent de plus en plus les maîtres d’œuvre d’exercice de diplomatie multiforme […] gérant aussi les aspects de plus en plus divers des sommets, des entretiens bilatéraux à la diplomatie publique. »</p>
<p>Les sherpas font le lien entre les dirigeants politiques et les négociateurs diplomatiques. Ce sont bien souvent eux qui forgent les compromis, même si c’est le pouvoir politique qui en tire tout le crédit. Ce sont eux, aussi, qui rédigent les traditionnelles déclarations politiques de fin de sommet, qu’on appelle communiqués finaux.</p>
<p>Enfin, il ne faut pas oublier le coût des sommets, de plus en plus onéreux, notamment à cause des frais liés à la protection des participants. Ainsi, le G7 de La Malbaie (Canada) en 2018 a coûté l’équivalent de 450 millions de dollars. Ce qui suscite évidemment des <a href="https://www.thestar.com/news/canada/2018/05/24/trudeau-defends-600-million-cost-of-quebec-g7-summit.html">réactions négatives dans l’opinion publique</a>. Avec les habituelles questions : a-t-on besoin des sommets ? Peut-on les rendre moins dispendieux ?</p>
<h2>De vraies limites, mais quelques mérites</h2>
<p>Tout paraît indiquer que la tendance contemporaine va vers une multiplication des sommets, qu’ils soient périodiques ou ad hoc. La diplomatie des sommets repose sur le prédicat que le concert des puissances est la condition nécessaire et suffisante d’une gouvernance mondiale efficace. Mais cette idée est quelque peu illusoire car ce sont d’abord les États qui assurent la régulation, que ce soit dans le domaine de la sécurité internationale ou du développement. Or les « G7 » et les « G20 » produisent souvent de la concertation sans décision, ce qui débouche inévitablement sur l’immobilisme.</p>
<p>Pourtant, les sommets ont quelques mérites. Tout d’abord, ils constituent une forme d’apprentissage à la négociation pour des États plutôt habitués aux postures unilatérales, comme ce fut le cas pour la Russie durant les 17 années (1997-2014) où elle appartint au G8. La diplomatie des sommets est de ce point de vue utile, parce qu’elle crée de la connivence entre les États – en cela, elle est dans la droite ligne des rapports de puissance inspirés du <a href="https://ehne.fr/fr/eduscol/terminale-sp%C3%A9cialit%C3%A9-histoire/terminale-sp%C3%A9cialit%C3%A9-histoire/th%C3%A8me-2-faire-la-guerre-faire-la-paix-formes-de-conflits-et-modes-de-r%C3%A9solution/faire-la-paix-par-les-trait%C3%A9s-les-trait%C3%A9s-de-westphalie-1648">Traité de Westphalie de 1648</a>, qui codifia la coexistence des États-nations souverains, débouchant sur le Concert européen du XIX<sup>e</sup> siècle (consacré par le Congrès de Vienne en 1815).</p>
<p>En même temps, elle favorise l’idéologie des « clubs » (le P5 du Conseil de sécurité, le G7 ou G8, etc.) qui entraîne une tension permanente entre ceux qui en sont et ceux qui voudraient en être – ce que l’on appelle la relégation, comme ce fut le cas pour l’Empire ottoman au XIX<sup>e</sup> siècle (il ne fut pas admis dans le Concert européen), et comme le montre l’exclusion de la Russie du G8 en 2014 après l’annexion de la Crimée. Cette relégation est également ressentie aujourd’hui par les puissances émergentes qui demandent à <a href="https://www.vie-publique.fr/parole-dexpert/270782-la-question-de-lelargissement-du-conseil-de-securite-de-lonu">élargir la composition du Conseil de sécurité</a> et se heurtent aux cinq membres permanents.</p>
<p>Concluons avec <a href="https://www.grasset.fr/livres/memoire-de-paix-pour-temps-de-guerre-9782246859710">Dominique de Villepin</a> : les sommets, estime l’ancien chef de la diplomatie française, « constituent une armature indispensable de la mondialisation pour amortir les chocs entre le niveau du multilatéralisme parfait et celui du pur jeu des puissances ».</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/206718/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Raoul Delcorde ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>G7, G20, Asean, BRICS et tant d’autres : les sommets internationaux se suivent à une cadence de plus en plus rapprochée. Faut-il y voir de simples passages obligés ou ont-ils une vraie utilité ?Raoul Delcorde, Ambassadeur honoraire de Belgique, Professeur invité, Université catholique de Louvain (UCLouvain)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2026762023-04-11T14:08:35Z2023-04-11T14:08:35ZL’insécurité alimentaire augmente dans le monde, dans l’indifférence. Voici ce que nous pouvons faire<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/519686/original/file-20230405-18-a2phag.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=30%2C0%2C6772%2C4566&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">De l'eau est distribuée dans un camp de personnes déplacées à la périphérie de Dollow, en Somalie, le 20 septembre 2022. </span> <span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Jerome Delay)</span></span></figcaption></figure><p>Se nourrir pour survivre, c’est ce que beaucoup d’êtres humains tentent de faire. </p>
<p>Au niveau international, il existe une constellation d’organisations ayant comme mission de lutter contre la faim, dont le <a href="https://fr.wfp.org/aidez-nous/histoires/faire-un-don">Programme alimentaire mondial</a> (PAM), l’<a href="https://www.fao.org/home/fr">Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture</a> et le <a href="https://www.ifad.org/fr/">Fonds international de développement agricole</a>.</p>
<p>Mais malgré ces organisations internationales et non gouvernementales (ONG) visant l’élimination de la faim dans le monde, la situation actuelle est dramatique. La faim dans le monde <a href="https://www.fao.org/publications/sofi/2022/fr/">est en constante augmentation pour la sixième année consécutive</a>. </p>
<p>Membre de l’Observatoire des droits de la personne affilié au Centre d’études et de recherches internationales de l’Université de Montréal (<a href="https://droits-observatoire-cerium.org">CÉRIUM</a>) et étudiant au doctorat en science politique, mes intérêts de recherche portent sur la justice climatique, les droits de la personne et la transition énergétique. </p>
<h2>Des millions d’êtres humains touchés par la famine</h2>
<p>Selon les <a href="https://fr.wfp.org/global-hunger-crisis?_ga=2.138467447.599589881.1680535874-975792406.1680535874&_gac=1.56963160.1680535874.Cj0KCQjw8qmhBhClARIsANAtbocTTjwonoEG-0IAgHDh-IYM_RHscDPmezO3Y7SZ959MgAkkgge2SmcaAovDEALw_wcB">projections du PAM</a>, au moins 345 millions de personnes seront en situation d’insécurité alimentaire en 2023. C’est le double du nombre enregistré en 2020. À l’heure actuelle, on parle de <a href="https://fr.wfp.org/eliminer-la-faim">43,3 millions de personnes</a> dont la vie est gravement menacée par la famine. Il s’agit d’une croissance dix fois plus rapide qu’il y a cinq ans. </p>
<p>Parmi les pays les plus touchés par la famine, on retrouve l’Afghanistan, dont <a href="https://www.actionagainsthunger.org/the-hunger-crisis/world-hunger-facts/the-worlds-hungriest-countries/">90 % de la population vit sous le seuil de la pauvreté</a>. Suivent de près l’Éthiopie, le Nigeria, la Somalie, le Soudan du Sud et le Yémen. Il ne faut pas non plus oublier Haïti, le Honduras, le Liban et le Sri Lanka. </p>
<p>Plus largement, ce sont <a href="https://fr.wfp.org/eliminer-la-faim">environ 828 millions de personnes</a>, soit près d’une personne sur neuf, qui n’a aucune idée du moment de leur prochain repas. Et les enfants sont loin d’être épargnés par cette crise. L’UNICEF estime qu’au moins <a href="https://www.wfp.org/stories/child-malnutrition-mounts-un-agencies-issue-call-action">40 millions d’entre eux</a> sont mal nourris, et ce, dans 15 pays seulement. Ils ne reçoivent pas le strict minimum d’une alimentation diversifiée nécessaire pour grandir et se développer. De plus, en 2020, près de <a href="https://www.un.org/sustainabledevelopment/hunger/">149 millions d’enfants de moins de cinq ans</a> à travers le monde souffraient d’un retard de croissance.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/519881/original/file-20230406-18-6qjaxn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="famille mange dans un salon" src="https://images.theconversation.com/files/519881/original/file-20230406-18-6qjaxn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/519881/original/file-20230406-18-6qjaxn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/519881/original/file-20230406-18-6qjaxn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/519881/original/file-20230406-18-6qjaxn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/519881/original/file-20230406-18-6qjaxn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/519881/original/file-20230406-18-6qjaxn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/519881/original/file-20230406-18-6qjaxn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Une famille déjeune dans sa maison de l’un des quartiers pauvres de Kaboul, en Afghanistan, le 21 mai 2022. L’ONU a déclaré que l’Afghanistan était confronté à une pauvreté croissante et que 6 millions de personnes étaient menacées de famine.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Ebrahim Noroozi, File)</span></span>
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</figure>
<h2>Les droits de la personne ne sont pas respectés</h2>
<p><a href="https://www.actioncontrelafaim.org/a-la-une/pourquoi-la-faim-dans-le-monde-existe-t-elle-toujours/">Les principales causes de la faim dans le monde sont connues</a>, et la liste des pays les plus affectés le confirme : conflits, inégalités et dérèglements climatiques. La guerre en Ukraine, l’un des principaux pays exportateurs de blé, a aussi mis à mal l’approvisionnement dans de nombreux pays. <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1873330/famine-aliment-guerre-ukraine-pam-onu-nourriture-inflation">Les récoltes ont chuté de 50 % en 2022</a>.</p>
<p>Dans ce contexte, il ne fait malheureusement pas de doute que les droits fondamentaux de ces populations sont bafoués. Exactement 75 ans après son adoption, la <a href="https://www.un.org/fr/universal-declaration-human-rights/"><em>Déclaration universelle des Droits de l’Homme</em></a> n’est pas honorée. L’article 3 stipule, par exemple, que « tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne ». Or, la faim peut conduire à de graves problèmes de santé, voire à la mort. La liberté des individus qui luttent pour survivre se voit fortement limitée. </p>
<p>Ensuite, l’article 25 énonce que « toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et celui de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement […] ». Il ne fait malheureusement aucun doute que des millions de personnes ont un niveau de vie nettement insuffisant pour assurer leur santé globale, parce que leur alimentation est grandement limitée. Ce manque est susceptible d’exacerber plusieurs autres problèmes de santé.</p>
<p>Finalement, en dépit de l’article 28, il est impossible d’affirmer que toute personne profite d’un environnement où règne l’ordre, sur le plan social et sur le plan international, comme les droits et libertés énoncés dans la présente Déclaration.</p>
<p>La <a href="https://www.un.org/sustainabledevelopment/sustainable-development-goals/">communauté internationale s’est pourtant engagée</a> à éradiquer la faim dans le monde d’ici 2030, soit dans moins de huit ans. <a href="https://www.un.org/sustainabledevelopment/hunger/">L’objectif principal ne peut être plus clair et précis</a> : garantir l’accès de tous et toutes, notamment des personnes en situation de pauvreté et de vulnérabilité y compris les nourrissons, à une alimentation sécuritaire et suffisante tout au long de l’année. </p>
<p>Cependant, l’aide internationale est actuellement insuffisante pour combler tous les besoins en nourriture. Pendant ce temps, les étalages des supermarchés en Amérique du Nord et en Europe regorgent de nourriture. Alors que le <a href="https://greenly.earth/en-us/blog/ecology-news/global-food-waste-in-2022">tiers de l’ensemble de la nourriture produite</a> sur la Terre est gaspillé ou perdue.</p>
<h2>Des solutions existent</h2>
<p>Dans ce même ordre d’idées, <a href="https://www.actionagainsthunger.org/press-releases/53-percent-shortfall-in-funds-for-hunger-programs-finds-2023-hunger-gap-report/">seulement 47 % du financement de la lutte contre la faim</a> par l’entremise du système humanitaire onusien est comblé. En d’autres mots, moins de la moitié du financement est atteint. <a href="https://www.wfp.org/funding/2022">Ce dernier provient majoritairement</a> des États-Unis, de l’Allemagne, de l’Union européenne, du Royaume-Uni et du Canada. Les donateurs privés constituent aussi une source majeure de financement. Notons que le PAM est entièrement financé par des dons volontaires, qui totalisaient en 2022 près de <a href="https://www.wfp.org/stories/wfp-glance">14 milliards de dollars</a>. Or, le manque de fonds exacerbe d’autres problématiques comme l’itinérance, la pauvreté, les problèmes de santé majeurs et la malnutrition. </p>
<p>Heureusement, des solutions existent. Outre un réinvestissement massif dans le Programme alimentaire mondial, des sommes devraient être consacrées aux propriétaires de petites exploitations agricoles et maraîchères. Ces dernières fournissent des emplois, des revenus et de la nourriture. Un soutien financier et matériel permettrait ainsi de profiter du plein potentiel de leur culture. De plus, des <a href="https://www.thelancet.com/journals/langas/article/PIIS2468-1253(22)00280-1/fulltext">investissements régionaux ciblés</a> devraient aussi être destinés à la prévention de la dégradation des sols, au soutien à l’agriculture durable et à la résilience des aménagements agricoles.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1643532346698678276"}"></div></p>
<p>Ensuite, la mise en place d’un programme universel de repas scolaires devrait être une priorité, alors que <a href="https://www.unicef.org/press-releases/nutrition-crisis-looms-more-39-billion-school-meals-missed-start-pandemic-unicef-and">370 millions d’enfants</a> dans le monde arrivent à l’école le ventre vide. Il serait aussi tout à fait justifié d’imposer une taxe sur les bénéfices des grandes entreprises du G7, comme le suggère <a href="https://oxfam.qc.ca/taxer-les-profits-pandemiques-pour-lutter-contre-la-faim/">Oxfam</a>. Des experts proposent aussi que <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-3-031-15703-5_1">chaque pays alloue 1 % de leur produit intérieur brut (PIB)</a> au système alimentaire et à la recherche liée à l’alimentation. Les pays en développement pourraient recevoir une aide pour atteindre la cible.</p>
<p>Aujourd’hui, on ne peut que constater l’échec du système international de préserver la dignité des individus et de leur garantir les besoins de base. Les structures dont la communauté internationale s’est dotée pour répondre aux problématiques sont incapables de répondre aux défis actuels.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/202676/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Félix Bhérer-Magnan ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Des millions d’êtres humains ont cruellement faim et leurs droits fondamentaux sont bafoués. L’aide alimentaire est nettement insuffisante. Tous les ingrédients sont réunis pour une crise majeure.Félix Bhérer-Magnan, Étudiant au doctorat en science politique, Université LavalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2022132023-03-21T14:15:15Z2023-03-21T14:15:15ZL’inculpation de Poutine par la Cour pénale internationale est symbolique. Mais les symboles ont aussi leur importance<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/516490/original/file-20230320-2144-nqnrpa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=51%2C8%2C5754%2C3798&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une femme enveloppée d'un drapeau ukrainien crie dans un mégaphone lors d'une manifestation devant la Cour pénale internationale à La Haye, aux Pays-Bas, en mars 2022. </span> <span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Phil Nijhuis)</span></span></figcaption></figure><p>La Cour pénale internationale (CPI) <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1964087/mandat-arrestation-vladimir-poutine-cour-penale-internationale">a délivré un mandat d’arrêt</a> à l’encontre du président russe Vladimir Poutine. L’Ukraine et ses partisans <a href="https://www.bbc.com/news/world-europe-62990141">réclament l’inculpation</a> de Poutine depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, en février 2022. </p>
<p>Néanmoins, le fait que la <a href="https://www.icc-cpi.int/fr/about/the-court">CPI</a>, organe judiciaire permanent chargé d’enquêter, de poursuivre et de juger les personnes accusées de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, ait délivré les charges est surprenant.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1636845070866423809"}"></div></p>
<p>Les charges sont toutefois nettement moins graves que ce que <a href="https://www.rferl.org/a/ukrainians-react-icc-arrest-warrant-putin/32324276.html">l’Ukraine et ses partisans réclamaient</a>. Poutine n’est pas accusé de crime d’agression, entre autres, mais plutôt de <a href="https://www.theguardian.com/world/2023/mar/17/vladimir-putin-war-crimes-icc-arrest-warrant-ukraine-children">déportation illégale d’enfants et d’autres civils</a> de l’Ukraine vers la Russie.</p>
<p>Presque immédiatement après l’annonce du mandat d’arrêt, deux camps ont émergé. Le premier souligne <a href="https://www.cnn.com/videos/world/2023/03/17/icc-arrest-warrant-putin-russia-scheme-deport-ukrainian-children-vpx.cnn">l’importance de la décision</a>. Elle signifie qu’ultimement, Vladimir Poutine a et aura des comptes à rendre et que le monde observe ce qui se passe en Ukraine. </p>
<p>Le second camp fait valoir le fait que Poutine ne sera probablement <a href="https://www.outlookindia.com/international/for-russia-icc-arrest-warrant-against-president-putin-is-as-good-as-toilet-paper--news-271182">jamais traduit en justice</a>.</p>
<p>Les deux camps ont à la fois tort et raison. Il est en effet très peu probable que Poutine soit un jour jugé par un tribunal. Mais il est faux d’affirmer que cet acte symbolique n’a aucune valeur.</p>
<p>Les actions symboliques peuvent avoir un <a href="https://doi.org/10.1177/030437548901400306">effet profond sur les États</a>. Cela est vrai non seulement pour l’État ou l’individu directement concerné — dans ce cas, la Russie et Poutine — mais aussi bien au-delà de leurs frontières.</p>
<h2>Une semaine d’actions symboliques</h2>
<p>La décision de la CPI comporte deux niveaux de symbolisme. Le premier est son impact immédiat sur l’Ukraine elle-même.</p>
<p>Alors que les deux parties se préparent à <a href="https://www.sundaypost.com/fp/ukraine-spring-offensive/">d’intenses combats au printemps</a>, selon de nombreux analystes, les actes symboliques peuvent avoir une influence sur le moral, tant positivement que négativement. La décision de la CPI aura très certainement un impact positif sur le moral des Ukrainiens et de leurs partisans.</p>
<p>Par coïncidence, la décision de la CPI est intervenue quelques jours <a href="https://www.journaldemontreal.com/2023/03/17/xi-jinping-se-rendra-en-russie-la-semaine-prochaine">après que la Chine a annoncé que Xi Jinping se rendrait à Moscou</a> pour la première fois depuis le début de la guerre entre la Russie et l’Ukraine. </p>
<p>La visite du président chinois, <a href="https://www.lapresse.ca/international/europe/2023-03-21/debut-du-sommet-entre-vladimir-poutine-et-xi-jinping-au-kremlin.php">qui débute aujourd’hui au Kremlin</a>, est une <a href="https://www.theguardian.com/world/2023/mar/17/xi-jinping-visit-russia-vladimir-putin">grande victoire</a> pour la Russie, car elle contribue à dissiper les affirmations des États-Unis et de leurs alliés selon lesquelles le pays est isolé. La décision de la CPI équilibre ainsi le bilan en termes d’actes symboliques. Bien que la décision ait été prise indépendamment de la visite de Xi, elle intervient à un moment crucial.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Deux hommes sont assis devant une rangée de drapeaux rouges et apparaissent sur un écran" src="https://images.theconversation.com/files/516213/original/file-20230319-20-cr0ayg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/516213/original/file-20230319-20-cr0ayg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/516213/original/file-20230319-20-cr0ayg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/516213/original/file-20230319-20-cr0ayg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/516213/original/file-20230319-20-cr0ayg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/516213/original/file-20230319-20-cr0ayg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/516213/original/file-20230319-20-cr0ayg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Sur cette photo publiée par l’agence de presse Xinhua, le président chinois Xi Jinping (à droite) et le président russe Vladimir Poutine apparaissent à l’écran lors d’une réunion par liaison vidéo à Pékin en décembre 2022.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Yue Yuewei/Xinhua via AP)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Mais cette décision demeure symbolique, au-delà de la guerre entre la Russie et l’Ukraine. </p>
<p><a href="https://ir.lawnet.fordham.edu/ilj/vol34/iss6/4/">Les universitaires</a> <a href="https://www.theguardian.com/us-news/2018/sep/10/john-bolton-castigate-icc-washington-speech">et les politiciens</a> ont remis en question ces dernières années la détermination et la capacité d’agir de la CPI. </p>
<p>Bien qu’elle ait poursuivi plusieurs criminels de guerre au cours de la dernière décennie, les inculpations ont généralement lieu <a href="https://www.hrw.org/news/2022/12/04/libya-icc-reignites-hope-long-delayed-justice">longtemps après</a> les événements en question. Le fait que la CPI ait réussi à engager des poursuites pendant un conflit en cours témoigne de la volonté de l’organisation d’agir.</p>
<h2>La CPI et les États-Unis</h2>
<p>La CPI, comme la plupart des organisations internationales, n’est efficace que si les nations la prennent au sérieux. Peu après le début de la guerre, <a href="https://www.icc-cpi.int/news/statement-icc-prosecutor-karim-aa-khan-qc-situation-ukraine-receipt-referrals-39-states">39 États ont fait pression</a> pour que la Cour enquête sur les crimes de guerre en Ukraine. </p>
<p>Presque tous ces États étaient des alliés de l’Ukraine et des États-Unis.</p>
<p>Les relations entre les États-Unis et la CPI ont été, au mieux, irrégulières. Les États-Unis n’ont pas entériné le <a href="https://www.icc-cpi.int/sites/default/files/NR/rdonlyres/ADD16852-AEE9-4757-ABE7-9CDC7CF02886/283948/RomeStatuteFra1.pdf">Statut de Rome</a>, le document fondateur de la CPI. Les relations entre les États-Unis et la CPI ont par ailleurs connu un début difficile, en raison du désir de certains groupes de voir les <a href="https://www.theguardian.com/politics/2005/may/06/uk.iraq2">Américains et les Britanniques</a> tenus responsables de leurs actions lors de l’invasion de l’Irak.</p>
<p>Toutefois, même pendant ces périodes, le gouvernement américain <a href="https://web.archive.org/web/20120305234805/http:/www.amicc.org/docs/HRes726FinalOctober292007.pdf">a soutenu les inculpations pour crimes de guerre</a> qui ne menaçaient pas ses intérêts, voire les faisaient progresser.</p>
<p>Les relations se sont améliorées ces dernières années. D’abord sous l’ancien président <a href="https://obamawhitehouse.archives.gov/sites/default/files/rss_viewer/national_security_strategy.pdf">Barack Obama</a>, puis — après un intermède de quatre ans — à nouveau avec le président Joe Biden, les États-Unis ont collaboré activement avec la CPI. </p>
<p>Bien que ces derniers aient quelques réserves à son égard, en <a href="https://www.politico.com/news/2021/04/02/icc-sanctions-reversed-biden-478731">particulier sa position sur Israël</a>, ils <a href="https://www.npr.org/2022/04/16/1093212495/the-u-s-does-not-recognize-the-jurisdiction-of-the-international-criminal-court">travaillent avec elle</a> lorsque leurs intérêts concordent. </p>
<p>L’invasion de l’Ukraine par la Russie en est certainement un exemple, même si le <a href="https://www.theguardian.com/world/2023/mar/08/pentagon-international-criminal-court-russia-war-crimes">Pentagone a été accusé de ne pas partager ses renseignements avec la CPI</a>.</p>
<p>Il est peu probable que la CPI, les États-Unis et leurs partisans traduisent Poutine en justice. Les capacités militaires stratégiques des forces armées russes rendent une telle tâche pratiquement impossible. Elles peuvent toutefois signaler au monde que de telles actions ont des conséquences.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Des bougies portant l’inscription Putin come out sur une grande pelouse devant un palais de justice en pierre" src="https://images.theconversation.com/files/516197/original/file-20230319-8082-vqytnx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/516197/original/file-20230319-8082-vqytnx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/516197/original/file-20230319-8082-vqytnx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/516197/original/file-20230319-8082-vqytnx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/516197/original/file-20230319-8082-vqytnx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=498&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/516197/original/file-20230319-8082-vqytnx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=498&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/516197/original/file-20230319-8082-vqytnx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=498&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des bougies sont plantées dans l’herbe avec l’inscription Putin Come Out devant la Cour pénale internationale à La Haye, aux Pays-Bas, en mars 2022.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Phil Nijhuis)</span></span>
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<h2>Hypocrisie ou réalité ?</h2>
<p>D’autres conflits sont en cours dans le monde, notamment <a href="https://reliefweb.int/report/yemen/displacement-yemen-overview-enar">au Yémen</a> <a href="https://www.icc-cpi.int/news/statement-prosecutor-fatou-bensouda-conclusion-preliminary-examination-situation-nigeria">et au Nigeria</a>, où des crimes similaires à ceux reprochés à Poutine ont été commis.</p>
<p>Les dirigeants de ces pays sont beaucoup plus vulnérables aux pressions extérieures que Vladimir Poutine. Contrairement à la Russie, la plupart des autres États ne disposent pas d’armes nucléaires et d’autres armes stratégiques qui leur permettent d’ignorer les pressions extérieures. Compte tenu de l’incapacité de la communauté internationale à exercer des pressions sur ces pays, la position ferme de la CPI à l’égard de Poutine semble hypocrite.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1637173679090987008"}"></div></p>
<p>Les critiques soulignent que cette hypocrisie <a href="https://justiceinconflict.org/2021/03/05/polite-hypocrisy-the-rocky-road-ahead-for-biden-and-the-icc/">illustre la faiblesse de l’organisation</a>. Étant donné que la CPI doit conserver le soutien de pays puissants comme les États-Unis, ses choix sélectifs sont, et resteront, une caractéristique de l’organisation.</p>
<p>L’inculpation de Poutine n’aura donc qu’un impact direct minime sur lui, mais elle offrira un certain réconfort aux Ukrainiens dans leur lutte contre les Russes. </p>
<p>Elle indique également que malgré la visite de Xi en Russie, <a href="https://www.forbes.com/sites/worldeconomicforum/2018/06/01/the-west-has-lost-its-dominant-global-position-it-should-handle-its-decline-gracefully/">l’influence des États-Unis et de leurs alliés</a> dans les relations internationales reste forte – même si elle est appliquée de manière sélective.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/202213/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>James Horncastle ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Même s’il est peu probable que Poutine soit un jour jugé par un tribunal, le mandat d’arrêt de la CPI a une réelle valeur. Les actions symboliques peuvent avoir un effet profond sur les États.James Horncastle, Assistant Professor and Edward and Emily McWhinney Professor in International Relations, Simon Fraser UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2012662023-03-15T19:58:08Z2023-03-15T19:58:08ZChine–États-Unis : gare à la fascination pour le « piège de Thucydide » !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/515518/original/file-20230315-275-92kz7q.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C5%2C1791%2C852&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’aigle et le dragon sont-ils voués à s’affronter ?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-vector/eagle-vs-dragon-vector-illustration-economic-1471807013">Farosofa/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p><em>Dans <a href="https://www.cnrseditions.fr/catalogue/relations-internationales/l-autre-guerre-froide/">« L’autre Guerre Froide »</a>, qui vient de paraître aux éditions du CNRS, l’historien Pierre Grosser fait le bilan de la rivalité opposant les deux grandes puissances du XXI<sup>e</sup> siècle. Entre ambition de devenir la première puissance de la planète du côté chinois et crainte de perdre le monopole du leadership mondial du côté américain, un conflit armé est un scénario crédible selon la fameuse théorie du <a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2017/10/ZAJEC/57980">« piège de Thucydide »</a>, que l’auteur analyse dans l’extrait que nous vous présentons aujourd’hui.</em></p>
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<p>Dans l’histoire, l’ascension rapide d’une nouvelle puissance, soucieuse d’abord d’avoir « une place au soleil », puis de changer les règles du jeu pour qu’elles soient plus à son avantage, inquiéterait toujours la puissance la mieux installée, qui elle-même connaît un déclin relatif. Cela provoquerait nécessairement des guerres. Aujourd’hui, les États-Unis seraient confrontés au dilemme d’accepter ou non les changements tectoniques de la hiérarchie des puissances, et donc la domination qui en résulte de la Chine en Asie, ou de choisir la guerre pour la limiter, avec le risque de s’affaiblir eux-mêmes et de faciliter ce qu’ils voulaient prévenir, une transition vers la domination chinoise.</p>
<p>Cette thèse a été popularisée par un vétéran de la science politique, <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/histoire-et-geopolitique/geopolitique-et-strategie/vers-la-guerre_9782738147028.php">Graham Allison</a>, sous le terme de « piège de Thucydide », afin d’avoir un vernis d’humanités, une prétention scientifique, et des citations au rabais (comme pour la « fin de l’histoire » ou le « choc des civilisations », qui sont aussi accusées de devenir des prophéties auto-réalisatrices).</p>
<p>La comparaison avec 1914, qui est développée dans l’ouvrage, ne tient pas, tout simplement parce que la Première Guerre mondiale n’a pas été causée par la rivalité entre Berlin et Londres (je le montre plus en détail dans <a href="https://hal-sciencespo.archives-ouvertes.fr/hal-01064752/document">l’étude de l’IRSEM</a> La course aux armements navals avait été gagnée par les Britanniques dès 1912, et comptait moins que la course aux armements terrestres de l’Allemagne avec la France et la Russie. Les ennemis traditionnels de l’Allemagne étaient ces deux pays, qui étaient aussi, dans l’Empire, ceux des Britanniques, ce qui rendait possible un renversement des alliances.</p>
<p>Aujourd’hui, il faut tenir compte des tensions sino-indiennes et sino-japonaises, ces dernières étant parfois aussi comparées aux relations anglo-allemandes d’avant 1914. La proximité culturelle (et dynastique) anglo-allemande était bien plus forte qu’entre les États-Unis et la Chine. Celle-ci ne sort pas de guerres d’unification qui en auraient fait, comme l’Allemagne, un modèle militaire pour les états-majors du monde entier.</p>
<p>Non seulement la Première Guerre mondiale n’est pas due principalement à cette ascension rapide d’une nouvelle puissance, mais l’histoire regorge d’exemples où ces changements de rapports de puissance <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/01402390.2018.1558056?journalCode=fjss20">ne provoquent pas de guerre</a>.</p>
<p>Ainsi, il n’y a pas eu de guerre entre les États-Unis et le Royaume-Uni, lorsque les premiers ont concurrencé le second dès la fin du XIX<sup>e</sup> siècle. La Chine aime à rappeler cette réalité, et à se comparer aux États-Unis. Une puissance qui devient la plus riche du monde souhaiterait naturellement se réserver une sphère d’influence privilégiée, voire exclusive, en prétendant la libérer d’intrus impérialistes (les puissances européennes pour l’Amérique dans la première moitié du XIX<sup>e</sup> siècle, les États-Unis pour l’Asie deux siècles plus tard), devenir une puissance navale pour protéger son commerce et ses intérêts, devenir une puissance diplomatique et culturelle. La Chine parviendrait même à être à la fois une puissance terrestre et une puissance navale, ce que n’ont pas réussi la France, l’Allemagne et la Russie – ni la Chine à la fin du XIX<sup>e</sup> siècle. La Chine de Xi Jinping connaîtrait sa « phase Theodore Roosevelt », lorsque les <a href="https://www.pur-editions.fr/product/8409/theodore-roosevelt-et-l-amerique-imperiale">États-Unis sont devenus vraiment nationalistes et impérialistes</a>, puissance industrielle et navale, avec la prétention d’être le nouveau centre du monde.</p>
<p>Malgré les inquiétudes que la Chine suscite, sa volonté de créer des bases à l’étranger et de s’assurer des points d’appui portuaires, serait « naturelle ». De même que son souci d’assurer la sécurité de ses routes d’approvisionnement de matières premières et de ses ressortissants, en déployant des policiers chinois là où les communautés chinoises sont menacées, et en ayant les capacités militaires <a href="https://www.iiss.org/publications/adelphi/2015/chinas-strong-arm-protecting-citizens-and-assets-abroad">d’intervenir pour les protéger ou les évacuer</a>.</p>
<p>L’agitation de 2022 autour d’un <a href="https://www.geo.fr/geopolitique/les-iles-salomon-sur-la-ligne-de-front-entre-la-chine-et-les-etats-unis-209057">accord de la Chine avec les îles Solomon</a> fait suite à nombre de focalisations sur des lieux (du Cambodge au golfe de Guinée ou en Namibie, en passant par les Émirats arabes unis), que convoiterait Pékin.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/au-cambodge-une-base-militaire-comme-outil-dinfluence-pour-pekin-196165">Au Cambodge, une base militaire comme outil d’influence pour Pékin</a>
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<p>Les dépenses militaires de la Chine augmenteraient mécaniquement avec l’augmentation du PNB, sans qu’il y ait volonté militariste. Enfin, la Chine entrerait dans une nouvelle étape, déjà parcourue par les grandes puissances précédentes, en cherchant à internationaliser sa monnaie et aussi son droit. Au-delà des simples comparaisons de PNB, elle a déjà un <a href="https://www.lesechos.fr/weekend/business-story/la-chine-un-geant-a-la-conquete-du-monde-1257626">pouvoir de marché</a> (grâce à sa population nombreuse à niveau de vie croissant), elle est centrale dans les chaînes de valeur et surtout la construction navale (45 % de la production mondiale) et le transport maritime, et pèse dans l’établissement de normes technologiques. Les actions internationales de la Chine n’auraient donc rien à voir avec l’idéologie du régime, mais seraient le simple produit de « lois » de la géopolitique.</p>
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<p>De plus, le piège de Thucydide ne concernerait pas la Chine, car celle-ci ne serait pas une puissance guerrière (Xi Jinping dit que <a href="http://french.peopledaily.com.cn/Chine/n3/2021/0701/c31354-9867516.html">ce n’est pas « dans son ADN »</a>). Elle est le seul membre permanent du Conseil de Sécurité des Nations unies, depuis la fin de la guerre froide, à <a href="https://www.cairn.info/demain-la-chine-guerre-ou-paix--9782072951619-page-73.htm">ne pas avoir utilisé la force militaire</a> et déployé ses soldats pour des guerres à l’étranger. Elle ne serait pas une puissance révisionniste, alors même que les États-Unis en sont une en s’en prenant, par ses interventions « humanitaires », à l’ordre international d’États souverains codifié en 1945.</p>
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<p>Pékin appelle les États-Unis à « maintenir le système international avec l’ONU en son cœur et le droit international comme fondement ». La Chine n’essaierait pas de constituer une alliance anti-occidentale avec les pays hostiles à la domination américaine (malgré la formalisation de groupes d’amis aux Nations unies), ni à entraîner des rebelles anti-impérialistes à travers le monde comme dans les années 1960 et 1970, <a href="https://www.fulcrum.org/concern/monographs/pv63g2033">ni à briser les alliances américaines, ni à promouvoir un ordre alternatif</a>. Non seulement elle ne minerait pas l’ordre international mais paye de plus en plus pour lui, par ses contributions au système onusien (notamment les Opérations de Maintien de la Paix).
En réalité, c’est le mélange d’optimisme et de pessimisme de la puissance montante qui a été une des causes de la Première Guerre mondiale, et pourrait être celle d’une guerre sino-américaine.</p>
<p>La <em>Weltpolitik</em> allemande était dans une impasse à partir de la fin des années 1900, car elle provoquait des réactions des grandes puissances concurrentes. Berlin se sentait donc empêchée d’obtenir sa « place au soleil », tout en prétendant avoir le meilleur système politique, la meilleure culture, le plus grand dynamisme industriel et commercial. C’est la remontée en puissance rapide de la Russie, après <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/histoire-et-geopolitique/geopolitique-et-strategie/histoire-du-monde-se-fait-en-asie_9782738148773.php">sa défaite de 1905 contre le Japon</a>, et donc le renforcement de la tenaille franco-russe qui poussa Berlin à une guerre quasi préventive, en profitant de la crise de l’été 1914.</p>
<p>La Chine aujourd’hui est persuadée de devoir retrouver sa place au Centre et au sommet qui lui serait historiquement due, mais elle subit le retour de bâton de pays petits et grands qui ne goûtent guère son arrogance, les efforts des puissances concurrentes pour ne pas lui laisser le champ libre, tandis que le crises internes de certains « clients » sont attribués à un endettement excessif à l’égard de la Chine (Sri Laka, Laos…). Les observateurs qui s’inquiétaient de l’offensive de charme chinoise dans les années 2000 se frottent les mains en constatant, avec une certaine exagération, la <a href="https://thediplomat.com/2022/07/chinas-poor-global-image-is-undermining-its-strategic-goals/">dégradation de l’image de la Chine</a> dans le monde depuis la fin des années 2010, à cause de son agressivité verbale et de ses pratiques coercitives.</p>
<p>La question du triomphalisme excessif de la Chine menant à une sorte de <a href="https://academic.oup.com/ia/article-abstract/94/5/1019/5092108">« surexpansion impériale »</a> est discutée depuis plusieurs années en Chine. La comparaison avec l’Allemagne est même prolongée, en regrettant que la <a href="https://www.jstor.org/stable/10.7312/iken12590.7">Chine ait abandonné une politique néo-bismarckienne</a>, de multiplication de partenariats de toutes sortes, destinée à rassurer les voisins tout en dominant le système, et à tempérer les ardeurs des États-Unis (comme de la France pour le chancelier allemand). Xi Jinping aurait eu tort de jouer à Guillaume II, dans une politique régionale et mondiale assertive, de coups diplomatiques, de faits accomplis et de guerre juridique en mer de Chine du Sud, qui auraient rendu la Chine impopulaire, parfois isolée, et en conséquence plus agressive.</p>
<p>Même le Singapourien Kishore Mahbubani, chantre du triomphe de la Chine sur un Occident déclinant, <a href="https://www.fnac.com/livre-numerique/a13730571/Kishore-Mahbubani-Has-China-Won">déplore que celle-ci n’ait pas réussi à garder davantage d’« amis » aux États-Unis</a> pour empêcher le tournant consensuel pour une politique de confrontation. Au XX<sup>e</sup>, l’Allemagne s’est avérée trop grosse pour les équilibres européens mais trop faible pour dominer l’Europe : la Chine serait trop puissante pour les équilibres asiatiques, et même mondiaux, mais ses prétentions de domination seraient vaines et contreproductives.</p>
<p>La volonté croissante de Xi d’utiliser la coercition pour atteindre les objectifs de la Chine, ainsi que la rhétorique de plus en plus agressive, pourraient même être la preuve que Pékin a conscience qu’il sera difficile de dépasser pacifiquement les États-Unis dans le long sprint à la puissance. Les condensés de pessimisme dans la marmite d’optimisme seraient dangereux, car <a href="https://www.aei.org/research-products/book/danger-zone-the-coming-conflict-with-china/">pousseraient à prendre plus de risques, à cause d’une paranoïa et d’une impatience accrues</a>. Le célèbre stratège Edward Luttwak parle même d’<a href="https://www.orfonline.org/research/understanding-the-rationale-for-toxic-decision-making-within-the-army-52826/">« autisme de grande puissance »</a>, qui serait une loi de l’histoire : le PCC, particulièrement ethnocentrique et plein de morgue, ne pourrait ou ne voudrait abandonner des politiques contreproductives et autodestructrices, malgré tous les signaux.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/514725/original/file-20230310-18-5a1hho.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/514725/original/file-20230310-18-5a1hho.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514725/original/file-20230310-18-5a1hho.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=920&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514725/original/file-20230310-18-5a1hho.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=920&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514725/original/file-20230310-18-5a1hho.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=920&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514725/original/file-20230310-18-5a1hho.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1156&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514725/original/file-20230310-18-5a1hho.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1156&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514725/original/file-20230310-18-5a1hho.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1156&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Ce texte est issu de « L’autre Guerre froide », paru en mars 2023 aux éditions du CNRS. Cliquer pour zoomer.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Éditions du CNRS</span></span>
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<p>La question est donc de savoir si Pékin choisira une sorte de fuite en avant à court terme, ou bien de rassurer les puissances qu’elle inquiète et consolidera ses fondamentaux pour reprendre sa marche en avant. Les nominations récentes sont regardées avec attention. Pour certains observateurs, Xi promeut une nouvelle génération de diplomates prêts à la compétition avec l’Occident et à l’utilisation de la coercition, favorable à l’axe sino-russe et à un leadership chinois sur le monde non-occidental, et déterminés à défendre le modèle politique chinois ; d’autres au contraire estiment que ce sont des <a href="https://thediplomat.com/2022/07/chinas-wolf-warrior-diplomacy-is-fading/">diplomates plus modérés</a> qui sont mis en avant, pour calmer les inquiétudes des pays d’accueil. Mais comment revenir en arrière lorsque, pour des raisons avant tout domestiques, Xi Jinping aurait abandonné la montée en puissance pacifique de la Chine, et <a href="https://www.amazon.com/Overreach-China-Derailed-Peaceful-Rise/dp/0190068515">serait allé trop loin dans la projection de puissance</a> et l’agressivité verbale, provoquant une sur-réaction des États-Unis, de leurs alliés, et certains pays du Sud ? Cette sur-réaction à son tour rendrait impossible tout retour en arrière, voire faciliterait une fuite en avant.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/201266/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierre Grosser ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Alors que les points de tension se multiplient entre Pékin et Washington, la transition vers un leadership chinois passera-t-elle forcément par un affrontement militaire avec les États-Unis ?Pierre Grosser, Professeur de relations internationales, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1995712023-02-16T20:28:10Z2023-02-16T20:28:10ZL’ONU peut-elle contribuer à mettre fin à la guerre en Ukraine ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/509570/original/file-20230211-20-8306e5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C35%2C5946%2C3925&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">25&nbsp;février 2022&nbsp;: le Conseil de sécurité se réunit pour voter sur une résolution exigeant le retrait immédiat d’Ukraine des troupes russes, qui ont attaqué la veille. Le texte sera rejeté en raison du veto opposé par Moscou.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/new-york-ny-february-25-2022-2129406371">lev radin/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Le 24 février 2022, la Russie envahissait l’Ukraine. Un an plus tard, le <a href="https://www.lepoint.fr/monde/ukraine-180-000-soldats-russes-et-100-000-ukrainiens-morts-ou-blesses-22-01-2023-2505731_24.php">bilan est dramatique</a> et rien n’indique que le conflit prendra fin de sitôt, les deux parties affichant des exigences qui semblent inconciliables, tandis que sur le terrain la détermination russe se heurte à une résistance ukrainienne acharnée et soutenue par de nombreux États occidentaux.</p>
<p>Dans ce contexte mortifère, l’Organisation des Nations unies peut-elle agir de façon à ramener la paix ? Ce qui est sûr, c’est que si elle y a échoué depuis un an, elle ne relâche pas ses efforts pour autant…</p>
<h2>La paix, raison d’être de l’ONU</h2>
<p>Rappelons que la paix est le but premier de l’ONU, créée en 1945, au lendemain de la guerre la plus sanglante de l’histoire de l’humanité. Sa Charte affirme dès la première phrase de son préambule que le but de l’ONU est de <a href="https://www.un.org/fr/about-us/un-charter">« préserver les générations futures du fléau de la guerre »</a>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/Wi7DI4pgD6c?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Ukraine – L’ONU : un modèle à bout de souffle ? – Le Dessous des cartes – L’essentiel | Arte, 13 avril 2022.</span></figcaption>
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<p>L’Assemblée générale de l’ONU, où chacun des États membres (aujourd’hui au nombre de <a href="https://www.un.org/fr/about-us/member-states">193</a>) dispose d’une voix, a adopté, au cours de l’année écoulée, plusieurs résolutions visant à stopper la guerre et à condamner la Russie pour son invasion de l’Ukraine. Ces résolutions ne sont pas contraignantes, à l’inverse de celles votées par le <a href="https://unric.org/fr/ressources/lonu-en-bref/competences-et-prises-de-decision-de-lonu/">Conseil de sécurité</a>. Ces dernières doivent être adoptées par au moins neuf voix, sur les quinze membres (les cinq permanents, et dix membres élus par l’Assemblée générale pour un mandat de deux ans selon un principe de rotation).</p>
<p>Or, le Conseil de sécurité est paralysé car la Russie oppose systématiquement son veto à toute résolution du Conseil la condamnant, comme elle l’a fait le <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2022/02/26/l-onu-impuissante-a-voter-une-resolution-contre-l-agression-russe_6115350_3210.html">25 février</a> (sur la résolution « déplorant l’agression russe ») et le <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2022/10/01/au-conseil-de-securite-de-l-onu-la-russie-met-son-veto-a-la-resolution-condamnant-ses-annexions_6143916_3210.html">30 septembre</a> (sur celle condamnant l’annexion de quatre régions ukrainiennes).</p>
<h2>Une multitude d’actions depuis un an</h2>
<p>En dépit du blocage du Conseil de sécurité par Moscou, l’Assemblée générale a pu se faire entendre à de nombreuses reprises.</p>
<p>Le 2 mars, elle adopte une résolution <a href="https://news.un.org/fr/story/2022/03/1115472">exigeant le retrait des troupes russes</a>. Le 7 avril, une autre résolution <a href="https://news.un.org/fr/story/2022/04/1117912">suspend la Russie du Conseil des droits de l’homme</a> – une instance onusienne qui <a href="https://www.vie-publique.fr/fiches/271175-quest-ce-que-le-conseil-des-droits-de-lhomme-onu">compte 47 États membres</a> répartis par zone géographique, élus à bulletin secret et à la majorité absolue par l’Assemblée générale pour trois ans.</p>
<p>En mai, le Conseil des droits de l’homme vote une <a href="https://news.un.org/fr/story/2022/05/1119902">résolution demandant l’ouverture d’une enquête sur les atrocités reprochées aux troupes d’occupation russes</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-crimes-commis-en-ukraine-pourront-ils-un-jour-faire-lobjet-dun-proces-international-181021">Les crimes commis en Ukraine pourront-ils un jour faire l’objet d’un procès international ?</a>
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<p>En juillet, l’ONU contribue à l’adoption d’un <a href="https://news.un.org/fr/story/2022/10/1129012">accord</a> pour permettre la reprise des exportations de céréales ukrainiennes.</p>
<p>En novembre, l’Assemblée générale adopte une <a href="https://news.un.org/fr/story/2022/11/1129817">résolution appelant la Russie à verser des réparations de guerre à l’Ukraine</a>. Mais cette résolution est restée lettre morte, la Russie n’y répondant pas.</p>
<p>Ce qui ne veut pas dire que l’ONU ne fait rien de concret pour l’Ukraine : avec ses programmes et ses agences spécialisées comme l’<a href="https://www.unesco.org/fr/articles/ukraine-lunesco-lance-un-nouveau-programme-de-soutien-aux-journalistes-ukrainiens">Unesco</a>, l’<a href="https://www.who.int/europe/fr/news/item/16-12-2022-who-supported-emergency-medical-teams-begin-work-in-newly-regained-areas-in-ukraine">OMS</a>, la (<a href="https://www.fao.org/in-focus/fr">FAO</a>), l’<a href="https://www.unicef.org/fr/urgences/la-guerre-en-ukraine-constitue-une-menace-immediate-pour-les-enfants">Unicef</a>, le <a href="https://fr.wfp.org/urgences/urgence-en-urkaine#:">PAM</a> et les autres, elle a, depuis février, aidé plus de 14 millions d’Ukrainiens sur le plan humanitaire. <a href="https://unric.org/fr/onu-et-la-guerre-en-ukraine-les-principales-informations/">Plus de 1 400 membres du personnel de l’ONU sont présents en Ukraine</a>, apportant de la nourriture, des abris, des couvertures, des médicaments et de l’eau aux habitants démunis.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1624077031938920449"}"></div></p>
<p>La situation humanitaire est en effet très grave : le Haut commissariat aux réfugiés a mesuré que <a href="https://unric.org/fr/onu-et-la-guerre-en-ukraine-les-principales-informations/#:%7E:text=Le%20texte%20de%20la%20r%C3%A9solution,de%20guerre%20%C3%A0%20l%E2%80%99Ukraine.">plus de 17 millions de personnes ont fui le pays</a>. Il s’agit du mouvement de population forcé le plus rapide depuis la Seconde Guerre mondiale.</p>
<h2>Toujours plus d’outils pour œuvrer en faveur de la paix</h2>
<p>L’ONU a à sa disposition de nombreux <a href="https://journals.openedition.org/chrhc/5296">outils</a>, aussi bien en matière de <em>peacekeeping</em> (« maintien de la paix », c’est-à-dire interposition des Casques bleus dans des conflits armés) que de <em>peacebuilding</em> (« consolidation de la paix » c’est-à-dire action post-conflit, par exemple organisation d’élections libres). Elle dispose depuis 1948 d’un <a href="https://peacekeeping.un.org/fr/department-of-peace-operations">Département des opérations de maintien de la paix</a>.</p>
<p>Les responsables de l’ONU ont développé depuis cette date de nombreuses réflexions pour rendre cette action plus efficace. Avec le rapport « <a href="https://www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_1992_num_38_1_3062">Agenda pour la paix</a> » du secrétaire général Boutros-Ghali en 1992, l’ONU s’est mise en capacité de déployer plus rapidement ses unités de <a href="https://peacekeeping.un.org/fr/our-peacekeepers">Casques bleus (civils, militaires et policiers travaillant ensemble)</a>, de faire de la diplomatie préventive (essayer d’empêcher la violence d’éclore) et du <em>post-conflict peacebuilding</em> (construire une paix durable sur le long terme en traitant les problèmes économiques, sociaux, culturels et humanitaires).</p>
<p>Avec le « <a href="https://press.un.org/fr/2000/20001205.sgsm7639.doc.html">rapport Brahimi</a> » en 2000, a émergé l’idée de pouvoir <a href="http://www.irenees.net/bdf_fiche-documentation-187_fr.html">déployer des Casques bleus encore plus rapidement, en 30 jours, et la totalité d’une mission en 90 jours</a>. Il s’agit aussi de développer une approche multidimensionnelle incluant à la fois le <em>peacekeeping</em> et le <em>peacebuilding</em>, ce qui avait déjà été demandé par le rapport <em>Agenda pour la paix</em> mais pas vraiment réalisé en pratique.</p>
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<p>En 2008, l’ONU a lancé la <a href="https://www.unocha.org/sites/dms/Documents/DPKO%20Capstone%20doctrine%20(2008).pdf">« doctrine Capstone »</a>, dont il ressort que l’ONU doit se concentrer sur <a href="https://langloishg.fr/documents/les-operations-de-paix-des-nations-unies-dans-la-capstone-doctrine-2008/">l’avant-conflit (prévention des conflits) et surtout sur l’après-conflit (rétablissement de la paix et de la démocratie)</a>.</p>
<p>En 2015, le <a href="https://undocs.org/fr/S/2015/446">rapport HIPPO (High-Level Independent Panel on Peace Operations)</a> préconise des OMP mieux adaptées aux complexités du terrain et aux besoins des populations. Les OMP contribuent désormais, par exemple, à la réinsertion des anciens combattants et à l’organisation d’élections démocratiques : <a href="https://dppa.un.org/fr/elections">plus de 100 pays ont demandé et obtenu une assistance électorale de la part de l’ONU depuis 1991</a>.</p>
<p>En 2018, enfin le secrétaire général Antonio Guterres a lancé l’initiative <a href="https://peacekeeping.un.org/fr/action-for-peacekeeping-a4p">« Action pour le maintien de la paix » (A4P) et sa stratégie de mise en œuvre A4P+</a> autour de 8 grands thèmes clés : la promotion de solutions politiques aux conflits ; la protection des civils ; la protection des Casques bleus ; l’amélioration des performances des opérations de maintien de la paix ; la pérennisation de la paix ; le renforcement des partenariats régionaux et le l’amélioration de la conduite des opérations.</p>
<h2>Une intervention des Casques bleus ?</h2>
<p>Concrètement, en Ukraine, les Casques bleus pourraient-ils faire plier la Russie ? Au-delà de la question de la faisabilité politique d’une telle opération, il faudrait pour cela un déploiement colossal d’hommes et de matériels. Est-il seulement envisageable que les Casques bleus – dont les effectifs sont <a href="https://peacekeeping.un.org/fr/our-peacekeepers">issus de 97 pays différents, aux premiers rangs desquels le Pakistan, l’Inde, le Ghana, le Bangladesh et l’Éthiopie</a>, ce qui pose un problème de dilution des responsabilités – soient déployés en si grand nombre, avec une telle quantité et qualité d’armements sophistiqués ? Dans l’histoire, seule l’opération de l’ONU au Congo (ONUC), de 1960 à 1964, a mobilisé un très grand nombre de Casques bleus : à son apogée, <a href="https://www.cairn.info/revue-relations-internationales-2006-3-page-53.htm">l’ONUC comptait 93 000 hommes de l’ONU, issus de 34 pays</a>. Et malgré cela, cette opération n’a pas été un succès…</p>
<p>Rappelons par ailleurs que, s’ils sont absents en Ukraine, les Casques bleus, dont l’action a été saluée par le <a href="https://www.un.org/fr/about-us/nobel-peace-prize/un-peacekeeping-1988">Prix Nobel de la Paix en 1988</a>, agissent sur le terrain, un peu partout dans le monde : ils ont, depuis leur création en 1948, œuvré dans <a href="https://www.un.org/fr/observances/peacekeepers-day">72 opérations de maintien de la paix</a> dans de nombreux pays. Leur nombre est en augmentation : <a href="https://onu.delegfrance.org/Maintien-de-la-paix-10174">alors qu’ils étaient 12 000 en 1996, ils sont plus de 75 000 aujourd’hui</a>. Actuellement, ils sont présents dans <a href="https://peacekeeping.un.org/fr/where-we-operate">12 opérations de maintien de la paix</a>, dont 6 en Afrique et 4 au Moyen-Orient.</p>
<p>Si, aujourd’hui en Ukraine, une force de Casques bleus était envoyée en tant que force d’interposition, sa présence pourrait peut-être contribuer à dissuader la Russie de mener des attaques trop destructrices, mais cela n’est pas certain.</p>
<p>Il n’en reste pas moins qu’une telle présence peut être utile. Mais pour cela, il faudrait que le Conseil de sécurité vote à l’unanimité en faveur d’un tel envoi, ce qui est inenvisageable, la Russie s’y opposant.</p>
<h2>Le droit de veto, un blocage permanent ?</h2>
<p>Pour que l’ONU puisse agir plus efficacement pour promouvoir la paix, il est urgent de suspendre, voire supprimer le droit de veto, qui la paralyse.</p>
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<p>Nous l’avons dit : cinq États, considérés comme les vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale – France, États-Unis, Russie, Royaume-Uni et Chine – détiennent ce privilège, qui apparaît de plus en plus anachronique et injustifié aujourd’hui. Il ne fait que paralyser l’ONU, et l’a empêchée, par exemple, <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-actu/guerre-en-syrie-la-russie-a-exerce-14-fois-son-droit-de-veto-20191221">d’agir concrètement en Syrie depuis 2011</a>.</p>
<p>La France, qui n’a pas utilisé son veto depuis plus de 25 ans, a proposé, dès 2014, un encadrement, voire une <a href="https://onu.delegfrance.org/5-choses-a-savoir-sur-la-France-et-le-veto">suspension de ce droit</a>, lorsque l’ONU traite de situations où des violences de masse sont en cours. Cette initiative a été soutenue par plus de 106 pays.</p>
<p>Comment supprimer le droit de veto, sachant que la Russie, qui dispose de ce droit, peut l’utiliser pour s’opposer à une telle réforme ? Un pas en avant a été effectué en avril 2022, lorsque l’AG a adopté une <a href="https://unric.org/fr/droit-de-veto-ce-qui-va-changer/">résolution demandant aux cinq membres permanents du Conseil de sécurité de justifier leur recours au veto</a>. Cela permet au moins d’encadrer ce droit, de le rendre plus difficile à exercer.</p>
<p>L’Assemblée générale convoquera désormais une séance dans les dix jours ouvrables suivant l’exercice du droit de veto par un ou plusieurs membres permanents du Conseil de sécurité, afin de tenir un débat sur la situation au sujet de laquelle le veto a été opposé. Tous les membres des Nations unies pourront examiner et commenter le veto.</p>
<p>Aujourd’hui, un an après le début de l’attaque russe en Ukraine, il apparaît clairement que l’ONU a besoin d’être revitalisée afin de pouvoir jouer son indispensable rôle pacificateur de manière efficace. Ce débat <a href="https://www.cairn.info/revue-pouvoirs-2004-2-page-61.htm">dure depuis longtemps</a>. La tragédie ukrainienne permettra-t-elle de le faire progresser ?</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/496784/original/file-20221122-12-xtvhsq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/496784/original/file-20221122-12-xtvhsq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/496784/original/file-20221122-12-xtvhsq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/496784/original/file-20221122-12-xtvhsq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/496784/original/file-20221122-12-xtvhsq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=385&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/496784/original/file-20221122-12-xtvhsq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=385&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/496784/original/file-20221122-12-xtvhsq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=385&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Nous proposons cet article dans le cadre du Forum mondial Normandie pour la Paix organisé par la Région Normandie les 28 et 29 septembre 2023 et dont The Conversation France est partenaire. Pour en savoir plus, visiter le site du <a href="https://normandiepourlapaix.fr/">Forum mondial Normandie pour la Paix</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199571/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Chloé Maurel ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’ONU a multiplié les initiatives depuis le début de la guerre en Ukraine. Mais tant que subsistera le droit de veto, la marge de manœuvre des Nations unies restera très étroite.Chloé Maurel, SIRICE (Université Paris 1/Paris IV), Université Paris 1 Panthéon-SorbonneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1951852022-12-23T14:18:26Z2022-12-23T14:18:26ZLa COP15 a été un succès. Mais les cibles ambitieuses de protection de la biodiversité seront-elles atteintes ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/502254/original/file-20221220-20-jr3say.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C8061%2C5148&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les parties à la Convention sur la diversité biologique ont adopté leur nouveau cadre mondial pour la biodiversité post-2020 le 19 décembre 2022.</span> <span class="attribution"><span class="source">La Presse canadienne/Paul Chiasson</span></span></figcaption></figure><p>La pandémie de Covid-19 n’a pas seulement altéré nos vies depuis 2020, elle a également eu de profonds impacts sur la collaboration internationale, notamment en matière de protection de la biodiversité.</p>
<p>Initialement prévue en octobre 2020, soit 10 ans après le <a href="https://www.canada.ca/fr/environnement-changement-climatique/organisation/affaires-internationales/partenariats-organisations/protocole-nagoya-acces-ressources-genetiques.html">protocole de Nagoya</a> et <a href="https://www.cbd.int/doc/strategic-plan/2011-2020/Aichi-Targets-FR.pdf">l’adoption des objectifs d’Aichi</a>, la seconde partie de la <a href="https://www.cbd.int/conferences/2021-2022">Conférence des Parties sur la Convention de la Biodiversité des Nations-Unies (COP CDB) de Kunming</a> a été reportée, et s’est finalement tenue à <a href="https://www.ledevoir.com/environnement/725454/montreal-accueillera-la-deuxieme-partie-de-la-cop15-du-5-au-17-decembre">Montréal du 7 au 19 décembre 2022</a>.</p>
<p>Chercheurs à l’Université d’Ottawa et à l’UQAM, nous avons représenté le Centre du droit de l’environnement et de la durabilité mondiale à la COP 15 en tant qu’observateurs durant toute la conférence.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/cop-27-une-decision-historique-et-un-terrible-statu-quo-194151">COP 27 : une décision historique… et un terrible statu quo</a>
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<h2>Un nouveau cadre pour tenter d’arrêter l’érosion de la biodiversité</h2>
<p>Les négociations de la COP15 se sont cristallisées autour de trois thèmes majeurs interreliés, selon les <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1941211/pays-pauvres-quittent-sommet-biodiversite-financement">déclarations de certaines délégations</a> : l’adoption d’un nouveau cadre mondial de la biodiversité post-2020, la mobilisation de ressources financières et l’encadrement de l’information de séquençage numérique.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/502467/original/file-20221221-25-jeeqn6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/502467/original/file-20221221-25-jeeqn6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/502467/original/file-20221221-25-jeeqn6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/502467/original/file-20221221-25-jeeqn6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/502467/original/file-20221221-25-jeeqn6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/502467/original/file-20221221-25-jeeqn6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/502467/original/file-20221221-25-jeeqn6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le premier ministre Justin Trudeau prononce un discours lors de la cérémonie d’ouverture de la conférence de l’ONU sur la biodiversité à Montréal, le 6 décembre 2022.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse canadienne/Paul Chiasson</span></span>
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<p>La <a href="https://www.cbd.int/doc/strategic-plan/2011-2020/Aichi-Targets-FR.pdf">décennie des Nations-Unies sur la biodiversité 2011-2020</a> n’a pas été suffisante pour inverser le cours de la <a href="https://www.weforum.org/agenda/2022/10/nature-loss-biodiversity-wwf/">perte de la biodiversité</a> et assurer sa conservation à travers le monde. En effet, la majorité des États-Parties, dont le Canada, ont échoué à atteindre à l’horizon 2020 les <a href="https://www.cbd.int/aichi-targets/#:%7E:text=To%20improve%20the%20status%20of,ecosystems%2C%20species%20and%20genetic%20diversity.">20 objectifs fixés dans les cibles d’Aichi</a>. Dans ce contexte, un des enjeux majeurs de la COP15 consistait dans l’adoption (avec deux ans de retard) de nouveaux objectifs ambitieux, chiffrés et mesurables pour la protection de la biodiversité à l’horizon 2030.</p>
<p>Compte tenu de cela, la COP15 peut être considérée comme un succès avec <a href="https://s3.documentcloud.org/documents/23466127/cop-15-l-25-en-1_221219_035022.pdf">l’adoption du Cadre mondial pour la Biodiversité de Kunming-Montréal</a>. Ce cadre adopté dans la nuit de dimanche à lundi comprend <a href="https://twitter.com/CELGS/status/1605272501260804096">quatre objectifs</a> et <a href="https://twitter.com/CELGS/status/1605272728134889473">23 cibles</a> parmi lesquelles la cible 3 (ou 30 par 30) visant à protéger au moins 30 % des zones terrestres, des eaux intérieures et des zones côtières et marines d’ici 2030. Ce cadre constituera la feuille de route des États pour les huit prochaines années.</p>
<h2>Les nouvelles ressources financières toujours insuffisantes pour les pays en développement</h2>
<p>Dans la course pour la réalisation de ces cibles, le financement jouera un rôle clé.</p>
<p>Les pays en développement, qui abritent une large part de la biodiversité mondiale, l’ont bien compris et ont insisté sur ce point durant les deux semaines de négociations. Les pays développés se sont finalement engagés à fournir aux pays en développement <a href="https://s3.documentcloud.org/documents/23466127/cop-15-l-25-en-1_221219_035022.pdf">20 milliards de dollars par an d’ici à 2025 puis 30 milliards par an d’ici à 2030</a> pour la mise en œuvre du nouveau cadre mondial (aujourd’hui ces financements sont de l’ordre de 10 milliards de dollars).</p>
<p>Ces engagements, même s’ils sont supérieurs aux propositions initiales des pays développés, demeurent inférieurs aux attentes des pays en développement qui demandaient <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1941028/cop15-pays-nord-defavorable-nouveau-fonds-biodiversite">100 milliards de dollars par an</a>.</p>
<h2>Un nouveau mécanisme pour encadrer l’ISN</h2>
<p>Dernier sujet âprement discuté durant les deux semaines de négociation : l’encadrement de l’usage et de l’exploitation de <a href="https://www.ledevoir.com/environnement/774673/les-donnees-genetiques-un-enjeu-majeur-et-meconnu-des-negociations-a-la-cop15">l’information de séquençage numérique (ISN)</a>.</p>
<p>Il s’agit de ressources cruciales pour la recherche scientifique, disponibles en ligne, gratuitement et parfois sans aucune traçabilité vers les pays d’origine des ressources. Ces informations <a href="https://www.youtube.com/watch?v=xJ0ZjpY0VQo&t=194s">conservées au sein de larges bases de données en ligne</a> ne font jusqu’à ce jour l’objet d’aucun partage des avantages qui découlent de leur exploitation.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/502468/original/file-20221221-11-748g1z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/502468/original/file-20221221-11-748g1z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=396&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/502468/original/file-20221221-11-748g1z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=396&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/502468/original/file-20221221-11-748g1z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=396&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/502468/original/file-20221221-11-748g1z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=498&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/502468/original/file-20221221-11-748g1z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=498&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/502468/original/file-20221221-11-748g1z.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=498&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des membres du Réseau mondial des jeunes pour la biodiversité manifestent dans les couloirs du Palais des congrès, lors de la conférence de la COP15 à Montréal, le 16 décembre 2022.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse canadienne/Paul Chiasson</span></span>
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</figure>
<p>Ces avantages, notamment financiers, pourraient pourtant potentiellement être mobilisés en partie à des fins de conservation de la biodiversité. Ceci est un sujet de mécontentement profond pour les États qui ont fourni les ressources dont est issue l’ISN, notamment les pays du <a href="https://www.theglobeandmail.com/canada/article-cop15-save-nature-genetic-diversity/">groupe africain</a>.</p>
<p>À l’issue de négociations très tendues, une <a href="https://www.cbd.int/doc/c/6d20/a2aa/a5690825c94dfba69847ab8f/cop-15-l-30-fr.pdf">solution de compromis a été retenue</a> : l’adoption d’un mécanisme multilatéral de partage ainsi qu’un fonds mondial dont les détails seront négociés lors de la prochaine COP, qui sera organisée dans deux ans, en Turquie. En parvenant à cet accord, les parties ont évité un blocage de l’adoption du cadre mondial de la biodiversité qui avait été brandi par certains États.</p>
<h2>Un manque de confiance entre les pays développés et en développement</h2>
<p>Comme lors de la négociation des objectifs d’Aichi, l’adoption du cadre mondial sur la biodiversité s’est faite dans la douleur. Si le cadre a été adopté en avance sur l’horaire, la manière de procéder a été sévèrement critiquée par certaines délégations.</p>
<p>Et pour cause, la présidence chinoise a précipité l’adoption des dernières décisions en négociation, dont celle portant sur le cadre mondial, malgré l’opposition d’un représentant de la République Démocratique du Congo (RDC) lors d’une plénière nocturne. Au lendemain de cette rencontre, le secrétariat de la CDB a affirmé que les décisions avaient été adoptées par consensus (et non à l’unanimité) et sans objection formelle.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/502469/original/file-20221221-17-kjtlfq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/502469/original/file-20221221-17-kjtlfq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=363&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/502469/original/file-20221221-17-kjtlfq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=363&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/502469/original/file-20221221-17-kjtlfq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=363&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/502469/original/file-20221221-17-kjtlfq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=456&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/502469/original/file-20221221-17-kjtlfq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=456&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/502469/original/file-20221221-17-kjtlfq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=456&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Eve Bazaiba Masudi, vice-première ministre et ministre de l’Environnement de la République démocratique du Congo, en compagnie de Leonardo Cleaver de Athayde, ministre brésilien des Affaires étrangères, et d’autres délégués, lors de la COP15, à Montréal, le 19 décembre 2022.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse canadienne/Paul Chiasson</span></span>
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</figure>
<p>Cette affirmation est contredite par les <a href="https://www.theguardian.com/environment/2022/dec/19/objection-by-drc-sours-paradigm-changing-cop15-biodiversity-deal">déclarations de plusieurs représentants</a>, dont la RDC, qui a pu réaffirmer son opposition lors de la dernière plénière de la COP. Celle-ci sera consignée dans les textes. Cet incident diplomatique arrive à l’occasion d’une convention au cours de laquelle le manque de confiance entre les pays du Nord et les pays du Sud a été souligné à de multiples reprises.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1604760907292504069"}"></div></p>
<p>L’adoption rocambolesque du cadre mondial (malgré la <a href="https://twitter.com/EtienneFG/status/1604971724680069121">tentative de rattrapage in extremis de la présidence chinoise</a>) risque de laisser des traces dans les relations entre les parties à la Convention sur la diversité biologique et peut-être miner l’atteinte des objectifs fixés dans le cadre mondial.</p>
<h2>Le Canada : hôte et facilitateur très engagé</h2>
<p>Lors de la COP, le ministre de l’Environnement, Steven Guilbeault, <a href="https://www.canada.ca/fr/environnement-changement-climatique/nouvelles/2022/12/le-canada-contribue-a-mener-le-monde-a-une-entente-sur-lexceptionnel-cadre-mondial-de-kunming-montreal-pour-la-biodiversite.html">a joué un rôle d’hôte actif dans les coulisses</a> facilitant, au côté de la présidence chinoise, les négociations et la recherche de collaboration, consensus et compromis.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/502446/original/file-20221221-17-uqyvis.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/502446/original/file-20221221-17-uqyvis.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=331&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/502446/original/file-20221221-17-uqyvis.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=331&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/502446/original/file-20221221-17-uqyvis.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=331&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/502446/original/file-20221221-17-uqyvis.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/502446/original/file-20221221-17-uqyvis.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/502446/original/file-20221221-17-uqyvis.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Huang Runqiu, ministre chinois de l’Écologie et de l’Environnement et président de la COP15, en compagnie du ministre canadien de l’Environnement Steven Guilbeault, lors de la conférence de presse de clôture de la conférence des Nations unies sur la biodiversité, à Montréal, le 20 décembre 2022.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse canadienne/Paul Chiasson</span></span>
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<p><a href="https://twitter.com/CELGS/status/1605272001970851841">Sur la scène nationale, le gouvernement du Canada a effectué un grand nombre d’annonces en matière de protection environnementale</a>. Le premier ministre Justin Trudeau avait d’ailleurs ouvert la COP15 avec un premier engagement de <a href="https://www.canada.ca/fr/affaires-mondiales/nouvelles/2022/12/le-canada-accorde-un-nouveau-financement-pour-proteger-la-biodiversite-dans-les-pays-en-developpement.html">350 millions de dollars destiné à soutenir les efforts mondiaux</a> pour conserver et inverser la perte de biodiversité dans le monde.</p>
<p><a href="https://www.canada.ca/fr/affaires-mondiales/nouvelles/2022/12/le-canada-accorde-un-nouveau-financement-pour-proteger-la-biodiversite-dans-les-pays-en-developpement.html">Un investissement supplémentaire de 255 millions au FEM (Fonds pour l’Environnement Mondial) pour la conservation de la nature</a> (ex. : Action climatique féministe dans l’ouest de l’Afrique, stratégie forestière au Maroc), a été effectué par le ministre Guilbeault, propulsant le Canada au rang de 7<sup>e</sup> plus grand contributeur au GEF.</p>
<p>D’autres annonces à retenir incluent la <a href="https://www.canada.ca/fr/ressources-naturelles-canada/nouvelles/2022/12/le-canada-sengage-a-relever-le-defi-de-bonn-pour-la-restauration-des-paysagesa-loccasion-de-la-cop15.html">participation du Canada</a> au <a href="https://www.bonnchallenge.org/">Défi de Bonn</a> et son engagement à restaurer 19 millions d’hectares de terre et de forêts dégradés d’ici 2030 ainsi que le <a href="https://www.canada.ca/fr/environnement-changement-climatique/nouvelles/2022/12/lancement-du-nouveau-reseau-des-gardiens-des-premieres-nations.html">lancement du Réseau national des Gardiens des Premières Nations_</a>, qui permettra de faciliter la collaboration et la coordination des initiatives environnementales autochtones à travers le pays.</p>
<h2>Le travail ne fait que commencer</h2>
<p><a href="https://s3.documentcloud.org/documents/23466127/cop-15-l-25-en-1_221219_035022.pdf">L’adoption du Cadre mondial pour la Biodiversité de Kunming-Montréal</a> constitue bel et bien un nouvel élan bienvenu afin de tenter d’inverser la perte de biodiversité à travers le monde.</p>
<p>Si certains ont déjà salué un <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/environnement/2022-12-19/cop15/un-accord-historique-adopte-dans-la-bisbille.php">moment historique</a> ou encore une <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/environnement/2022-12-19/accord-a-la-cop15/plante-on-l-a-gagnee-la-cop.php">victoire</a>, le travail ne fait en réalité que commencer.</p>
<p>Il serait plus raisonnable de crier victoire lorsque les cibles auront effectivement été atteintes, car rappelons-le, les <a href="https://www.nationalgeographic.fr/environnement/2020/09/objectifs-daichi-aucun-engagement-pour-sauver-la-biodiversite-na-ete-respecte">objectifs d’Aichi ne l’ont pas été</a> sur une période de 10 ans. Or les cibles du nouveau cadre sont d’une ambition supérieure aux précédentes. Et il ne reste que huit ans pour les atteindre.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/195185/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lauren Touchant a reçu des financements du Centre du droit de l'environnement et de la durabilité mondiale à titre de chercheure postdoctorale, Université d'Ottawa. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Elie Klee a reçu des financements de l'Université d'Ottawa au titre de coordinateur du Centre du droit de l'environnement et de la durabilité mondiale (CDEDM).. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Lynda Hubert Ta est membre du Centre du droit de l'environnement et de la durabilité mondiale de l'Université d'Ottawa, duquel elle a reçu du financement pour participer à la COP 15.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Nessan Akemakou est membre du Forum de l'Université d'Ottawa sur le droit et la gouvernance de l'eau qui a financé sa participation à la COP 15. Il est par ailleurs président du think tank indépendant et à but non lucratif L'Afrique des Idées.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Thomas Burelli est co-directeur du centre du droit de l'environnement et de la durabilité mondiale de l'Université d'Ottawa. Il a reçu un financement de la part du centre pour participer à la COP15. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Erin Dobbelsteyn ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La COP15 peut être considérée comme un succès avec l’adoption d’un cadre qui vise notamment à protéger au moins 30 % des zones terrestres, côtières et marines d’ici 2030.Lauren Touchant, Professor at Vancouver Island University & Postdoctoral fellow, Centre d’études en gouvernance et du Centre de droit de l’environnement et de la durabilité mondiale, L’Université d’Ottawa/University of OttawaElie Klee, Doctorant en droit international public, coordinateur du Centre du droit de l'environnement et de la durabilité mondiale de l'Université d'Ottawa, L’Université d’Ottawa/University of OttawaErin Dobbelsteyn, PhD Student in Environmental Law, L’Université d’Ottawa/University of OttawaLynda Hubert Ta, Professeur en droit, L’Université d’Ottawa/University of OttawaNessan Akemakou, Chercheur postdoctoral, L’Université d’Ottawa/University of OttawaThomas Burelli, Professeur en droit, Section de droit civil, Université d’Ottawa (Canada), membre du Conseil scientifique de la Fondation France Libertés, L’Université d’Ottawa/University of OttawaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1960982022-12-12T14:49:15Z2022-12-12T14:49:15ZCOP sur le climat, COP sur la biodiversité : voici pourquoi il faut une approche intégrée<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/499830/original/file-20221208-7231-1umnjf.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=66%2C11%2C7377%2C4855&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La mairesse de Montréal, Valérie Plante, prononce un discours lors de la cérémonie d'ouverture de la conférence de l'ONU sur la biodiversité, la COP15, à Montréal, le 6 décembre 2022.
</span> <span class="attribution"><span class="source">LA PRESSE CANADIENNE/Paul Chiasson</span></span></figcaption></figure><p>La conférence de l’ONU sur la biodiversité, la <a href="https://www.cbd.int/">COP15</a>, a débuté à Montréal le 7 décembre dernier, peu de temps après la fermeture du <a href="https://cop27.eg/#/">sommet sur les changements climatiques (COP27)</a>, tenu en Égypte en novembre 2022. Ce dernier a été « décevant » pour plusieurs participants, <a href="https://www.reuters.com/business/sustainable-business/after-disappointing-cop27-calls-grow-new-approach-fighting-climate-change-2022-11-28/">lesquels souhaiteraient entreprendre une réforme du processus délibératif</a>.</p>
<p>Alors que les critiques fusent de toutes parts, le temps serait-il venu de fusionner les deux types de conférences entre elles ?</p>
<p>La tenue de deux COP dans un intervalle de temps rapproché peut semer la confusion chez le public. Cet article s’intéresse à l’interaction des agendas sur le climat et la biodiversité, le tout dans un esprit réformiste.</p>
<p>Doctorante en science politique à l’Université de Montréal, mes travaux portent sur l’efficacité des cadres utilisés, notamment celui de santé, pour aborder la crise climatique et leur rôle dans l’apport de changements de politique publique.</p>
<h2>Qu’est-ce que la COP27 ? La COP15 ?</h2>
<p>Lors du <a href="https://www.un.org/fr/conferences/environment/rio1992">sommet de Rio</a> en 1992, les pays membres de l’ONU se sont rassemblés afin de signer trois conventions déterminantes pour favoriser le développement durable : la <a href="https://www.canada.ca/fr/environnement-changement-climatique/organisation/affaires-internationales/partenariats-organisations/convention-cadre-nations-unies-changements-climatiques.html">Convention-cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques (CCNUCC)</a>, la <a href="https://www.canada.ca/fr/environnement-changement-climatique/organisation/affaires-internationales/partenariats-organisations/convention-diversite-biologique.html">Convention sur la diversité biologique (CDB)</a>, et la <a href="https://ise.unige.ch/isdd/spip.php?article156">Déclaration sur les principes de gestion des forêts</a>. Depuis, des conférences sont organisées pour chacune d’entre elles afin de faire le point sur les avancées et de mettre à jour les objectifs fixés.</p>
<p>La COP 27 s’ajoute à la longue liste des conférences tenues annuellement pour tenter de ralentir le réchauffement climatique, par l’entremise d’une réduction de l’impact des activités humaines. De son côté, la COP15 est associée plus spécifiquement à la préservation de la biodiversité, elle aussi dégradée par ces mêmes activités.</p>
<p>Les COP portant sur la biodiversité sont plus rares que celles sur le climat, puisqu’elles ont lieu une fois tous les deux ans. Le dernier plan stratégique remonte néanmoins à la conférence de <a href="https://www.cbd.int/abs/">Nagoya</a> en 2010. Les gouvernements se sont alors engagés, entre autres, à réduire au moins de moitié la perte d’habitats naturels et à sauvegarder 17 % des zones terrestres et des eaux continentales, ainsi que 10 % des zones marines et côtières. Un rapport récent du secrétariat pour la CDB a cependant démontré que <a href="https://www.cbd.int/gbo5">ces cibles n’ont pas été atteintes</a>.</p>
<p>À l’issue de la COP15, les gouvernements se seront mis d’accord sur de nouveaux objectifs pour la prochaine décennie, d’où son importance capitale.</p>
<h2>Un système à deux vitesses ?</h2>
<p>De plus en plus de voix s’élèvent en faveur d’une approche intégrée des agendas sur le climat et sur la biodiversité, jusqu’ici systématiquement séparés.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/499832/original/file-20221208-24-mk2q6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="homme parle à d’autres personnes" src="https://images.theconversation.com/files/499832/original/file-20221208-24-mk2q6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/499832/original/file-20221208-24-mk2q6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/499832/original/file-20221208-24-mk2q6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/499832/original/file-20221208-24-mk2q6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/499832/original/file-20221208-24-mk2q6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/499832/original/file-20221208-24-mk2q6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/499832/original/file-20221208-24-mk2q6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Sameh Shoukry, président du sommet climatique de l’ONU, la COP27, s’entretient avec d’autres personnes lors de la session plénière de clôture, le 20 novembre 2022, à Charm el-Cheikh, en Égypte.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Peter Dejong)</span></span>
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</figure>
<p>À peine dix ans après le sommet de Rio, plusieurs chercheurs, dont <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0959378004000275">Joy A. Kim</a>, économiste au <a href="https://www.unep.org/fr/propos-donu-environnement">Programme des Nations unies pour l’environnement</a>, constataient déjà le manque de synergie entre les deux régimes. Pourtant, le climat et la biodiversité représentent des enjeux transnationaux, hautement complexes et connectés, auxquels il faut remédier rapidement. Ils partagent d’ailleurs des causes similaires, soit des activités humaines excessives.</p>
<p>Le réchauffement climatique, par ses conséquences directes ou par les mesures mises en place pour le contrer, vient cependant <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s43538-022-00073-6#:%7E:text=Marked%20increase%20in%20the%20frequency,main%20consequences%20of%20climate%20change.">exacerber ces mêmes impacts</a> sur la biodiversité. Celle-ci fait donc face à un double danger.</p>
<h2>Le climat et la biodiversité sont interdépendants</h2>
<p>Les deux crises sont aussi interdépendantes en termes de solutions, car la biodiversité peut aider à lutter contre les changements climatiques, notamment avec des <a href="https://cieem.net/wp-content/uploads/2020/07/Nature-Based-Solutions-designed.pdf">solutions fondées sur la nature</a> (SfN) pour séquestrer le carbone. Ces solutions incluent, entre autres, la restauration des habitats, la gestion des ressources en eau, et la construction d’infrastructures vertes.</p>
<p>Autrement dit, les impacts des mesures climatiques sur la biodiversité sont peu reconnus, et les atouts de celle-ci sont mal mis à profit. Au lieu de la détériorer, l’action climatique devrait <a href="https://cieem.net/wp-content/uploads/2021/08/CIEEM-COP15-and-COP26-Statement-FINAL.pdf">pouvoir la protéger et même lui permettre de prospérer</a>.</p>
<p>Cette interaction au sein de la gouvernance environnementale est <a href="https://shs.hal.science/halshs-01675503/document">peu reflétée dans le droit international</a>, où les deux régimes n’ont aucune obligation de coopérer. De manière implicite, on les retrouve néanmoins côte à côte dans les <a href="https://www.un.org/sustainabledevelopment/fr/objectifs-de-developpement-durable/">Objectifs de développement durable</a> (ODD) de l’ONU.</p>
<p>Tandis que la CDB célèbre son 30<sup>e</sup> anniversaire cette année, sa secrétaire générale, Elizabeth Maruma Mrema, consciente du fait que la crise climatique fait de l’ombre à la crise de la biodiversité, a récemment déclaré que si cela était à refaire, <a href="https://www.carbonbrief.org/the-carbon-brief-interview-un-biodiversity-chief-elizabeth-maruma-mrema/">il n’aurait dû y avoir qu’une seule convention et non trois</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/499831/original/file-20221208-14410-krmmcp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="femme parle dans un micro" src="https://images.theconversation.com/files/499831/original/file-20221208-14410-krmmcp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/499831/original/file-20221208-14410-krmmcp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=427&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/499831/original/file-20221208-14410-krmmcp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=427&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/499831/original/file-20221208-14410-krmmcp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=427&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/499831/original/file-20221208-14410-krmmcp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/499831/original/file-20221208-14410-krmmcp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/499831/original/file-20221208-14410-krmmcp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=536&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Elizabeth Maruma Mrema, secrétaire administrative de la Convention des Nations unies sur la diversité biologique, prend la parole lors de la conférence de presse d’ouverture de la COP15, la conférence des Nations unies sur la biodiversité, à Montréal, le 6 décembre 2022.</span>
<span class="attribution"><span class="source">LA PRESSE CANADIENNE/Graham Hughes</span></span>
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</figure>
<h2>Quand la pandémie s’en mêle</h2>
<p>Comme si cela ne suffisait pas, la pandémie de Covid-19 est venue distraire les programmes politiques, en se hissant au sommet des préoccupations des gouvernements. En plus d’avoir retardé l’organisation de la COP27 et de la COP15, celle-ci pourrait amener les décideurs à <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0048969722042863">se concentrer en priorité sur des problèmes domestiques</a>, tels que le ralentissement économique qu’elle a elle-même engendré.</p>
<p>D’autres la voient plutôt comme une <a href="https://besjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/1365-2664.13985">fenêtre d’opportunité</a> pour une reprise économique verte, même si les résultats de la COP27 ont certainement affaibli leur optimisme.</p>
<p>Malgré les circonstances peu favorables, plusieurs initiatives scientifiques ont vu le jour afin de permettre un meilleur maillage d’expertise. Les liens entre les deux crises ont notamment été abordés par le <a href="https://www.ipcc.ch/languages-2/francais/">Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC)</a> et la <a href="https://fr.unesco.org/links/biodiversity/ipbes">Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES)</a>, qui ont décidé de <a href="https://ipbes.net/sites/default/files/2021-06/20210609_workshop_report_embargo_3pm_CEST_10_june_0.pdf">coécrire un rapport</a> pour la première fois en 2021.</p>
<p>Les engagements pris lors de la COP15 permettront d’avoir une meilleure idée de <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/global-sustainability/article/implications-of-covid19-on-progress-in-the-un-conventions-on-biodiversity-and-climate-change/5B62C3869C37AF0BC406EE17CFC1EDA5">l’impact de la pandémie de Covid-19 sur la gouvernance environnementale</a>.</p>
<p>Qu’il s’agisse d’une crise sanitaire ou d’une crise environnementale, la solidarité internationale est de mise.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196098/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Alizée Pillod est membre du Laboratoire de l'opinion climatique (CO-LAB), actuellement financé par le consortium Ouranos, en partenariat avec le Ministère de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) du Québec. Elle a notamment reçu des financements du Département de Science politique de l'Université de Montréal, et est affiliée à divers centres de recherche (CECD, CPDS, CERIUM).</span></em></p>Réflexion sur la pertinence de fusionner les agendas sur le climat et sur la biodiversité afin d’éviter un système à deux vitesses dans une ère post-pandémique.Alizée Pillod, Doctorante en science politique, Université de MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1938592022-11-07T19:52:27Z2022-11-07T19:52:27ZAccès à l’électricité des pays en développement : la solution des mini-réseaux ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/493330/original/file-20221103-26-qtjp7h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=48%2C79%2C1269%2C701&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Exemple de panneaux solaires (en bas) alimentant un mini-réseau électrique dans le village de Ziga, dans le nord du Burkina Faso.
</span> <span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>L’accès à l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/electricite-23762">électricité</a> reste problématique en <a href="https://theconversation.com/fr/topics/afrique-20142">Afrique</a> où, selon l’Agence internationale de l’énergie, près de 600 millions de personnes, soit <a href="https://www.connaissancedesenergies.org/sites/default/files/pdf-actualites/AfricaEnergyOutlook2022.pdf">43 % de la population</a>, n’en bénéficiaient toujours pas en 2021. La qualité de l’approvisionnement par le réseau est en outre limitée, avec de fréquentes coupures de courant, notamment dans les zones rurales.</p>
<p>Les bénéfices apportés par l’accès à l’électricité paraissent pourtant évidents, que ce soit pour l’éclairage public et privé, les conditions sanitaires ou les activités économiques. Substituer l’électricité à l’usage de combustibles traditionnels participe aussi à la protection de l’environnement.</p>
<p>Ainsi, l’amélioration de l’accès à l’électricité fait maintenant partie des priorités du développement, à travers l’objectif du développement durable (ODD) n°7 des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/organisation-des-nations-unies-onu-20684">Nations unies</a> : garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/457705/original/file-20220412-17-bq1vpg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/457705/original/file-20220412-17-bq1vpg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/457705/original/file-20220412-17-bq1vpg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=309&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/457705/original/file-20220412-17-bq1vpg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=309&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/457705/original/file-20220412-17-bq1vpg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=309&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/457705/original/file-20220412-17-bq1vpg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=388&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/457705/original/file-20220412-17-bq1vpg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=388&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/457705/original/file-20220412-17-bq1vpg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=388&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les 17 ODD de l’ONU.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:17-objectifs-odd-unicef.png">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pendant longtemps, les politiques d’électrification menées dans les pays en développement ont été calquées sur celles des pays développés, à savoir la construction de grands réseaux électriques nationaux, voire continentaux. Cette politique apparaît inadaptée pour les zones rurales des pays en développement, en raison des coûts démesurés de l’extension des réseaux liée à la dispersion de la population mais aussi du fait de la faible qualité de services qu’ils sont à même d’offrir.</p>
<p>La solution préconisée face à ces défis a été pendant un temps la diffusion de solutions individuelles isolées, dont les plus connues sont les <a href="https://www.sciencedirect.com/topics/engineering/solar-home-systems"><em>solar home systems</em></a> (SHS). Mais ces solutions, même parées des mérites de l’utilisation de ressources locales renouvelables, ont trouvé leurs limites, car apportant une puissance électrique trop faible pour soutenir des usages productifs significatifs. L’éclairage électrique apporte du confort, mais ne crée que peu d’impacts favorables avérés.</p>
<h2>Manque de données</h2>
<p>Les espoirs pour l’avenir reposent à présent sur le développement de mini-réseaux, c’est-à-dire des installations comprenant un générateur électrique de puissance modérée (le plus souvent moins de 1 MW), et fournissant du courant à travers un réseau câblé local. Quand la source d’énergie est intermittente (solaire, éolien), on lui adosse des batteries, voir un générateur auxiliaire le plus souvent diesel. Cela facilite aussi l’équilibrage du mini-réseau, à savoir la réalisation de l’équilibre indispensable à tout moment entre la charge appelée et la charge produite.</p>
<p>Ainsi, en 2019, la Banque mondiale a estimé que le développement massif de projets de mini-réseaux <a href="https://www.banquemondiale.org/fr/news/press-release/2019/06/25/mini-grids-have-potential-to-bring-electricity-to-half-a-billion-people">pourrait apporter l’électricité à un demi-milliard de personnes</a> d’ici 2030. D’autres agences de développement comme l’Agence française de développement et la Banque africaine de développement lui ont emboité le pas dans le soutien aux <a href="https://www.afd.fr/fr/carte-des-projets/electricite-renouvelable-et-mini-reseaux-projet-dhybridation-des-mini-reseaux-de-kenya-power">programmes</a> mobilisant cette technologie.</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Cette volonté est louable et doit être soutenue. Cependant, comme souvent, la réorientation des politiques menées a été décidée sans évaluation approfondie des impacts que l’on peut en attendre. Grâce à Abhijit Banerjee, Esther Duflo et Michael Kremer, récipiendaires du <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/10/14/le-nobel-d-economie-attribue-a-esther-duflo-michael-kremer-et-abhijit-banerjee-pour-leurs-travaux-sur-la-lutte-contre-la-pauvrete_6015436_3234.html">prix « Nobel » d’économie en 2019</a> pour leurs travaux sur l’évaluation des politiques de développement, la préconisation d’évaluation d’impacts préalable à la généralisation de nouvelles politiques reste admise par la plupart des chercheurs, mais n’est clairement pas toujours mise en œuvre par les décideurs opérationnels dont le discours face aux interrogations des chercheurs est de dire : nous, nous agissons, nous évaluerons après.</p>
<p>Pourtant, suffisamment de mini-réseaux ont déjà été installés pour que cette politique puisse être évaluée. Ce qui manque, ce sont des données évaluatives solides, répétées et pertinentes.</p>
<h2>Luminosité nocturne</h2>
<p>Notre proposition pour relever ce défi est simple : elle consiste à utiliser des données distantes, provenant d’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/imagerie-satellite-102611">images satellitaires</a>, qui sont largement disponibles et qui ont déjà été utilisées dans d’autres domaines de la recherche en économie.Par exemple, les données de luminosité nocturne (dites NTL pour <em>Night-time light</em>) qui fournissent une indication pertinente de l’accès à l’énergie.</p>
<p>Ces données ont aussi le grand mérite d’être observables presque en temps réel, et donc de permettre de suivre l’évolution dans le temps des localités électrifiées. La précision de ces données est telle qu’on peut mesurer l’évolution de la NTL après l’arrivée de l’électricité à un niveau de granularité très fin, celui de petits villages ruraux de quelques centaines à quelques milliers d’habitants.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/493214/original/file-20221103-17-4s8fkw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/493214/original/file-20221103-17-4s8fkw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/493214/original/file-20221103-17-4s8fkw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=442&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/493214/original/file-20221103-17-4s8fkw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=442&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/493214/original/file-20221103-17-4s8fkw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=442&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/493214/original/file-20221103-17-4s8fkw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=555&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/493214/original/file-20221103-17-4s8fkw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=555&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/493214/original/file-20221103-17-4s8fkw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=555&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Localisation de la province du Yatenga (en rouge) au Burkina Faso.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Yatenga_(province)#/media/Fichier:Burkina_Faso_-_Yatenga.svg">Wikimedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Considérons à titre d’exemple le village de Ziga, dans la province de Yatenga dans le nord du Burkina Faso. Ce village de quatre milliers d’habitants en 2006 a bénéficié de la construction d’un micro-réseau alimenté par une centrale de production électrique de source solaire d’une puissance maximale de 69kW. Il s’agit donc d’un projet de taille modeste, mais décisif localement.</p>
<p>L’installateur SINCO a publié des <a href="https://www.facebook.com/sincoburkina/posts/pfbid021LG6Mk5NtcYyedFEdcguGafsp9PugRyhUkUjkwD3fjdBGKFitcB7TKMqQzXBDR5el?__cft__%5B0%5D=AZXHS5l8Fv30mqs0iTjkRiKgZ9uSBhGigNtciVvXgGRknbIw06mxesGPxBYSXpHSUkJd_8VHw-5selZLXocK1pcVgE0ma860JEJjh0_XN3K-UyqE1c6TCJ-WshMWsIlhAN_BvmKjvyIFwhlDR0yoc7MQdMAtAmI0KyNV12yy5CwXJHW9SPvYZlW_zRk1VExTuur2y10fGhPjykgER15EuHwckTj5RJjB7V6NJN1dX735kg&__tn__=%2CO%2CP-R">témoignages</a> d’habitants de Ziga et de responsables du mini-réseau confirmant tout le bien que cette installation a apporté au village. En 2019, une <a href="https://start.org/news/lequipe-progreen-burkina-faso-lance-une-collecte-de-donnees-terrain/">enquête de terrain indépendante de l’équipe PROGREEN du Burkina Faso</a> dans plusieurs projets dont celui de Ziga a révélé que les gains ressentis par la population ne sont pas seulement associés à l’éclairage électrique mais aussi au développement de petits usages productifs et à l’alimentation électrique de pompes à eau pour l’agriculture. Néanmoins, le prix de l’électricité reste cher, ce qui entrave son accès par les plus pauvres.</p>
<p>Les gains de croissance économique cités sont parfaitement corroborés par l’évolution de la NTL, qui part de pratiquement 0 en 2014-2016 puis augmente régulièrement, à la fois de manière extensive et intensive.</p>
<p><strong>Évolution de la luminosité nocturne (NTL) entre 2014 et 2021 à Ziga</strong></p>
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<figcaption>
<span class="caption">2014-2016.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/493219/original/file-20221103-20-etoub8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/493219/original/file-20221103-20-etoub8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/493219/original/file-20221103-20-etoub8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/493219/original/file-20221103-20-etoub8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/493219/original/file-20221103-20-etoub8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/493219/original/file-20221103-20-etoub8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/493219/original/file-20221103-20-etoub8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/493219/original/file-20221103-20-etoub8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">2017.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
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<span class="caption">2018.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<span class="caption">2019.</span>
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<span class="caption">2020.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/493223/original/file-20221103-14-59hffq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/493223/original/file-20221103-14-59hffq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/493223/original/file-20221103-14-59hffq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/493223/original/file-20221103-14-59hffq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/493223/original/file-20221103-14-59hffq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/493223/original/file-20221103-14-59hffq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/493223/original/file-20221103-14-59hffq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/493223/original/file-20221103-14-59hffq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">2021.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p><em>Cartes préparées par Olivier Santoni (CERDI et FERDI) à partir des <a href="https://eogdata.mines.edu/products/vnl/">données VIIRS</a>.</em></p>
<p>Les données de NTL permettent ainsi de mesurer les progrès dans l’accès à l’énergie, et les progrès économiques qui leur sont associés, pratiquement à tout moment et en tout lieu, y compris, et même surtout, dans des localités isolées.</p>
<h2>Un taux d’échec élevé</h2>
<p>Nous avons réalisé, dans le cadre d’un programme de recherche de la FERDI soutenu par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (<a href="https://theconversation.com/institutions/ademe-agence-de-la-transition-ecologique-2357">Ademe</a>), une première tentative concluante de <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=4207842">mobilisation de ces données</a> pour étudier l’impact potentiel d’une politique d’électrification rurale par mini-réseau. Nous avons à cet effet exploité une base de données originale de la FERDI, la <a href="https://ferdi.fr/en/indicators/data-collaborative-smart-mapping-of-mini-grid-action-cosmma">CoSMMA – Collaborative Smart Mapping of Mini-grid Action</a>, qui recense de nombreuses données évaluatives sur des projets d’électrification décentralisée. Nous avons pu identifier la localisation précise de ces projets pour une cinquantaine d’entre eux, et ainsi mettre en face les données d’évolution de la NTL dans leurs localités respectives.</p>
<p>Malgré un nombre d’observations encore limité, elle révèle des premiers résultats prometteurs. Dans l’ensemble, la construction de mini-réseaux a un impact positif sur l’a réalisation de l’ODD n°7 ; mais une proportion élevée des projets étudiés, proche de la moitié, a échoué au regard du critère de croissance de la NTL. La politique envisagée aujourd’hui est donc tout sauf une panacée, même si les taux d’échec sont à la baisse.</p>
<p>Il faudra rassembler plus de données pour identifier de manière rigoureuse les causes des échecs. Quelques conclusions, en accord avec des observations de terrain factuelles, s’imposent néanmoins.</p>
<p>D’abord, il n’est pas toujours possible de construire pour ces projets un modèle économique viable. On ne peut pas montrer d’impact positif dans des localités caractérisées par une grande pauvreté énergétique ou fortement isolées, alors que des impacts positifs sont observés dans des situations inverses ; il faut donc concevoir des modèles intermédiaires de pré-électrification dans ces circonstances, qui sont plus souvent la norme que l’exception dans les zones rurales en Afrique.</p>
<p>En outre, même si le modèle économique du projet est viable, sa gouvernance est un facteur décisif de son impact. Il n’est pas possible de trouver un impact positif des projets de mini-réseaux quand les projets sont conçus et gérés sans une approche inclusive, prenant en compte toutes les parties prenantes. À l’inverse, les projets à gouvernance inclusive présentent un impact positif. Ce point de vue n’est pas toujours, loin s’en faut, partagé par les grandes agences de développement habituées, surtout dans le secteur de l’énergie, à une approche de type « top-down ».</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/193859/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Claude Berthelemy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L'exploitation de données satellitaires montre qu'un projet sur deux d'électrification au travers un générateur de puissance modérée n'engendre pas les gains économiques attendus.Jean-Claude Berthelemy, Professeur émérite d'économie, Université Paris 1 Panthéon-SorbonneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1900052022-09-12T22:40:46Z2022-09-12T22:40:46ZLa cybersécurité doit aussi se penser durable<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/482723/original/file-20220905-2318-9vo37n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=70%2C98%2C1891%2C1263&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le potentiel de la technologie reste souvent entravé par des facteurs externes dans son utilisation.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/117994717@N06/40466246635">École polytechnique/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>L’utilisation des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/technologies-21576">technologies</a> est à la fois porteuse d’opportunités et de risques. Actuellement, les sources d’insécurités sont notamment liées à l’interconnexion des millions d’appareils formant <a href="https://theconversation.com/fr/topics/internet-des-objets-21322">l’Internet des objets</a>. Cette interconnexion peut apparaître comme une bombe à retardement qui risque de faire vaciller la confiance des utilisateurs (organisations et consommateurs) et d’affecter l’économie moderne et les institutions démocratiques. Si nous voulons éviter le pire, nous devons donc adopter une <a href="https://docs.lib.purdue.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1034&context=cit_articles">approche durable de la cybersécurité</a>.</p>
<p>Les technologies de l’information et de la communication (TIC) sont au cœur de toutes les transactions de la vie moderne, qu’il s’agisse de la distribution d’électricité et d’eau, des opérations bancaires, des achats, de la fabrication ou de la correspondance. Elles soutiennent de plus en plus, sinon complètement, les actions traditionnelles de durabilité telles qu’identifiées par les 10 principes du <a href="https://www.un.org/fr/exhibit/odd-17-objectifs-pour-transformer-notre-monde">Pacte mondial des Nations</a> unies et les <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=3262527">17 objectifs de développement durable</a>. L’ONU reconnaît en effet aux TIC un rôle catalyseur, un moyen de « <a href="https://sustainabledevelopment.un.org/topics/technology">réaliser l’innovation</a>, les opportunités commerciales et le développement, le commerce des biens et services environnementaux, la finance et l’investissement, et les capacités institutionnelles ».</p>
<p>Cependant, le potentiel de la technologie reste souvent entravé par des facteurs externes dans son utilisation. <a href="https://theconversation.com/fr/topics/internet-20905">L’Internet</a> n’a pas été construit dans un souci de sécurité ; de ce fait, une grande partie des flux de données au niveau mondial sont échangés sur des réseaux publics vulnérables aux attaques.</p>
<h2>Confiance humaine</h2>
<p>L’incapacité à garantir la confidentialité, l’intégrité, l’authenticité ou la disponibilité des informations – c’est-à-dire la cybersécurité ou la sécurité de l’information – peut dès lors entraîner des défaillances critiques. Ces défaillances mettent en péril la réputation, les revenus, les actifs et la longévité même de l’entreprise. Si rien n’est fait, une mauvaise cybersécurité peut également menacer les TIC elles-mêmes. Le chercheur américian Jason Healey, de l’Université de Columbia, soulignait d’ailleurs en 2017 :</p>
<blockquote>
<p>« Même si les [TIC] ne sont pas une ressource naturelle – comme l’air, la terre, la mer ou l’espace – elles peuvent être détruites par des actions imprudentes. En fait, comme leur fondement n’est pas naturel, mais repose essentiellement sur la <a href="https://www.atlanticcouncil.org/wp-content/uploads/2015/08/AC_StrategyPapers_No8_Saving_Cyberspace_WEB.pdf">confiance humaine</a>. Le cyberespace et l’Internet peuvent être beaucoup plus sensibles aux perturbations à long terme. »</p>
</blockquote>
<p>Dans ce contexte, nous nous devons d’avoir une lecture dynamique et sociétale de l’essor des TIC, afin que l’ère numérique poursuive sa croissance exponentielle mais surtout que celles-ci continuent d’assurer ce mécanisme d’innovation nécessaire à la réalisation des ODD définis par les Nations unies.</p>
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<p>La « cybersécurité » en soi n’a pas d’horizon temporel. La recherche de durabilité peut se définir ici comme le fait de vouloir que les générations futures disposent d’un Internet aussi riche, ouvert et sûr que celui d’aujourd’hui. Selon cette perspective, la cybersécurité durable est une approche dans laquelle les interactions avec l’écosystème des TIC sont comprises et délibérées, et où chaque participant comprend sa responsabilité en qualité d’« intendant » en vue de respecter et préserver son utilisation future.</p>
<h2>Mieux informer le marché</h2>
<p>La transition vers une approche de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/cybersecurite-31367">cybersécurité</a> axée sur la durabilité demande que l’ensemble des parties prenantes se transforme en acteurs de la sauvegarde de cet écosystème. Dans cette vision: </p>
<ul>
<li><p>les entreprises assument de revoir leurs méthodes de gestion, afin de mieux répartir les stratégies d’investissements et d’évaluer les mesures de rentabilité (internalisation des externalités) ; </p></li>
<li><p>les gouvernements s’engagent à élaborer des stratégies nationales ; </p></li>
<li><p>les assureurs s’attèlent à modifier les incitations par le biais de nouveaux paramètres de souscription ; </p></li>
<li><p>les établissements d’enseignement cherchent à moderniser les programmes d’études ; </p></li>
<li><p>les consommateurs apprennent les éléments pertinents de la cybersécurité et à les intégrer dans leur vie quotidienne.</p></li>
</ul>
<p>Des efforts naissants sont déjà en cours pour accroître la transparence, sensibiliser les consommateurs au respect de la vie privée et à la sécurité, et stimuler la demande de meilleurs produits et services. Aux États-Unis, un groupe d’experts en sécurité technologique et en responsabilité des entreprises est par exemple en train d’élaborer <a href="https://thedigitalstandard.org/standard/"><em>The Digital Standard</em></a> (la norme numérique) pour créer une norme de sécurité et de protection de la vie privée numérique, afin de guider la conception future des logiciels grand public, des plates-formes et services numériques ainsi que des produits connectés à l’Internet.</p>
<p>De même, les meilleures pratiques établies en matière de développement de logiciels et les efforts visant à élaborer une nomenclature de ces derniers contribuent à favoriser un marché informé. À l’instar des consommateurs qui regardent les étiquettes des ingrédients et les pratiques commerciales concernant l’impact environnemental et social, une plus grande transparence et une meilleure connaissance des pratiques de cybersécurité des entités, via par exemple des normes, devront permettre de mieux éduquer les utilisateurs, en les habituant à exiger des produits qui donnent la priorité à la sécurité.</p>
<h2>Effort collectif</h2>
<p>En réponse à cette demande, et également des éléments de la norme, il conviendra d’améliorer les politiques et pratiques d’information dans un <a href="https://www.ssi.gouv.fr/uploads/2016/06/resilience-de-linternet-rapport-2016.pdf">langage simple</a> que la personne non spécialiste peut comprendre, de mieux contrôler les données que l’appareil collecte et à quelles fins ces données seront utilisées.</p>
<p>À partir de ce point de vue élargi, on peut commencer à envisager ce que signifie réellement la cybersécurité durable. En effet, celle-ci ne se limite pas aux mesures prises par les développeurs et les fabricants de matériel. L’intégration de pratiques de gestion de la cybersécurité durable dans l’ensemble de l’écosystème de l’Internet et des TIC doit permettre à toutes les parties prenantes de faire leur part pour améliorer la sécurité de l’écosystème et <a href="https://www.sciencedirect.com/?ref=pdf_download&fr=RR-11&rr=745dab2b6f3899f4">renforcer la confiance</a> dans celui-ci.</p>
<p>Grâce aux pratiques de cybersécurité durable, les parties prenantes du monde entier pourront faire preuve d’intention, lorsqu’elles participent et contribuent à l’économie moderne, qu’il s’agisse de développer des produits et des services, de gérer un foyer, d’exploiter des infrastructures critiques ou d’élaborer des politiques nationales. Grâce à cet effort collectif, l’ensemble des parties pourra avoir davantage confiance dans le fait que les technologies de l’information et des communications soutiennent pleinement et en toute sécurité les innovations d’aujourd’hui et de demain.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190005/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>L’interconnexion, liée notamment à l’essor de l’Internet des objets, multiplie les risques et les fragilités dans le cyberespace, ce qui exige une réponse plus large qu’aujourd’hui.Olivier Meier, Professeur des Universités, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Jeanne Le Roy, Professeure associée en ressources humaines et comportement organisationnel, ICN Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.