tag:theconversation.com,2011:/us/topics/relance-economique-84909/articlesrelance économique – The Conversation2023-10-22T15:07:33Ztag:theconversation.com,2011:article/2160272023-10-22T15:07:33Z2023-10-22T15:07:33ZMode, beauté, « effet rouge à lèvres » : ces comportements de consommation qui ont changé depuis le Covid<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/554768/original/file-20231019-29-y0la2x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C0%2C5599%2C3741&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En période de crise, les ventes de produits cosmétiques ont tendance à augmenter, un phénomène désigné comme un «&nbsp;effet rouge à lèvres&nbsp;».
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/poudres-pulverisees-et-rouges-a-levres-de-couleurs-assorties-1377034/">Dan Cristian Pădureț / Pexels</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p>La pandémie mondiale liée au <a href="https://theconversation.com/topics/coronavirus-81702">coronavirus</a> a, comme pour bien d’autres secteurs, eu un impact considérable sur <a href="https://www.businessoffashion.com/reports/news-analysis/the-state-of-fashion-2022-industry-report-bof-mckinsey/">l’ensemble du monde de la mode</a>, modifiant le comportement des consommateurs, perturbant les chaînes d’approvisionnement et affectant les principales entreprises du secteur.</p>
<p>En <a href="https://theconversation.com/topics/crises-55191">période de difficultés économiques</a>, il a plusieurs fois par le passé suivi une dynamique assez atypique que les chercheurs ont nommée <a href="https://www.forbes.com/sites/pamdanziger/2022/06/01/with-inflation-rising-the-lipstick-effect-kicks-in-and-lipstick-sales-rise/">« effet rouge à lèvres »</a>. Une augmentation des ventes de <a href="https://theconversation.com/topics/cosmetiques-20977">cosmétiques</a> et de maquillage chez les femmes a en effet été observée lors de <a href="https://www.theguardian.com/business/2008/dec/22/recession-cosmetics-lipstick">crises</a> telles que la Grande Récession de 2007-2009 et même la Grande Dépression des années 1930.</p>
<p>Daniel MacDonald et Yasemin Dildar, chercheurs à l’Université de Californie, ont proposé <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S2214804319304884?via%3Dihub">trois hypothèses</a> explicatives. La première est psychologique : les femmes achèteraient plus de maquillage simplement parce qu’elles veulent se faire plaisir au milieu des difficultés. Une autre est de nature anthropologique : les femmes achètent plus de maquillage pour mieux attirer des partenaires. La dernière fait appel à des considérations touchant au marché de l’emploi : acheter plus de maquillage serait une stratégie pour augmenter ses chances d’être (meilleures) employées.</p>
<p>Qu’en a-t-il été en période de pandémie ? Selon un <a href="https://www.mckinsey.com/%7E/media/McKinsey/Industries/Consumer%20Packaged%20Goods/Our%20Insights/How%20COVID%2019%20is%20changing%20the%20world%20of%20beauty/How-Covid-19-is-changing-the-world-of-beauty-vF.pdf">rapport</a> du cabinet de conseil, McKinsey, on a pu relever, en France la semaine du 16 mars 2020, celle du premier confinement, une augmentation de <a href="https://www.mckinsey.com/%7E/media/McKinsey/Industries/Consumer%20Packaged%20Goods/Our%20Insights/How%20COVID%2019%20is%20changing%20the%20world%20of%20beauty/How-Covid-19-is-changing-the-world-of-beauty-vF.pdf">jusque 800 %</a> des ventes de savons de luxe par comparaison avec la même semaine en 2019. Il semble néanmoins difficile ici de distinguer ce qui relèverait des conséquences d’une promotion soudaine des gestes barrières d’un effet rouge à lèvres.</p>
<p>Au cours du mois d’avril toutefois, Zalando, leader électronique du secteur en Europe, a fait état d’un boom dans les catégories de produits de beauté pour le bien-être et les soins personnels ; les ventes de produits de soins pour la peau, les ongles et les cheveux ont augmenté de 300 % d’une année sur l’autre. Les ventes de produit de maquillage, effet du télétravail sans doute, s’orientaient, elles à la baisse. Les mêmes tendances ont été observées chez Amazon.</p>
<p>Nos <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/14707853231201856">travaux</a> se sont ainsi donnés pour objectif de creuser cet effet rouge à lèvres d’un genre nouveau.</p>
<h2>Changements des comportements du consommateur</h2>
<p>Certaines <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0969698920309814?via%3Dihub">recherches</a> ont mis en évidence un changement du comportement des consommateurs pendant la crise Covid. Ont été par exemple soulignés, des achats impulsifs ou hédoniques, un rejet des achats en magasin, une modification des dépenses discrétionnaires ou un intérêt croissant pour la façon dont les marques traitent leurs employés. À notre connaissance néanmoins, une seule <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/0887302X211014973">étude</a> a exploré l’évolution des habitudes de consommation dans le secteur de la beauté, et plus précisément des vêtements, au moment de la pandémie de Covid.</p>
<p>Ses auteurs ont étudié 68 511 tweets collectés entre janvier 2020 et septembre 2020, révélant divers éléments. Les internautes parlent de problèmes de sécurité (expédition depuis la Chine, virus sur les vêtements, vêtements de protection, désinfection des vêtements), de perturbations de la consommation (préoccupations concernant les services de revente et de location, inquiétudes concernant l’achat de vêtements spéciaux, inquiétudes concernant les achats en magasin, inquiétudes concernant l’expédition), demandes refoulées (arrêt ou report des achats, désir de soldes). Ils évoquent aussi une transition de la consommation (prise de poids et « rétrécissement des vêtements »), des changements d’habitude (style vestimentaire, désencombrement et don, sensibilisation à l’éthique) et de consommation (adaptation à un nouveau style vestimentaire, digitalisation).</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1683902003653509120"}"></div></p>
<p>Notre <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/14707853231201856">projet de recherche</a> visait ainsi à explorer un potentiel effet rouge à lèvres Covid, à partir de trois études explorant l’impact à long terme de la pandémie sur les pratiques d’achats vestimentaires et de beauté.</p>
<h2>Un effet autocentré</h2>
<p>Dix-sept participants (neuf femmes et huit hommes), tous étudiants ont été recrutés pour notre première étude. Nous avons choisi exclusivement des étudiants sans responsabilité professionnelle ni présence familiale afin d’observer des pratiques de la mode pendant le confinement isolées de toute pression parentale ou managériale.</p>
<p>Les résultats suggèrent un impact potentiel des deux confinements sur les pratiques de mode et de beauté chez les femmes mais pas chez les hommes : les participantes ont passé beaucoup de temps à explorer leur relation avec les vêtements et les produits de beauté afin de mieux aligner leurs pratiques sur elles-mêmes, tandis que les étudiants de sexe masculin n’ont pas modifié leurs pratiques en matière de mode.</p>
<p>Pour approfondir cette intuition, nous avons recruté 111 étudiantes, lesquelles ont été invitées à compléter des questionnaires décrivant leur pratique vestimentaire, d’estime de soi et de bien-être avant la pandémie Covid et depuis le début de pandémie. Ils montré qu’elles choisissaient des couleurs plus vives et une gamme de couleurs plus large ainsi que des textures et des vêtements favorisant la mobilité. Une troisième étude sur le maquillage a souligné que les participantes en utilisaient une quantité moindre et moins fréquemment depuis le début de la pandémie.</p>
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<p>Notre recherche a mis en évidence, pour la première fois, un type spécifique de l’effet « rouge à lèvres », à savoir « l’effet rouge à lèvres autocentré » spécifique à la crise sanitaire Covid. Nos résultats ont confirmé que les participantes utilisaient moins de produits de maquillage mais aussi ont montré qu’elles portaient des vêtements différents pour mieux refléter leur identité authentique, leur « moi », une des réponses des consommateurs face à cette crise sanitaire. C’est un facteur d’explication de l’augmentation des ventes de produits de beauté pendant et post-Covid focalisées sur les produits cosmétiques, naturels, et/ou à faire soi-même.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216027/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Aurore Bardey ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>On observe généralement en période de crise une hausse qui peut sembler paradoxale des dépenses en produit de beauté. Le phénomène a toutefois pris un tour nouveau pendant le Covid.Aurore Bardey, Associate Professor in Marketing, Burgundy School of Business Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2055852023-05-14T15:19:43Z2023-05-14T15:19:43ZPourquoi l’Italie ne parvient pas à dépenser les fonds de l’UE<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/525854/original/file-20230512-6683-4cs0n6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=26%2C7%2C1171%2C722&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Seuls 12&nbsp;% des fonds alloués à le relance de l’Italie ont pour le moment été dépenses.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/5/5c/%22_12_-_ITALY_-_3_-_Flag_of_Italy_and_Europe_%28_European_Union_%29_IT_e_UE.jpg/2048px-%22_12_-_ITALY_-_3_-_Flag_of_Italy_and_Europe_%28_European_Union_%29_IT_e_UE.jpg">Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Les <a href="https://www.lefigaro.fr/conjoncture/l-italie-incapable-d-utiliser-les-fonds-europeens-20230329">ressources sont là</a>, et en abondance, mais elles ne sont pas utilisées. L’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/italie-22616">Italie</a> ne sait pas comment dépenser les fonds européens dont elle dispose. Jusqu’à présent, seuls <a href="https://www.infobuildenergia.it/italia-in-ritardo-spesa-obiettivi-del-pnrr/">12 % des ressources disponibles</a> ont été dépensés et moins de la moitié de l’enveloppe initialement prévue décaissée ces deux dernières années (pour un montant total de 20 milliards d’euros débloqués).</p>
<p>En 2021, l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/union-europeenne-ue-20281">Union européenne</a> (UE) avait approuvé l’octroi de 191,5 milliards d’euros à l’Italie, qui a ajouté à ce montant 30,6 milliards d’euros par le biais d’un plan complémentaire, financé directement par l’État, pour un <a href="https://www.mimit.gov.it/it/pnrr/piano">total de 222,1 milliards d’euros</a>. Cette enveloppe est destinée à financer le <em>piano nazionale di ricostruzione e resilienza</em> (plan national de relance et de résilience, ou PNRR). Les sommes doivent être allouées d’ici cinq ans à différents projets dans des six domaines d’investissement (Innovation, transition verte, infrastructures, éducation, inclusion, santé).</p>
<p><iframe id="X2vi7" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/X2vi7/3/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>En contrepartie des différentes tranches versées dans le temps, l’Italie est tenue de respecter une feuille de route qui comporte un total de 27 objectifs. Or, 12 auraient dû être atteints d’ici la fin du mois de mars, et 15 autres doivent l’être d’ici au 30 juin 2023. Face à cette situation, Bruxelles a d’ores et déjà <a href="https://www.lesechos.fr/monde/europe/plan-de-relance-litalie-admet-des-retards-irrattrapables-1921669">gelé le versement de la prochaine tranche</a> de 19 milliards d’euros prévu à cette date.</p>
<h2>Un problème politique</h2>
<p>Pourquoi ? Plusieurs raisons expliquent le laborieux déploiement du plan de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/relance-economique-84909">relance</a> italien. Dès le mois d’août 2022, les retards dans la sélection et les appels d’offres des projets sont apparus, lorsque la Corte dei conti, l’équivalent de notre Cour des comptes, <a href="https://www.lesechos.fr/monde/europe/plan-de-relance-litalie-admet-des-retards-irrattrapables-1921669">a tiré la sonnette d’alarme</a>, en pointant notamment du doigt les municipalités (en particulier dans les régions du Molise, de la Basilicate et de la Calabre, qui ont les services les plus déficients).</p>
<p>Le premier <a href="https://www.rgs.mef.gov.it/_Documenti/VERSIONE-I/CIRCOLARI/2022/27/Circolare-del-21-giugno-2022-n.-27.pdf">paragraphe du décret-loi</a> de mise en place du PNRR précise en effet que les autorités locales sont chargées d’une partie des interventions. Or, la péninsule ne dispose pas des compétences nécessaires pour réaliser les projets nécessaires, mettre en route la machine administrative et respecter les délais dans toutes les régions.</p>
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<p>Les fonctionnaires italiens ont <a href="https://pagellapolitica.it/fact-checking/draghi-ha-ragione-i-dipendenti-pubblici-hanno-in-media-quasi-51-anni-oltre-7-in-piu-rispetto-a-ventanni-fa">en moyenne 50,7 ans</a> – beaucoup plus qu’au Royaume-Uni et en France, par exemple – et 4 sur 10 ont un diplôme universitaire en droit ou en économie : deux diplômes peu utiles pour imaginer un projet visant à promouvoir la numérisation dans les écoles d’une certaine région, à résoudre le problème de l’instabilité hydrogéologique dans une certaine province, à améliorer la collecte différenciée des déchets dans les banlieues d’une grande ville. Les professionnels recherchés sont donc surtout des techniciens, c’est-à-dire des ingénieurs ou des architectes pour lesquels les faibles rémunérations proposées et la précarité des postes offerts rendent les postes peu attractifs.</p>
<p>Il existe également un problème politique. Les structures administratives et bureaucratiques sont fondamentales pour la création et la mise en œuvre des projets, mais elles ont besoin du soutien et de la vision de la classe politique locale qui, malheureusement, préfère souvent soutenir les petits projets qui lui assurent des paquets de voix. C’est un gros problème, surtout dans le sud de l’Italie, où la plupart des fonds sont dirigés pour la Basilicate, la Calabre, la Campanie, les Pouilles et la Sicile – et <a href="https://www.ilpost.it/2020/12/13/italia-fondi-europei/">où la politique opère souvent avec une logique clientéliste</a>.</p>
<h2>Contexte difficile</h2>
<p>Pour ne rien arranger, le contexte apparaît peu favorable à la relance. D’abord, en raison de l’inflation (<a href="https://www.latribune.fr/economie/union-europeenne/italie-l-inflation-ralentit-fortement-en-mars-mais-reste-plus-elevee-que-dans-le-reste-de-l-ue-959030.html">8,7 % en 2022</a>), l’augmentation des coûts de production prive de nombreuses entreprises de l’accès aux appels d’offres. Le contexte politique a pesé également. En effet, l’une des toutes premières actions du gouvernement de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/giorgia-meloni-124819">Giorgia Meloni</a>, première ministre depuis octobre 2022, a consisté à réformer toute la gouvernance du PNRR en février 2023. Cette période de changement a sans aucun doute <a href="https://www.lasvolta.it/7035/quali-sono-gli-ostacoli-che-rallentano-il-pnrr">allongé le calendrier</a> et fait perdre de précieux mois pour la mise en œuvre du plan.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/525886/original/file-20230512-23-gqi4m5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Portrait de Giorgia Meloni" src="https://images.theconversation.com/files/525886/original/file-20230512-23-gqi4m5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/525886/original/file-20230512-23-gqi4m5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=419&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/525886/original/file-20230512-23-gqi4m5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=419&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/525886/original/file-20230512-23-gqi4m5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=419&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/525886/original/file-20230512-23-gqi4m5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=526&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/525886/original/file-20230512-23-gqi4m5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=526&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/525886/original/file-20230512-23-gqi4m5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=526&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Giorgia Meloni, première ministre italienne depuis octobre 2022.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.governo.it/it/articolo/gli-impegni-del-presidente-meloni-di-luned-30-gennaio/21620">Gouvernement italien/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Par ailleurs, la leader du parti italien d’extrême droite Fratelli d’Italia doit faire face à une situation d’une grande complexité. En raison de ses engagements de campagne à l’égard des petits commerçants et artisans, sa marge est très étroite.</p>
<p>Fin mars, le gouvernement italien a également <a href="https://www.ilsole24ore.com/art/pnrr-scadenze-filo-lana-porto-meno-meta-obiettivi-AE590H8C?refresh_ce=1">ouvert officiellement la révision du plan</a> et sa rediscussion des objectifs avec Bruxelles. Le but est notamment d’éliminer les interventions qui devraient s’avérer irréalisables en raison de coûts excessifs ou de retards prévisibles dans les délais de mise en œuvre.</p>
<p>Il y a quelques mois, la Cour des comptes avait estimé que le <a href="https://www.rainews.it/articoli/2023/03/pnrr-la-corte-dei-conti-piano-di-attuazione-in-ritardo-solo-il-70-dei-fondi-versato-alle-ditte-8f1ce38a-d508-4492-996f-923d743370b0.html">pic de dépenses pour l’Italie serait atteint entre 2024 et 2025</a>, lorsqu’il y aura 45 milliards à utiliser ! Un laps de temps qui semble aussi court que les <a href="https://theconversation.com/avec-lextreme-droite-les-perspectives-economiques-de-litalie-sassombrissent-189578">problèmes structurels fondamentaux</a> de l’Italie sont durables : l’économie de la botte n’a connu aucun gain productivité depuis 20 ans et sa classe politique reste orientée vers la rente plutôt que vers l’investissement et le risque.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1541349562031521792"}"></div></p>
<p>Pour ces raisons, l’Italie conserve la peu enviable <a href="https://www.ansa.it/europa/notizie/qui_europa/2023/05/02/litalia-in-forte-ritardo-nella-spesa-dei-fondi-ue_a8d7bed4-cce8-48d6-b5d4-8d5e7eeaa5d5.html">avant-dernière place européenne</a> en termes de capacité d’absorption des fonds du budget 2014-2020, avec un recours à environ 38 % des ressources effectivement déboursées par l’UE sur cette période.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205585/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>André Tiran ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le contexte mais aussi les problèmes structurels de la péninsule enrayent le plan de relance pour lequel Bruxelles a déjà gelé le versement de la prochaine tranche.André Tiran, Professeur émérite de sciences économiques, Université Lumière Lyon 2 Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2027782023-04-05T19:17:41Z2023-04-05T19:17:41ZLa relocalisation, un chemin semé d’embûches<p>La France a connu 30 années de délocalisation de ses structures de production industrielle, et a perdu <a href="https://www.latribune.fr/actualites/economie/france/20140709trib000839219/a-publier-jeudi-a-10h00-ou-sont-passes-les-deux-millions-d-emplois-detruits-depuis-1980-dans-l-industrie-.html">plus de 2 millions d’emplois</a>. La perte de souveraineté qui s’en est suivie s’est révélée avec force lors de la crise sanitaire puis du conflit en Ukraine. La question du soutien à l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/industrie-21143">industrie</a>, et plus particulièrement à la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/reindustrialisation-86098">réindustrialisation</a> et à la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/relocalisation-economique-84432">relocalisation</a>, est ainsi devenue une thématique majeure corrélée à celle de la souveraineté de la France. En témoigne le plan « France Relance », présenté en septembre 2020 par le gouvernement, dont 35 milliards d’euros sont consacrés à l’industrie. Objectif :</p>
<blockquote>
<p>« Relocaliser les maillons manquants des chaînes de production stratégiques et prendre un temps d’avance pour favoriser la localisation des activités d’avenir en France ».</p>
</blockquote>
<p>Le ministre délégué à l’Industrie a également mis en place une politique de soutien et d’encouragement aux relocalisations notamment via les Chambres de commerce et d’industrie (CCI) auxquelles il est demandé, dans le cadre de leur mission, de déployer en 2023 des accélérateurs de relocalisations.</p>
<p>Depuis l’annonce du plan France Relance, 155 relocalisations ont été dénombrées en France par le cabinet d’étude Trendeo, contre 98 sur l’ensemble de la période 2014-2018.</p>
<iframe width="100%" height="315" src="https://www.canal-u.tv/chaines/canal-aunege/embed/55449?t=0" allowfullscreen=""></iframe>
<p>Néanmoins, au-delà de ces premiers chiffres de la volonté affichée, la question de la faisabilité de la relocalisation se pose et de nombreuses difficultés peuvent freiner le mouvement.</p>
<h2>Une reconfiguration forcée des modèles</h2>
<p>Les projets de relocalisation soulèvent, très généralement, des problématiques de trois ordres. D’abord, d’ordre technologique. En effet, la relocalisation ne peut être envisagée que par des changements de méthode de production afin de faire baisser de façon drastique les coûts de main-d’œuvre, d’être plus compétitif tout en offrant des produits de meilleure qualité.</p>
<p>Ainsi l’opticien Atol, qui a commencé à relocaliser ses activités dès 2009 et que nous avons étudié dans le cadre de nos recherches, a misé sur l’innovation en automatisant les procédés de fabrication, en réorganisant le temps de travail (en passant aux 3x8) tout en modifiant son offre. L’entreprise roannaise Tissages de Charlieu, spécialisée dans le textile, a fait de même, comme en témoigne son patron dans une interview récente au journal Le Progrès :</p>
<blockquote>
<p>« Nous avons décidé d’investir dans un système automatisé 100 % pour la confection de sacs de caisse et de packaging textile avec une technologie unique au monde pour arrêter les importations en provenance d’Asie ».</p>
</blockquote>
<p>La deuxième difficulté est d’ordre économique : le projet doit en effet être rentable. Ici, le fabricant de brosses à dents écologiques Biospetyl a par exemple pour cela supprimé ses intermédiaires et a misé sur l’argument qualitatif pour se démarquer des géants du secteur et affirmer son positionnement « made in France » auprès des donneurs d’ordre (distributeurs et consommateurs).</p>
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<p>Pour Aledia, entreprise grenobloise spécialisée dans le secteur microélectronique, l’enjeu est à la fois de devoir reconstruire une infrastructure capable d’accueillir les projets rapatriés pour atteindre l’objectif de 2025, mais aussi de former à des corps de métiers spécifiques. Son directeur industriel le soulignait dans une interview accordée en 2022 à Europe 1 :</p>
<blockquote>
<p>« On a besoin de chimistes, d’électroniciens, d’opticiens mais ce sont des métiers qui manquent beaucoup aujourd’hui… On ne peut pas réindustrialiser sans former ».</p>
</blockquote>
<p>Les problématiques concernent enfin le volet environnemental : La transition qui s’est amorcée au niveau mondial se traduit pour les entreprises françaises et européennes par des normes accrues qu’il s’agisse de la traçabilité, du bilan carbone ou de recyclabilité et de réparabilité. Ces nouvelles normes constituent désormais des contraintes nouvelles pour les distributeurs et les marques.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1496362862628982789"}"></div></p>
<p>Soutenu par le plan relance, le sous-traitant pharmaceutique Seqens a annoncé le lancement d’un projet de construction d’une nouvelle unité de production du paracétamol à Roussillon (Isère) : l’entreprise affirme avoir réussi à développer des nouveaux procédés de synthèse lui permettant de garantir la construction d’une installation à la fois efficace et compétitive sur le long terme tout en maîtrisant l’empreinte environnementale (réduction d’un facteur de 5 à 10 en comparaison aux unités existantes).</p>
<h2>Priorité aux produits « vulnérables » ?</h2>
<p>Ces trois problématiques font des relocalisations des projets complexes que des acteurs économiques privés, même regroupés par un intérêt commun avéré, peuvent être en difficulté de mener à bien. La R&D nécessaire, les études supplémentaires, la diversité des expertises à mobiliser complexifient le process de relocalisation mais ne le rendent pas impossible.</p>
<p>Dès lors, les projets de relocalisations pourraient idéalement s’étendre en priorité sur des produits « vulnérables », c’est-à-dire les plus concernés par les difficultés d’approvisionnement et la dépendance à d’autres zones économiques (santé, alimentation, etc.). </p>
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<p><em>Daniel Suissa, responsable pédagogique du master management industriel de l'ESDES, a participé à la rédaction de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/202778/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les entreprises qui choisissent de rapatrier leurs activités se heurtent à des difficultés technologiques, économiques ou encore environnementales.Catherine Mercier-Suissa, MCF-HDR en sciences économiques, iaelyon School of Management – Université Jean Moulin Lyon 3Manal El Bekkari, ATER en Stratégie, Burgundy School of Business Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1977072023-01-23T18:48:37Z2023-01-23T18:48:37ZL'effet rebond : quand la surconsommation annule les efforts de sobriété<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/504182/original/file-20230112-11-zf5z90.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=113%2C57%2C971%2C553&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans le transport aérien civil, chaque kilomètre de vol par passager consomme environ trois fois moins de carburant qu’il y a quarante ans, mais le nombre de kilomètres de vol a explosé.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/158652122@N02/51111707897">Mike McBey/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Dans le livre de Lewis Carrol <a href="https://www.librairie-gallimard.com/livre/9782070466603-alice-au-pays-des-merveilles-de-l-autre-cote-du-miroir-lewis-carroll/"><em>De l’autre côté du miroir</em></a> (la suite des Aventures d’Alice au pays des merveilles), on voit la Reine rouge prendre Alice par la main pour courir. Mais plus elles courent, moins le paysage bouge aux alentours ! Face à l’étonnement d’Alice, la Reine lui explique qu’il faut courir sans cesse pour rester sur place. C’est une excellente image de ce qui se passe dans notre société, où les gains d’efficacité sont sans cesse rattrapés, annulés, dépassés par l’envolée des consommations.</p>
<p>Dans le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/transport-aerien-29163">transport aérien</a> civil, chaque kilomètre de vol par passager consomme environ trois fois moins de carburant qu’il y a quarante ans. Voilà qui est bon pour la planète, direz-vous. Hélas non, car la baisse des coûts a fait que le voyage aérien s’est considérablement développé et démocratisé. Le nombre de kilomètres de vol a explosé. En 2017, on a dépassé 4 milliards de passagers dans les vols de l’aviation civile dans le monde. Alors que le volume de GES émis par passager-kilomètre diminuait de moitié, le <a href="https://theshiftproject.org/wp-content/uploads/2021/03/Pouvoir-voler-en-2050_ShiftProject_Rapport-2021.pdf">volume total d’émissions a été multiplié par deux</a> ; L’impact global sur les consommations de matières et d’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/energie-21195">énergie</a> a crû considérablement.</p>
<p>Prenons un autre exemple, plus banal encore, celui de l’éclairage. Aucune de nos activités courantes n’a connu sur le long terme une telle augmentation d’efficacité et une chute aussi vertigineuse du coût par unité produite (Au passage, cela signifie que le fameux retour à la bougie évoqué par les écolo-sceptiques serait une catastrophe écologique !). Mais la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/consommation-20873">consommation</a>, d’abord portée par le gaz de ville, puis par l’électricité, a plus que rattrapé cette augmentation d’efficacité. Elle a été, grosso modo, multipliée par dix tous les cinquante ans.</p>
<p>Depuis les débuts de l’éclairage urbain dans les années 1830 jusqu’en 2000, le <a href="https://www.researchgate.net/publication/227349575_Seven_Centuries_of_Energy_Services_The_Price_and_Use_of_Light_in_the_United_Kingdom_1300-2000">nombre de lumens-heure a été multiplié par 100 000</a>. Le résultat est que désormais on voit nos villes nocturnes de l’espace, comme sur les belles images envoyées par Thomas Pesquet ! Mais l’aviation et l’éclairage ne sont que des illustrations d’un phénomène universel, que l’on va retrouver pour les mobilités, pour le chauffage, pour l’informatique, pour l’habillement. En réalité, pour la quasi-totalité de nos activités.</p>
<h2>Des biens et des services moins coûteux</h2>
<p>Ainsi, « le moins alimente le plus », écrit le [chercheur et analyste politique canadien] <a href="https://www.cairn.info/magazine-books-2020-5-page-23.htm">Václav Smil</a>. Le signe de ce rattrapage, ou débordement, par la demande est que les gains d’efficacité constatés au niveau « macro » sont nettement plus faibles que ceux qu’on observe au niveau « micro ». Ils existent néanmoins.</p>
<p>Pour l’ensemble du monde, la quantité de gaz à effet de serre (GES) par unité de PIB a ainsi <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/chiffres-cles-du-climat/pdf/pages/partie2/partie2.pdf">diminué d’un tiers depuis 1990</a>. En France, elle a baissé de 50 % (si on s’en tient aux émissions sur le territoire national : rappelons que le carbone incorporé dans nos importations représente désormais plus de la moitié de notre empreinte réelle). En Chine, qui partait de loin, la baisse de ce ratio « tonnes de GES par unité de PIB » a été beaucoup plus rapide encore, même si, à ce jour, il reste sensiblement plus élevé que dans les pays occidentaux. […]</p>
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<p>Pourquoi les gains d’efficacité réalisés au niveau « micro » sont-ils ainsi atténués, voire dilapidés ? La réponse est très simple. L’efficacité rend les biens et les services moins coûteux, plus accessibles, plus désirables, et la demande, dopée par la publicité et par les multiples formes de l’effort pour vendre, croît en proportion, ou même davantage. On appelle cela l’effet rebond, ou, si on veut avoir l’air savant, l’effet ou le <a href="https://energyhistory.yale.edu/library-item/w-stanley-jevons-coal-question-1865">paradoxe de Jevons</a>.</p>
<p>En 1865, les producteurs de charbon britanniques s’inquiétaient de l’efficacité croissante des machines à vapeur, qui utilisaient de moins en moins leur précieux combustible. William Stanley Jevons, homme d’affaires et économiste, un des fondateurs, avec Léon Walras, de l’école marginaliste, leur répondit :</p>
<p>« C’est une erreur complète de supposer que l’usage plus économique de l’énergie va faire baisser la consommation. C’est exactement le contraire qui va se passer. »</p>
<p>Un siècle et demi plus tard, il est difficile de lui donner tort</p>
<h2>Le numérique, emblématique de l’effet rebond</h2>
<p>Il y a beaucoup moins d’aluminium ou d’acier dans chaque canette de 33 centilitres, mais le nombre de canettes a tellement crû que la consommation d’acier ou d’aluminium pour les canettes s’est envolée (Un conseil, au passage : l’acier est un meilleur choix écologique, car plus facile à recycler !). Dans le monde <a href="https://theconversation.com/fr/topics/numerique-20824">numérique</a>, les gains d’efficacité pour les processus de base sont très spectaculaires. Même les mégafermes de serveurs, sur lesquelles repose la croissance du cloud, sont de plus en plus efficaces en énergie et en émissions de carbone.</p>
<p>Les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/gafam-45037">Gafam</a> (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft) ne mentent pas quand ils soulignent que ces hyperscalers (la dernière génération des infrastructures du cloud) sont <a href="https://www.lesechos.fr/tech-medias/hightech/lenvironnement-le-nouveau-filon-du-cloud-1373837">30 % à 50 % plus efficaces que les anciennes fermes</a>. Mais, au bout du compte, il s’agit bien de permettre la multiplication des utilisations, notamment du côté du grand public, par le streaming vidéo en particulier.</p>
<p>L’empreinte globale du monde numérique, qui paraît léger et immatériel, a déjà <a href="https://theshiftproject.org/wp-content/uploads/2020/10/Deployer-la-sobriete-numerique_Rapport-complet_ShiftProject.pdf">dépassé celle de l’aviation civile</a> et ne cesse de croître. Elle repose sur un effet rebond massif, le cœur du modèle économique des plates-formes étant précisément la croissance ultrarapide des volumes que permettent les effets de réseau. L’effet pervers est que ces augmentations sont insensibles pour l’usager qui échange des photos ou regarde des vidéos, et dont la consommation locale est négligeable au regard des coûts globaux.</p>
<p>Un autre domaine très problématique est celui du ciment et de la construction, où les gains d’efficacité (en énergie et en émissions de GES) restent relativement limités, parce que techniquement difficiles à obtenir, alors que la demande explose en Asie et en Afrique.</p>
<p>L’effet Jevons est donc omniprésent. Il peut être indirect – les baisses de prix dans un domaine dégageant du revenu disponible pour d’autres consommations – ou direct, par augmentation de la consommation du bien concerné. Bien entendu, la croissance de la demande n’est pas indépendante des stratégies marketing et commerciales déployées par les entreprises, qui mobilisent des ressources considérables. Le renouvellement plus ou moins frénétique des produits et des catalogues commerciaux reste un moyen classique pour doper la demande.</p>
<p>Pensez aux centaines de variantes des produits les plus simples qui apparaissent lorsque vous consultez Internet pour un achat banal. Les <a href="https://theconversation.com/vos-appareils-electroniques-sont-ils-obsoletes-de-plus-en-plus-rapidement-169765">stratégies d’obsolescence programmée</a> et d’accroissement incessant de la diversité se retrouvent même dans les modèles de services. Nous connaissons tous l’imagination avec laquelle les offreurs de logiciels arrivent à nous obliger de changer de version en permanence.</p>
<h2>« Profondeur technologique »</h2>
<p>Il y a une autre forme de « recyclage » des gains d’efficacité, analogue à l’effet rebond mais beaucoup moins étudiée : c’est la progression incontrôlée de la complexité technique et fonctionnelle de nos objets. […] En lien avec la globalisation, nos objets sont devenus en quelques décennies considérablement plus compliqués que ceux des générations précédentes, tant par le nombre de composants que par leur complexité technologique. Les microprocesseurs, par exemple, se sont disséminés bien au-delà de nos ordinateurs et de nos portables. L’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/internet-des-objets-21322">Internet des objets</a> nous promet une vague encore plus puissante et étendue.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1122&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1122&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1122&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1410&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1410&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1410&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><a class="source" href="https://editionsdelaube.fr/catalogue_de_livres/bifurcations/">Éditions de l’aube, octobre 2022</a></span>
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<p>Or il est certain que cet effet de « profondeur technologique » pèse lourd dans la balance climatique, même si personne, à ma connaissance, ne l’a chiffré. Derrière nos objets et nos services quotidiens, on trouve maintenant des réseaux de plus en plus labyrinthiques d’activités productives, avec des myriades de fournisseurs en cascade – ce qui, soit dit au passage, rend irréaliste l’idée de certains économistes de pister précisément les impacts écologiques de ces chaînes en recensant toutes les activités qui les composent.</p>
<p>L’évolution de nos voitures est un bon exemple. Au lieu de rendre les modèles plus simples (et beaucoup moins coûteux), les gains d’efficacité ont été recyclés principalement dans une formidable augmentation de complexité, avec une part énorme désormais consacrée à l’électronique et, de plus en plus, au logiciel.</p>
<p>Bien sûr, une partie de ces nouveaux équipements et des nouvelles fonctionnalités imaginées par les bureaux d’études est très utile. Qui voudrait se passer de fonctions de sécurité comme l’ABS, ou même de confort comme la caméra arrière ? Mais le processus d’ensemble est à l’évidence piloté davantage par la passion des ingénieurs et la créativité du marketing que par une analyse des véritables besoins des usagers, et encore moins par celle des conséquences écologiques. Il ne s’agit pas de refuser les avancées de la technique, ni de les brider par avance. Il faut cependant bien constater qu’il n’existe aucun forum, ni dans la société, ni dans les entreprises, pour exercer ce que [l’ingénieur] <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/l-age-des-low-tech-philippe-bihouix/9782021160727">Philippe Bihouix</a> appelle le « techno-discernement ».</p>
<p>« N’importe quelle mesure du progrès dans le niveau de vie de l’individu donne un coefficient de progrès incomparablement plus faible que dans la quantité d’énergie dépensée par habitant », écrivait déjà [l’écrivain] <a href="https://books.google.fr/books/about/Arcadie.html?id=Wy4JAQAAIAAJ&redir_esc=y">Bertrand de Jouvenel</a> dès la fin des années 1950. Depuis, cette quantité a été multipliée par 7, et nettement plus pour les plus riches d’entre nous. Vivons-nous sept fois mieux ?</p>
<p>L’ingénieur Jean-Marc Jancovici rappelle souvent que nous ne consommons pas d’énergie. Ce qui consomme de l’énergie, ce sont les centaines, les milliers, les dizaines de milliers de machines qui travaillent pour nous, machines dont nous avons oublié l’existence, car la plupart d’entre elles sont très lointaines, devenues « abstraites » à nos yeux.</p>
<p>Reprenant une image proposée par [l’architecte américain] Buckminster Fuller dès 1940, il parle des « équivalents-esclaves » qui sont à notre disposition, en prenant comme unité l’énergie déployée par un humain en une journée de travail. Leur nombre est faramineux et se chiffre en centaines. Cette image montre à quel point nos processus se sont auto-emballés depuis un siècle, et même un demi-siècle. Elle est aussi source d’espoir, car elle suggère qu’une réduction substantielle de notre extravagant train de vie est possible en gardant l’essentiel de nos acquis, surtout si on partage mieux nos « esclaves ».</p>
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<p><em>Ce texte est extrait du livre <a href="https://editionsdelaube.fr/catalogue_de_livres/bifurcations/">« Bifurcations : réinventer la société industrielle par l’écologie ? »</a> de Pierre Veltz, publié aux Éditions de l’aube en octobre 2022. Les intertitres ont été ajoutés par la rédaction</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/197707/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierre Veltz ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Ce principe, théorisé par l’économiste britannique William Stanley Jevons en 1865, se concrétise aujourd’hui dans des secteurs comme le transport aérien ou le numérique.Pierre Veltz, Professeur émérite, École des Ponts ParisTech (ENPC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1895782022-09-26T04:38:42Z2022-09-26T04:38:42ZAvec l’extrême droite, les perspectives économiques de l’Italie s’assombrissent<p>Comme attendu, Giorgia Meloni et son parti de la droite radicale Fratelli d’Italia sont arrivés en tête du scrutin législatif du dimanche 25 septembre. Le prochain gouvernement aura désormais la lourde tâche de rassurer ses partenaires quant à la conduite des réformes économiques en cours en Italie, ainsi que le respect des engagements et de leurs échéances.</p>
<p>La mise en œuvre rapide et effective des réformes structurelles en place sera une garantie de crédibilité pour attirer des investisseurs étrangers et limiter les risques d'attaque spéculative sur la dette du pays comme en juin 2022, mais aussi assurer le versement de l'aide financière européenne dont la péninsule est aujourd'hui la <a href="https://www.la-croix.com/Economie/Larrivee-fonds-europeens-dope-moral-Italiens-2021-08-16-1201170968">principale bénéficiaire au titre du plan de relance</a>.</p>
<p>L'un des éléments phares du bilan de l'ex-premier ministre Mario Draghi, qui a <a href="https://www.latribune.fr/economie/union-europeenne/italie-le-premier-ministre-mario-draghi-sur-le-depart-926527.html">démissionné fin juillet</a> faute de soutien au parlement, reste en effet la mise en place du <a href="https://italiadomani.gov.it/it/home.html">Plan national de relance et de résilience</a> (<em>Piano nazionale di ripresa e resilienza</em>, ou PNRR). Ce plan, approuvé en juillet 2021, représente quelque chose d'exceptionnel au regard de l'histoire économique de l'Italie de ces 30 dernières années : son montant total, entre les financements européens et les ressources nationales, s'élève à <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-eco/l-italie-rend-public-son-plan-de-relance-finance-par-l-union-europeene-20210426">plus de 220 milliards d'euros</a> dont environ 191 par l'Union européenne, soit près de 14 % du produit intérieur brut sur une durée de cinq ans.</p>
<p>La chute du gouvernement Conte 2 et son remplacement par le gouvernement Draghi en février 2021 s'expliquait d'ailleurs par l'importance de l'enjeu que représente ce financement censé remettre en marche d'une économie pratiquement à l'arrêt depuis plus de 30 ans en termes d'investissement et la productivité.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/leconomie-italienne-est-aussi-malade-de-ses-elites-185520">L’économie italienne est aussi malade de ses élites</a>
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<p>Le PNRR définit notamment un calendrier des réformes essentielles pour moderniser le pays et permettre d'assurer la mise en œuvre du plan dans les domaines : de l'administration, de la justice, de la simplification et de la concurrence. Une refonte totale de la fiscalité est également prévue alors que le total des créances fiscales non recouvrées du Trésor public restent estimées <a href="https://www.ilmessaggero.it/economia/news/fisco_tasse_non_riscosse_evasione-5425350.html">à plus de 1 000 milliards d'euros</a> pour un budget national de 1061 milliards d'euros en 2021.</p>
<p>Le document décrit en outre les projets à mettre en œuvre sur une période de six ans et comment seront gérées les ressources allouées autour de trois axes principaux : innovation et numérisation, transition écologique et inclusion sociale.</p>
<h2>55 objectifs pour la fin 2022</h2>
<p>Dès l'adoption du PNRR, la Commission européenne a versé à l'Italie au titre du préfinancement <a href="https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/IP_21_4066">24,9 milliards d'euros</a>, soit 13 % du total, dont 8,9 milliards d'euros de fonds non remboursables et environ 16 milliards d'euros de prêts. À la mi-avril 2022, la Commission européenne a versé la première tranche du PNRR, d'un montant de <a href="https://www.rtl.be/info/monde/europe/l-italie-recoit-de-l-ue-une-premiere-tranche-de-fonds-pour-realiser-son-plan-de-relance-1370080.aspx">21 milliards d'euros</a>, dont 10 milliards d'euros de subventions et 11 milliards d'euros de prêts. C'est une bonne nouvelle pour le pays, car cela signifie que la Commission a vérifié la réalisation des <a href="https://italiadomani.gov.it/it/catalogo-open-data.html">51 objectifs fixés dans le PNRR pour 2021</a>.</p>
<p>La tâche s'annonce toutefois plus ardue en 2022. En effet, il y a 102 objectifs à atteindre, pour un financement total d'environ 40 milliards d'euros. Même si les 47 objectifs du premier semestre de l'année ont été atteints, permettant d'obtenir 19 milliards, il en restera 55 pour le second semestre 2022, d'ores et déjà marqué par l'enlisement politique, pour obtenir 21 milliards.</p>
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<p>Or, le respect du calendrier des projets financés constitue une condition essentielle de la réussite du plan et de la réception effective des ressources fournies par l'Union européenne. Avec les prochaines élections et le temps techniquement nécessaire à la formation d'un nouveau gouvernement, l'Italie pourrait donc perdre quelques mesures prévues par le PNRR et arriver à la fin de l'année sans avoir rempli ses obligations pour obtenir la prochaine tranche.</p>
<p>La cheffe du parti souverainiste Fratelli d'Italia (FDI), Giorgia Meloni, avait déclaré pendant la campagne que «la révision du PNRR serait l'une des priorités du prochain gouvernement». Selon la candidate d’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/extreme-droite-20397">extrême droite</a>, il est possible pour un pays, en fonction d'événements exceptionnels, de renégocier certains objectifs. Toutefois, si un pays peut en théorie proposer une telle opération, il lui faut l'accord de tous les autres États.</p>
<p>En termes de bilan du gouvernement Draghi, notons que quasiment tous les objectifs qui lui avaient été assignés a été atteints. En effet, l'ancien président de la Banque centrale européenne (BCE) est en effet parvenu à faire respecter la totalité du calendrier tant qu'il a été en fonction, à faire voter des lois qui n'avaient pas pu l'être depuis plus de vingt ans, tout en gérant une coalition hétéroclite, dont la plupart des membres n'attendaient que la fin du gouvernement. Mais il reste à vérifier sir les décrets d'application sortiront et si ils seront mis en œuvre.</p>
<h2>Clientélisme fiscal</h2>
<p>Parmi les choses importantes qu'il a réalisées, il faut noter les structures mises en place pour la réalisation du PNRR, sa connaissance des faiblesses de l'État italien, des administrations régionales et les jeux récurrents du clientélisme des partis politiques l'ayant amené à constituer des structures qui lui permettaient de garantir l'intégrité des décisions.</p>
<p>N'oublions pas que, en ce qui concerne les subventions aux économies d'énergie dans le domaine de la construction mise en place par le gouvernement précédent, cela a donné lieu à une <a href="https://www.lefigaro.fr/conjoncture/italie-gigantesque-fraude-a-la-construction-20220214">fraude gigantesque de 4 milliards d'euros</a>, fraude qui a conduit le gouvernement Draghi à modifier radicalement tout le processus de façon à permettre une traçabilité et un contrôle de la destination des subventions.</p>
<p>L'avenir dira si cette période très particulière et l'action du gouvernement Draghi aura donné une impulsion décisive pour sortir l'Italie de la quasi-stagnation économique et du risque que représente l'importance de sa dette publique.</p>
<p>Toutefois, on peut d'ores et déjà souligner que sa chute ne lui aura pas permis de faire aboutir deux éléments essentiels : d'une part la loi sur la concurrence, qui touchera des intérêts extrêmement importants pour le clientélisme fiscale des partis politiques, et d'autre part la loi sur les tribunaux portant sur les questions fiscales. Le gouvernement Draghi, s'il a respecté une grande partie des objectifs assignés par l'UE n'a pas résolu ces deux questions essentielles lors de son mandat. L'approche par les seules questions économiques ne pouvait pas le permettre.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/189578/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>André Tiran ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une victoire de l'extrême-droite pourrait remettre en cause le train de réformes exigées par Bruxelles en échange du financement européen.André Tiran, Professeur émérite de sciences économiques, Université Lumière Lyon 2 Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1837382022-05-27T15:50:56Z2022-05-27T15:50:56ZQuel « monde d’après » pour le tourisme ?<p><a href="https://www.lefigaro.fr/societes/tourisme-l-ete-s-annonce-radieux-en-france-20220426">52 000 arrivées</a> en avion à Paris pour le week-end de Pâques, annoncées sept fois plus nombreuses qu’en 2021 pour la période de mai à juillet… la reprise du tourisme semble réelle. Au niveau mondial, elle est observée depuis quelque temps par l’Organisation mondiale du tourisme. Les voyageurs étaient en janvier déjà <a href="https://www.unwto.org/fr/taxonomy/term/347">2,3 fois plus nombreux</a> qu’au même mois un an plus tôt.</p>
<p>Pour certains professionnels, ce retour laisse <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/04/24/a-paris-le-retour-du-tourisme-du-monde-d-avant-covid_6123415_3234.html">entrevoir un été radieux</a>. Il est estimé qu’en 2022 les fréquentations atteindront des <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/tourisme-transport/tourisme-la-france-se-prepare-au-grand-retour-des-vacanciers-1402285">records</a> et apporteront des recettes tant attendues après des mois de pandémie. En 2021, à l’échelle du monde, le nombre de touristes internationaux a baissé de <a href="https://www.unwto.org/tourism-data/global-and-regional-tourism-performance">71 %</a> par rapport à 2019 (de 1 468 millions à 421 millions) et en <a href="https://www.unwto.org/tourism-data/international-tourism-and-covid-19">France de 72 %</a>.</p>
<p>Cette reprise du tourisme de masse suscite l’intérêt des chercheurs. Deux scénarios, correspondant à deux champs de recherche, semblent d’ailleurs émerger. D’une part, celui de la reprise du tourisme poursuivant une logique de croissance ; d’autre part, sa redéfinition.</p>
<h2>Relance ou « détouristification » ?</h2>
<p>Certains universitaires encouragent ainsi l’élaboration de <a href="https://www.tandfonline.com/doi/epub/10.1080/02508281.2020.1805933">stratégies de relance</a> pour permettre au secteur de retrouver le « business as usual » dès que possible. Des <a href="https://mdpi-res.com/d_attachment/tourismhosp/tourismhosp-03-00026/article_deploy/tourismhosp-03-00026.pdf?version=1651148659%20">travaux récents</a> concluent d’ailleurs au retour et au maintien du tourisme tel qu’il existait dans le « monde d’avant ». </p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/465008/original/file-20220524-16-kxrxgc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/465008/original/file-20220524-16-kxrxgc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/465008/original/file-20220524-16-kxrxgc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=449&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/465008/original/file-20220524-16-kxrxgc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=449&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/465008/original/file-20220524-16-kxrxgc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=449&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/465008/original/file-20220524-16-kxrxgc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=564&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/465008/original/file-20220524-16-kxrxgc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=564&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/465008/original/file-20220524-16-kxrxgc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=564&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">À Venise, un tag réclame le retour des touristes.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Cette perspective surfe également sur la propagation d’un « <em><a href="https://www.researchgate.net/profile/Girish-Vg/publication/356086459_COVID-19_pandemic_and_the_emergence_of_revenge_travel/links/618b97723068c54fa5c88b59/COVID-19-pandemic-and-the-emergence-of-revenge-travel.pdf%20">revenge travel</a></em> ». Par cette expression sont désignés les effets qui résultent de la combinaison des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S016073832100150X">désirs de rencontres et de déplacements</a> déclenchés par la distanciation sociale et le confinement imposés par la pandémie. D’autant que nombre de ménages ont pu se constituer une épargne durant les mois de confinement.</p>
<p>Le risque d’un surtourisme, chargé en externalités négatives, apparaît cependant. Dégradations de l’environnement, du cadre de vie des résidents, nuisances et pollutions aérienne, visuelle ou sonore… Avant la pandémie, le tourisme avait déjà fait l’objet de <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-3-030-36342-0_34">rejets</a>. Des mouvements « <a href="https://theconversation.com/chers-touristes-cassez-vous-cette-contagion-sociale-a-lorigine-de-la-tourismophobie-122556">tourismophobes</a> » ont été initiés par des habitants de <a href="https://www.courrierinternational.com/article/espagne-tourismophobie-quand-les-vacanciers-derangent">Barcelone</a>, de Venise ou d’Amsterdam, obligeant les autorités à implémenter de nouvelles régulations. Leur <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/tourisme-transport/leurope-se-mobilise-contre-le-surtourisme-1041097">enjeu</a> : maintenir la qualité de la vie et, pour cela aussi, la manne financière issue du tourisme.</p>
<p>C’est pourquoi d’autres recherches invitent à rejeter le modèle du tourisme de masse qui valorise l’exploitation des ressources naturelles, humaines ou culturelles comme moteur de la croissance. Leurs auteurs plaident pour une réinvention du tourisme afin de sortir de la logique du « toujours plus », <a href="https://editionsdufaubourg.fr/livre/reinventer-le-tourisme">incompatible avec le besoin de durabilité</a>.</p>
<p>Il s’agit, dans un souci d’écologie, de privilégier la <a href="https://theconversation.com/pourquoi-il-est-temps-de-reinventer-le-tourisme-138447">proximité plutôt que l’ailleurs</a> et de placer les habitants au cœur du système touristique afin qu’ils bénéficient d’interactions positives. Des travaux exposent même l’idée d’une décroissance du tourisme ou « <a href="https://www.tandfonline.com/doi/pdf/10.1080/09669582.2019.1679822">détouristification</a> ». Ils encouragent le développement d’un tourisme alternatif proposant des offres compatibles avec les <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-3-030-36342-0_34">valeurs environnementales et sociétales</a> de la région d’accueil, ce tourisme devant être « <a href="https://www.tandfonline.com/doi/pdf/10.1080/14616688.2020.1768434">régénérateur</a> ».</p>
<h2>Trois systèmes</h2>
<p>D’un point de vue théorique, ce modèle alternatif peut reposer sur le concept d’ « <a href="https://www.tandfonline.com/doi/pdf/10.1080/14616688.2020.1768434?download=true">économie diversifiée</a> ». Il a été introduit en 1996 par les géographes économistes féministes Katherine Gibson et Julie Graham dans leur ouvrage <em>The End of Capitalism (As We Knew It)</em>, en réaction notamment à la valorisation du capitalisme néolibéral. Celle-ci se fait au détriment d’autres systèmes existants de production, d’échanges et de distribution. Nos travaux en cours, fondés sur nos <a href="https://hal-univ-bourgogne.archives-ouvertes.fr/hal-01882972">précédentes publications</a> liant tourisme et bien-être, transposent la notion à ce secteur.</p>
<p>Selon cette théorie, le paysage économique serait composé d’une <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/0309132508090821">multitude de pratiques et d’organisations cachées</a> qui exercent un impact potentiellement plus élevé sur le bien-être social que le capitalisme et qui peuvent contribuer à la régénération environnementale au sens large. Très schématiquement, cette théorie s’intéresse à cinq types de relations développés dans le cadre du capitalisme, du capitalisme alternatif et du non-capitalisme.</p>
<p><iframe id="EPivl" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/EPivl/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p><a href="https://www.tandfonline.com/doi/pdf/10.1080/14616688.2020.1768434">Dans le cadre du tourisme</a>, on observe une coexistence de systèmes alternatifs et non capitalistes avec le système capitaliste dominant, celui des tour-opérateurs. En France, plusieurs initiatives peuvent être mentionnées. Pour ce qui est des pratiques alternatives, <a href="https://www.terresdesandes.org">Terres des Andes</a> est, par exemple, une société coopérative et participative qui propose un tourisme en immersion, co-construit avec les habitants locaux et assurant une juste rémunération aux guides et aux familles d’accueil. </p>
<p>Pour ce qui est des pratiques non capitalistes, outre le <a href="https://wwoof.fr/fr/">WWOOFing</a>, l’association des <a href="https://internationalgreeter.org/fr">greeters</a> regroupent des guides locaux bénévoles proposant des visites aux touristes. Pour sa part, la plate-forme coopérative de voyages <a href="https://lesoiseauxdepassage.coop/">Les oiseaux de passage</a> réunit les deux pratiques précédentes.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/465009/original/file-20220524-16-38ix0v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/465009/original/file-20220524-16-38ix0v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/465009/original/file-20220524-16-38ix0v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/465009/original/file-20220524-16-38ix0v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/465009/original/file-20220524-16-38ix0v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/465009/original/file-20220524-16-38ix0v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/465009/original/file-20220524-16-38ix0v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">À Venise toujours, des drapeaux sont aussi de sortie contre certaines formes de tourisme.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Prendre en compte cette théorie peut ainsi permettre d’identifier de nouvelles formes de tourisme. Cela suggère notamment de développer des initiatives valorisant les collaborations entre parties prenantes pour penser des offres touristiques impliquant des pratiques économiques diversifiées. Elle peut aussi aider à élaborer des offres combinant de façon équilibrée le marchand, le marchand alternatif, voire même le non marchand.</p>
<p>Ces recherches pourraient d’ailleurs intégrer les apports des travaux consacrés à l’« <a href="https://www.librairie-gallimard.com/livre/9782743651367-l-abondance-frugale-comme-art-de-vivre-bonheur-gastronomie-et-decroissance-serge-latouche/">abondance frugale</a> » pour proposer des solutions permettant de faire, de vivre et de (faire) voyager mieux avec moins. Il s’agirait de privilégier l’eudémonisme et moins l’hédonisme.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/183738/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Laurence Graillot ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Relancer le secteur pour qu’il retrouve une dynamique de croissance ou bien saisir l’opportunité offerte par la crise pour le repenser autrement, à partir de concepts économiques hétérodoxes ?Laurence Graillot, Maître de conférences en Sciences de gestion (marketing) - HDR, Université de Bourgogne – UBFCLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1750882022-01-19T18:31:49Z2022-01-19T18:31:49ZCovid-19 : à quoi aurait ressemblé l’économie française sans les mesures de soutien ?<p>La France a connu une récession sans précédemment avec la crise du Covid-19 : une chute de 17 points de son PIB au creux de la crise (au troisième trimestre 2020). La vitesse de la sortie de crise est aussi inédite : en sept trimestres seulement, le PIB a renoué avec son niveau d’avant-crise.</p>
<p>Cette résilience exceptionnelle de l’économie française reste fortement liée aux mesures de soutien de l’activité prises par le gouvernement depuis le début de la crise sanitaire : sans elles, la baisse du PIB aurait été de 37 points de PIB, et le niveau de PIB d’avant-crise aurait été retrouvé après 13,5 trimestres, selon nos <a href="http://www.cepremap.fr/2022/01/limpact-de-la-loi-de-finance-2022-sur-la-croissance-economique-et-la-dette-publique/">estimations</a> réalisées pour le Centre pour la recherche économique et ses applications (Cepremap). La combinaison de la hausse des dépenses publiques à court terme, relayée par une baisse de la pression fiscale à moyen terme, explique cette dynamique.</p>
<p>Ces mesures exceptionnelles ont eu pour contrepartie d’accroître le ratio de dette sur PIB, celui-ci atteignant 115 %. Toutefois, notre analyse montre que si le gouvernement n’avait pas pris ces mesures, alors le ratio de dette aurait pu atteindre 145 % compte tenu de l’effondrement de l’activité.</p>
<p>Enfin, la programmation des dépenses publiques et des allègements fiscaux prévus dans le <a href="https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b4482_projet-loi">projet de loi de finance (PLF) 2022</a> met la France sur une trajectoire de croissance du PIB plus forte (1,65 %) que celle observée lors des deux quinquennats précédents (1,5 %).</p>
<p>Cette relative bonne santé de l’économie française en fin d’année 2021 doit cependant s’apprécier avec prudence, la situation sanitaire n’étant pas stabilisée. Il reste néanmoins utile d’évaluer l’efficacité des mesures déjà prises et d’en déduire les perspectives de l’économie française dans la période à venir.</p>
<h2>Plus d’un an de gagné</h2>
<p>La crise sanitaire s’est traduite sur le plan économique par une restriction inédite des échanges nationaux, tant sur le marché des biens et services que sur celui du travail, et des échanges internationaux. Les mesures exceptionnelles de politique économique ont alors été prises, modifiant la consommation publique (emploi, éducation, santé, culture…), l’investissement public (R&D, armement, bâtiments et d’infrastructures), et la fiscalité (taxation des entreprises et des ménages).</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/441080/original/file-20220117-27-txaub2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/441080/original/file-20220117-27-txaub2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/441080/original/file-20220117-27-txaub2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=500&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/441080/original/file-20220117-27-txaub2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=500&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/441080/original/file-20220117-27-txaub2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=500&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/441080/original/file-20220117-27-txaub2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=629&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/441080/original/file-20220117-27-txaub2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=629&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/441080/original/file-20220117-27-txaub2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=629&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Graphique 1 : La crise du Covid-19 en l’absence des politiques macroéconomiques. Note : PIB réel par habitant observé (trait noir), prévu par le PLF 2022 (trait bleu) et simulé par le modèle CEPREMOD en l’absence des politiques macroéconomiques (trait rouge). Indice 100 en 2020 T1.</span>
<span class="attribution"><span class="source">PLF 2022 et calculs des auteurs</span></span>
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</figure>
<p>Le graphique 1 compare la trajectoire « réelle » de l’économie française (traits noirs et bleus) à un scénario où les mesures budgétaires et fiscales exceptionnelles prises par le gouvernement sont supprimées (trait rouge). Il montre comment ces politiques ont protégé l’économie française d’une crise qui aurait été encore plus ample.</p>
<p>Dans les deux cas, avec ou sans les politiques de soutien, le creux de l’activité économique se produit au troisième trimestre de 2020, à la suite du confinement de l’économie. La contraction observée est de – 17 % par rapport à la situation d’avant-crise, alors qu’en l’absence des mesures exceptionnelles, la chute de l’activité économique est estimée à – 37 %. Au plus fort de la crise, les politiques macroéconomiques auraient donc permis d’éviter des pertes de l’ordre de 20 points de pourcentage du PIB de 2019.</p>
<p>Sur les quatre années d’après-crise, les mesures ont permis d’éviter des pertes de PIB encore plus importantes. En effet, alors que le PIB observé a déjà quasiment retrouvé son niveau d’avant-crise (il est un point de pourcentage en dessous), il se situerait à près de 10 points de pourcentage en dessous de son niveau d’avant crise sans ces mesures exceptionnelles. Sans ces politiques, le niveau d’activité de 2019 ne serait rejoint qu’au premier trimestre 2023, soit avec plus d’une année de retard (5,5 trimestres).</p>
<p>La hausse de la consommation publique explique l’essentiel des pertes évitées durant les deux premières années suivant la crise (à hauteur de 85 % sur la période 2020-2021), tandis que les allègements fiscaux jouent un rôle prépondérant pour les années suivantes (à hauteur de 85 % sur la période 2022-2023). L’investissement public expliquant le reste (de l’ordre de 15 %), de manière homogène sur l’ensemble de la période.</p>
<h2>Une dette publique finalement contenue</h2>
<p>Les politiques macroéconomiques de soutien à l’activité économique ont représenté une charge financière importante pour l’État dans un contexte de recettes fiscales limitées du fait du ralentissement de l’activité économique. Elles ont par conséquent conduit à d’importants déficits publics, faisant progresser le niveau de la dette publique.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/441082/original/file-20220117-15-12qvqa1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/441082/original/file-20220117-15-12qvqa1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/441082/original/file-20220117-15-12qvqa1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=483&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/441082/original/file-20220117-15-12qvqa1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=483&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/441082/original/file-20220117-15-12qvqa1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=483&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/441082/original/file-20220117-15-12qvqa1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=607&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/441082/original/file-20220117-15-12qvqa1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=607&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/441082/original/file-20220117-15-12qvqa1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=607&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Graphique 2 : évolution et simulation de la dette publique (en % du PIB) en l’absence des politiques macroéconomiques. Note : Dette au sens de Maastricht des administrations publiques en points de PIB observée (trait noir), prévue avant la crise du Covid-19 par le PLF 2019 (trait bleu) et simulée par le modèle Cepremod en l’absence des politiques macroéconomiques (trait rouge).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Insee, PLF 2019 et calculs des auteurs</span></span>
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</figure>
<p>Renoncer à ces politiques de soutien aurait-il permis de limiter la progression de l’endettement public ? Le graphique 2 compare l’évolution observée de la dette publique à ce qu’elle aurait été sans les mesures exceptionnelles de soutien à l’activité.</p>
<p>La dette publique en pourcentage du PIB a augmenté de plus de 20 points durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy, principalement du fait de la crise financière de 2008-2009. Pendant le quinquennat de François Hollande, elle a lentement progressé, alors que cette période ne connaissait aucune crise majeure (pendant cette période, la dette allemande est passée de 88 % à 70 % du PIB), pour se stabiliser autour du niveau de 100 % du PIB au début du quinquennat d’Emmanuel Macron.</p>
<p>La gestion de la crise du Covid-19 a augmenté ce ratio de 15 points de pourcentage amenant la dette publique à un niveau de 115 % du PIB à la fin de l’année 2021. Sans les mesures de soutien à l’économie, l’aggravation de la crise économique aurait conduit à une hausse encore plus forte du ratio de dette publique. Selon nos simulations, ce ratio aurait en effet atteint un niveau de 145 % du PIB dès le troisième trimestre de 2020 (cf. la courbe rouge du graphique 2).</p>
<p>Cet écart de 30 points du ratio d’endettement entre les deux scénarios s’explique par la plus grande ampleur et la plus forte persistance de la crise qui aurait alors eu lieu sans les mesures de soutien (voir ci-dessus). En conclusion, la politique du « quoi qu’il en coûte » semble avoir été une meilleure opération pour les finances publiques qu’une politique de « laissez-faire », encadrée par les critères de Maastricht.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/441083/original/file-20220117-25-10q4w81.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/441083/original/file-20220117-25-10q4w81.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/441083/original/file-20220117-25-10q4w81.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=503&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/441083/original/file-20220117-25-10q4w81.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=503&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/441083/original/file-20220117-25-10q4w81.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=503&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/441083/original/file-20220117-25-10q4w81.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=632&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/441083/original/file-20220117-25-10q4w81.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=632&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/441083/original/file-20220117-25-10q4w81.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=632&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Graphique 3 : évolution depuis 2007 et prévisions jusqu’en 2025 du PIB par tête en France. Note : PIB réel par habitant observé (trait plein noir) et prévu par le PLF 2002 (trait plein rouge) à partir de 2021 T4 (indice 100 en 2017 T2). Tendances du PIB réel par habitant de 1,2 % à partir des débuts des mandants de M. Sarkozy (tirets noirs), M. Hollande (tirets bleus) et de 1,35 % pour le début du mandat de M. Macron (tirets roses).</span>
<span class="attribution"><span class="source">PLF 2022 et calculs des auteurs</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le gouvernement a présenté ses politiques budgétaire et fiscale jusqu’en 2025 dans le PLF 2022. Sous l’hypothèse qu’il n’y aura pas de nouvelle vague épidémique, le graphique 3 montre que ces politiques ancrent la France sur un rythme de 1,35 % de croissance annuelle par tête (soit 1,65 % de croissance en ajoutant la croissance démographique). Cette croissance est donc plus élevée que lors des deux précédents quinquennats (croissance de 1,2 % par tête, soit 1,5 % en ajoutant la croissance démographique).</p>
<p>Au-delà de l’amortissement de la crise, la politique macroéconomique engagée, de par les réductions pérennes d’impôts et le soutien aux investissements publics, semble donc avoir des effets positifs à moyen terme sur le rythme de croissance.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/175088/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Selon les estimations du Cepremap, les politiques macroéconomiques mises en place à partir de 2020 ont non seulement limité la contraction du PIB mais également l’augmentation de la dette publique.François Langot, Professor in Economics, Le Mans UniversitéFabien Tripier, Professeur d'économie, Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1743092022-01-11T20:50:45Z2022-01-11T20:50:45ZLes librairies indépendantes ont-elles gagné de nouveaux clients au cours de la crise sanitaire ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/439341/original/file-20220104-15-dsw2h0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C26%2C4470%2C3319&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">légende</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/echelle-en-bois-marron-sur-etagere-en-bois-marron-220326/">Pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>La crise liée à la pandémie de Covid-19 a mis en lumière les librairies comme des acteurs essentiels de la culture, d’abord fermées puis ouvertes devant <a href="https://theconversation.com/ce-que-nous-apprend-le-debat-sur-la-fermeture-des-librairies-150248">l’attachement des Français et l’ampleur du soutien reçu</a>. Très tôt, dès le début du premier confinement, des voix se sont élevées, s’inquiétant de l’avenir du livre et des librairies <a href="https://theconversation.com/quel-avenir-pour-le-livre-dans-lapres-covid-138470">dans le « monde d’après »</a>, s’alarmant même parfois de <a href="https://theconversation.com/debat-en-france-le-livre-papier-a-t-il-encore-un-avenir-143363">l’inadaptation du modèle actuel des librairies</a>. Ainsi, Vincent Chabault <a href="https://www.vie-publique.fr/catalogue/23786-vers-la-fin-des-librairies">s’interrogeait encore il y a quelques années sur la possible fin des librairies « physiques »</a>.</p>
<p>Dans ce concert d’inquiétude, une récente étude menée pour le compte de l’association <a href="http://asso.chez-mon-libraire.fr/">Chez mon libraire</a> (qui regroupe 200 librairies indépendantes de la région Auvergne-Rhône-Alpes), permet de <a href="http://asso.chez-mon-libraire.fr/vos-librairies/%88-la-une.html">mieux appréhender les habitudes et pratiques d’achats de livres des clients des librairies indépendantes</a>. Cette enquête a été réalisée par un questionnaire en ligne en juin et juillet 2021. Plus de 4000 personnes ont répondu à cette enquête qui, même si elle visait les clients de la région Auvergne-Rhône-Alpes, permet d’étendre les résultats à la France entière.</p>
<p>Que pensent les clients de leurs librairies ? Quelles sont leurs pratiques et habitudes d’achats de livre ? Ces questions ont depuis longtemps intéressé les librairies. Mais les précédentes études sur les clients des librairies indépendantes <a href="http://www.lesrencontresnationalesdelalibrairie.fr/2019/06/etudes/">datent maintenant de l’avant-crise sanitaire</a>.</p>
<p>Les résultats de cette étude en ligne vont à contre-courant de bon nombre d’idées reçues et montrent distinctement la résurgence des librairies indépendantes françaises.</p>
<h2>L’impact de la crise sanitaire</h2>
<p>Les deux tiers des répondants de l’étude déclarent acheter et lire de la même façon depuis la crise sanitaire. Plus d’un quart déclarent acheter et lire davantage. Ces résultats confirment ceux <a href="https://www.sne.fr/actu/une-etude-sur-les-usages-des-livres-numeriques-audio-et-imprimes-en-confinement/">d’études menées en 2020</a> par la Sofia, le Syndicat national de l’édition et la Société des gens de lettres : la majorité des lecteurs lisent autant voire davantage depuis la crise sanitaire. Et 82 % des répondants ont déclaré fréquenter à l’identique ou davantage les librairies indépendantes.</p>
<p>Autre point intéressant : le groupe des « nouveaux clients » (ceux qui fréquentent régulièrement des librairies indépendantes depuis moins de trois ans) et le groupe des « anciens clients » (ceux qui fréquentent régulièrement des librairies indépendantes depuis plus de sept ans) ont des comportements d’achats de livres assez différents. Ces deux groupes ne se distinguent pas par les âges moyens ou d’autres caractéristiques socio-économiques mais essentiellement par l’ancienneté de la fréquentation des librairies.</p>
<p>Ainsi, les « nouveaux clients » ont significativement davantage acheté et lu de livres que les « anciens clients » (33 % versus 20 % pour les achats et 36 % versus 24 % pour la lecture).</p>
<h2>Une relation de confiance très forte</h2>
<p>Les résultats montrent une relation de confiance forte entre les clients et les librairies indépendantes. 79 % d’entre eux déclarent privilégier leur librairie indépendante au détriment d’autres lieux d’achats de livre (en ligne, en supermarchés ou encore dans les grandes surfaces culturelles), même si le livre n’est pas en stock et qu’il faut le commander. La relation avec la librairie est ancrée, et même un délai de commande ne remettra pas en cause le souhait d’acheter des livres en librairie.</p>
<p>Les clients privilégient également la relation personnalisée et l’acte d’achat spécifique propre à la librairie puisque 80 % déclarent aimer flâner et prendre leur temps.</p>
<p>Pour l’avenir, ils sont 58 % à déclarer choisir à l’identique la librairie de proximité comme lieu d’achat et 31 % de façon renforcée. Cela témoigne d’un fort sentiment d’adhésion à la librairie indépendante pour le futur.</p>
<h2>La révolution non advenue du livre numérique</h2>
<p>Depuis le début de la pandémie, la très grande majorité des clients ont acheté autant de livres papier, de livres audio et de livres numériques. Cette proportion est encore plus importante pour le livre numérique (86 %) que pour le livre papier (79 %). Alors que l’on pouvait s’attendre à une augmentation significative des ventes de livres audio et numérique à l’instar de ce qu’ont connu certains pays (comme la Suède), ce phénomène ne s’est pas produit en France. Toutes les conditions liées au confinement étaient pourtant réunies pour que cette augmentation soit massive. Mais les pratiques déclarées dans l’enquête vont dans un tout autre sens. Elles confirment ainsi les études sur les pratiques de lecture pendant le confinement (Étude SNE, Sofia, SGDL). Il n’y a pas eu le raz-de-marée du livre numérique que tout le monde prédisait.</p>
<h2>Des modes de prescription en mutation</h2>
<p>Comment les clients des librairies choisissent-ils leurs livres ?</p>
<p>Les modes de prescription et de choix des livres reposent fondamentalement sur : l’envie de lire un auteur apprécié (pour 80 % des répondants), les conseils des libraires (63 %) témoignant en cela de la confiance envers l’institution-librairie, les conseils des amis (63 %) et enfin les résumés et couvertures de livres (61 %) aisément accessibles désormais sur Internet et les réseaux sociaux.</p>
<p>Ces modes de prescription diffèrent selon le profil des clients. Ainsi, les « anciens » sont plus sensibles aux critiques des journalistes et émissions TV (notamment <em>La Grande Librairie</em>, principale émission TV à une heure de grande écoute dédiée aux livres et <a href="https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/">valorisant régulièrement des choix de libraires</a>). À l’opposé, les « nouveaux clients » sont davantage influencés par les films et séries, les résumés et couvertures et enfin par Internet et les réseaux sociaux.</p>
<h2>L’exigence de service rendu</h2>
<p>Nous l’avons souligné, la relation entre les clients et leur librairie semble solide. Mais pour autant il ne faudrait pas croire que cette relation de confiance abaisse le niveau d’exigence de service rendu et de professionnalisme. Fidèles, certes, mais exigeants, surtout dans un contexte concurrentiel renforcé.</p>
<p>Ainsi, 35 % des clients veulent récupérer leurs livres en dehors de tout échange ou relation humaine. Cette attente est tout particulièrement significative pour le groupe des « nouveaux clients » dont les préférences sont empreintes d’un souci d’efficacité et de service rendu.</p>
<p>Certes, la librairie demeure le lieu de préférence pour les achats de livres mais 15 % des « nouveaux clients » privilégieront malgré tout la praticité de l’achat contre seulement 9 % pour les « anciens clients ». Les arbitrages d’achats peuvent aussi se faire en fonction de critères d’efficacité malgré la fidélité attitudinale envers la librairie. La fidélité est toute relative, la volatilité des clients par rapport aux lieux d’achats existe bel et bien, même s’il semble qu’elle se soit récemment réduite.</p>
<h2>L’avenir des pratiques d’achat</h2>
<p>Un quart des clients pensent utiliser davantage le « click and collect » à l’avenir (26 %) mais un tiers ne sont pas intéressés par cette pratique (31 %). Cette question polarise ainsi les attentes des clients.</p>
<p>Le désir de « click and collect » est important quelle que soit l’ancienneté de la relation avec les librairies mais il est significativement plus fort avec les nouveaux clients (32 % contre 20 % pour les anciens). Par ailleurs, le désir de pratiquer à l’avenir le « click and collect » se vérifie pour toutes les librairies, qu’elles soient en zone rurale ou urbaine et qu’elles soient de grande ou petite taille. Ce qui signifie que l’ensemble des librairies sera concerné par le développement de cette pratique d’achat.</p>
<p>Des attentes de « click and collect » mais également des attentes pour faire perdurer le lien humain, voilà l’enjeu-oxymore du futur de la relation des librairies avec leurs clients !</p>
<p>Ces résultats témoignent d’une résurgence pour les librairies indépendantes. Il semblerait que ce regain ne soit pas uniquement localisé en France mais que d’autres pays puissent également en témoigner, <a href="https://www.google.fr/amp/s/amp.theguardian.com/books/2020/jan/10/indie-bookshops-grow-high-street-declines">comme au Royaume-Uni, par exemple</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/174309/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>David Piovesan ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Que pensent les clients de leurs librairies ? Quelles sont leurs pratiques et habitudes d’achats de livres, et ont-elles évolué au cours de la pandémie ?David Piovesan, Maître de conférences HDR en sciences de gestion, iaelyon School of Management – Université Jean Moulin Lyon 3Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1737802021-12-20T18:55:33Z2021-12-20T18:55:33ZLe menaçant retour des déficits jumeaux américains<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/437585/original/file-20211214-25-1w27c88.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C35%2C1120%2C804&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En 2021, le déficit budgétaire fédéral devrait s’établir à 12,5&nbsp;% du PIB et le déficit courant à 4&nbsp;%.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/59937401@N07/5857169353">Images Money / Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Face à la pandémie de coronavirus, Washington a adopté une série de <a href="https://www.tresor.economie.gouv.fr/Pays/US/situation-de-l-economie-americaine-et-perspectives-a-moyen-terme">plans massifs de soutien</a> à l’économie américaine qui ont creusé les déficits publics. Après avoir atteint le niveau record de 3 132 milliards de dollars en 2020, soit près de 15 % du PIB, le déficit budgétaire fédéral devrait s’établir à 2 770 milliards de dollars en 2021, soit 12,5 % du PIB.</p>
<p>Dans le même temps, le déficit courant, qui correspond approximativement au solde négatif entre la valeur des exportations de biens et services et la valeur des importations de biens et services, s’est creusé pour atteindre près de 3 % du PIB en 2020. Selon les prévisions du Fonds monétaire international et de l’Organisation de coopération et de développement économiques, la dégradation des comptes extérieurs américains devrait en outre se poursuivre en 2021 et 2022 (le déficit courant pourrait atteindre 4 % du PIB en 2022).</p>
<p>L’expression de déficits jumeaux (<a href="https://www.everycrsreport.com/reports/RS21409.html">« Twin Deficits »</a>), qui désigne la hausse simultanée du déficit budgétaire et du déficit courant, semble donc s’appliquer au contexte actuel. Dans un <a href="https://doi.org/10.3917/ecofi.137.0339">article publié</a> en 2020, nous avions d’ailleurs montré qu’il existait une relation positive de long terme entre ces déficits : une augmentation d’un dollar du déficit budgétaire américain s’accompagne d’une augmentation de 0,40 dollar du déficit courant américain.</p>
<p>Mais le creusement actuel est-il transitoire, comme il a pu l’être ces dernières décennies (voir graphique ci-dessous) ? Ou marque-t-il le début d’une nouvelle phase de dégradation qui pourrait constituer un danger pour les États-Unis, en raison cette fois-ci d’une moindre capacité à mobiliser l’épargne étrangère ?</p>
<h2>Le statut du dollar</h2>
<p>Au cours de la première moitié des années 1980, la réduction des impôts résultant pour l’essentiel de l’application de <a href="https://www.history.com/this-day-in-history/reagan-signs-economic-recovery-tax-act-erta">l’Economic Recovery Act</a> (août 1981), combinée à la hausse de dépenses publiques, avait conduit à une forte augmentation du déficit budgétaire fédéral américain, qui est passé de 2,6 % du PIB en 1980 à 5 % en 1985. Sur la même période, au cours de laquelle est apparu le terme de « déficits jumeaux », le déficit extérieur s’est fortement creusé pour atteindre 3,2 % du PIB en 1985.</p>
<p>Par la suite, les États-Unis ont connu deux autres épisodes similaires. Le premier s’est déroulé au début des années 2000. À l’époque, à côté de déficits courants élevés et persistants, les comptes publics ont connu une dégradation sous l’effet conjugué de la guerre en Irak et de nombreuses réductions fiscales accordées par l’administration de George W. Bush afin de relancer l’activité économique mise à mal par l’éclatement de la bulle Internet.</p>
<p>Le second épisode a débuté en 2017. Alors que l’économie américaine était proche du plein emploi, le président Donald Trump a adopté une politique budgétaire expansionniste, en réduisant les impôts (application de la grande réforme fiscale « Tax cuts and Jobs Act » adoptée en décembre 2017) et en augmentant les dépenses publiques. Cette politique budgétaire procyclique a alors provoqué un creusement du déficit budgétaire et du déficit courant (les deux déficits ont atteint respectivement 4,6 % et 2,2 % du PIB en 2019).</p>
<p><iframe id="M6WA6" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/M6WA6/3/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Jusqu’à présent, les États-Unis ont bénéficié d’un « financement sans pleurs et sans heurts » de leurs déficits jumeaux. Compte tenu du statut de <a href="http://www.cepii.fr/CEPII/fr/publications/em/abstract.asp?NoDoc=12731">monnaie internationale du dollar</a>, les investisseurs internationaux, privés et officiels, ont en effet accepté d’ajouter à leurs portefeuilles des titres du Trésor émis par les États-Unis pour financer leur double déficit.</p>
<p>La hausse des entrées nettes de capitaux aux États-Unis durant les épisodes de déficits jumeaux a ainsi provoqué, du moins au début, une appréciation du dollar qui a entraîné à son tour une dégradation de la balance courante américaine. Les graphiques suivants montrent la corrélation positive entre les déficits jumeaux et le cours du dollar (entre 1980 et 1985, puis entre 2000 et 2002 et enfin entre 2018 et 2020).</p>
<p><iframe id="aQVzu" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/aQVzu/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p><iframe id="qMG2l" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/qMG2l/9/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Le système monétaire international dit de <a href="https://www.research.natixis.com/Site/fr/publication/O6-4CMuqzwBK5Q76CJSmZg%3D%3D">« Bretton-Woods 2 »</a>, en vigueur entre la fin des années 1990 et le début des années 2010, a notamment permis le financement des déficits jumeaux américains par la Chine, et dans une moindre mesure, par les autres pays émergents d’Asie.</p>
<p>De son côté, pour éviter que sa monnaie s’apprécie sous l’effet d’excédents commerciaux colossaux, la Chine a accumulé d’importantes réserves de change en dollars (jusqu’à 4000 milliards de dollars), qui ont été investies majoritairement en actifs en dollars, en particulier en titres du Trésor. Pendant des années, l’empire du Milieu a ainsi constitué le plus gros détenteur de bons du Trésor américains (fin 2013, il en détenait pour 1 312 milliards de dollars, soit 23 % du total détenu hors des États-Unis). La Chine a ainsi contribué de façon significative au financement des déficits courant et budgétaire américains.</p>
<h2>Moins d’investisseurs étrangers</h2>
<p>Depuis le début de la crise sanitaire, la baisse de la part des bons du Trésor détenus par les non-résidents (moins 6 points entre mars 2019 et septembre 2021) était compensée par la hausse de celle détenue par la Réserve fédérale (Fed). Cependant, le processus de réduction progressive des achats d’actifs par la Fed ( <a href="https://www.brookings.edu/blog/up-front/2021/07/15/what-does-the-federal-reserve-mean-when-it-talks-about-tapering/">« tapering »</a>), qui a débuté en novembre dernier, va obliger le Trésor américain à emprunter davantage auprès de ses autres créanciers domestiques et étrangers.</p>
<p>Depuis la fin des années 1980, la tendance est d’ailleurs à la réduction de la part des bons du Trésor détenus par les non-résidents. Après avoir atteint un point haut de 58 % en 2008, cette part a diminué progressivement pour tomber à 33 % en septembre 2021.</p>
<p>Or, l’augmentation de l’émission de bons du Trésor américains sur les marchés, alors que la demande reste inchangée, pourrait provoquer une baisse du cours des obligations, et donc une hausse des taux d’intérêt à long terme. Au cours des prochaines années, le budget fédéral américain devra alors être prioritairement axé sur la réduction du besoin de financement du Trésor.</p>
<p>Des déficits jumeaux demeurant trop élevés et/ou devant persister sur une trop longue période pourraient ainsi, à terme, entamer la confiance des investisseurs internationaux dans les titres libellés en dollars.</p>
<p>Il y a aujourd’hui de bonnes raisons de considérer que, compte tenu de l’importance des déficits jumeaux américains, les variables de taux d’épargne et de solde courant des États-Unis puissent exercer encore pendant un certain temps une influence significative sur les taux longs américains et les taux de change. Selon certains prévisionnistes, ces variables pourraient même à l’avenir peser davantage que les <a href="https://www.groupama-am.com/fr/article/la-thematique-des-deficits-jumeaux-aux-etats-unis-constitue-un-risque-a-la-baisse-sur-le-dollar-et-a-la-hausse-sur-leuro/">mesures de politique monétaire</a>, telle que la fin des politiques accommodantes d’assouplissement quantitatif aux États-Unis et dans la zone euro.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/173780/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michel Dupuy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Aux États-Unis, la double dégradation actuelle des déficits publics et de la balance courante pourrait mettre fin à une période historique de financement aisé auprès des investisseurs étrangers.Michel Dupuy, Professeur d'économie internationale, Université de BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1732932021-12-07T21:24:57Z2021-12-07T21:24:57ZL’affaiblissement de l’euro face au dollar, une tendance qui s’annonce durable<p>Depuis le début de l’année 2021, l’euro s’est affaibli par rapport au dollar américain, passant d’environ 1,23 dollar à son taux de change actuel de 1,13 dollar. Cela représente une baisse d’environ 9 %, ce qui reste significatif, d’autant plus qu’il s’agit des deux principales devises du monde.</p>
<p>La chute s’est également intensifiée en novembre, avec une baisse de 3 % environ. Ce recul a été enregistré dans un contexte marqué par des violences dans les capitales européennes en raison des restrictions sanitaires liées au Covid-19, par des problèmes de migrants à la frontière entre la Biélorussie et la Pologne et par l’amassement de troupes russes à la frontière de l’Ukraine.</p>
<p>Cette baisse doit toutefois être considérée dans un contexte plus large. L’euro reste encore plus fort qu’il y a deux ans, lorsqu’il valait environ 1,10 dollar. Il a également connu une forte volatilité hebdomadaire entre février et avril 2020, au début de la pandémie de Covid-19, oscillant entre 1,07 et 1,13 dollar à ce jour (au 6 décembre), à une époque où de nombreux investisseurs se réfugiaient dans la devise américaine et où l’incertitude régnait quant aux conséquences des confinements.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/435875/original/file-20211206-17-kvpm9l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/435875/original/file-20211206-17-kvpm9l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/435875/original/file-20211206-17-kvpm9l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/435875/original/file-20211206-17-kvpm9l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/435875/original/file-20211206-17-kvpm9l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/435875/original/file-20211206-17-kvpm9l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/435875/original/file-20211206-17-kvpm9l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/435875/original/file-20211206-17-kvpm9l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution de l’euro face au dollar depuis début 2021.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.tradingview.com/chart/?symbol=FX%3AEURUSD">Trading view</a></span>
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</figure>
<p>Il est bien connu qu’il est extrêmement difficile d’expliquer les mouvements des devises sur une base hebdomadaire ou même mensuelle, surtout lorsqu’il s’agit d’économies majeures comme les États-Unis et les pays de la zone euro. Mais il est certain que nous devons examiner ce qui se passe dans les deux régions, et pas seulement dans l’une ou l’autre. En utilisant cette idée simple, il existe plusieurs explications à la récente dépréciation de l’euro.</p>
<h2>Différences d’inflation</h2>
<p>La première explication est liée au fait que la Réserve fédérale américaine (Fed) et la Banque centrale européenne (BCE) stimulent leurs économies en recourant à l’assouplissement quantitatif (<em>quantitative easing</em>, ou QE), qui consiste essentiellement à injecter des liquidités en rachetant des actifs financiers comme des obligations d’État auprès des banques et d’autres grands investisseurs. Depuis le début de la pandémie, les deux banques centrales ont accéléré cette opération de manière intensive.</p>
<p>Toutefois, l’inflation annuelle aux États-Unis atteignant désormais un <a href="https://news.sky.com/story/us-inflation-hits-highest-level-since-1990-at-6-2-as-food-and-fuel-prices-surge-12465340">niveau de 6,2 %</a>, contre <a href="https://www.reuters.com/world/europe/euro-zone-oct-inflation-confirmed-41-yy-energy-spike-2021-11-17/">4,1 % dans la zone euro</a>, la Fed pourrait <a href="https://www.reuters.com/business/cop/dollar-hovers-near-peaks-fed-heads-taper-2021-11-03/">mettre fin plus tôt que prévu à ses achats d’actifs</a> pour limiter l’envolée des prix. En effet, l’augmentation de la masse monétaire reste susceptible d’alimenter l’inflation.</p>
<p>D’ailleurs, la Fed a déjà commencé récemment à ralentir le rythme de l’assouplissement quantitatif (<em>tapering</em>) en vue de l’arrêter au second semestre 2022. D’autre part, la BCE <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2021-10-06/ecb-said-to-study-new-bond-buying-plan-for-when-crisis-tool-ends">réfléchit à un nouveau programme de QE</a> lorsque l’actuel, d’un montant global de 2 200 milliards de dollars, prendra fin en mars 2022.</p>
<p>Dans ce contexte, on s’attend de plus en plus à ce que les États-Unis commencent à <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2021-11-18/jpmorgan-economists-now-predict-fed-to-raise-rates-in-september">relever leurs taux d’intérêt à partir de la mi-2022</a> pour juguler l’inflation. De son côté, la présidente de la BCE, Christine Lagarde, vient d’indiquer clairement que le relèvement de ses taux ne devrait pas avoir lieu <a href="https://www.cnbc.com/2021/11/19/ecbs-lagarde-says-a-rate-hike-unlikely-for-2022.html">avant au moins 2023</a>.</p>
<p>Ces différences émergentes dans les positions de politique monétaire des États-Unis et de la zone euro ont jusqu’alors clairement favorisé un renforcement du dollar, puisque l’assouplissement quantitatif et des taux d’intérêt bas ont tendance à faire déprécier une monnaie.</p>
<h2>Covid et politique</h2>
<p>Un deuxième facteur déterminant a été la force relative récente de l’économie américaine, par rapport à la zone euro, dans son redressement après la pandémie. Pour 2021, le Fonds monétaire international prévoit une <a href="https://www.imf.org/en/Publications/WEO/Issues/2021/10/12/world-economic-outlook-october-2021">croissance de 6 % pour les États-Unis</a>, contre 5 % pour la zone euro, tandis qu’en 2022, les prévisions sont respectivement de 5,2 % et 4,3 %. Là encore, cela laisse présager la force du dollar.</p>
<p>Il semble peu probable que le Covid-19 fasse l’objet d’autres mesures de verrouillage aux États-Unis (même si le <a href="https://www.nytimes.com/2021/11/22/us/us-covid-cases-rising-thanksgiving.html?mc_cid=6d76cfd520&mc_eid=c825ac9090">nombre de cas augmente à nouveau</a>), mais pas dans la zone euro, où le taux d’infection a fortement augmenté ces dernières semaines dans des pays comme l’Allemagne, la France, les Pays-Bas, l’Autriche et la Belgique. <a href="https://www.bbc.com/news/world-europe-59369488">L’Autriche</a> est à nouveau en quarantaine, et <a href="https://news.sky.com/story/covid-19-germany-may-follow-austria-into-full-lockdown-as-coronavirus-cases-hit-new-high-12472233">d’autres pays de la zone euro pourraient suivre</a>.</p>
<p>Une plus grande stabilité politique constitue enfin un dernier moteur de la récente force du dollar. L’administration Biden dispose encore de trois ans de mandat et a récemment réussi à faire adopter son plan de relance <a href="https://www.theguardian.com/us-news/2021/nov/19/house-democrats-pass-biden-expansive-build-back-better-policy-plan"><em>Build Back Better</em></a> de 1 700 milliards de dollars américains.</p>
<p>En revanche, les pays de la zone euro sont actuellement confrontés à une période de plus grande instabilité politique. L’Allemagne voit les 16 années de stabilité relative sous Angela Merkel toucher à leur fin. En France, l’éventuelle victoire d’un candidat populiste aux prochaines élections présidentielles <a href="https://www.thetimes.co.uk/article/french-election-2022-macron-is-sitting-pretty-but-sitting-presidents-often-tumble-fqfb6t5g0">inquiète également les investisseurs</a>, tout comme les frictions commerciales persistantes post-Brexit entre l’Union européenne et le Royaume-Uni.</p>
<p>Tout cela se produit à un moment où le <a href="https://www.businessinsider.com/russian-invasion-of-ukraine-a-real-possibility-russia-watchers-warn-2021-11?r=US&IR=T">renforcement des forces de la Russie à proximité de l’Ukraine</a> soulève la perspective d’un conflit militaire à la lisière de l’Europe – sans compter que la Russie a déjà <a href="https://www.reuters.com/markets/europe/living-hand-mouth-europes-gas-crunch-shows-little-sign-easing-2021-11-22/">limité l’approvisionnement en gaz</a> de la région et que l’un de ses principaux pipelines traverse l’Ukraine. En outre, d’importantes <a href="https://www.buzzfeednews.com/article/skbaer/antivax-europe-covid-mandates">manifestations anti-vaccins</a> ont eu lieu aux Pays-Bas, en Allemagne, en France ou encore en Italie, et les gouvernements européens sont désormais soumis à de <a href="https://thehill.com/opinion/finance/580976-is-europe-headed-toward-another-debt-crisis">plus en plus de pression</a> pour maîtriser leurs dépenses.</p>
<p>Ainsi, bien que les mouvements monétaires à court terme soient très difficiles à prévoir, il y a de nombreuses raisons de croire que la récente période de faiblesse de l’euro va se poursuivre. Cela rend les importations dans la zone euro plus chères, notamment l’énergie. En outre, si cela présente certains avantages pour un grand exportateur comme l’Allemagne, l’affaiblissement de la devise européenne sape également la crédibilité de la zone euro en tant que force économique mondiale.</p>
<p>Ce qui pourrait changer la donne, c’est que la BCE reconnaisse l’existence d’un problème d’inflation auquel il faut s’attaquer, en mettant fin à son expérience d’assouplissement quantitatif et en entamant le processus de relèvement des taux d’intérêt. Mais cela ne semble pas à l’ordre du jour.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/173293/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Keith Pilbeam ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les différents rythmes d’inflation des deux côtés de l’Atlantique et les réponses monétaires envisagées face à la hausse des prix devraient entretenir la dépréciation de la devise européenne.Keith Pilbeam, Professor of Economics, City, University of LondonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1720682021-11-21T16:49:50Z2021-11-21T16:49:50ZRécession économique française : le creux est passé, mais les effets perdurent<p>Le comité de datation des cycles du National Bureau of Economic Research (<a href="https://www.nber.org/news/business-cycle-dating-committee-announcement-july-19-2021">NBER</a>) a annoncé, en juillet 2021, que l’économie américaine était sortie de récession en avril 2020 après avoir connu un pic deux mois auparavant. Il s’agit ainsi de la récession la plus courte jamais connue par les États-Unis. Qu’en est-il en France ? Peut-on considérer que la crise économique liée au Covid-19 est derrière nous ?</p>
<p>Selon le Comité de datation des cycles de l’économie française (<a href="https://www.afse.fr/fr/cycles-eco-500215">CDCEF</a>) de l’Association française de science économique (<a href="https://www.afse.fr/">AFSE</a>), dont l’objectif est d’établir une chronologie historique des points de retournement du cycle économique de la France et de la maintenir à jour, il convient de répondre par l’affirmative à cette question.</p>
<p>Rappelons tout d’abord que le cycle économique se définit comme étant la succession de phases de baisse du niveau d’activité, c’est-à-dire de croissance économique négative (récessions), et de phases de hausse de ce même niveau, c’est-à-dire de croissance positive (expansions). Ces différentes périodes sont délimitées par des creux (plus bas niveau d’activité) et des pics (plus haut niveau d’activité), correspondant aux points de retournement du cycle.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1408709632181276675"}"></div></p>
<p>Toute la difficulté réside dans la datation de tels points de retournement dans la mesure où le cycle n’est, par définition, pas observable. À cette fin, il est nécessaire de recourir à <a href="https://www.afse.fr/global/gene/link.php?doc_id=428&fg=1">diverses approches</a> qui sont, pour la plupart, statistiques et économétriques. La méthodologie retenue par le CDCEF est originale au sens où elle mêle approches statistiques et économétriques, d’une part, et approche historique, d’autre part.</p>
<p>La datation des points de retournement s’effectue ainsi via une évaluation des critères de durée, d’amplitude et de diffusion de la phase du cycle (règle « DAD ») et repose sur <a href="https://www.afse.fr/global/gene/link.php?doc_id=428&fg=1">deux piliers</a> : un pilier quantitatif basé sur des approches économétriques et un pilier qualitatif basé sur une approche narrative (<a href="https://www.afse.fr/fr/cycles-eco/membres-du-comite-500218">dire d’experts</a>).</p>
<h2>Un point bas au deuxième trimestre 2020</h2>
<p>Réuni le 25 octobre 2021, le CDCEF, qui avait préalablement identifié le pic du cycle économique français au <a href="https://theconversation.com/a-partir-de-quand-pourra-t-on-dire-que-la-recession-est-derriere-nous-163108">quatrième trimestre 2019</a>, s’est accordé pour acter le creux au deuxième trimestre 2020.</p>
<p>Si une telle conclusion peut sembler logique, elle n’était toutefois pas évidente en raison de l’incertitude qui domine encore aujourd’hui. Face au caractère inédit de ce cycle, le CDCEF avait délibérément choisi d’attendre avant de se déterminer car, depuis le premier confinement de mars 2020, l’activité économique est restée dominée par les évolutions de l’épidémie de Covid-19 et des mesures sanitaires l’accompagnant.</p>
<p>Les vagues successives de la pandémie auraient ainsi pu <a href="https://www.lesechos.fr/economie-france/conjoncture/comment-le-covid-a-bouleverse-les-cycles-economiques-1360191">décaler au-delà du deuxième trimestre 2020</a> le point bas du cycle. En général, les comités de datation mettent beaucoup plus de temps pour identifier les sorties de récession (par exemple 15 mois en moyenne pour le NBER) que les débuts (7 mois en moyenne pour le NBER). À cet égard, au niveau de la zone euro, le comité de datation du Center for Economic Policy Research (<a href="https://eabcn.org/dc/news">CEPR</a>) n’a pas encore daté la sortie de récession dans la mesure où la situation reste très hétérogène selon les pays.</p>
<p>L’économie française a connu un fort rebond au troisième trimestre 2020, mais la croissance a été proche de zéro en cumul sur les trois trimestres suivants – affichant même une valeur négative au dernier trimestre 2020. La confirmation de la reprise à l’été 2021 (le PIB a progressé de 3 % au troisième trimestre 2021, selon les <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/5760961#:%7E:text=Le%20produit%20int%C3%A9rieur%20brut%20(PIB,par%20rapport%20au%20T4%202019).">dernières données des comptes nationaux fournies</a>) par l’Insee le 29 octobre 2021, permet toutefois de considérer que l’économie se situe bien dans une phase de rattrapage de l’activité depuis le troisième trimestre 2020 (voir graphique 1).</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/432351/original/file-20211117-13-1jfyqtx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/432351/original/file-20211117-13-1jfyqtx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/432351/original/file-20211117-13-1jfyqtx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=247&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/432351/original/file-20211117-13-1jfyqtx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=247&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/432351/original/file-20211117-13-1jfyqtx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=247&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/432351/original/file-20211117-13-1jfyqtx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=311&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/432351/original/file-20211117-13-1jfyqtx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=311&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/432351/original/file-20211117-13-1jfyqtx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=311&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Graphique 1 : PIB et cycle économique de la France. Note : les barres grisées correspondent aux périodes de récession estimées par le CDCEF. Le PIB est exprimé en milliards d’euros constants (PIB trimestriel en volume aux prix de l’année précédente chaînés).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Insee, données disponibles au 29 octobre 2021</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ainsi, même si les confinements de novembre 2020 et d’avril 2021 ont pesé sur l’activité, la méthodologie retenue par le CDCEF permet d’affirmer que le point bas du cycle a eu lieu au deuxième trimestre 2020. En effet, parmi les diverses variables macroéconomiques considérées, l’investissement total des entreprises, l’emploi et le taux d’utilisation des capacités de production dans l’industrie sont restés sur une croissance continue depuis le deuxième trimestre 2020 ; la production industrielle et les heures travaillées ayant quant à elles connu une plus forte volatilité au cours de cette période.</p>
<p>En outre, si l’on s’intéresse à la diffusion de la phase de rattrapage au sein de l’économie, il ressort que seuls cinq secteurs sur les quinze secteurs principalement marchands non agricoles ont connu une baisse entre le troisième trimestre 2020 et le premier trimestre 2021.</p>
<p>Ces secteurs, qui sont ceux qui ont été les plus touchés par les confinements de novembre 2020 et d’avril 2021 (commerce, transport, hôtellerie et restauration, services aux ménages et industrie des matériels de transport), représentent moins de 20 % du PIB. La grande majorité des secteurs principalement marchands non agricoles, représentant près de 60 % de l’activité économique en 2019, ont à l’inverse enregistré une croissance au cours de cette période.</p>
<h2>Une récession historique, mais courte</h2>
<p>Le choc qu’a connu l’économie française en 2020 est inédit à plusieurs égards. La phase du pic au creux du cycle aura été la plus courte depuis les années 1970, puisque sa durée est de deux trimestres, contre une moyenne de quatre trimestres pour les quatre précédents épisodes de récession identifiés par le CDCEF depuis 1970 (chocs pétroliers de 1974-75 et 1980, cycle d’investissement de 1992-93 et Grande Récession de 2008-09 engendrée par la crise financière).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/432352/original/file-20211117-27-4lq5mk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/432352/original/file-20211117-27-4lq5mk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/432352/original/file-20211117-27-4lq5mk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/432352/original/file-20211117-27-4lq5mk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/432352/original/file-20211117-27-4lq5mk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/432352/original/file-20211117-27-4lq5mk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/432352/original/file-20211117-27-4lq5mk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/432352/original/file-20211117-27-4lq5mk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Tableau 1 : Datation du cycle économique de la France par le CDCEF. Note : la durée de la phase baissière est exprimée en trimestres, l’amplitude en % et la sévérité est définie par l’équation suivante : | 0,5 × Durée × Amplitude |. La date t du pic correspond à la fin de la période d’expansion (c.-à-d., la récession commence en t+1). La date t du creux correspond à la fin de la période de récession (c.-à-d., l’expansion commence en t+1). * Par convention, les dates des deux derniers points de retournement sont considérées comme provisoires.</span>
<span class="attribution"><span class="source">CDCEF (Octobre 2021)</span></span>
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</figure>
<p>Cependant, cette récession reste de loin la plus marquée en termes d’amplitude et de sévérité puisque la perte de PIB est de 18,4 % entre le pic et le creux, contre une moyenne de 1,6 % lors des précédentes récessions (voir tableau 1).</p>
<p>Si le creux du cycle lié à la pandémie de Covid-19 est désormais derrière nous, peut-on pour autant considérer que les effets de la crise ont été totalement absorbés ? Si les prévisions de croissance pour l’année 2021 sont plutôt bonnes (<a href="https://www.imf.org/fr/News/Articles/2021/11/09/mcs-France-Staff-Concluding-Statement-2021-Article-IV-Mission">6,75 % selon le FMI</a>), il ne faut oublier que ce rebond intervient après une baisse historique d’environ 8 % en 2020.</p>
<p>De plus, les études empiriques soulignent le caractère souvent dévastateur des récessions sur la croissance de long terme : ce sont les <a href="https://econpapers.repec.org/bookchap/nbrnberch/4245.htm">effets d’hystérèse</a> mis en évidence dans les années 1980, par exemple par les économistes Olivier Blanchard et Lawrence Summers. Il est maintenant bien établi empiriquement que les cycles peuvent affecter les facteurs de la croissance potentielle des économies, notamment les <a href="https://voxeu.org/article/persistence-covid-induced-global-recession">performances à long terme du marché du travail</a>. La France ne semble pas échapper à ce phénomène puisque le PIB est passé d’une croissance moyenne d’environ 1,3 % par trimestre sur la période 1970-1974 à une croissance de l’ordre de 0,3 % par trimestre sur la période 2009-2019.</p>
<p>Au total, même si le point bas du cycle lié à la pandémie de Covid-19 est derrière nous et que l’économie française est à ce jour dans une phase de rattrapage de son activité, les expériences passées nous enseignent qu’il convient de rester vigilants sur la croissance future, notamment s’agissant du support des politiques économiques à l’activité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/172068/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie Mignon est conseiller scientifique au CEPII, membre du Cercle des économistes, présidente de la section 05 (sciences économiques) du CNU et membre du CDCEF.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Laurent Ferrara est membre du comité directeur de l'Association Française de Science Economique. </span></em></p>Le rebond économique post-Covid reste vigoureux, mais les conséquences de la brutale chute de l’activité au deuxième trimestre 2020 continuent de plomber la croissance.Valérie Mignon, Professeure en économie, Chercheure à EconomiX-CNRS, Conseiller scientifique au CEPII, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLaurent Ferrara, Professeur d’Economie Internationale, SKEMA Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1718502021-11-16T18:50:35Z2021-11-16T18:50:35ZFaut-il redouter une aggravation des déséquilibres de l’économie mondiale post-Covid ?<p>L’intensification de la <a href="https://www.cairn.info/revue-reflets-et-perspectives-de-la-vie-economique-2002-1-page-115.htm">globalisation des économies</a> et de l’intégration des marchés financiers au niveau international ont favorisé l’émergence, l’accroissement et la persistance des déséquilibres de l’économie mondiale. Lorsqu’ils sont durablement <a href="https://www.imf.org/external/french/np/blog/2018/072418f.htm">excessifs</a>, c’est-à-dire déconnectés des fondamentaux économiques censés guider leur évolution, ces déséquilibres deviennent une menace pour l’économie mondiale et sa stabilité, notamment au niveau financier.</p>
<p>Pour nombre d’économistes, tels l’Italien <a href="https://www.ecb.europa.eu/press/key/date/2008/html/sp081209.en.html">Lorenzo Bini Smaghi</a> ou les Américains <a href="https://eml.berkeley.edu/%7Eobstfeld/santabarbara.pdf">Maurice Obstfeld et Kenneth Rogoff</a>, ces déséquilibres étaient ainsi à l’origine de la crise économique et financière de 2007-2008. Le suivi de l’évolution de ces déséquilibres mondiaux et de leur niveau, resté élevé malgré les efforts visant à les réduire, fait donc l’objet de toutes les attentions de la part de la communauté internationale.</p>
<p>À l’heure actuelle, la question est d’autant plus préoccupante que la crise du Covid-19 s’est accompagnée de <a href="https://theconversation.com/plan-biden-relance-americaine-consequences-mondiales-161370">déficits budgétaires monstres</a> dans de nombreux pays développés. Si le spectre de déséquilibres mondiaux massifs surgit à nouveau aujourd’hui, faut-il vraiment les craindre ?</p>
<h2>La communauté internationale mobilisée</h2>
<p>Sous l’impulsion de la globalisation des économies à partir des années 1990, certains pays comme les États-Unis ont accumulé des déficits de transactions courantes explosifs tandis que d’autres – Japon, pays émergents d’Asie de l’Est et certains pays exportateurs de pétrole – enregistraient des excédents courants presque insolents.</p>
<p>Ces déséquilibres des comptes de transactions courantes, qualifiés de déséquilibres globaux ou mondiaux, sont mesurés par la somme, en valeur absolue, des excédents et déficits du solde des transactions courantes à l’échelle mondiale. Alors qu’ils représentaient, selon les données du Fonds monétaire international (FMI), seulement 2 % du produit intérieur brut (PIB) mondial au début des années 1990, ils ont augmenté continuellement pour atteindre <a href="https://www.imf.org/en/Publications/WEO">5,5 % du PIB mondial en 2006</a>.</p>
<p>Le solde des transactions courantes pouvant également être exprimé comme la différence entre l’épargne et l’investissement, les déséquilibres globaux sont aussi le reflet des besoins et des capacités de financement des économies à travers le monde. L’épargne des pays excédentaires ayant fortement alimenté la bulle immobilière américaine des années 2000, les déséquilibres mondiaux sont ainsi accusés d’avoir fortement contribué à la crise économique et financière de 2007-2008.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1397639006700048384"}"></div></p>
<p>Si cette crise financière a mis un coup d’arrêt à la progression des déséquilibres mondiaux, la communauté internationale s’est aussi mobilisée depuis cette date, notamment à travers les sommets du G20, pour tenter de contenir leur niveau.</p>
<p>Les déséquilibres globaux sont le fait de pays débiteurs (respectivement créditeurs), acteurs de l’amplification des déficits (respectivement des excédents) mondiaux des transactions courantes. Les premiers absorbent l’essentiel de l’épargne mondiale, tandis que les seconds l’alimentent.</p>
<p>Les États-Unis sont de loin le <a href="https://www.imf.org/en/Publications/WEO">principal acteur des déficits mondiaux</a> (voir graphique 1). À eux seuls, ils représentaient les deux tiers des déficits des transactions mondiales avant la crise financière, entre 2000 et 2006. Cette part a néanmoins baissé depuis 2007, se situant autour de 38 % en moyenne sur la période 2007-2019. Le Royaume-Uni se place au deuxième rang des principaux débiteurs depuis 2000, avec une contribution moyenne de 8 % aux déficits mondiaux des transactions courantes.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/431923/original/file-20211115-15-nmcjm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/431923/original/file-20211115-15-nmcjm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/431923/original/file-20211115-15-nmcjm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=393&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/431923/original/file-20211115-15-nmcjm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=393&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/431923/original/file-20211115-15-nmcjm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=393&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/431923/original/file-20211115-15-nmcjm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=494&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/431923/original/file-20211115-15-nmcjm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=494&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/431923/original/file-20211115-15-nmcjm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=494&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Graphique 1 : Contributions aux déséquilibres globaux (solde des transactions courantes, en milliards de dollars américains). Notes : PEP = Pays exportateurs de pétrole, USA = États-Unis, UK = Royaume-Uni, BIT = Brésil-Inde-Turquie, Déficits = Déficits mondiaux, Excédents = Excédents mondiaux.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Calculs des auteurs à partir des données issues du FMI</span></span>
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</figure>
<p>À l’inverse, les excédents des transactions courantes sont principalement le fait du trio Allemagne-Chine-Japon dont les contributions, au cours des deux dernières décennies, ont été respectivement de 15,2 %, 12,7 % et 12,3 % (voir graphique 1). Depuis 2011, l’Allemagne se situe en tête de peloton et compte pour 20 % des excédents courants mondiaux depuis 2015. Les grands pays pétroliers comme la Russie, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, sont aussi des acteurs significatifs de ces excédents mondiaux.</p>
<h2>Rupture européenne</h2>
<p>Avant la crise financière de 2007-2008, l’Union européenne dans son ensemble (Europe des Vingt-Sept) ne jouait qu’un rôle marginal dans les déséquilibres globaux, et ce, malgré la dynamique excédentaire de l’économie allemande dès 2002. La <a href="https://theconversation.com/conversation-avec-sophie-piton-la-zone-euro-a-t-elle-perdu-lequilibre-74815">rupture</a> intervient en 2008, alors que le déficit des transactions courantes des 27 États membres s’élevait à 120 milliards de dollars américains (334 milliards hors Allemagne).</p>
<p>Depuis, le solde des transactions courantes de l’UE n’a cessé de grimper pour atteindre, après un léger fléchissement, un excédent de 450 milliards de dollars américains (160 milliards, hors Allemagne) en 2019, avant la crise du Covid-19 (voir graphique 2). Ainsi, avec sa locomotive allemande, l’UE a financé 30 % des besoins de financement à l’échelle mondiale entre 2012 et 2020.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/431925/original/file-20211115-27-c3j9zn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/431925/original/file-20211115-27-c3j9zn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/431925/original/file-20211115-27-c3j9zn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/431925/original/file-20211115-27-c3j9zn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/431925/original/file-20211115-27-c3j9zn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/431925/original/file-20211115-27-c3j9zn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/431925/original/file-20211115-27-c3j9zn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/431925/original/file-20211115-27-c3j9zn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Graphique 2 : Dynamique du solde des transactions courantes de l’Europe.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Calculs des auteurs à partir des données issues du FMI</span></span>
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<p>Outre l’Allemagne, cette nouvelle dynamique est portée par les Pays-Bas, l’Italie et, dans une moindre mesure, le Danemark, l’Espagne et la Suède. Cette tendance <a href="https://www.imf.org/fr/Publications/WEO/Issues/2021/10/12/world-economic-outlook-october-2021">devrait se poursuivre</a> pour l’Union européenne, selon les données du FMI sur les perspectives de l’économie mondiale.</p>
<h2>Effet Covid</h2>
<p>En 2019, les déséquilibres de l’économie mondiale représentaient 2,8 % du PIB mondial, soit le plus bas niveau observé depuis les 20 dernières années. La correction entamée depuis la crise financière de 2007-2008 y a fortement contribué.</p>
<p>Cependant, ces déséquilibres pourraient à nouveau s’emballer sous l’impulsion de plusieurs facteurs : les déficits budgétaires considérables occasionnés par les dépenses publiques en réponse à la crise du Covid-19 et ses conséquences, la reprise du commerce international et le rebond de l’activité économique mondiale.</p>
<p>Pourtant, selon les données du FMI, les déséquilibres globaux <a href="https://www.imf.org/fr/Publications/WEO/Issues/2021/10/12/world-economic-outlook-october-2021">devraient rester contenus</a> malgré une dynamique haussière depuis 2019. Ils devraient ainsi représenter, en 2020, 3,15 % et, en 2021, 3,26 % du PIB mondial, avant qu’une nouvelle baisse ne s’installe à partir de l’année 2022.</p>
<p>Si l’ampleur actuelle des déséquilibres globaux reste sans commune mesure avec celle qui prévalait avant la crise financière de 2007-2008, les tendances des déficits budgétaires, y compris celles observées avant la crise du Covid-19, peuvent être source d’inquiétude. En effet, alors que le solde des transactions courantes est globalement équilibré au niveau international sur les deux dernières décennies, les déficits budgétaires mondiaux, portés par le déficit américain, ont explosé.</p>
<p>Passés de moins de 1 % du PIB mondial en 2000 à 3,6 % en 2019, ils ont, sous l’effet de la crise, dépassé la barre des 10 % en 2020. Bien qu’une correction soit attendue à partir de l’année 2021, les déséquilibres budgétaires devraient rester largement supérieurs à 3 % du PIB mondial en raison du rôle sans cesse accru des marchés financiers et des acteurs privés dans le financement des déficits publics. Dans un contexte d’incertitude exacerbée sur les marchés financiers mondiaux, une telle situation, si elle perdure, pourrait être préjudiciable pour les pays débiteurs.</p>
<h2>Comment contenir ces déséquilibres ?</h2>
<p>Si la crise financière de 2007-2008 avait réduit l’ampleur du déficit courant américain, la crise liée à la pandémie de Covid-19 l’a accentuée depuis 2020. L’inversion de cette tendance pourrait impliquer une baisse du dollar ; une dépréciation de la devise américaine permettant en effet aux États-Unis de dégager des excédents et de rembourser leur dette extérieure.</p>
<p>Au niveau européen, un accroissement des dépenses d’investissement dans les pays excédentaires comme l’Allemagne permettrait de relancer la demande interne. Un tel scénario pourrait également s’appliquer dans le cas du Japon en vue de limiter ses excédents de transactions courantes.</p>
<p>L’évolution du cours de la devise chinoise mérite aussi d’être suivie avec attention. L’appréciation du yuan depuis 2011 a en effet contribué à la résorption des déséquilibres globaux au cours des dernières années. En laissant les marchés déterminer le cours de sa monnaie, la Chine pourrait ainsi jouer un rôle clé dans la maîtrise des déséquilibres mondiaux à venir.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/171850/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie Mignon est conseiller scientifique au CEPII, membre du Cercle des économistes et présidente de la section 05 (sciences économiques) du CNU.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Blaise Gnimassoun ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les dépenses publiques pour faire face à la crise pourraient infléchir la trajectoire de correction des écarts entre les pays excédentaires et les pays déficitaires.Valérie Mignon, Professeure en économie, Chercheure à EconomiX-CNRS, Conseiller scientifique au CEPII, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresBlaise Gnimassoun, Maître de conférences en sciences économiques, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1712272021-11-04T13:34:05Z2021-11-04T13:34:05ZCombien de tonnes d’émissions de CO₂ pouvons-nous encore nous permettre ?<p><a href="https://essd.copernicus.org/preprints/essd-2021-386/">Une nouvelle étude</a>, publiée ce jeudi 4 novembre 2021, montre que les émissions mondiales de dioxyde de carbone (CO<sub>2</sub>) ont rebondi après une baisse liée au Covid-19.</p>
<p>Elles devraient ainsi atteindre pour 2021 des niveaux proches de ceux d’avant la pandémie. Un constat inquiétant à l’heure où les dirigeants du monde entier sont réunis à Glasgow pour la COP26, dans une nouvelle tentative d’éviter un réchauffement délétère de la planète.</p>
<p>Ces résultats sont le fruit des travaux du <a href="https://www.globalcarbonproject.org/carbonbudget">Global Carbon Project</a>, un consortium de scientifiques du monde entier qui produit, collecte et analyse des informations sur les gaz à effet de serre.</p>
<p>La reprise rapide des émissions de CO<sub>2</sub>, après la <a href="https://theconversation.com/global-emissions-are-down-by-an-unprecedented-7-but-dont-start-celebrating-just-yet-151757">forte baisse</a> de l’année dernière imputable au contexte pandémique, n’est pas une surprise. La relance économique mondiale très soutenue a entraîné une hausse massive de la demande d’énergie, sollicitant un système énergétique mondial toujours fortement dépendant des combustibles fossiles.</p>
<p>Le plus inquiétant concerne la tendance à la hausse des émissions de CO<sub>2</sub> imputable au pétrole et du gaz sur le long terme ; la croissance des émissions liées au charbon en 2021 est également préoccupante. Tout cela ne nous rapproche pas de la neutralité carbone à l’horizon 2050.</p>
<h2>39 milliards de tonnes de CO₂ attendues pour 2021</h2>
<p>En 2020, les émissions mondiales de CO<sub>2</sub> provenant des combustibles fossiles ont diminué de 5,4 % par rapport à 2019. Cette année, elles devraient augmenter d’environ 4,9 % par rapport aux niveaux de 2020 pour atteindre 36,4 milliards de tonnes. Ce qui nous ramène presque aux niveaux de 2019.</p>
<p>Pour 2021, il faudra ajouter 2,9 milliards de tonnes d’émissions de CO<sub>2</sub>, correspondant aux effets des activités humaines impactant les terres (déforestation, dégradation des sols, végétalisation…).</p>
<p>Nous atteignons ainsi un total prévisionnel de plus de 39 milliards de tonnes de CO<sub>2</sub> pour 2021.</p>
<p>La croissance rapide des émissions s’explique par la demande accrue d’énergie, à mesure que l’économie mondiale repart après la pandémie – les différents plans de relance économique dans le monde atteignant les <a href="https://www.f4b-initiative.net/post/majority-of-17-2-trillion-covid-stimulus-packages-doing-more-harm-than-good-to-environment">17,2 billions de dollars</a>.</p>
<p>Cette année, quel que soit le combustible fossile utilisé – charbon, pétrole ou gaz naturel –, toutes les émissions de CO<sub>2</sub> sont à la hausse.</p>
<p>Notons que celles imputables au charbon et au gaz naturel auront davantage augmenté en 2021 qu’elles n’ont diminué en 2020. Si les émissions liées au charbon étaient en baisse avant que le Covid frappe début 2020, elles sont reparties à la hausse ces derniers mois. Quant aux émissions liées à l’utilisation mondiale du gaz, elles ont retrouvé la tendance haussière observée avant la pandémie.</p>
<p>Les émissions de CO<sub>2</sub> provenant de l’utilisation mondiale du pétrole restent bien inférieures aux niveaux d’avant la pandémie, mais elles risquent d’augmenter dans les années à venir, le transport routier et l’aviation se relançant après les restrictions liées au Covid.</p>
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<span class="caption">Émissions mondiales de CO₂ pour la période 1960-2020.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Global Carbon Project</span></span>
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<h2>La Chine et l’Inde tirent les émissions vers le haut</h2>
<p>Les émissions de la Chine se sont redressées très rapidement avec une augmentation de 0,4 milliard de tonnes en 2021. Ce pays fait partie des rares où les émissions ont augmenté en 2020 (de 1,4 %) ; la croissance prévue cette année devrait être de 4 %.</p>
<p>En 2021, les émissions de CO<sub>2</sub> de la Chine devraient ainsi être supérieures de 5,5 % à celles de 2019, pour atteindre 11,1 milliards de tonnes. En 2020, la Chine détenait 31 % des émissions mondiales.</p>
<p>Les émissions de charbon dans ce pays devraient augmenter de 2,4 % cette année. Si cette hausse se réalise, elle correspondrait alors à ce qui a été décrit en 2013 comme « le pic des émissions de charbon » pour le géant asiatique.</p>
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<span class="caption">Émissions régionales pour la période 2019-2021.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Global Carbon Project</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les émissions de CO<sub>2</sub> de l’Inde devraient également augmenter avec une hausse relative de 12,6 % in 2021 après une baisse de 7,3 % en 2020. Les émissions de cette année devraient être supérieures de 4,4 % au niveau de 2019, atteignant 2,7 milliards de tonnes. L’Inde a représenté 7 % des émissions mondiales en 2020.</p>
<p>Les émissions des États-Unis et de l’Union européenne devraient augmenter de 7,6 % cette année. Cela conduirait respectivement à des émissions de 3,7 % et 4,2 %, inférieures aux niveaux de 2019.</p>
<p>Les États-Unis et l’Union européenne représentent 14 % et 7 % des émissions mondiales en 2020.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/430216/original/file-20211104-17-11ly8l4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les différents types d’émissions de CO₂ pour la France pour la période 1960-2020.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.globalcarbonproject.org/carbonbudget">Global Carbon Project</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les émissions en France sont en baisse depuis le milieu des années 2000, celles de 2020 ayant chuté dramatiquement suite à la pandémie. Pour 2021, les données ne sont pas encore disponibles ; si on s’attend à un rebond, les émissions françaises devraient toutefois rester à un niveau inférieur aux conditions pré-pandémie.</p>
<p>Les émissions du reste du monde (en prenant en compte la part des transports internationaux, et tout particulièrement le transport aérien) devraient augmenter de 2,9 % cette année, mais resteraient inférieures de 4,2 % au niveau de 2019. Ensemble, ces pays représentent 59 % des émissions mondiales.</p>
<h2>La boussole des budgets carbone</h2>
<p>Notre constat est clair : les variations relativement importantes des émissions au cours des deux dernières années n’ont eu aucun effet perceptible sur la vitesse à laquelle le CO<sub>2</sub> s’accumule dans l’atmosphère.</p>
<p>Les concentrations de CO<sub>2</sub>, et le réchauffement climatique associé, sont déterminés par l’accumulation de gaz à effet de serre – en particulier le CO<sub>2</sub> – depuis le début de l’ère industrielle. Cette accumulation s’est accélérée au cours des dernières décennies.</p>
<p>Pour empêcher la poursuite du réchauffement climatique, les émissions mondiales de CO<sub>2</sub> doivent cesser ou atteindre le niveau « net zéro » – signifiant que toute émission restante de CO<sub>2</sub> devrait être compensée par l’élimination d’une quantité équivalente dans l’atmosphère.</p>
<p>Dans la lutte contre le dérèglement climatique, les « budgets carbone » représentent un moyen utile pour mesurer la quantité de CO<sub>2</sub> pouvant encore être émise, relativement à un niveau donné de réchauffement climatique.</p>
<p>Dans <a href="https://essd.copernicus.org/preprints/essd-2021-386/">notre nouvelle étude</a>, nous avons ainsi mis à jour le budget carbone en nous appuyant sur le dernier rapport du GIEC <a href="https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg1/downloads/report/IPCC_AR6_WGI_SPM.pdf">paru en août 2021</a>.</p>
<p>À partir de janvier 2022, si nous voulons atteindre l’objectif d’une limitation à 1,5 °C de réchauffement global pour le XXI<sup>e</sup> siècle, nous pourrons encore émettre 420 milliards de tonnes de CO<sub>2</sub> supplémentaires au niveau mondial ; ce qui correspond à 11 ans d’émissions en prenant 2021 comme année de référence.</p>
<p>Pour limiter ce réchauffement à 2 °C, le budget carbone mondial s’élèvera à 1 270 milliards de tonnes de CO<sub>2</sub> supplémentaires, soit 32 ans d’émissions au rythme actuel.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=443&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=443&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/429886/original/file-20211103-19-fl69o8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=443&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les budgets carbone restants pour limiter le réchauffement à 1,5 C et 2 , à partir des données du GIEC d’août 2021.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Global Carbon Project</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces budgets sont notre boussole vers des émissions nettes nulles. Conformément à l’engagement pris par de <a href="https://eciu.net/netzerotracker">nombreux pays</a> d’atteindre des émissions nettes nulles d’ici 2050, les émissions de CO<sub>2</sub> doivent en conséquence diminuer de 1,4 milliard de tonnes en moyenne chaque année.</p>
<p>Il s’agit d’une quantité comparable à la baisse enregistrée en 2020, soit 1,9 milliard de tonnes. Ce fait souligne l’extraordinaire défi à relever et la nécessité d’accroître les engagements à court et à long terme pour faire baisser les émissions mondiales.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/171227/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pep Canadell a reçu des financements de Australian National Environmental Science Program - Climate Systems Hub.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Corinne Le Quéré a reçu des financements du programme Horizon 2020 de l’UE grant agreement Nos. 821003 (4C) et 776810 (VERIFY)), du UN Natural Environment Research Council (grant NE/P021417/1 (SONATA) et NE/V011103/1 (Frontiers)) et du UK Royal Society (grant RP\R1\191063, Research Professorship).
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Glen Peters a reçu des financements du programme Horizon 2020 de l’UE – grant agreement Nos. 821003 (4C), 776810 (VERIFY), 820846 (PARIS REINFORCE), and 958927 (CoCO2).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Pierre Friedlingstein a reçu des financements du programme Horizon 2020 de l’UE (4C Project).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Robbie Andrew a reçu des financements du programme Horizon 2020 de l’UE – grant agreement Nos. 821003 (4C), 776810 (VERIFY), and 958927 (CoCO2).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Rob Jackson ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Après une forte baisse des émissions en 2020 due à la pandémie de Covid-19, 2021 témoigne d’une inquiétante reprise, souligne la nouvelle étude du Global Carbon Projet.Pep Canadell, Chief research scientist, Climate Science Centre, CSIRO Oceans and Atmosphere; and Executive Director, Global Carbon Project, CSIROCorinne Le Quéré, Royal Society Research Professor of Climate Change Science, University of East AngliaGlen Peters, Research Director, Center for International Climate and Environment Research - OsloPierre Friedlingstein, Chair, Mathematical Modelling of Climate, University of ExeterRobbie Andrew, Senior Researcher, Center for International Climate and Environment Research - OsloRob Jackson, Professor, Department of Earth System Science, and Chair of the Global Carbon Project, Stanford UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1708352021-11-03T19:23:33Z2021-11-03T19:23:33ZInflation : les gouvernements pris à leur propre piège<p>Il y a un an, certains économistes semblaient persuadés qu’on pouvait augmenter indéfiniment les dépenses publiques car, tant que le chômage n’était pas revenu à son niveau pré-Covid, il n’y aurait pas d’inflation. À l’extrême de cette vision, les adeptes de la <a href="https://www.ft.com/content/673b0be2-3559-4b61-9224-7c271ae4ed31">théorie monétaire moderne</a> recommandaient une hausse massive des dépenses publiques – et donc de l’endettement public – jusqu’au point où tous ceux qui cherchent un emploi en trouvent un.</p>
<p>Aujourd’hui, trois constatations s’imposent :</p>
<ul>
<li><p>Lorsque le niveau du stimulus fiscal (plus de dépenses, réduction d’impôts) pousse la demande globale au-delà de la capacité productive maximale de l’économie, des pénuries locales apparaissent et la hausse des prix se met en marche.</p></li>
<li><p>La pandémie a provoqué un ample « choc d’offre », l’équivalent d’une réduction du potentiel productif de l’économie (mondiale). L’ampleur du choc d’offre engendré a été largement sous-estimée, que ce soit par les organisations internationales, les dirigeants politiques et même le marché, comme l’attestent les anciennes prévisions d’inflation ayant largement sous-estimé l’inflation actuelle.</p></li>
<li><p>L’inflation qui, comme actuellement, touche les biens de première nécessité comme l’énergie utilisée pour le chauffage domestique et les produits alimentaires, constitue un phénomène profondément discriminant qui affecte plus fortement les ménages les plus défavorisés.</p></li>
</ul>
<p>Ainsi, la crise économique post-Covid n’a pas rompu les principes de l’économie, qui s’appliquent à cette crise comme ils se sont appliqués lors des crises précédentes, notamment les crises d’offre des années 1970. Les gouvernements, par leurs politiques de dépense excessive face à une offre entravée, apparaissent comme les principaux responsables de cette inflation.</p>
<h2>Un caractère transitoire incertain</h2>
<p>Ainsi, aux États-Unis, le président nouvellement élu Joe Biden s’est lancé dans une vaste expérimentation sociale, <a href="https://theconversation.com/le-plan-de-relance-de-joe-biden-va-t-il-faire-surchauffer-leconomie-americaine-154959">multipliant les dépenses publiques</a> et creusant le déficit dans un contexte où l’économie américaine sortait de la crise. La hausse des prix à la consommation a très rapidement accéléré, passant à 4,2 % dès avril 2021, et était en septembre pour le <a href="https://www.bls.gov/">cinquième mois d’affilée au-dessus de 5 %</a> sur 12 mois, selon les données de l’US Bureau of Labor Statistics.</p>
<p>En zone euro, la situation, avec <a href="https://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php?title=Inflation_in_the_euro_area">4,1 % attendus en octobre</a> (3,4 % en septembre), semble un peu moins problématique, ce qui est cohérent au regard de l’ampleur des programmes de relance. Au 1<sup>er</sup> octobre 2021, le soutien global à l’économie (dépenses et exonérations fiscales) représentait <a href="https://www.imf.org/en/Topics/imf-and-covid19/Fiscal-Policies-Database-in-Response-to-Covid-19">25,5 % du PIB aux États-Unis contre 15,3 % en Allemagne</a>, le taux le plus élevé de la zone euro, selon le Fonds monétaire international (FMI).</p>
<p>Les experts de L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pointent aujourd’hui le <a href="https://www.oecd.org/economic-outlook/">caractère transitoire</a> de cette inflation :</p>
<blockquote>
<p>« Une fois les goulots d’étranglement éliminés, la hausse des prix de produits durables, comme les voitures, devrait se tarir rapidement, puisque l’offre de produits manufacturés devrait augmenter rapidement. »</p>
</blockquote>
<p>Les mêmes experts rappellent que les mécanismes d’indexation des salaires n’existent plus, donc l’inflation actuelle ne devrait pas se retrouver dans une hausse des coûts de production demain, enclenchant une « boucle prix-salaires-prix » comme dans les années 1970. Cela dit, on constate une nouvelle vivacité des syndicats partout dans le monde et de leur capacité à négocier des hausses de salaire dès lors que l’inflation, qui avait quasiment disparu, est de retour. Il est par exemple frappant de constater que les <a href="https://time.com/6105109/workers-strike-unemployment/">grèves se multiplient aujourd’hui aux États-Unis</a>.</p>
<p>Le point sur lequel nous aimerions insister dans cet article est que la hausse des prix et les pénuries locales qui l’accompagnent peuvent en effet dégrader la production potentielle de biens par au moins quatre canaux :</p>
<ul>
<li><p>La hausse des prix de l’énergie et des matières premières peut provoquer des faillites, notamment dans les secteurs où ces coûts représentent une part importante du coût total et où l’entreprise ne peut pas transférer les surcoûts sur les consommateurs en raison d’une forte concurrence. Les plus petites entreprises, PME et TPE, risquent d’être les plus vulnérables.</p></li>
<li><p>Les pénuries de certains composants peuvent enrayer la fabrication des produits finaux, comme c’est le cas sur le marché de l’automobile. Actuellement, la pénurie de puces amène en effet les constructeurs à rationner leur production. Comme Toyota et General Motors, Renault a annoncé à son tour une <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/automobile/la-penurie-de-semi-conducteurs-empechera-renault-de-construire-500000-vehicules-cette-annee-1357442">réduction de la production de 17 %</a> cette année, malgré une demande soutenue.</p></li>
<li><p>Les entreprises les plus fragiles ne pourront pas augmenter les salaires pour compenser l’inflation ; elles subiront des départs de personnel. Si celui-ci part pour des entreprises plus efficaces, qui se développent, c’est une situation normale. Si le personnel quitte l’entreprise pour l’inactivité ou le chômage, cela dégrade l’offre potentielle.</p></li>
<li><p>Enfin, de nombreuses entreprises à fort endettement et faible rentabilité, surnommées « firmes zombies », ne survivent actuellement que parce que les banques continuent à les refinancer à des taux proches de zéro. Au moment où les taux d’intérêt commenceront à refléter l’inflation et augmenteront, nombre de ces firmes risquent de faire faillite.</p></li>
</ul>
<p>Dans ce contexte, que peuvent faire les autorités publiques ? Il semble que la meilleure réponse à cette question serait de ne prendre aucune mesure qui conduirait à une nouvelle stimulation de la demande face à une production désorganisée et à une augmentation de l’endettement public.</p>
<h2>Le risque d’alimenter l’inflation</h2>
<p>Certes, l’inflation est peut-être un moindre mal : on peut comprendre que les gouvernements n’aient pas voulu rajouter la réduction des revenus à l’angoisse provoquée par la crise sanitaire. Peut-être, comme le suggère une <a href="https://www.kansascityfed.org/documents/8322/JH_Guerrieri.pdf">équipe de chercheurs américains</a>, une courte période d’inflation élevée reste nécessaire pour réaligner les salaires, compte tenu des évolutions divergentes des différents secteurs dans l’économie post-Covid.</p>
<p>Mais à partir de la situation existante, toute intervention supplémentaire risque de rendre l’inflation pérenne, avec les conséquences néfastes que nous connaissons, notamment en termes de réduction du pouvoir d’achat des ménages les plus fragiles :</p>
<ul>
<li><p>Ainsi, bloquer la hausse des prix, quel que soit le marché, est une fausse bonne idée, car elle ne fait qu’augmenter les pénuries et empêche l’augmentation de la production.</p></li>
<li><p>Réduire le taux de TVA a du sens, car cette mesure ne modifie pas les prix relatifs et donc l’allocation des ressources. En revanche, elle ne peut pas cibler les ménages les plus fragiles. Attribuer une subvention forfaitaire aux ménages les plus modestes, comme décidé par le gouvernement de Jean Castex, peut également avoir du sens car cela ne modifie pas les prix relatifs. Cependant, qu’il s’agisse de réduction de taux de TVA ou de transferts (3,8 milliards pour la « <a href="https://www.leparisien.fr/economie/prix-des-carburants-jean-castex-annonce-une-indemnite-inflation-de-100-euros-pour-ceux-gagnant-moins-de-2000-euros-net-par-mois-21-10-2021-5J3NT722UREXHO7VTUTWG3RVN4.php">prime inflation</a> » en France), les deux mesures vont stimuler la demande, dont l’excès est déjà à l’origine de l’inflation.</p></li>
</ul>
<ul>
<li><p>À demande globale constante, la préservation du pouvoir d’achat des ménages les moins aisés peut se faire par un transfert en provenance des plus aisés, comme proposé par certains <a href="https://edition.cnn.com/2021/10/25/politics/billionaires-tax-plan-capital-gains/index.html">députés démocrates</a> aux États-Unis sous le nom de « taxe milliardaires ». Il n’est pas certain qu’une telle mesure soit politiquement acceptable.</p></li>
<li><p>Certains dirigeants politiques, aux <a href="https://www.lavoixdunord.fr/992109/article/2021-04-27/etats-unis-joe-biden-augmente-le-salaire-minimum-pour-les-contractuels-du">États-Unis</a> ou encore plus récemment au <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2021/10/25/le-royaume-uni-se-prepare-a-une-hausse-du-salaire-minimum_6099847_3210.html">Royaume-Uni</a>, ont en outre proposé une hausse massive du salaire minimum afin de compenser la perte de pouvoir d’achat. Celle-ci pourrait être probablement absorbée par les grands groupes disposant d’un pouvoir de marché suffisant. En revanche, elle contribuerait fortement à la sortie du marché de nombreuses PME, avec des conséquences dramatiques sur l’emploi, et une nouvelle réduction de l’offre qui pourrait renforcer à son tour les tensions inflationnistes.</p></li>
</ul>
<p>Depuis le début de la crise, l’aspect « choc d’offre » a été largement négligé par les organisations internationales et leurs départements de prévision, qui ont sous-estimé l’inflation actuelle. Aujourd’hui, il semble que les effets nocifs de l’inflation sur la production potentielle ne sont pas mieux pris en compte, ce qui conduit à faire l’hypothèse erronée du caractère temporaire de l’inflation. Ce diagnostic imprécis risque de conduire à des politiques économiques à même de renforcer l’inflation qu’elles cherchent à combattre.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/170835/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les mesures d’aide au pouvoir d’achat risquent d’aggraver le déséquilibre entre l’offre et la demande, alimentant ainsi la hausse des prix.Radu Vranceanu, Professeur d'économie, ESSEC Marc Guyot, Professeur d'économie, ESSEC Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1705852021-11-02T18:03:56Z2021-11-02T18:03:56ZLa dette publique post-Covid sera-t-elle soutenable ?<p>Le financement des mesures d’urgence face à la pandémie de la Covid-19 a conduit à élever le niveau de la dette publique en France à <a href="https://www.economie.gouv.fr/cedef/dette-publique#:%7E:text=%C3%80%20la%20fin%20du%20troisi%C3%A8me,publi%C3%A9s%20le%2022%20d%C3%A9cembre%202020.">près de 120 % du PIB</a>, soit près de 20 points de plus en un an. Cela effraie, mais il ne faut pas paniquer pour autant. Et pour ne pas paniquer, rien de tel qu’une approche raisonnée. C’est pourquoi nous proposons <a href="https://ofce.shinyapps.io/debtwatchr/">Debtwatch</a> et une nouvelle approche de la soutenabilité de la dette.</p>
<p>La méthode est de simuler le plus grand nombre d’évolutions possibles de la dette publique, en jouant sur les hypothèses à la base de chaque simulation. Ces hypothèses peuvent s’appuyer sur des régularités du passé (la <a href="https://www.edubourse.com/guide-bourse/loi-d-okun.php">loi d’Okun</a>, la <a href="https://partageonsleco.com/2020/02/05/la-courbe-de-phillips-fiche-concept/">courbe de Phillips</a>, etc.) ou sur des a priori, fondés ou non. Elles peuvent quantifier des risques (plus ou moins de croissance) comme des engagements sur d’autres politiques (les politiques monétaires ou la croissance qui découlerait d’un plan d’innovation).</p>
<p>L’application Debtwatch est ainsi conçue pour faire fonctionner un modèle économique qui traduit ces hypothèses et utilise la puissance de calcul moderne pour mettre à la disposition de tous les moyens de raisonner sur les dettes publiques de 15 grands pays développés. Le but de tous ces calculs est de déterminer les efforts nécessaires pour atteindre une cible en un temps donné et de juger de l’acceptabilité des hausses d’impôt, des baisses de dépenses ou de l’évolution du chômage.</p>
<h2>Charge d’intérêt partout au plus bas</h2>
<p>La modélisation, les simulations et les données historiques nous livrent aujourd’hui quelques enseignements :</p>
<p>D’abord, la dette publique est élevée dans beaucoup de pays, à des niveaux jamais atteints presque partout. Ce n’est pas une fatalité, puisque certains pays échappent à la dette, en particulier l’Allemagne. Mais si la dette est presque partout au plus haut, la charge d’intérêt est presque partout au plus bas. En France, il faut remonter à 1980 pour retrouver une charge d’intérêt aussi basse qu’aujourd’hui en % du PIB. En 1980, la dette publique était de 20 % du PIB ! Avant 1980, aussi loin que remontent les comptes nationaux publiés par la France (1949), la charge d’intérêt représentait en moyenne 1 point de PIB, pas très loin de l’étiage actuel.</p>
<p>La clef de ce mystère est la chute vertigineuse des taux d’intérêt amorcée avec le passage à l’euro, mais surtout conséquence de la baisse de l’inflation et du ralentissement progressif de la croissance économique depuis la fin du rattrapage économique de la France de l’après-guerre. Nous sommes passés d’une situation de croissance nominale forte (prix comme volume) à une période de croissance faible. Là où la dette coûtait cher mais restait soutenable en raison de la croissance, nous sommes maintenant dans une période de croissance faible, voire très faible, et donc de dette élevée mais dont la charge d’intérêt reste réduite.</p>
<p>On pourrait penser que c’est artificiel, et que les taux d’intérêt vont remonter, qu’ils sont très bas parce que la politique monétaire non conventionnelle de la Banque centrale européenne (BCE). Il y a du vrai, mais nous sommes aussi dans une période dans laquelle il existe peu d’actifs sûrs, la tentative de produire des actifs synthétiques appuyés sur les titres privés s’étant soldée par un échec aux proportions dantesques (la <a href="https://www.cairn.info/revue-de-l-ofce-2019-3-page-281.htm">crise de 2008 peut d’ailleurs se résumer à ça</a>) et le nombre de fournisseurs d’actifs sûrs publics se réduisant plutôt dans le monde.</p>
<p>L’euro, sa banque centrale, son droit supra-national, et la cohésion à peine forcée entre les États restent les piliers d’une stabilité que s’arrachent les fonds de pension de toute la planète. Ils doivent assurer le capital de leurs épargnants pour des périodes allant jusqu’à 40 ans ; et ils n’ont pas beaucoup de choix. En tout cas, leur besoin d’actifs – plusieurs fois le PIB mondial – laisse de la marge pour les passifs publics. Ainsi, les taux souverains sont bas et c’est un privilège exorbitant dont il ne faut pas se priver d’user.</p>
<h2>Du sang et des larmes ?</h2>
<p>Debtwatch nous permet de préciser tout cela : stabiliser la dette publique de la France au niveau actuel, en ramenant la part des dépenses publiques dans le PIB à ce qu’elles étaient en 2009, c’est-à-dire en effaçant toutes les traces du « quoiqu’il en coûte », tout en maintenant les taux souverains à un niveau très bas – prolongeant la situation de pénurie d’actifs sûrs – ne demande aucun ajustement particulier (c’est la simulation que vous pouvez reproduire et modifier en tapant « <a href="https://ofce.shinyapps.io/debtwatchr/?id=pgtgv">pgtgv</a> » dans la barre de recherche de Debtwatch, un outil ouvert car le débat sur la dette publique doit être transparent et ouvert : le code de Debtwatch est donc librement accessible).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428540/original/file-20211026-17-di4s57.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428540/original/file-20211026-17-di4s57.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428540/original/file-20211026-17-di4s57.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428540/original/file-20211026-17-di4s57.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428540/original/file-20211026-17-di4s57.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428540/original/file-20211026-17-di4s57.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428540/original/file-20211026-17-di4s57.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://ofce.shinyapps.io/debtwatchr/?id=pgtgv">Debtwatch, OFCE</a></span>
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<figure class="align-center ">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://ofce.shinyapps.io/debtwatchr/?id=pgtgv">Debtwatch, OFCE</a></span>
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<p>C’est acceptable socialement et possible économiquement. Si les taux souverains venaient à augmenter et s’établissaient à 3,6 points par an (contre 0,2 % par an aujourd’hui), la charge d’intérêt remonterait au cours des prochaines 30 années lentement, du fait d’une maturité plutôt longue de la dette publique française, mais resterait plus faible que le poids des intérêts d’avant l’euro (simulation « <a href="https://ofce.shinyapps.io/debtwatchr/?id=kxyor">kxyor</a> » sur Debtwatch). Il faut de la défiance des marchés financiers, et donc une crise profonde en zone euro, pour construire des scénarios plus durs.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/428533/original/file-20211026-27-14ikmsy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428533/original/file-20211026-27-14ikmsy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428533/original/file-20211026-27-14ikmsy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428533/original/file-20211026-27-14ikmsy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428533/original/file-20211026-27-14ikmsy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428533/original/file-20211026-27-14ikmsy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428533/original/file-20211026-27-14ikmsy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428533/original/file-20211026-27-14ikmsy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://ofce.shinyapps.io/debtwatchr/?id=kxyor">Debtwatch, OFCE</a></span>
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<figure class="align-center ">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://ofce.shinyapps.io/debtwatchr/?id=kxyor">Debtwatch, OFCE</a></span>
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<p>Réduire la dette publique est en revanche très coûteux. Pour ramener la dette publique à la situation d’avant l’épidémie, il faudrait augmenter les impôts (ou réduire les dépenses) de plus de 3 points de PIB, un peu moins que la moitié de la TVA (« <a href="https://ofce.shinyapps.io/debtwatchr/?id=fsunl">fsunl</a> »).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428535/original/file-20211026-15-16sezau.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428535/original/file-20211026-15-16sezau.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428535/original/file-20211026-15-16sezau.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428535/original/file-20211026-15-16sezau.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428535/original/file-20211026-15-16sezau.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428535/original/file-20211026-15-16sezau.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428535/original/file-20211026-15-16sezau.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="attribution"><a class="source" href="https://ofce.shinyapps.io/debtwatchr/?id=fsunl">Debtwatch, OFCE</a></span>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://ofce.shinyapps.io/debtwatchr/?id=fsunl">Debtwatch, OFCE</a></span>
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<p>Certes, au bout de quelques années, on pourra les réduire à nouveau (l’arithmétique de la dette est désagréable) mais l’effort apparaît conséquent. Et la protection contre une hausse de taux est assez faible, puisque, l’économie d’intérêts en cas de hausse des taux souverains à 3,6 points ne serait que de 0,6 point de PIB. C’est aujourd’hui 15 milliards d’euros, soit la moitié de la <a href="https://www.budget.gouv.fr/panorama-finances-publiques">dépense publique pour la culture et les cultes</a>. Ce n’est pas rien, mais c’est ce qu’il faut mettre en regard du coût correspondant.</p>
<p>Enfin, notons qu’un retour à 60 % du PIB de dépense publique demanderait du sang et des larmes ( <a href="https://ofce.shinyapps.io/debtwatchr/?id=eqiot">« eqiot »</a>).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428537/original/file-20211026-23-11u6vli.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428537/original/file-20211026-23-11u6vli.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428537/original/file-20211026-23-11u6vli.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428537/original/file-20211026-23-11u6vli.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428537/original/file-20211026-23-11u6vli.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428537/original/file-20211026-23-11u6vli.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428537/original/file-20211026-23-11u6vli.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="attribution"><a class="source" href="https://ofce.shinyapps.io/debtwatchr/?id=eqiot">Debtwatch, OFCE</a></span>
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<span class="attribution"><a class="source" href="https://ofce.shinyapps.io/debtwatchr/?id=eqiot">Debtwatch, OFCE</a></span>
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<p>Il nous prémunirait contre 1,8 point de PIB de charge d’intérêt en plus, soit un cinquième des sommes perçues au titre de l’impôt sur le revenu et la CSG. À vous de juger si cela en vaudrait la peine.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/170585/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le nouvel outil de l’OFCE, Debtwatch, permet d’établir plusieurs scénarios qui tiennent compte d’une éventuelle remontée des taux d’intérêt.Xavier Timbeau, Économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), Sciences Po Elliot Aurissergues, Chargé d'étude à l'OFCE, Sciences Po Éric Heyer, Directeur à l'OFCE, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1705952021-10-27T20:41:22Z2021-10-27T20:41:22ZL’indicateur de climat des affaires indique un plus haut historique<p>Ces derniers mois, le niveau de confiance des entreprises augmente à nouveau en France pour atteindre 70, contre 64 au trimestre précédent et 56 en début d’année sur une échelle de zéro à cent. Ce niveau est le plus haut observé depuis 2005 et le lancement de l’<a href="http://www.grenoble-em.com/climat-des-affaires">enquête</a> trimestrielle que nous menons conjointement avec Duke University. Il traduit l’accélération de la croissance et le rattrapage d’activité à la suite de la crise du Covid-19.</p>
<iframe title="Climat des affaires" aria-label="Interactive line chart" id="datawrapper-chart-JBBgn" src="https://datawrapper.dwcdn.net/JBBgn/2/" scrolling="no" frameborder="0" style="width: 0; min-width: 100%!important; border: none;" height="471" width="100%"></iframe>
<p>Cette perception est confirmée par les prévisions de croissance du chiffre d’affaires des entreprises. Celles-ci s’établissent désormais à 15,2 % environ pour l’année 2022. Dans ce contexte, les entreprises envisagent également une hausse de 12,2 % de leurs investissements et de 8,6 % du nombre de leurs salariés. En complément, nous rapportons que, selon notre enquête, en moyenne, aujourd’hui, 25 % du temps de travail est réalisé à distance (en télétravail).</p>
<iframe title="Anticipations d'activité à 12mois" aria-label="Interactive line chart" id="datawrapper-chart-QCM6g" src="https://datawrapper.dwcdn.net/QCM6g/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width: 0; min-width: 100%!important; border: none;" height="471" width="100%"></iframe>
<p>L’indicateur de solidité financière traduit lui aussi cet optimisme, en ressortant à 79 sur une échelle de zéro à cent, dépassant ainsi lui aussi les plus hauts niveaux observés depuis les débuts de l’enquête en 2005. En l’absence du plan de soutien gouvernemental, les responsables financiers estiment désormais que le degré d’optimisme ne serait que de deux points inférieur à l’actuel pour atteindre 77.</p>
<p>Alors qu’en début d’année, plus de 50 % des entreprises se déclaraient dépendantes du plan de soutien, elles ne sont plus que 20 % aujourd’hui, dont la moitié seulement pourraient connaître des difficultés en cas de retrait des autorités. Cette observation semble justifier une sortie à court terme des aides gouvernementales. Cependant, un suivi ciblé des entreprises les plus fragiles apparaît comme nécessaire.</p>
<h2>L’Amérique plus pessimiste</h2>
<p>En Europe, le climat des affaires ressort aussi en hausse et atteint 76, contre 70 au trimestre précédent et 62 en début d’année, toujours sur une échelle de zéro à cent. Ce niveau constitue également un record historique, bien au-dessus du niveau observé avant la crise du Covid-19.</p>
<p>L’Europe reste notamment portée par l’Allemagne, où le climat des affaires atteint 76 au troisième trimestre 2021. À l’inverse, au Royaume-Uni, qui a été frappé par plusieurs pénuries importantes, le moral des directeurs financiers reste au plus bas, à 49.</p>
<p>De l’autre côté de l’Atlantique, aux États-Unis, nous observons un net recul du climat des affaires, qui tombe à 59 sur une échelle de zéro à cent, contre 69 au trimestre précédent et 68 en début d’année. Il s’agit du plus grand écart en faveur de l’Europe depuis 2005. Cette baisse pourrait anticiper un ralentissement de l’activité américaine après le fort rebond de sortie de crise.</p>
<p>Dans ce contexte, les responsables financiers américains s’attendent à une augmentation des ventes d’environ 10,9 % et du nombre d’employés d’environ 5,6 %.</p>
<iframe title="Évolution comparative du climat des affaires en Europe et aux États-Unis" aria-label="Interactive line chart" id="datawrapper-chart-RMTdj" src="https://datawrapper.dwcdn.net/RMTdj/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width: 0; min-width: 100%!important; border: none;" height="471" width="100%"></iframe>
<p>Les tensions sur les chaînes d’approvisionnement (« bullwhip effect », l’effet coup de fouet) semblent aujourd’hui se renforcer. En France, plus de trois entreprises sur quatre qui nous ont répondu ce trimestre nous ont dit qu’elles rencontraient ce type de difficultés. En Allemagne, ce chiffre se maintient à neuf sur dix, comme au trimestre précédent.</p>
<p>De même, comme nous le rapportions au <a href="https://theconversation.com/climat-des-affaires-limpact-de-la-crise-de-la-covid-19-est-efface-164800">trimestre précédent</a>, la demande croissante en matières premières et matériaux crée des pressions inflationnistes visibles désormais par la majorité des entreprises. En France, 75 % des entreprises déclarent être confrontées à une hausse des prix des intrants, et ce chiffre ressort à près de 90 % en Allemagne. Nous continuons de penser que ces pressions inflationnistes pourraient se diffuser dans l’économie via un réajustement des prix de vente dès la fin d’année 2021.</p>
<hr>
<p><em>L’enquête mesure chaque trimestre depuis plus de 20 ans le climat des affaires tel que perçu par les responsables financiers des entreprises à travers le monde. L’enquête est courte (environ 5 questions). Elle recueille près de 1 000 réponses anonymes d’entreprises de tous secteurs et de toutes tailles. Des données de l’enquête Duke University – Réserve fédérale de Richmond et Atlanta sont utilisées pour comparaison.</em></p>
<p><em>Voir <a href="http://www.grenoble-em.com/climat-des-affaires">ici</a> les résultats complets de cette enquête. Prochaine enquête <a href="http://ceocfo.org/French.htm">courant janvier 2022</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/170595/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Dupuy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les entreprises françaises ne sont aujourd’hui plus que 20 % à se déclarer dépendantes des aides d’État.Philippe Dupuy, Professeur au département Gestion, Droit et Finance, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1691342021-10-05T19:17:04Z2021-10-05T19:17:04ZPrix du pétrole, du gaz et de l’électricité : bienvenue dans les montagnes russes !<p>D’abord le pétrole, puis le gaz naturel et l’électricité… La hausse du prix des énergies est au premier rang de l’attention médiatique mais aussi des préoccupations du gouvernement, qui redoute un mouvement social rappelant le mauvais souvenir des « Gilets jaunes ».</p>
<p>Pour les experts, <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/energie-5-questions-sur-la-flambee-des-prix-dans-le-monde-1350412">cette tendance est conjoncturelle</a> : à la chute des prix de l’énergie du printemps 2020 succède un rebond brutal, dû à la reprise rapide de l’économie après la quatrième vague de Covid.</p>
<p>Mais cette volatilité n’a rien d’une nouveauté : côté hydrocarbures, l’économie mondiale se souvient des bouleversements des chocs et contre-chocs pétroliers depuis le début des années 1970. Côté électricité, l’Europe a été marquée par les conséquences des réformes de libéralisation du secteur dans les années 1980.</p>
<p>Enfin, s’annonce aujourd’hui l’impact sur les prix de la nécessaire décarbonation des systèmes énergétiques dans le contexte de la lutte contre les dérèglements climatiques.</p>
<p>Décryptons ces différents facteurs d’instabilité pour mieux comprendre la situation actuelle.</p>
<h2>Facteur d’instabilité n°1 : la conjoncture et les marchés des hydrocarbures</h2>
<p>Parmi les fluctuations les plus sensibles pour les consommateurs (car très visibles à la pompe), les hydrocarbures sont instables du fait de leur dépendance au cours des marchés internationaux ; ils sont ainsi difficiles à contrôler.</p>
<p>Ces fluctuations peuvent vite devenir la bête noire des gouvernements ; c’est le cas aujourd’hui du gaz, pour lequel la <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/pourquoi-les-prix-du-gaz-augmentent-1350400">Russie semble profiter de la situation</a> en mettant la pression sur le gazoduc Nordstream 2 dont la <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/energie/energie-le-remplissage-du-gazoduc-controverse-nord-stream-2-a-debute_4794855.html">mise en service a été retardée</a>.</p>
<p>Avant le pic de 2008, qui marquait pour certains le passage à « l’après-pétrole », le début des années 2000 avait vu une importante augmentation du prix du pétrole, comme en témoigne le graphique ci-dessous.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=540&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=540&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=540&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Variation du prix des énergies.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs, données Index Mundi</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour atténuer cette flambée des prix des carburants à la pompe, le gouvernement Jospin avait eu recours en 2000 et 2002 à un mécanisme dit de « taxe flottante » (<a href="https://www.huffingtonpost.fr/2018/11/27/moduler-les-taxes-sur-les-carburants-jospin-avait-deja-essaye-sans-succes_a_23602094/">« la TIPP flottante »</a>), s’appuyant sur un ajustement de la taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques en fonction des variations du cours du pétrole brut.</p>
<p>En 2010, la TIPP avait fait place à la TICPE dont la composante carbone avait été retoquée par le Conseil constitutionnel ; ce n’est qu’en 2014 que fut introduite une taxe carbone dans la fiscalité énergétique, taxe carbone dont l’augmentation programmée en 2018 a déclenché la crise des « Gilets jaunes ».</p>
<h2>Facteur d’instabilité n° 2 : les marchés de l’électricité</h2>
<p>Pour l’électricité, la constitution du marché unique de l’énergie en Europe (idée « fondatrice » de Jacques Delors lorsqu’il était président de la Commission) a été menée corrélativement à l’introduction de la concurrence dans les industries électriques.</p>
<p>Elle a profondément modifié les conditions de concurrence et de fixation des prix : nouveaux producteurs et distributeurs, marchés de gros, libre-choix du fournisseur par le consommateur…</p>
<p>Cette concurrence était censée faire baisser les prix. Dans la plupart des cas, cela se produira <a href="https://www.marianne.net/economie/consommation/marche-unique-europeen-de-lelectricite-un-grand-bienfait-sauf-pour-les-consommateurs">jusqu’au début des années 2000</a>. </p>
<p><a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/02/19/a-force-de-vouloir-deroger-aux-regles-de-la-concurrence-l-etat-voit-le-piege-se-refermer-sur-edf_6070547_3232.html">Seule la France a résisté</a> en conservant des tarifs régulés de vente avec, pour contre partie vis-à-vis de Bruxelles, l’accès de la concurrence à une partie de la production nucléaire à travers le mécanisme de l’accès régulé au nucléaire historique, l’<a href="https://www.edf.fr/entreprises/electricite-gaz/le-benefice-arenh">ARENH</a>.</p>
<p>Comme le montre le graphique ci-dessous, l’examen sur quarante ans des prix de l’électricité (en monnaie constante) pour les ménages en France, en Allemagne et au Royaume-Uni, confirme que les baisses ont cessé au début des années 2000. Il montre par ailleurs que le prix actuel de l’électricité en France reste inférieur à celui de 1980 et aussi inférieur de 38 % à celui de l’Allemagne.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=265&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=265&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=265&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=333&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=333&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=333&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Évolution des prix de l’électricité en France, Allemagne et Royaume-Uni.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs, données Enerdata (gauche)/Statista (droite)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Facteur d’instabilité n° 3 : l’impact des objectifs bas carbone à court et moyen terme</h2>
<p>Aujourd’hui, c’est aussi en partie à cause du remplacement du charbon par le gaz naturel – une énergie dite de « transition », car carbonée mais moins que le charbon – qu’opère actuellement la <a href="https://www.liberation.fr/economie/gaz-electricite-jusquou-les-prix-de-lenergie-peuvent-ils-grimper-20210928_QTJEZ6URPJFVNE7HZZ5HSP7IYY/">Chine dans ses centrales électriques</a> que le prix du gaz augmente au niveau mondial.</p>
<p>La transition énergétique « bas carbone » impose le recours à des solutions énergétiques plus coûteuses en moyenne que le recours aux fossiles, ce qui suppose que le prix de ceux-ci soit augmenté.</p>
<p>Par ailleurs, le déploiement des énergies renouvelables variables entraîne des périodes de surabondance, au cours desquelles le prix peut même devenir négatif, et des périodes de déficit de soleil et de vent, au cours desquelles ils peuvent atteindre des sommets ; c’est actuellement le cas en <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/energie-la-flambee-des-prix-actuelle-est-inouie-1347404">Europe de l’Est avec l’éolien</a>.</p>
<p>Sans solution d’ajustement massive, les prix seront donc amenés à moyen terme à être extrêmement volatiles.</p>
<h2>Facteur d’instabilité n° 4 : l’impact des objectifs bas carbone à long terme</h2>
<p>Mais si la transition se poursuit et réussit, il faut s’attendre à ce que :</p>
<ul>
<li><p>les coûts des solutions décarbonées diminuent ;</p></li>
<li><p>la dépendance des consommateurs aux prix des marchés internationaux soit moindre ;</p></li>
<li><p>la demande pour les énergies fossiles importées se tarisse au profit des sources nationales décarbonées ;</p></li>
<li><p>les <a href="https://www.iea.org/reports/world-energy-outlook-2019">prix internationaux subissent une forte pression à la baisse</a> dans les scénarios « soutenables » à forte ambition climatique, comme en témoigne le tableau ci-dessous.</p></li>
</ul>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=488&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=488&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=488&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Agence internationale de l’énergie</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cela, à moins que le sous-investissement dans la production, pour le gaz naturel comme pour le pétrole, ne se traduise par une succession de chocs et contre-chocs, avec une vulnérabilité des consommateurs qui demeurera grande dans « l’entre-deux » de la transition.</p>
<p>D’ailleurs, la flambée actuelle des prix du gaz naturel s’explique aussi par un sous-investissement prolongé dans la production : les investisseurs, qui ont subi de faibles rendements ces dernières années, ont mis la pression sur les producteurs qui ont alors été amenés à <a href="https://xn--mobilis-hya.es/la-penurie-de-gaz-naturel-et-la-flambee-des-prix-menacent-la-croissance-economique">réduire leurs dépenses d’investissement</a>…</p>
<h2>À la recherche des bonnes options</h2>
<p>La hausse du prix pour les consommateurs des énergies fossiles ne résoudra pas, à elle seule, le problème de la décarbonation. C’est cependant une nécessité et la question de l’introduction, sous une forme ou sous une autre, d’un <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2009/12/07/quel-modele-de-croissance-le-signal-prix-4-8_1276902_3234.html">« signal prix »</a> adapté ne pourra être évitée.</p>
<p>Une interrogation centrale émerge alors : comment concilier la hausse nécessaire du prix des énergies fossiles et la protection des ménages les plus défavorisés ? Comme le <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/09/03/christian-gollier-et-jean-tirole-l-objectif-de-reduction-des-emissions-de-gaz-a-effet-de-serre-doit-avoir-le-moindre-impact-social_6093286_3232.html">rappelaient</a> récemment les économistes Christian Gollier et Jean Tirole :</p>
<blockquote>
<p>« L’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre doit avoir le moindre impact social. »</p>
</blockquote>
<p>L’Europe s’oriente, dans son dernier cycle de politique climat (le <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/fit-55-nouveau-cycle-politiques-europeennes-climat">« Fit for 55 »</a>), vers la création d’un deuxième marché des quotas d’émission pour le <a href="https://www.lemoniteur.fr/article/le-batiment-sur-la-sellette-des-quotas-carbone-europeens.2133259">bâtiment</a> et les <a href="https://www.actu-environnement.com/ae/news/reforme-marche-co2-fitfor55-37904.php4">transports</a>.</p>
<p>Mais personne ne sait aujourd’hui comment ce nouveau dispositif impactera les prix et la fiscalité carbone là où elle existe, et avec quels impacts pour le consommateur final.</p>
<p>Faut-il alors assurer un mécanisme de stabilisation ?</p>
<p>Pour le gouvernement, l’ajustement par les taxes dans le <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2021/09/30/flambee-des-tarifs-de-l-energie-jean-castex-annonce-un-bouclier-tarifaire-l-augmentation-des-prix-du-gaz-bloquee-a-partir-de-novembre_6096644_823448.html">« bouclier tarifaire »</a> représentera un manque à gagner <a href="https://www.challenges.fr/economie/la-france-ne-peut-pas-se-permettre-une-tipp-flottante_628772">aggravant le déficit budgétaire</a>. Il ne sera en outre pas ciblé sur les ménages les plus en difficulté.</p>
<p><a href="https://www.gouvernement.fr/hausse-du-gaz-au-1er-octobre-un-cheque-energie-supplementaire-de-100-eu">L’augmentation du chèque énergie</a>, annoncée la semaine dernière, répond à la question de la protection des ménages les plus défavorisés. Mais face à l’augmentation du nombre des ménages en précarité énergétique, et en fonction de la rigueur de l’hiver à venir, ces mesures seront-elles suffisantes ?</p>
<p>Certains proposent de « s’affranchir de la dictature des marchés ». Plutôt que de subir leur volatilité, l’État pourrait fixer lui-même la trajectoire des prix des énergies carbonées, indépendamment des cours mondiaux : soit bloquer les prix pour défendre le pouvoir d’achat et <a href="https://www.lesechos.fr/elections/presidentielle/presidentielle-2022-fabien-roussel-appelle-a-bloquer-les-prix-de-lenergie-1348814">diviser par deux</a> la facture énergétique, comme le propose le Secrétaire national du PCF, Fabien Roussel ; soit plutôt programmer la hausse, pour assurer que les bonnes décisions d’investissement seront prises au bon moment. </p>
<p>Ainsi, une augmentation annuelle programmée sur trente ans de <a href="http://www.hprevot.fr/">2 centimes d’euro par litre et de 2 euros par mégawatt-heure de gaz</a> serait suffisante, selon l’expert de l’énergie Henri Prévot : cela représenterait en 2050 un supplément de 60 c€/l et 60 €/MWh.</p>
<p>Cette dernière idée est a priori séduisante, mais comment alors s’assurer de l’équilibre économique et financier des entreprises et de leur capacité à évoluer dans un monde d’incertitudes et de changements systémiques ?</p>
<p>Alors qu’aucune solution miracle ne s’impose, il faudra à l’évidence un « mix d’instruments » qui devra être accompagné de normes et d’investissements massifs dans la décarbonation et l’efficacité énergétique. Nul doute que ces questions seront amplement débattues dans les débats de la prochaine campagne présidentielle.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169134/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La conjoncture post-Covid, le fonctionnement des marchés, la nécessaire décarbonation de l’économie mondiale : autant de facteurs qui expliquent les effets yo-yo des prix de l’énergie.Patrick Criqui, Directeur de recherche émérite au CNRS, Université Grenoble Alpes (UGA)Carine Sebi, Professeure associée et coordinatrice de la chaire « Energy for Society », Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1689582021-09-29T18:20:18Z2021-09-29T18:20:18ZPlan de relance américain : la facture de la fraude pourrait s’élever à 225 milliards de dollars<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/423773/original/file-20210929-23-pm7e0k.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=12%2C0%2C1040%2C655&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le pont Leonard P. Zakim de Bunker Hill, à Boston (Massachusetts), tristement célèbre pour la tricherie aux matériaux mise en place par ses constructeurs.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:The_Leonard_P._Zakim_Bunker_Hill_Bridge.JPG">Tom Walsh / Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le gouvernement américain pourrait dépenser jusqu’à <a href="https://www.cnbc.com/2021/08/09/democrats-release-budget-resolution-as-senate-works-on-infrastructure-bill.html">4 500 milliards de dollars</a> (3 850 milliards d’euros) dans ce qui pourrait être l’un des plus importants investissements dans les <a href="https://www.cnet.com/personal-finance/1-trillion-infrastructure-bill-not-a-done-deal-yet-heres-what-you-get-if-it-passes/">infrastructures</a> et le <a href="https://slate.com/news-and-politics/2021/08/senate-democrats-budget-plan-social-safety-net.html">système de protection sociale</a> depuis des décennies.</p>
<p>La Chambre des représentants prévoit en effet de voter, le 30 septembre, un projet de loi bipartite sur les infrastructures d’un montant de <a href="https://www.nytimes.com/2021/09/24/us/politics/house-democrats-infrastructure-social-policy.html">1 000 milliards de dollars</a>, qui a déjà été approuvé par le Sénat, et pourrait bientôt suivre ce dernier avec jusqu’à 3 500 milliards de dollars d’autres investissements.</p>
<p>L’adoption de ces mesures reste encore incertaine. Mais si l’un ou l’autre des projets de loi, ou les deux, sont adoptés, ils ne se traduiront pas seulement par de nouvelles dépenses publiques massives que les législateurs considèrent comme des investissements, mais aussi par une multiplication des opportunités pour les fraudeurs.</p>
<p>La plupart des dépenses publiques atteignent généralement les secteurs que le gouvernement veut stimuler : transports en commun, énergie propre, Internet haut débit. Néanmoins, une partie de l’argent sera sans doute perdue à cause de la fraude. Il est impossible d’en prévoir le montant exact, mais nous pouvons avancer une estimation raisonnable basée sur les dépenses passées qui le situerait autour de 5 %, soit 225 milliards de dollars. C’est l’équivalent du <a href="https://data.worldbank.org/indicator/NY.GDP.MKTP.CD?most_recent_value_desc=true">produit intérieur brut annuel de la Grèce</a>.</p>
<p>Ce problème de la fraude dans les dépenses publiques et ce que les gouvernements peuvent faire pour la combattre fait l’objet de nos <a href="https://scholar.google.com/citations?user=NJ2rEj8AAAAJ&hl=en&oi=ao">dernières recherches</a>, qui montrent qu’il existe des <a href="https://www.nber.org/papers/w27900">mesures efficaces</a>. Or, le législateur américain ne fait pas toujours de la prévention de la fraude une priorité.</p>
<h2>Asymétrie d’information</h2>
<p>Dans sa forme la plus simple, la fraude est l’utilisation de la <a href="https://www.investopedia.com/terms/f/fraud.asp">tromperie pour obtenir un gain financier ou personnel</a>. Lorsqu’elle concerne les dépenses publiques, la fraude se produit lorsque quelqu’un détourne de l’argent de l’objectif public auquel il est destiné.</p>
<p>Parmi les exemples courants de fraude à la dépense publique, citons les entreprises ou les administrations qui <a href="https://www.justice.gov/opa/pr/engineering-firm-pleads-guilty-decade-long-bid-rigging-and-fraud-scheme">truquent l’attribution de contrats publics</a>, les organismes de soins de santé qui <a href="https://www.justice.gov/usao-ma/pr/carewell-urgent-care-center-agrees-pay-2-million-resolve-allegations-false-billing">falsifient les données des patients</a> pour obtenir des paiements plus élevés de Medicare ou Medicaid, ou encore les fournisseurs du département de la Défense (l’équivalent du ministère de la Défense) qui <a href="https://www.justice.gov/opa/pr/united-states-government-sues-kellogg-brown-root-services-inc-and-two-foreign-companies">gonflent les coûts des services</a>.</p>
<p>Il est courant d’entendre que la <a href="https://www.cnbc.com/2019/08/30/trump-plan-to-crack-down-on-food-stamp-fraud-reignites-heated-debate.html">fraude individuelle</a>, dans des programmes tels que le programme alimentaire fédéral Supplemental Nutrition Assistance Program, est endémique. Cependant, la plupart des fraudes impliquent des entreprises payées par le gouvernement pour fournir des services publics – parce qu’il y a beaucoup plus d’argent en jeu.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/423802/original/file-20210929-26-ph41oj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/423802/original/file-20210929-26-ph41oj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/423802/original/file-20210929-26-ph41oj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/423802/original/file-20210929-26-ph41oj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/423802/original/file-20210929-26-ph41oj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/423802/original/file-20210929-26-ph41oj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/423802/original/file-20210929-26-ph41oj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les prestataires du département de la défense qui gonflent les factures, une fraude fréquemment constatée.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://nara.getarchive.net/media/an-aerial-view-of-the-pentagon-the-headquarters-of-the-united-states-department-dcde1f">U.S. National Archives & DVIDS</a></span>
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<p>Environ <a href="https://www.gao.gov/blog/snapshot-government-wide-contracting-fy-2020-infographic">15 % des dépenses publiques vont directement à ces entreprises</a> par le biais de contrats. Une part encore plus importante va aux <a href="https://www.kff.org/medicare/issue-brief/the-facts-on-medicare-spending-and-financing/">prestataires de Medicare</a> et de <a href="https://www.kff.org/medicaid/issue-brief/medicaid-financing-the-basics/">Medicaid</a>, qui sont souvent des entreprises privées remboursées pour les services qu’elles fournissent.</p>
<p>Une partie du problème à l’origine de la fraude est ce que les économistes appellent <a href="https://academic.oup.com/qje/article-abstract/84/3/488/1896241?redirectedFrom=fulltext">l’asymétrie d’information</a>. C’est ce qui se produit lorsque l’entreprise de construction ou l’hôpital qui effectue un travail pour le gouvernement dispose de plus d’informations sur ce qu’ils facturent que l’administration. Les fraudeurs peuvent exploiter à leur profit ce qu’ils savent et que le gouvernement ne sait pas, en facturant plus qu’ils ne le devraient.</p>
<h2>4 % de dépenses irrégulières en 2019</h2>
<p>Une illustration de ce que le gouvernement américain perd en raison de la fraude est son taux de paiements abusifs – une mesure du montant d’argent que le gouvernement n’aurait pas dû verser, en raison, par exemple, de paiements en double ou de personnes inéligibles recevant des paiements. En 2019, les paiements irréguliers ont totalisé <a href="https://www.gao.gov/improper-payments">175 milliards de dollars</a>, soit environ 4 % de toutes les dépenses gouvernementales.</p>
<p>Les différents programmes ont des taux de paiements irréguliers différents. Medicare, par exemple, a des paiements irréguliers de l’ordre de 5 à 6 %, ce qui coûte au gouvernement des <a href="https://www.gao.gov/highrisk/medicare-program-improper-payments">dizaines de milliards de dollars par an</a>.</p>
<p>Toutefois, les paiements irréguliers ne sont pas la mesure la plus précise de la fraude. Ils incluent l’argent indûment versé par accident plutôt que par malveillance, mais ils ne mesurent pas la fraude qui n’a pas été décelée – qui peut être substantielle mais qui est inconnue. Il y a un <a href="https://www.npr.org/sections/health-shots/2010/05/13/126802714/how-fighting-medical-fraud-is-like-whack-a-mole">jeu constant du chat et de la souris</a> entre les responsables de la lutte contre la fraude et les fraudeurs qui exploitent de nouvelles opportunités dans un paysage réglementaire en constante évolution.</p>
<p>Par exemple, le Payment Protection Program (PPP), qui a dépensé <a href="https://www.sba.gov/funding-programs/loans/covid-19-relief-options/paycheck-protection-program/ppp-data">792 milliards de dollars</a> pour aider les petites entreprises à supporter les effets économiques de la pandémie de Covid-19, pourrait avoir perdu <a href="http://dx.doi.org/10.2139/ssrn.3906395">76 milliards de dollars de ce montant à cause de la fraude</a>, selon une étude de 2021.</p>
<p>Environ <a href="https://www.nytimes.com/2021/08/17/business/ppp-fraud-covid.html">15 % des prêts accordés</a> par le PPP sont ainsi soupçonnés de fraude. Ce chiffre se fonde sur certains indices, tels que des dossiers comprenant des entreprises non enregistrées ou récemment constituées, de nombreuses adresses résidentielles identiques ou des salaires d’employés invraisemblablement élevés.</p>
<p>D’autres programmes de relance récents ont également fait l’objet de fraudes, notamment le programme d’<a href="https://www.forbes.com/advisor/personal-finance/identity-theft-unemployment-benefits-fraud/">assurance chômage pendant la pandémie</a>, dans le cadre duquel l’identité de centaines de milliers de personnes a été utilisée pour des demandes frauduleuses. L’Ohio estime à lui seul avoir perdu <a href="https://www.cleveland.com/open/2021/02/ohio-paid-out-330-million-in-fraudulent-pandemic-unemployment-benefits-in-december-alone.html">330 millions de dollars</a> à cause de ce type de fraude.</p>
<p>Comme d’autres formes de fraude, ce problème n’était pas dû à des abus individuels, mais plutôt à des organisations criminelles exploitant la <a href="https://www.nbcnews.com/news/us-news/how-billions-pandemic-aid-was-swindled-con-artists-crime-syndicates-n1257766">faible surveillance du gouvernement</a>.</p>
<p>Les programmes d’infrastructure apparaissent comme un terrain particulièrement à la fraude, car ils se caractérisent par une asymétrie d’information encore plus marquée. Par exemple, la <a href="https://www.journals.uchicago.edu/doi/10.1086/517935">qualité des projets de construction</a> reste difficile à vérifier. Cela donne aux constructeurs la possibilité de mentir sur les matériaux ou de gonfler les coûts pour réaliser des profits plus élevés.</p>
<p>Le <a href="https://www.bostonglobe.com/magazine/2015/12/29/years-later-did-big-dig-deliver/tSb8PIMS4QJUETsMpA7SpI/story.html">« Big Dig » de Boston</a>, un mégaprojet d’infrastructure de 15 milliards de dollars du début des années 1990, avait ainsi entraîné l’<a href="https://www.roadsbridges.com/arrests-made-bostons-big-dig-investigation">arrestation de certains entrepreneurs</a> pour avoir fourni frauduleusement des matériaux de qualité inférieure. Un entrepreneur important du projet avait notamment été poursuivi pour avoir livré du béton frelaté. Il avait payé une amende de <a href="https://www.justice.gov/archive/usao/ma/news/BigDig/AggregatePleaPR.html">50 millions de dollars</a>.</p>
<p>En outre, les projets d’infrastructure sont généralement attribués à une seule entreprise par le biais d’un processus d’appel d’offres qui reste <a href="https://www.justice.gov/file/21816/download">susceptible d’être truqué</a>. En juin 2021, par exemple, une <a href="https://www.equipmentworld.com/business/article/15066094/contech-to-pay-85-million-for-ncdot-bidrigging-scheme">société d’ingénierie de l’Ohio</a> a par exemple été condamnée à payer <a href="https://www.justice.gov/opa/pr/engineering-firm-pleads-guilty-decade-long-bid-rigging-and-fraud-scheme">8,5 millions de dollars d’amendes</a> pour avoir truqué plusieurs projets de drainage en Caroline du Nord.</p>
<p>Les États-Unis ont des règles élaborées en matière d’appels d’offres, de contrats et d’audits, mais des cas de ce genre se produisent encore <a href="https://search.justice.gov/search ?query=bid+rigging&op=Search&affiliate=justice">assez régulièrement</a>.</p>
<h2>La dénonciation, arme de dissuasion</h2>
<p>Pour endiguer ce phénomène, le gouvernement fédéral dispose aujourd’hui de plusieurs outils : la répression pénale, les dénonciations et les poursuites civiles, les audits, les exigences réglementaires accrues, ou encore les outils d’apprentissage automatique pour l’exploration des données et l’analyse judiciaire.</p>
<p>Les recherches ont montré que de nombreux efforts de lutte contre la fraude peuvent être <a href="https://www.nber.org/system/files/working_papers/w28560/w28560.pdf">couronnés de succès</a>. En effet, le département de la justice (l’équivalent du ministère de la Justice) a constaté que chaque dollar dépensé pour lutter contre la fraude dans le domaine de la santé en 2020 avait <a href="https://www.justice.gov/jmd/page/file/1398931/download">rapporté 4,30 dollars</a> – un retour sur investissement exceptionnellement bon.</p>
<p>Les dénonciations se sont notamment révélées particulièrement utiles. En vertu du <a href="https://www.justice.gov/civil/false-claims-act">False Claims Act</a>, une loi sur les fausses réclamations, les personnes qui disposent d’informations sur des fraudes impliquant des programmes gouvernementaux peuvent engager leurs propres avocats et intenter des poursuites au nom du gouvernement devant un tribunal civil fédéral. Ces dénonciateurs reçoivent une part de l’argent qu’ils récupèrent pour le gouvernement.</p>
<p>Nos recherches ont montré que cela pouvait être particulièrement <a href="https://sites.bu.edu/jetson/files/2020/07/False-Claims-Act-Paper.pdf">efficace pour dissuader la fraude</a>. Avec cette loi, le gouvernement a récemment récupéré plus d’un milliard de dollars par an, et nos recherches montrent qu’il a également économisé des dizaines de milliards de plus en empêchant la fraude de se produire en premier lieu.</p>
<p>Cependant, au moins l’un des deux projets de loi sur lesquels le Congrès travaille actuellement comporte très peu de dispositions visant à lutter contre la fraude : certes, le projet de loi sur les infrastructures prévoit une enveloppe d’un <a href="https://www.accountingtoday.com/news/inside-the-infrastructure-plans-impact-on-taxpayers">milliard de dollars pour l’application de la loi</a> par l’Internal Revenue Service, mais les demandes pour renforcer la dénonciation <a href="https://www.mondaq.com/unitedstates/trials-appeals-compensation/1105256/last-minute-attempt-to-add-proposed-false-claims-act-amendments-to-infrastructure-bill-falls-short">n’ont pas abouti</a>.</p>
<p>D’autres dispositions du projet de loi demandent au gouvernement de décourager le gaspillage et la fraude, mais ne précisent ni les sanctions ni la manière dont elles seront appliquées. D’ailleurs, le mot « fraude » n’apparaît que <a href="https://www.congress.gov/bill/117th-congress/house-bill/3684/text">sept fois dans ce projet de loi de 2 000 pages</a>.</p>
<p>Compte tenu de l’ampleur des investissements prévus pour les années à venir, le législateur serait donc bien avisé d’inclure davantage de dispositions anti-fraude dans les grands projets de loi sur les dépenses. Cela permettrait de s’assurer qu’une plus grande partie de ces milliards de dollars va <a href="https://www.cnbc.com/2021/08/25/democrats-3point5-trillion-budget-plan-includes-major-help-for-families.html">aux personnes qui en ont vraiment besoin</a>, et non aux fraudeurs.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/168958/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jetson Leder-Luis a reçu des financements du National Institute on Aging, qui dépend du National Institutes of Health.</span></em></p>Les investissements prévus pour les infrastructures devraient gonfler le montant des dépenses irrégulières – d’autant que le législateur n’a pas fait de la lutte contre le phénomène une priorité.Jetson Leder-Luis, Assistant Professor of Markets, Public Policy and Law, Boston UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1669782021-08-30T20:50:18Z2021-08-30T20:50:18ZFaillites : le coût de la fin du « quoi qu’il est coûte » reste très difficile à évaluer<p>Face à la crise économique liée aux mesures sanitaires, le gouvernement a mis en place différents dispositifs d’aides, dont l’objectif est de permettre aux entreprises (viables ou non) de faire face à leurs échéances. Un an demi après leur instauration, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a annoncé la levée de ces aides. « Le “quoi qu’il en coûte”, c’est fini », a-t-il déclaré à l’occasion de la Rencontre des entrepreneurs de France du Medef, le 25 août.</p>
<p>La fin des aides de l’État laisse donc craindre une recrudescence des faillites qui avaient été jusqu’alors limitées. En effet, selon le <a href="https://www.altares.com/fr/publications/etudes-defaillances-sauvegardes-entreprises">rapport Altares</a> 2021, celles-ci ont augmenté de 14,2 %, mais ce chiffre reste en recul de 48 % par rapport à la période 2017-2019.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-defaillances-dentreprise-un-risque-finalement-limite-pour-leconomie-et-les-comptes-publics-165834">Les défaillances d’entreprise, un risque finalement limité pour l’économie et les comptes publics</a>
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<p>Certes, il est difficile de prévoir le nombre de défaillances qui surviendront après la levée des mesures d’aides. Pour l’année 2021, le président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) s’attend à un chiffre de <a href="https://www.msn.com/fr-fr/finance/economie/fran%C3%A7ois-asselin-cpme-anticipe-jusqu%C3%A0-100000-d%C3%A9faillances-dentreprises-sur-lann%C3%A9e-%C3%A0-venir/ar-BB1g8k9m">60 000 à 100 000</a> alors qu’Altares prévoit entre 33000 et 35000 défaillances.</p>
<p>Quoi qu’il en soit, il ne fait guère de doute que ces défaillances vont être coûteuses. Mais quels sont ces coûts ? Et sommes-nous réellement capables de les mesurer ?</p>
<p>Les coûts sont à la fois directs et indirects. En ce qui concerne les coûts directs, ils sont constitués par les frais des mandataires de justice. D’autres éléments sont à incorporer à ces coûts tels que ceux perçus par le commissaire à l’exécution du plan. Quel est l’ordre de grandeur de ces coûts ? Plusieurs <a href="https://www.jstor.org/stable/2327126">études</a> apportent des éléments de réponse.</p>
<h2>Cinq types de coûts indirects</h2>
<p>Premièrement, leur étendue est variable selon les pays et représente entre 1 et 10 % de la valeur de la firme. Deuxièmement, ils sont inversement proportionnels à la taille de l’entreprise (plus lourds pour les PME comparativement aux grandes entreprises). Troisièmement, ils ne sont pas supportés de façon identique par tous les acteurs en fonction de la règle de priorité et de la législation en vigueur.</p>
<p>En revanche, contrairement aux coûts directs, les coûts indirects restent d’une extrême complexité, non pas à définir mais à mesurer. On peut circonscrire cinq types de coûts indirects.</p>
<p>Le premier est celui de la perte du chiffre d’affaires faisant suite à la perte de clients. Devant l’incertitude d’être approvisionné et de ne pas bénéficier d’un service après vente, un client se détournera d’une entreprise en redressement judiciaire, augmentant conséquemment ses difficultés.</p>
<p>Le deuxième se porte de l’autre côté du spectre avec les fournisseurs. Percevant la difficulté d’un client, les fournisseurs infèrent la possibilité de perdre leurs créances en raison de l’ordre de priorité des créanciers dans le redressement judiciaire. Par conséquent, ils vont exiger des délais de paiement plus rapides.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1430554350565351430"}"></div></p>
<p>Le troisième tient dans l’attitude du personnel. En effet, dans un redressement judiciaire, on assiste très souvent à des licenciements qui traduisent un double coût : celui d’une perte de compétence et de formation financée par l’entreprise et celui de la démotivation des salariés restants qui sont dans la crainte de perdre leurs emplois si la situation venait à empirer encore. Le coût pour la firme est d’autant plus important que les meilleurs de ses salariés partent car ces derniers sont les plus employables et recherchés par les compétiteurs.</p>
<p>Le quatrième coût est appelé par les Américains fire sale (vente précipitée). Pour résoudre leurs problèmes de cash, les firmes vont chercher à désinvestir de façon sous optimale en vendant leurs actifs à vil prix.</p>
<p>Le cinquième coût est lié à l’asymétrie d’information et au risque. En effet, les dirigeants, qui ont un meilleur accès à l’information que les actionnaires, peuvent soit retarder la faillite pour préserver leurs avantages, soit extraire des avantages importants avant leur mise à l’écart. Un exemple célèbre met en évidence que <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0304405X9800004X">plus de 50 % de la valeur de la compagnie aérienne Eastern Airline a été détruite</a> pendant le redressement judiciaire en raison du comportement opportuniste du dirigeant dans les années 1990.</p>
<h2>Qu’y a-t-il derrière le « quoiqu’il en coûte » ?</h2>
<p>Dans les années 1980, une <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1540-6261.1984.tb03893.x">étude</a> avait tenté d’évaluer plus précisément ces coûts indirects en mesurant d’une part, le différentiel de la baisse du chiffre d’affaires des entreprises ayant fait faillite comparativement à la moyenne des ventes du secteur et d’autre part, l’écart entre le montant réel des ventes et les prévisions réalisées trois ans avant la faillite. Ces coûts pourraient ainsi représenter de 6,6 à 8,1 % de la valeur de la firme. La difficulté d’une telle approche reste toutefois l’accès aux données.</p>
<p>Une seconde méthode consiste à mesurer les coûts indirects en utilisant les données boursières au travers des coûts de réputation et des effets de contagion. On mesure les variations de cours boursier des clients et fournisseurs des sociétés ayant fait faillite. On capte ainsi la perte de valeur subie par les partenaires des entreprises ayant fait faillite (effet contagion). Les résultats font ressortir des pertes de l’ordre de 1 à 3 % de la valeur boursière des fournisseurs et des clients.</p>
<p>S’il reste difficile de prévoir le nombre exact des faillites en 2021, il n’en reste pas moins vrai qu’il serait très utile de pouvoir mesurer les coûts de ces faillites pour l’ensemble des acteurs. Cela aurait deux mérites. Le premier serait de savoir ce qu’il convient de mettre derrière le « quoiqu’il en coûte ». Le second serait de permettre des comparaisons avec nos partenaires pour savoir où nous situer au sein de cette crise mondiale.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/166978/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les redressements judiciaires liés à la levée des mesures d’aide annoncée par le gouvernement entraîneront des coûts à la fois directs et indirects variables selon le type d’entreprise concernée.Eric Séverin, Professeur des Universités Finance - Comptabilité, Université de LilleDavid Veganzones, Assistant professor, management & finance, ESCE International Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1664582021-08-23T18:10:24Z2021-08-23T18:10:24ZQue nous réserve l’économie mondiale en 2022 ?<p><em>Le Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII) livre son décryptage annuel des grandes tendances à venir dans son ouvrage collectif <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/l_economie_mondiale_2022-9782348069857">« L’économie mondiale 2022 » publié aux Éditions La Découverte</a> (collection Repères), à paraître le 9 septembre. Tour d’horizon des grandes questions de l’année à venir avec Isabelle Bensidoun et Jézabel Couppey-Soubeyran, coordinatrices de l’ouvrage.</em></p>
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<p><strong>The Conversation France : L’année 2021 a vu la pandémie s’installer, mais aussi les vaccins arriver. Est-on à l’aube de la sortie de la crise sanitaire et donc de la crise économique ?</strong></p>
<p>Difficile à dire, car si les vaccins portent l’espoir d’un retour à une vie normale, les variants font craindre de nouveaux reconfinements. Aussi, pour le moment, l’économie mondiale reste suspendue aux évolutions sanitaires. Du côté économique, la chute d’activité initialement prévue par le FMI à 4,9 % pour l’année 2020 <a href="https://www.imf.org/fr/Publications/WEO/Issues/2021/07/27/world-economic-outlook-update-july-2021">n’aura finalement été que de 3,2 %</a> grâce aux soutiens publics massifs, tant budgétaires que monétaires, et à une reprise particulièrement vigoureuse lors des périodes de déconfinement.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/417401/original/file-20210823-20-19wj4t6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/417401/original/file-20210823-20-19wj4t6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/417401/original/file-20210823-20-19wj4t6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/417401/original/file-20210823-20-19wj4t6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/417401/original/file-20210823-20-19wj4t6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/417401/original/file-20210823-20-19wj4t6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/417401/original/file-20210823-20-19wj4t6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/417401/original/file-20210823-20-19wj4t6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.imf.org/fr/Publications/WEO/Issues/2021/07/27/world-economic-outlook-update-july-2021">FMI (Juillet 2021).</a></span>
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</figure>
<p>Mais la crise sanitaire n’a pas été partout gérée de la même manière et les États n’avaient pas tous la même capacité à financer les mesures pour compenser la paralysie de l’activité. Les perspectives sont donc très contrastées, entre l’Asie en développement, dont le PIB par tête devrait en 2021 <a href="https://www.imf.org/en/Publications/WEO/weo-database/2021/April/select-aggr-data">dépasser de près de 6 % son niveau de 2019</a>, les économies avancées, où il devrait être revenu à son niveau de 2019, et l’Amérique latine et l’Afrique subsaharienne, où il devrait lui être inférieur d’environ 5 % et 4 %.</p>
<p>Se dessine ainsi une économie mondiale où les écarts de niveaux de vie vont s’accentuer et où les réponses à la crise vont sérieusement modeler le monde d’après.</p>
<p>À cet égard, les États-Unis se démarquent clairement : le choc déclenché par l’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche et le stimulus budgétaire porté à 13 % du PIB américain pourraient bien, selon Sébastien Jean, enclencher un véritable changement de régime de croissance qui creuserait encore l’écart entre l’Europe et les États-Unis, même si les bénéfices engrangés par l’économie américaine <a href="https://theconversation.com/plan-biden-relance-americaine-consequences-mondiales-161370">se diffuseront à l’économie mondiale</a>. Le nouveau président américain l’a bien compris, la crise est aussi une occasion de revoir les schémas qui prévalaient jusque-là pour construire un « monde d’après » qui ne ressemble pas à celui d’avant, du moins au plan économique.</p>
<p><strong>TCF : Parmi les schémas à réviser, celui concernant la fiscalité internationale a connu une évolution plutôt positive en 2021…</strong></p>
<p>Absolument. Le président américain a clairement été moteur dans la relance des négociations visant à réformer la fiscalité internationale, en proposant un relèvement du taux d’imposition des sociétés dans son pays et un <a href="https://www.france24.com/fr/%C3%A9co-tech/20210701-accord-%C3%A0-l-ocde-sur-une-taxe-mondiale-%C3%A0-15-sur-les-multinationales">taux plancher au niveau international à 15 %</a>, approuvé par les pays de l’OCDE en juillet. Il faut dire que, sur les quarante dernières années, c’est à une baisse drastique de l’impôt sur les sociétés que l’on a assisté́ dans les économies avancées.</p>
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<p>Sans minimiser l’importance de la réforme en cours, Vincent Vicard souligne le double enjeu auquel la réforme internationale doit répondre : lutter contre l’évitement fiscal, angle sous lequel cette réforme est le plus souvent abordée, mais également <a href="https://theconversation.com/taxe-mondiale-a-15-sur-les-multinationales-un-accord-au-g7-et-beaucoup-de-questions-162288">mettre fin à une concurrence fiscale</a> encore intense entre États. À cet égard, la coopération internationale revêt une importance cruciale pour permettre à ces derniers de sortir d’une course au moins-disant et de retrouver leur souveraineté fiscale.</p>
<p><strong>TCF : S’agissant de la montée des dettes publiques et de la manière dont il va falloir les (di)gérer, quelle est la meilleure stratégie ? Celle adoptée par les États-Unis qui ne semblent pas s’en soucier plus que cela, ou celle des Européens plus prompts à se demander comment rapidement y remédier ?</strong></p>
<p>Les leçons qui peuvent être tirées de la gestion, au XIX<sup>e</sup> et au XX<sup>e</sup> siècles, de niveaux parfois encore plus élevés de dette qui suscitaient les mêmes inquiétudes qu’aujourd’hui, sont claires : rien n’a été pire pour y faire face que le <a href="https://www.cairn.info/revue-l-economie-politique-2015-3-page-102.htm">choix de l’austérité</a>. C’est au contraire, le plus souvent, par la croissance que les dettes publiques massives ont été digérées.</p>
<p>Les dépenses publiques doivent donc se poursuivre. D’autant que, pour des États souverains au niveau monétaire, une dette publique élevée n’est pas aujourd’hui un problème. Il leur suffit de piloter l’action des banques centrales pour que ces dernières contrôlent les taux d’intérêt au niveau qui convient, et monétisent les dettes publiques autant que de besoin.</p>
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<p>Reste que tous les États ne disposent pas de cette souveraineté. Et en cela l’insouciance est plus compréhensible outre-Atlantique.</p>
<p><strong>TCF : Donc ceux qui disposent de cette souveraineté, comme les États-Unis, bénéficient d’un gros avantage par rapport à l’Union européenne, notamment parce que cela leur permet de stimuler plus aisément la demande ?</strong></p>
<p>Si l’on en croit les penseurs de la <a href="https://partageonsleco.com/2021/02/15/stagnationseculaire/">stagnation séculaire</a>, le problème auquel sont confrontés les économies matures est clairement un problème d’insuffisance chronique de la demande et tout particulièrement de l’investissement privé.</p>
<p>Dans ce contexte, rien de tel qu’un soutien public, à condition toutefois, souligne Axelle Arquié, que la recherche d’une croissance soutenue ne se fasse pas au prix de dégradations environnementales <a href="https://www.nature.com/articles/s41558-021-01058-x">d’ores et déjà coûteuses en vies humaines</a>. Aussi la réalisation d’investissements publics massifs, orientés là où ils permettront à nos économies d’opérer leur nécessaire transformation énergétique et écologique apparaît-elle comme l’issue la plus favorable : celle qui permettrait à la fois de sortir les économies avancées de la stagnation séculaire tout en agissant pour le climat.</p>
<p>Là encore, une intervention de l’État, énergique et bien dirigée, apparaît comme la principale clé d’entrée dans le « monde d’après ». Et ce aussi bien d’un côté de l’Atlantique que de l’autre.</p>
<p><strong>TCF : Mais ne risque-t-on pas avec ces actions publiques pour soutenir la croissance de voir ressurgir le spectre de l’inflation ?</strong></p>
<p>Si l’on s’appuie sur les grilles d’analyse traditionnelle comme la fameuse <a href="https://partageonsleco.com/2020/02/05/la-courbe-de-phillips-fiche-concept/">courbe de Phillips</a> augmentée, qui relie accélération de l’inflation et chômage structurel, sur laquelle s’appuie les banques centrales depuis plusieurs décennies pour décider de la conduite des politiques monétaires, alors oui, on a tout lieu de craindre un retour de l’inflation lorsque la demande est stimulée. Mais le bon guidage de la politique économique de ces prochaines années va nécessiter de remiser les formules qui ont fait leur temps.</p>
<iframe title="L’inflation reste pour l’instant moins prononcée en Europe qu’aux États-Unis" aria-label="Interactive line chart" id="datawrapper-chart-1eLl1" src="https://datawrapper.dwcdn.net/1eLl1/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width : 0 ; min-width : 100 % !important ; border : none ;" height="400" width="100%"></iframe>
<p>D’autant que François Geerolf nous enseigne que, en réalité, le lien qui prévaut n’est pas entre chômage et inflation, mais <a href="https://theconversation.com/retour-sur-la-baisse-du-chomage-est-elle-encore-un-moteur-de-linflation-159972">entre chômage et appréciation du taux de change réel</a>. En conséquence, l’arbitrage auquel sont confrontés les pouvoirs publics n’est pas entre inflation et chômage, mais entre perte de compétitivité et chômage. De quoi être moins arcbouté sur les craintes d’une reprise de l’inflation lorsque le chômage se réduit ou lorsque l’activité repart, et éviter ainsi des remontées prématurées des taux d’intérêt.</p>
<p><strong>TCF : Une petite révolution pour les banques centrales, d’autant qu’elles assurent <a href="https://www.lesechos.fr/finance-marches/marches-financiers/climat-la-bce-donne-des-gages-sur-son-verdissement-1284169">revoir la couleur de leur politique monétaire</a>… En la matière, est-on sur la bonne voie ?</strong></p>
<p>Les banques centrales ont pris conscience qu’il leur faut passer au vert. Il en va de leurs objectifs de stabilité monétaire et financière que le changement climatique menace, et de l’alignement de la finance sur des trajectoires bas carbone. Les options qu’elles pourraient mobiliser, pour faire en sorte que la finance contribue à atténuer le risque climatique plutôt qu’à l’aggraver, <a href="https://theconversation.com/comment-la-bce-peut-enfin-verdir-sa-politique-monetaire-152117">ne manquent pas</a>. Les refinancements qu’elles octroient aux banques, les garanties qu’elles exigent, leurs rachats d’actifs, etc. : tout cela pourrait verdir.</p>
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<figcaption><span class="caption">Transformer la création monétaire au service du bien commun (Xerfi canal, juillet 2021).</span></figcaption>
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<p>Mais les banques centrales avancent à petits pas. Pour l’instant, même l’éventail des options vert clair n’est pas très ouvert. Quant à l’option vert vif, celle qui mettrait le pouvoir de création monétaire des banques centrales au service de l’écologie en finançant directement les dépenses publiques d’investissement dans ce domaine, c’est celle qui suscite le plus d’oppositions car c’est aussi celle qui réclamerait des changements institutionnels auxquels, malgré l’urgence, les autorités ne sont pas encore prêtes.</p>
<p><strong>TCF : Un autre défi auquel les banques centrales sont confrontées, avec le développement des cryptomonnaies, c’est celui de passer au numérique. Sont-elles davantage résolues à agir dans ce domaine ?</strong></p>
<p>Oui, les banques centrales ont bien conscience qu’il va leur falloir agir. Car l’une des transformations monétaires les plus emblématiques de ces dernières années, l’essor des monnaies numériques cryptographiques, bitcoin et autres <a href="https://www.numerama.com/tech/732951-stablecoins-que-sont-ces-cryptos-stables-de-plus-en-plus-populaires-mais-controversees.html"><em>stable coins</em></a>, pose des défis redoutables à l’ordre monétaire de demain. Le bitcoin, qui se voulait un projet monétaire alternatif, fondé sur la contestation d’un ordre monétaire centralisé et le postulat d’une confiance décentralisée, se laisse de plus en plus rattrapé par les excès du capitalisme financiarisé.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1383013088505499649"}"></div></p>
<p>Avec les <em>stable coins</em> (type <a href="https://www.journaldunet.fr/patrimoine/guide-des-finances-personnelles/1438892-diem-ex-libra-les-derniers-elements-sur-la-future-crypto-de-facebook-juin-2021/">diem de Facebook</a>) s’amorce un changement d’échelle et de logique qui pourrait nous faire basculer dans un capitalisme de surveillance, où le contrôle, aux mains d’acteurs privés, s’opère par le biais de l’information et du chiffre, effaçant la puissance publique. Pour Michel Aglietta et Odile Lakomski-Laguerre, la souveraineté monétaire est en danger. Aussi, pour la réaffirmer, les banques centrales doivent répondre à ces transformations par la création de leurs propres monnaies numériques.</p>
<p><strong>TCF : Alors que l’économie mondiale reste surdéterminée par la pandémie, on voit que les défis à relever sont dès à présent immenses !</strong></p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/417390/original/file-20210823-13-1j5yz72.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/417390/original/file-20210823-13-1j5yz72.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/417390/original/file-20210823-13-1j5yz72.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=945&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/417390/original/file-20210823-13-1j5yz72.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=945&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/417390/original/file-20210823-13-1j5yz72.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=945&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/417390/original/file-20210823-13-1j5yz72.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1187&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/417390/original/file-20210823-13-1j5yz72.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1187&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/417390/original/file-20210823-13-1j5yz72.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1187&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">L’économie mondiale 2022.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.editionsladecouverte.fr/l_economie_mondiale_2022-9782348069857">Éditions La Découverte</a></span>
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</figure>
<p>…</p>
<p>Oui, et ils mettent au défi la solidarité internationale. Car aussi bien pour limiter la circulation du virus que pour faire face aux défis communs que sont la lutte contre le changement climatique, la préservation de la biodiversité, la lutte contre la pauvreté ou les paradis fiscaux, seule une action concertée permettra de les relever.</p>
<p>Quant aux choix qui seront faits en matière macroéconomique entre, d’une part, le maintien des doctrines qui ont installé la sobriété budgétaire et l’obsession de l’inflation, et, d’autre part, le déploiement d’actions plus soucieuses de remédier au défi posé par l’insuffisance chronique de la demande, ils façonneront, à n’en pas douter, les trajectoires des économies avancées.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/166458/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jézabel Couppey-Soubeyran est membre de l'Institut Veblen. Elle a reçu des financements de la Chaire énergie et prospérité (Institut Louis Bachelier). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Isabelle Bensidoun ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Solidarité internationale, verdissement des politiques monétaires, cryptomonnaies… Les défis post-Covid sont immenses.Isabelle Bensidoun, Économiste, CEPIIJézabel Couppey-Soubeyran, Maître de conférences en économie, Université Paris 1 Panthéon-SorbonneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1658342021-08-12T21:15:12Z2021-08-12T21:15:12ZLes défaillances d’entreprise, un risque finalement limité pour l’économie et les comptes publics<p>La crise, débutée en mars 2020 par le premier confinement, a entraîné une <a href="https://www.lepoint.fr/politique/le-pib-a-chute-de-8-en-2020-contre-les-8-2-annonces-28-05-2021-2428514_20.php">baisse du PIB de 8 % en 2020</a>. Cependant, l’arrêt de l’économie durant les différentes vagues n’a pas entraîné, comme on aurait pu s’y attendre, une hausse des défaillances d’entreprises, c’est-à-dire des situations où une unité légale, n’étant plus en mesure de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, se trouve en cessation et doit déposer son bilan, ce qui conduit à une procédure de redressement judiciaire (graphique 1).</p>
<p>Au contraire, le nombre d’entreprises faisant l’objet d’une procédure de redressement judiciaire a <a href="https://www.banque-france.fr/statistiques/defaillances-dentreprises-avr-2021">diminué de 35 % en avril 2021</a> par rapport à avril 2020, selon la Banque de France. Au-delà de la fermeture des tribunaux de commerce durant la première vague, qui a ralenti le processus judiciaire, ce sont les aides de l’État qui ont fortement contribué au soutien des entreprises, comme le montre le <a href="https://www.strategie.gouv.fr/publications/comite-de-suivi-devaluation-mesures-de-soutien-financier-aux-entreprises-confrontees-0">rapport final</a> du comité de suivi et d’évaluation des mesures de soutien aux entreprises de France Stratégie.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/415217/original/file-20210809-19-1g2l1yy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/415217/original/file-20210809-19-1g2l1yy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/415217/original/file-20210809-19-1g2l1yy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/415217/original/file-20210809-19-1g2l1yy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/415217/original/file-20210809-19-1g2l1yy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/415217/original/file-20210809-19-1g2l1yy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/415217/original/file-20210809-19-1g2l1yy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/415217/original/file-20210809-19-1g2l1yy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Graphique 1. La forte contraction du PIB n’a pas entraîné une hausse des défaillances d’entreprises.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Insee (Comptes nationaux trimestriels) et Banque de France (Démographie d’entreprises)</span></span>
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<p>Les mesures de soutien public ont permis d’alléger le coût du travail : ainsi, la mise en place du dispositif d’activité partielle a réduit la charge de la masse salariale des entreprises et des reports de dettes fiscales et sociales (à hauteur de 3,5 milliards d’euros) ont temporairement réduit leurs charges sociales.</p>
<h2>Un taux de refus limité</h2>
<p>L’État a, par ailleurs, instauré des dispositifs de soutien à la trésorerie. Le fonds de solidarité (32,2 milliards d’euros) a été renforcé et élargi afin de subventionner les frais fixes des entreprises. Enfin, le prêt garanti par l’État (PGE), dispositif le plus important (139,28 milliards d’euros), a été créé afin de permettre aux entreprises d’étaler le coût de la crise sur plusieurs exercices.</p>
<p>Ce prêt, qui est garanti par l’État à hauteur de 90 %, permet d’obtenir des taux d’intérêt avantageux et de soutenir le financement bancaire des entreprises. Sollicitée plus de 600 000 fois, cette aide a fait l’objet d’une sélection de la part des banques avec un taux de refus des demandes de PGE qui est certes <a href="https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/fs-2021-rapport-etape-coeure-avril_1.pdf">resté inférieur à 3 %</a> mais a pu limiter le surendettement des entreprises.</p>
<p>En moyenne, ce sont les entreprises ayant des niveaux d’endettement intermédiaires qui ont contracté ces prêts avec un taux de participation au dispositif PGE <a href="https://www.ipp.eu/wp-content/uploads/2021/04/evaluation-contrainte-entreprises-remboursement-prets-garantis-etat-avril-2021.pdf">proche de 40 %</a>, les plus endettées n’ayant pas alourdi leurs dettes via ce dispositif (leur taux de participation est près de deux fois plus faible).</p>
<p>En cas de défaut, les banques seront touchées. Cependant, le risque de crédit semble contenu. En effet, en septembre 2020, les PGE représentaient 6,4 % de la dette brute des sociétés non financières (SNF) et <a href="https://www.banque-france.fr/sites/default/files/media/2020/10/27/820151_7_impact_crise_covid_octobre_ok.pdf">10,2 % de leurs crédits bancaires</a>, selon la Banque de France. Ces crédits de trésorerie ont donc soutenu les SNF mais ils représentent une part minime de leur dette et de leur capacité d’endettement.</p>
<p>Un accroissement significatif du risque de défaut des SNF n’est cependant pas exclu dans un futur proche. Pour estimer son ampleur potentielle, nous considérons deux scénarios alternatifs.</p>
<h2>Des pertes supportables</h2>
<p>Le premier scénario consiste à supposer que la probabilité de défaut des entreprises est égale à la part de prêts non performants dans l’ensemble des crédits. Ces prêts, correspondant aux créances douteuses dont le risque de défaut élevé constitue une fragilité dans les bilans bancaires, représentaient <a href="https://sdw.ecb.europa.eu/quickview.do?SERIES_KEY=359.CBD2.Q.FR.W0.11._Z._Z.A.F.I3632._Z._Z._Z._Z._Z._Z.PC">2,1 % de l’ensemble des crédits</a> au premier trimestre 2021, selon Eurostat.</p>
<p>Une telle probabilité de défaut de 2,1 % conduirait pour les banques à des pertes représentant 3,7 % de leurs fonds propres (tableau 1). Encore faut-il souligner que les pertes associées aux PGE ne représentent qu’une fraction très marginale de ce chiffre, correspondant à 0,04 % des fonds propres des banques. Selon ce scénario, le risque de défaut ne pèserait pas lourd non plus dans les dépenses publiques (0,4 %).</p>
<p>Le second scénario correspond à la probabilité de défaut de <a href="https://www.senat.fr/notice-rapport/2020/r20-583-notice.html">5,3 % retenue par le gouvernement</a> dans ses estimations. Les pertes des banques se monteraient alors à 9,2 % de leurs fonds propres (dont 0,1 % liés aux PGE), tandis que le coût pour l’État représenterait 1,1 % des dépenses publiques.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/415216/original/file-20210809-25-t3hji8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/415216/original/file-20210809-25-t3hji8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/415216/original/file-20210809-25-t3hji8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=571&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/415216/original/file-20210809-25-t3hji8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=571&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/415216/original/file-20210809-25-t3hji8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=571&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/415216/original/file-20210809-25-t3hji8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=717&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/415216/original/file-20210809-25-t3hji8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=717&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/415216/original/file-20210809-25-t3hji8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=717&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Tableau 1. Les risques de défaut ont un effet surmontable tant sur les dépenses de l’État que sur les fonds propres des banques.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs.</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Quoique substantiels, ces montants de pertes restent tout à fait surmontables pour les banques comme pour l’État. Un diagnostic qui rejoint celui établi par Pierre-Olivier Gourinchas et ses co-auteurs dans une recherche récente. Selon ces économistes, les politiques d’aide aux entreprises mises en œuvre dans la plupart des pays <a href="https://www.aeaweb.org/articles?id=10.1257/pandp.20211109">n’ont pas créé une « bombe à retardement »</a>. Les prêts associés arrivent à échéance, mais les défaillances d’entreprises restent modestes, de même que les coûts de ces politiques.</p>
<p>En somme, si la sortie de la crise économique et sanitaire se confirmait dans un avenir proche, ces évaluations montrent que les dispositifs d’aide aux entreprises auront rempli leur rôle avec succès, comme le conclut le <a href="https://www.strategie.gouv.fr/publications/comite-de-suivi-devaluation-mesures-de-soutien-financier-aux-entreprises-confrontees-0">rapport</a> de France Stratégie, limitant la destruction du tissu productif français, avec des effets d’aubaine modérés, sans exposer les banques et l’État à des risques de défaut excessifs.</p>
<hr>
<p><em>Sarah Nandnaba, élève fonctionnaire stagiaire à l’ENS Paris-Saclay, a co-rédigé cet article</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/165834/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Erica Perego a reçu des financements de la Fondazione Cariplo, Italie en 2010. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Fabien Tripier a reçu des financements de l'ANR. </span></em></p>Les fonds propres des banques et les dépenses de l’État rendent largement surmontables les défauts sur les prêts garantis par l’État, qui auront globalement rempli leur rôle avec succès.Erica Perego, Économiste, CEPIIFabien Tripier, Professeur à l'Université Paris-Saclay, Université d'Evry, Conseiller scientifique, CEPIILicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1655052021-08-08T18:21:59Z2021-08-08T18:21:59ZLe difficile combat de Joe Biden contre les divisions de l’Amérique<p>Joe Biden y a travaillé pendant des mois. Il a finalement obtenu un compromis avec une dizaine de républicains au Sénat sur la première partie d’un projet de loi pour la rénovation des infrastructures de 1 200 milliards de dollars, dont 550 de dépenses fédérales nouvelles. Cette partie concerne les ponts, routes, ports, canalisations, Internet à haut débit, etc. Par ce compromis, la Maison Blanche vise à combattre l’obstruction systématique au Sénat – les républicains disposant d’une minorité de blocage – grâce à un vote bipartisan qu’elle espère imminent.</p>
<p>Le reste du projet devrait fusionner avec celui, plus axé sur le social, intitulé « American Families » <a href="https://www.mediapart.fr/journal/international/040821/joe-biden-la-recherche-d-un-impossible-compromis-au-congres">dans le cadre d’un texte de loi de 3 500 milliards de dollars</a>, mais celui-ci suivra la procédure dite de « réconciliation », ce qui signifie qu’une majorité simple suffit pour la voter au Sénat. L’adoption de ces deux textes serait une étape supplémentaire de l’immense plan de relance de Biden dont le premier volet, de 1 900 milliards de dollars, a été <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2021/03/06/etats-unis-le-senat-adopte-le-plan-de-1-900-milliards-de-dollars-souhaite-par-joe-biden_6072221_3210.html">adopté en mars</a>, sans les républicains. Au total, l’objectif de départ s’élève à plus de 6 000 milliards de dépenses et d’investissements, répartis sur plusieurs années et en trois grandes lois aux allures de New Deal et de Great Society.</p>
<p>L’ambition bipartisane de Biden exige des concessions importantes à droite et au centre et fait déjà grincer des dents à gauche. Elle est centrale dans la stratégie du président pour tenter de réconcilier l’Amérique avec elle-même sur des grands projets de société, après des années de divisions amplifiées par son prédécesseur. Biden n’a cessé de le répéter pendant sa campagne et <a href="http://nytimes.com/2021/03/25/us/politics/biden-white-house-press-conference.html">lors de sa première conférence de presse en tant que président, 25 mars</a>.</p>
<p>Après le Plan de relance, il devra s’atteler à une grande réforme de la législation sur l’immigration, à l’extension de l’Affordable Care Act (l’Obamacare) ou encore à la régulation du port d’armes et au combat contre le racisme institutionnel, sujets sur lesquels il est très attendu par les mouvements militants et l’aile gauche du parti. Mais il dispose d’un temps politique d’autant plus court que les élections de mi-mandat, en novembre 2022, risquent de lui faire perdre sa courte majorité au Congrès. Pour l’heure, le président mise sur son expérience passée de négociateur en chef quand il était sénateur et met les républicains au pied du mur. Il est encouragé par le fait que ses réformes bénéficient jusqu’ici d’une relative popularité dans l’électorat de droite, <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/post-abc-poll-biden/2021/07/03/54e95b6e-db43-11eb-8fb8-aea56b785b00_story.html">pour sa gestion de la pandémie</a>.</p>
<h2>Résister aux assauts des républicains</h2>
<p>« America is back ». La formule, martelée par le président en quasi-slogan publicitaire, a par ailleurs vocation à rappeler au peuple américain et au monde entier qu’il a l’intention de faire des États-Unis une démocratie exemplaire et de rétablir l’influence et la confiance perdues à l’international pendant les années Trump.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/viDuzR42hVk?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>De fait, la démocratie américaine est malmenée et il faut bien dire qu’une partie du camp républicain y travaille ardemment, à coup de déclarations complotistes et de limitation du droit de vote.</p>
<p>D’une part, le mythe de l’« élection volée » de novembre 2020, créé et entretenu par Donald Trump et ses soutiens, perdure (<a href="https://www.washingtonpost.com/politics/2021/07/31/trump-committees-fundraising-2021-fec/?tid=ss_tw">et rapporte beaucoup d’argent</a>). Une majorité d’électeurs et d’électrices républicain·e·s demeure convaincue que les démocrates ont fraudé en masse. Du côté des élu·e·s du Grand Old Party, c’est encore pire : <a href="https://www.washingtonpost.com/politics/the-senate-vote-on-the-bipartisan-jan-6-commission-showed-trumps-power-and-a-government-under-duress/2021/05/28/9f91becc-bff0-11eb-9c90-731aff7d9a0d_story.html">seul·e·s six sénatrices et sénateurs sur 50 (et 35 représentant·e·s sur 212)</a> ont voté en faveur de la création d’une commission indépendante pour enquêter sur la tentative d’insurrection au Capitole, le 6 janvier 2021. L’institut Morning Consult a réalisé une <a href="https://morningconsult.com/2021/06/09/trump-reinstated-democracy-polling/">enquête</a> mettant en évidence qu’en juin dernier, 29 % de l’électorat républicain pensait que Trump, qui <a href="https://www.vanityfair.com/news/2021/06/donald-trump-august-reinstatement">fait lui-même courir ce bruit</a>, va revenir à la Maison Blanche avant la fin de l’année 2021.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1402588031635398665"}"></div></p>
<p>D’autre part, dans la plupart des États fédérés, les républicains s’efforcent de changer les règles des futures élections. Une tentation partagée par de nombreux partis de droite radicale dans divers pays démocratiques, au <a href="https://www.vanityfair.com/news/2021/06/donald-trump-august-reinstatement">Brésil</a> comme en <a href="https://www.ips-journal.eu/topics/european-integration/voter-suppression-comes-to-europe-3999/">Europe</a>, comme le montre la journaliste Anne Applebaum dans son dernier livre, <a href="https://www.grasset.fr/livres/democraties-en-declin-9782246855125"><em>Démocraties en déclin</em></a>. Des lois locales (limitation, voire interdiction du vote anticipé ou par correspondance, suppression d’électrices et d’électeurs des listes, etc.) visent à restreindre l’accès aux urnes de celles et ceux qui ne votent pas pour le Grand Old Party.</p>
<p>Les Noir·e·s, les plus démuni·e·s et les jeunes sont particulièrement visé·e·s. Mais ce n’est pas tout. Il s’agit également, dans les États conservateurs, de donner davantage de pouvoir aux autorités élues pour gérer les désaccords sur le résultat des urnes, autrement dit de remettre en question ce dernier. Donald Trump en <a href="https://www.nytimes.com/2021/06/19/us/politics/republican-states.html?campaign_id=2&emc=edit_th_20210620&instance_id=33461&nl=todaysheadlines&regi_id=61994657&segment_id=61221&user_id=3f2a08136276afbc6c51023c67539e27">a rêvé en novembre</a> (et a fait pression sur certains États, on se souvient de la Géorgie) : les républicains tentent de le voter aujourd’hui.</p>
<p>Biden, de son côté, s’efforce de faire passer deux lois fédérales pour protéger le droit de vote. Là aussi, des tractations, difficiles, sont en cours au Congrès et là aussi, l’aile gauche du parti démocrate <a href="http://nytimes.com/2021/07/22/us/politics/biden-voting-rights.html">exige d’aller vite et de frapper fort</a>.</p>
<h2>Le masque et le vaccin continuent de diviser la classe politique</h2>
<p>Le port du masque et la vaccination constituent encore d’importants marqueurs de clivage politique aux États-Unis. Le rejet d’un supposé « nanny state » (« État nounou ») et la préservation de la sacro-sainte liberté individuelle guident de nombreux et nombreuses parlementaires de droite à critiquer ces dispositions.</p>
<p>Depuis quelques derniers jours, la règle est de porter un masque à l’intérieur du Capitole. La Speaker de la Chambre, Nancy Pelosi, a <a href="https://edition.cnn.com/2021/07/28/politics/nancy-pelosi-kevin-mccarthy-mask-mandate/index.html">traité d’« imbécile »</a> le chef de la minorité républicaine, Kevin McCarthy, qui estimait que cette mesure ne reposait sur aucun fondement scientifique. Un autre sujet de discorde, plus clivant cependant au sein de la classe politique que dans population, est apparu à la suite des nouvelles mesures instaurées par le président Biden ciblant les quatre millions de fonctionnaires fédéraux : ils et elles devront soit se faire vacciner, soit se faire tester chaque semaine, et porter un masque en continu pendant leur service.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1420965983662092290"}"></div></p>
<p>Les gouverneurs, républicains, du Nebraska, de l’Iowa et de Floride ont affirmé qu’ils ne respecteraient pas les nouvelles recommandations des autorités de santé sur le port du masque dans l’espace public, l’amplification de la vaccination et les pass sanitaires. Selon la <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/07/29/le-debat-sur-la-vaccination-obligatoire-prend-de-l-ampleur-aux-etats-unis_6089898_3244.html">National Academy for State Health Policy</a>, ce sont plus de 150 projets de loi qui ont été déposés au niveau local pour interdire toute « discrimination » fondée sur le statut vaccinal. Cinq États fédérés conservateurs ont pour leur part interdit aux entreprises d’exiger de leur personnel d’être vacciné. Et ce ne sont que quelques exemples.</p>
<h2>Gouverner l’Amérique plurielle</h2>
<p>Certaines et certains soufflent donc sur les braises, et la Covid-19 est aussi une occasion de renforcer le pouvoir des États fédérés face à Washington dans une « guerre culturelle » qui ne cesse de se renouveler à coups de polémiques.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1411720392369135621"}"></div></p>
<p>Présente avant Trump, attisée par lui pendant ses quatre années au pouvoir, et entretenue par ses soutiens (et lui-même) depuis son départ de la Maison Blanche, l’obsession surannée d’une Amérique blanche et patriarcale se porte par ailleurs très bien. Des mesures <a href="https://www.nytimes.com/2021/03/11/sports/transgender-athletes-bills.html">interdisant aux fillettes transgenres de participer à des compétitions sportives</a> à l’offensive, <em>via</em> des fake news, <a href="https://theconversation.com/bans-on-critical-race-theory-could-have-a-chilling-effect-on-how-educators-teach-about-racism-163236">contre la Critical Race Theory, un champ de recherche universitaire et d’enseignement portant sur le racisme structurel</a> – son histoire, ses mécanismes, ses représentations, ses effets, etc. –, la droite trumpiste poursuite son offensive. Or, faut-il le rappeler, la <a href="https://www.brookings.edu/blog/fixgov/2021/07/02/why-are-states-banning-critical-race-theory/">société américaine n’est ni <em>gender blind</em>, ni <em>color blind</em></a> : discriminations et inégalités de genre et liées à l’origine perdurent, voire se sont renforcées avec la pandémie (accès à la santé, perte d’emploi, perte du logement, pauvreté, etc.).</p>
<p>Un point qui n’a pas échappé à la Maison Blanche, dont le choix est de cibler les populations les plus vulnérables dans le cadre de <a href="https://www.courrierinternational.com/revue-de-presse/etats-unis-lambitieux-plan-de-relance-de-biden-1-900-milliards-pour-remettre-le-pays">politiques universelles, notamment le plan de relance</a>. Un exemple éclairant est la mise en place d’allocations familiales exceptionnelles qui favoriseront les mères célibataires les plus pauvres mais qui, au final, concerneront plus de 90 % des enfants. Un autre est la création, au sein du ministère de la Santé, d’une <a href="https://www.minorityhealth.hhs.gov/omh/browse.aspx?lvl=2&lvlid=100">« Health equity task force »</a>, afin que les critères de vulnérabilité (pauvreté, origine, sexe, handicap, territoire de vie, etc.), qui s’entremêlent, soient particulièrement pris en compte dans la réponse à la Covid-19, à court terme, et aux inégalités sanitaires, sur un plan structurel.</p>
<p>Le président propose depuis son arrivée au pouvoir un agenda plus ambitieux que prévu, et porté par une vision optimiste de la société américaine, « unie dans ses différences ». Et pour mener à bien ses réformes, Biden a choisi un gouvernement féminisé et multiculturel. C’est une question <a href="https://blogs.mediapart.fr/marie-cecile-naves/blog/010221/la-democratie-selon-biden-inclusion-equite-et-expertise">non seulement de représentativité, mais aussi, et inséparablement, de compétences</a>. L’anti-trumpisme au pouvoir.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/165505/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marie-Cécile Naves est membre de l'IRIS. </span></em></p>Joe Biden a mis en branle un ambitieux plan de relance qui vise à remettre l’économie sur les rails. La tâche consistant à réconcilier ses concitoyens sera peut-être encore plus compliquée…Marie-Cécile Naves, Docteure en science politique, chercheuse associée au CRI Paris, Learning Planet Institute (LPI)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1648132021-07-25T16:25:41Z2021-07-25T16:25:41ZLaisser filer l’inflation ou freiner la reprise, le dilemme des banquiers centraux<p>Aux États-Unis, l’indice des prix à la consommation a augmenté de <a href="https://www.zonebourse.com/actualite-bourse/USA-Plus-forte-hausse-des-prix-a-la-consommation-depuis-2008%E2%80%9335846520/">0,9 % en juin</a> après avoir progressé de 0,5 % en mai, et la variation annuelle est supérieure à 5 %. Dans la zone euro, cette hausse est beaucoup moins prononcée, du moins pour l’instant. En France, par exemple, les prix à la consommation ont augmenté de <a href="https://investir.lesechos.fr/marches/actualites/france-l-inflation-augmente-a-1-5-sur-un-an-en-juin-1969795.php">1,5 % en juin</a> par rapport à l’année précédente, alors qu’en variation sur un an, ces prix n’avaient augmenté que de 0,2 % en juin de l’année dernière.</p>
<p>Ce retour de l’inflation peut s’expliquer notamment par un mécanisme économique très simple : la demande augmente et l’offre se réduit, donc les prix augmentent.</p>
<iframe title="L’inflation reste pour l’instant moins prononcée en Europe qu’aux États-Unis" aria-label="Interactive line chart" id="datawrapper-chart-1eLl1" src="https://datawrapper.dwcdn.net/1eLl1/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width : 0 ; min-width : 100 % !important ; border : none ;" height="400" width="100%"></iframe>
<p>D’une part, la pandémie a conduit de nombreux ménages à reporter leur consommation. Pour certains d’entre eux, ils ont accumulé de l’épargne. Lorsque les mesures de distanciation sociales sont levées, ces ménages peuvent à nouveau consommer. Cela correspond à une hausse de la demande.</p>
<p>D’autre part, l’offre de biens et de services subit encore des effets de la pandémie. En bref, toutes les chaînes d’approvisionnement et de production ne sont pas forcément rétablies.</p>
<h2>Une tendance durable ?</h2>
<p>Ces facteurs de demande et d’offre sont considérés comme transitoires : une fois la pandémie terminée, l’offre va se remettre en place et l’épargne accumulée sera dépensée. Ainsi, l’inflation qui en résulte <a href="https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/l-inflation-transitoire-l-hypothese-qui-plait-aux-investisseurs-n-est-pas-la-seule-credible-887708.html">ne devrait pas persister</a>, du moins en théorie. D’une certaine manière, c’est même un signe que l’économie se remet sur les rails et la hausse de la demande va permettre à l’offre de se remettre en place.</p>
<p>Toutefois, il existe un risque que l’inflation reste durablement élevée, ce qui peut constituer un problème pour la reprise. Une telle inflation plus durable pourrait avoir des conséquences pour tous les prix dans l’économie : jusqu’à présent, les hausses de prix aux États-Unis concernent seulement certains secteurs comme l’énergie – et tout spécialement les prix liés au prix du pétrole et du gaz – ou des biens durables comme les voitures, mais <a href="https://www.bls.gov/news.release/cpi.nr0.htm">nettement moins les services</a>.</p>
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<figcaption><span class="caption">Inflation : quels risques pour la relance ? (Académie des Sciences et Techniques Comptables et Financières, juillet 2021).</span></figcaption>
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<p>Si une telle inflation plus persistante venait à se réaliser, les banques centrales n’auront pas d’autre choix que de réagir pour les contenir. En effet, la Réserve fédérale américaine (Fed) comme la Banque centrale européenne (BCE) ont un objectif de stabilité des prix. Dans le cas de la Fed, depuis août 2020, l’inflation doit avoisiner les 2 % en moyenne. Dans le cas de la BCE, depuis sa récente revue stratégique, l’inflation doit être proche de 2 %. Un dérapage persistant des prix ne serait donc plus en accord avec le mandat de ces banques centrales.</p>
<h2>Une question de crédibilité</h2>
<p>Pour éviter un tel risque, les banques centrales devront limiter leur soutien à l’économie, ou bien en restreignant les programmes quantitatifs qu’elles ont mis en place depuis plusieurs années, ou bien en remontant si nécessaire leurs taux directeurs, aujourd’hui au plus bas.</p>
<iframe title="[Insérez le titre ici]" aria-label="Interactive line chart" id="datawrapper-chart-D55dr" src="https://datawrapper.dwcdn.net/D55dr/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width : 0 ; min-width : 100 % !important ; border : none ;" height="400" width="100%"></iframe>
<p>Paradoxalement, un éventuel retour de l’inflation est en partie lié à un risque de manque de crédibilité des banques centrales pour la combattre : si celles-ci préfèrent systématiquement ne pas ralentir l’activité économique pour combattre l’inflation, alors les marchés financiers voire, si le phénomène s’empire, les entreprises et les ménages vont penser que l’inflation risque effectivement de revenir. L’anticipation d’inflation future pousserait alors aux hausses de prix dès aujourd’hui, alimentant la spirale inflationniste.</p>
<p>Aujourd’hui, au-delà du risque pour la reprise, une raison particulière peut conduire les banques centrales à ne pas souhaiter resserrer la vis monétaire : en relevant les taux ou en limitant les achats de titres, les banques centrales peuvent également faire augmenter le coût de la dette des États. Une augmentation trop élevée des taux pourrait rendre insoutenable la dette de certains États et provoquer un défaut souverain.</p>
<p>Quelle que soit sa source, tout manque de crédibilité finirait par se traduire par les anticipations d’inflation à long terme. Dans les mois et années à venir, ce sera la variable clé à vérifier : si ces anticipations commençaient à s’écarter de l’objectif des banques centrales, ces dernières n’auraient d’autre choix que d’intervenir en ralentissant éventuellement la reprise.</p>
<p>Cette crédibilité à resserrer la vis monétaire si besoin, c’est visiblement ce qui a été testé aux États-Unis en juin dernier. La Fed a laissé ses taux inchangés, mais a annoncé que <a href="https://www.letemps.ch/economie/fed-se-prepare-une-hausse-taux-plus-rapide">deux resserrements des taux</a> sont désormais envisagés d’ici à fin 2023, alors que la date de 2024 était précédemment envisagée.</p>
<p>Avec cette communication autour d’une accélération du calendrier, les marchés financiers ont, semble-t-il, perçu que la Fed était crédible pour relever ses taux en cas de retour persistant de l’inflation. En retour, les anticipations d’inflation à plus long terme ont amorcé un léger recul aux États-Unis, laissant espérer que les marchés s’attendent effectivement à ce que la Fed intervienne si nécessaire en cas de hausse de l’inflation.</p>
<iframe title="Évolution des anticipations d’inflation à 5 ans aux États-Unis" aria-label="Interactive line chart" id="datawrapper-chart-uFvmx" src="https://datawrapper.dwcdn.net/uFvmx/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width : 0 ; min-width : 100 % !important ; border : none ;" height="600" width="100%"></iframe>
<img src="https://counter.theconversation.com/content/164813/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Éric Mengus ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En cas de retour persistant de l’inflation, La Fed et la BCE seraient contraintes de relever leurs taux, quitte à casser la croissance, pour tenir leurs objectifs.Éric Mengus, Professeur associé en économie et sciences de la décision, HEC Paris Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1648002021-07-22T23:37:38Z2021-07-22T23:37:38ZClimat des affaires : l’impact de la crise de la Covid-19 est effacé<p>En France, avec la fin des restrictions et la montée en puissance de la campagne de vaccination, le niveau de confiance mesuré par notre enquête trimestrielle, qui s’est déroulée du 28 juin au 16 juillet 2021, bondit de 8 points. Mesuré sur une échelle de zéro à cent (cent indiquant une confiance maximale), il atteint 64 au second trimestre 2021 contre 56 à la fin du premier trimestre 2021.</p>
<iframe title="Le niveau de confiance bondit de 8 points au second semestre 2021" aria-label="Interactive line chart" id="datawrapper-chart-KuSiu" src="https://datawrapper.dwcdn.net/KuSiu/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width : 0 ; min-width : 100 % !important ; border : none ;" height="400" width="100%"></iframe>
<p>Ce niveau de confiance qui reste à confirmer se trouve désormais supérieur aux niveaux observés lorsque la crise de la Covid-19 a commencé. La confiance n’atteignait en effet que 62 début mars 2020. Ces chiffres paraissent indiquer une reprise relativement dynamique à moyen terme de l’activité sans risque de récession.</p>
<h2>Niveaux supérieurs à l’avant-crise</h2>
<p>Cette perception semble d’ailleurs confirmée par les prévisions de croissance du chiffre d’affaires des entreprises. Celles-ci s’établissent désormais à 12 % environ pour l’année 2021 et pour l’année 2022.</p>
<iframe title="L’optimisme rejaillit sur les prévisions de croissance des entreprises" aria-label="Tracé de la flèche" id="datawrapper-chart-QBdhK" src="https://datawrapper.dwcdn.net/QBdhK/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width : 0 ; min-width : 100 % !important ; border : none ;" height="255" width="100%"></iframe>
<p>Dans ce contexte, les entreprises envisagent une hausse de 8,5 % de leurs investissements et de 6 % du nombre de leurs salariés. L’indicateur de solidité financière traduit lui aussi cet optimisme en ressortant à 71 sur une échelle de zéro à cent et en dépassant lui aussi les niveaux observés début 2020.</p>
<p>À l’échelle européenne, le climat des affaires bondit également pour atteindre 70 contre 62 au trimestre précédent. Ce niveau s’avère très supérieur à celui observé avant la crise de la Covid-19. L’Europe se voit notamment tirée par l’Allemagne dont le climat des affaires atteint 75 au second trimestre 2021.</p>
<iframe title="Aux États-Unis comme en Europe, l’optimisme affiché s’approche des valeurs les plus élevées depuis 15 ans " aria-label="Interactive line chart" id="datawrapper-chart-SzI56" src="https://datawrapper.dwcdn.net/SzI56/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width : 0 ; min-width : 100 % !important ; border : none ;" height="350" width="100%"></iframe>
<p>À titre de comparaison, aux États-Unis, le climat des affaires semble se stabiliser aux environs de 69 contre 68 au trimestre précédent selon l’enquête de la Réserve fédérale de Richmond et D’Atlanta. Cela indique une reprise économique marquée pour l’année 2021.</p>
<p>L’indicateur de solidité financière s’établit outre-Altlantique à 74,9 selon cette même enquête. C’est à peine 0,1 point de moins que de la valeur la plus élevée observée depuis 2000. Dans ce contexte, les responsables financiers américains attendent une hausse des chiffres d’affaires d’environ 9 % et une hausse du nombre de salariés d’environ 6 %.</p>
<h2>Risque inflationniste</h2>
<p>La reprise économique provoque cependant des tensions sur les chaînes d’approvisionnement (on parle de « bullwhip effect ») comme nous l’évoquions déjà au <a href="https://theconversation.com/climat-des-affaires-le-faux-semblant-dun-retour-a-la-normale-158795">trimestre précédent</a>. En France, 74 % des entreprises qui nous ont répondu ce trimestre déclarent faire face à ce type de tensions. Elles n’étaient que 62 % au trimestre précédent.</p>
<p>Plus frappant encore, l’ensemble de ces entreprises estime désormais que les tensions pourraient ralentir voire remettre en question la normalisation de leur activité. Moins de 40 % des entreprises nous avaient fait cette réponse au trimestre précédent.</p>
<p>Avec l’intensification de la reprise économique, l’effet est désormais visible dans la plupart des secteurs économiques et la plupart des pays. C’est en Allemagne que l’effet semble le plus fort puisque plus de 90 % des entreprises le mentionnent lorsqu’on les interroge.</p>
<p>De même, la demande croissante en matières premières et matériaux crée des pressions inflationnistes visibles désormais par la majorité des entreprises. En France, 78 % des entreprises déclarent être confrontées à une hausse des prix des intrants.</p>
<p>Ce chiffre ressort à près de 90 % en Allemagne et ces pressions inflationnistes pourraient se diffuser dans l’économie via un réajustement des prix de vente dès la fin d’année 2021.</p>
<h2>Dépendance aux aides</h2>
<p>Enfin, nous avons à nouveau demandé aux responsables financiers d’imaginer un scénario alternatif dans lequel il n’y aurait pas d’aide financière de l’État. Dans ce cas, en France, l’indicateur de solidité financière de l’entreprise ressortirait à 63 sur une échelle de zéro à cent, en hausse par rapport au niveau de 56 observé au trimestre précédent. Pour rappel, l’indicateur de solidité financière, tenant compte des aides de l’État, ressort à 71 pour ce trimestre en France.</p>
<p>La part des entreprises dépendantes ou fortement dépendantes des aides gouvernementales recule aussi pour atteindre 41 % contre un peu plus de 50 % au trimestre précédent. Sans les aides de l’État, celles-ci afficheraient un niveau de solidité financière de 46 sur une échelle de zéro à cent, inchangé par rapport au trimestre dernier.</p>
<p>Si la reprise économique semble profiter à un plus grand nombre d’entreprises, une part importante d’entre elles reste ainsi encore dépendante des aides gouvernementales, repoussant toujours plus loin une sortie définitive des plans de soutien à l’économie.</p>
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<p>_L’enquête mesure chaque trimestre depuis plus de 20 ans le climat des affaires tel que perçu par les responsables financiers des entreprises à travers le monde. L’enquête est courte (environ 5 questions). Elle recueille près de 1 000 réponses anonymes d’entreprises de tous secteurs et de toutes tailles. Des données de l’enquête Duke University – Réserve fédérale de Richmond et Atlanta sont utilisées pour comparaison.</p>
<p><em>Voir <a href="http://www.grenoble-em.com/climat-des-affaires">ici</a> les résultats complets de cette enquête</em></p>
<p>_Prochaine enquête <a href="http://ceocfo.org/French.htm">courant septembre 2021</a></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/164800/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Dupuy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le climat des affaires semble désormais très favorable à la croissance et aux États-Unis. La reprise se trouve cependant menacée par des tensions sur les chaînes d’approvisionnement et sur les prix.Philippe Dupuy, Professeur au département Gestion, Droit et Finance, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1628662021-06-28T19:53:10Z2021-06-28T19:53:10ZLe nouveau cap du Parti démocrate sous Joe Biden<p>Les difficultés du Parti démocrate n’ont pas commencé avec l’élection de Donald Trump en 2016. N’oublions pas que le parti de l’âne a <a href="https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2014/11/05/les-republicains-a-la-conquete-du-senat-americain_4518181_3222.html">perdu le Congrès dès 2014</a>, durant le second mandat de Barack Obama, alors que la situation du pays s’était améliorée et qu’Hillary Clinton n’avait pas encore commencé sa campagne. Le retour au pouvoir des Démocrates en 2020 semble s’accompagner d’un tournant vers le centre gauche qui tranche avec la période de Bill Clinton et même, dans une certaine mesure, avec celle de Barack Obama.</p>
<h2>L’évolution du parti à l’époque de Bill Clinton</h2>
<p>C’est sous Bill Clinton, dans les années 1990, après trois mandats républicains, que les Démocrates ont fini par embrasser ce qu’ils estimaient ne plus pouvoir éviter, à savoir la <a href="https://www.csmonitor.com/1996/0125/25012.html">mythologie du Parti républicain</a>.</p>
<p>Les emplois liés à la bulle technologique étaient alors prometteurs et l’establishment démocrate s’est pris à croire que chacun pourrait gravir les sommets à la condition d’avoir fait des études et que toutes les barrières discriminatoires aient été levées. Le logiciel du Parti a donc glissé d’une solidarité de groupe vers la réussite individuelle, ce qui permettait de défendre des idéaux de justice sociale sans en demander trop aux élites – ces élites auxquelles Clinton a lié l’avenir du Parti sans prévoir de véritable plan B pour qui ne pourrait pas réussir dans les emplois du futur.</p>
<p>Au sortir de la crise de 2008, tout le monde a fini par admettre la réalité d’une polarisation du marché du travail, avec très peu d’emplois qualifiés et rémunérateurs et une large majorité d’emplois non qualifiés et très mal payés.</p>
<p>Bill Clinton avait voulu croire qu’une marée technologique et méritocratique allait soulever la totalité des bateaux, les petits comme les gros, mais cela ne s’est pas produit. Il reste que l’idée était séduisante : avec de l’intelligence, il suffirait d’aller à Harvard puis de décrocher l’emploi de ses rêves chez Google, quels que soient sa race, son genre ou ses préférences sexuelles. Et là, s’agissant de la race, Obama a été une incarnation tout à fait extraordinaire… à ceci près que tout le monde n’est pas et ne peut pas être Barack Obama.</p>
<h2>Le poids de l’aile gauche</h2>
<p>Les Démocrates modérés, dont fait partie Joe Biden, appelaient jusqu’ici l’aile gauche du parti à se recentrer à des fins d’éligibilité. Cela n’a fait qu’accentuer leur rapport de force avec une base qui, elle, demande avec force des emplois, des soins de santé, des écoles décentes, des quartiers sûrs et quelqu’un à Washington qui lui prêterait une oreille attentive. Or les Démocrates <a href="https://www.firstthings.com/web-exclusives/2020/12/democrats-win-in-wealthy-suburbs">représentent aujourd’hui les quartiers les plus riches</a>, et les Républicains <a href="https://www.washingtonpost.com/blogs/in-the-loop/wp/2014/08/05/wealthiest-americans-in-each-state-primarily-support-republicans/">envoient systématiquement à Washington les individus les plus riches</a>. Le revenu médian au Congrès est <a href="https://www.statista.com/statistics/274581/median-wealth-per-member-of--us-congress-by-chamber/">disproportionnellement supérieur à celui de la population</a>.</p>
<p>Les deux partis se réjouissent de la diversification des membres du Congrès, avec 24 % de femmes, 22 % de minorités raciales ou ethniques, et plus de 5 % d’origine étrangère. Mais seuls 2 % des membres du Congrès sont issus de la classe ouvrière. C’est spécifiquement à celle-ci que s’est adressé Bernie Sanders durant ses campagnes de 2016 et de 2020. On lui a d’ailleurs reproché une sorte de <a href="https://newrepublic.com/article/122432/bernie-sanderss-blind-spot-race-was-imported-scandinavia">point aveugle pour ce qui a trait, par exemple, à la question raciale</a>. Sanders, en d’autres termes, ne serait pas « woke ».</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1224592221795766274"}"></div></p>
<p>La gauche du Parti démocrate est donc contrainte par une posture politique parfois impopulaire dont de nombreux dirigeants démocrates se tiennent éloignés. Biden n’a ainsi cherché à endosser ni la posture « woke » ni les problématiques liées à l’intersectionnalité, contrairement à Hillary Clinton en 2016. Il s’est présenté comme un modéré fiable et sympathique, à même de stabiliser le navire après le mandat très controversé de Donald Trump et la poussée des insurgés de Bernie Sanders.</p>
<h2>Le « New Deal » de Joe Biden</h2>
<p>Aujourd’hui tout le monde se demande si Biden va réussir à renverser la table néolibérale et à devenir le Roosevelt du XXI<sup>e</sup> siècle en ressuscitant l’État-providence. Il y a toutefois des limites, importantes, à la comparaison entre Biden et Roosevelt : Roosevelt est élu en 1932 avec 18 % d’avance dans le vote populaire, 472 grands électeurs sur 531 et 42 États sur 48. Force est de constater que la victoire de Biden n’est en rien comparable (4,5 % d’avance en matière de vote populaire, 306 grands électeurs sur 538 et 27 États sur 50).</p>
<p>Cela étant, on peut considérer que le cœur du programme de Biden (les emplois et les infrastructures) ressemble à celui de Roosevelt, même si Obama et Trump ont en réalité utilisé exactement les mêmes thèmes. Le New Deal de Biden (« Build Back Better ») vise à remettre à niveau les infrastructures que Roosevelt avait créées, en ajoutant une infrastructure de services pour soutenir les professions liées au « care ». Roosevelt avait résumé son action en trois objectifs, « Relief, Recovery and Reform », qui s’appliquent aussi à ce que fait Biden.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/build-back-better-le-programme-economique-de-joe-biden-151867">« Build back better » : Le programme économique de Joe Biden</a>
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<p>La séquence « Relief » est déjà là, par le biais du gigantesque <a href="https://www.whitehouse.gov/american-rescue-plan/">American Rescue Plan</a>. En dollars constants de 1933, Biden a fait plus que Roosevelt au cours de ses 100 premiers jours, mais Roosevelt avait déjà réalisé des changements structurels, comme dans le système financier, que Biden n’a pas encore tentés.</p>
<p>La phase « Recovery » est également amorcée avec l’<a href="https://www.whitehouse.gov/briefing-room/statements-releases/2021/03/31/fact-sheet-the-american-jobs-plan/">American Jobs Plan</a> de 2 milliards de dollars, qui va créer des emplois via les infrastructures. Il faudra voir si le fait de placer stratégiquement ce type de projets dans des États « rouges » pourra aider Biden à remporter les 10 voix républicaines nécessaires pour éviter un <em>filibuster</em> au Sénat. La pratique du filibuster permet une obstruction que seule une majorité de 60 sièges permet de contourner, ce qui est très supérieur à la majorité simple dont peuvent disposer aujourd’hui les Démocrates.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1368503039649345536"}"></div></p>
<p>Le troisième « R » (« Reform ») sera le plus difficile. La réforme des lois électorales, de l’immigration, de la législation sur les armes à feu, par exemple, imposera de cumuler toutes les voix démocrates et d’obtenir l’assentiment de dix Républicains au Sénat. Cela paraît difficile sans abolir ou au moins réduire la pratique du <em>filibuster</em>. C’est très important pour que la rupture politique et psychologique soit aussi nette et permanente que celle opérée par Roosevelt, dont la plupart des grandes réalisations sont survenues après sa première année de mandat.</p>
<h2>L’interrogation des midterms de 2022</h2>
<p>Même si Biden réussissait à convaincre la totalité des Démocrates, le pari pourrait tout de même se retourner contre lui.</p>
<p>En 1934, Roosevelt a déjoué la logique des élections de mi-mandat où le parti du président perd traditionnellement des sièges. Ce n’est plus arrivé ensuite jusqu’à ce que George W. Bush instrumentalise la peur liée au 11-Septembre pour tout de même progresser à mi-mandat en 2002. La norme serait donc que les Républicains reprennent le contrôle après les midterms de 2022.</p>
<p>Cela mettrait les Démocrates en grande difficulté ; pour mémoire, c’est uniquement après le désastre des midterms de 1994 que Bill Clinton s’est mis à réaliser le programme économique du Speaker républicain Newt Gingrich. En simplement deux ans, Clinton est passé d’une ambitieuse réforme de la couverture santé à sa célèbre phrase <a href="https://www.pbs.org/weta/washingtonweek/web-video/era-big-government-over-clintons-1996-state-union">« The era of big government is over »</a>. Attendons de voir quel sera le Biden, historiquement très centriste, de l’après-2022.</p>
<p>Les 100 premiers jours de Biden sont ceux d’un Parti qui essaie de corriger le tir, de changer de cap, qui prend enfin ses distances avec l’époque Reagan et se tourne vers un électorat qui semble vouloir évoluer d’un pays de centre droit vers un pays de centre gauche. Il y a beaucoup d’anciens de l’administration Obama dans l’équipe Biden : ils essaient sans doute de donner une impulsion plus ouvertement progressiste à l’administration Biden, mais on verra si les impératifs de la responsabilité fiscale reprennent le dessus, ou pas, après les midterms de 2022.</p>
<p>Biden, comme Obama, a hérité d’une économie en crise, mais son plan de relance est 2,5 fois supérieur à celui d’Obama. Là où l’on avait reproché à Obama un plan trop modeste, trop compliqué et à peine perceptible par les électeurs, Biden a proposé un plan beaucoup plus important, plus simple et plus lisible, notamment centré sur ces fameux <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-eco/etats-unis-les-premiers-cheques-du-plan-de-relance-verses-des-ce-week-end-20210313">chèques de 1 400 dollars par personne</a> prévus dans son plan de relance.</p>
<p>Obama avait émoussé son plan initial pour essayer de s’assurer des voix républicaines ; Biden a rencontré les Républicains avant de se lancer seul. Là où Obama avait le don de faire en sorte que des programmes en réalité très modérés, comme sa réforme de santé, aient l’air véritablement réformateurs aux yeux des progressistes, la force de Biden est d’arriver à faire que des idées très libérales (au sens américain du terme) paraissent raisonnables et modérées aux yeux des centristes.</p>
<p>Enfin, l’ascension d’Obama a représenté un séisme prétendument post-racial, qui a déclenché une réaction raciste et conduit des élus Démocrates dans des circonscriptions difficiles à prendre leurs distances avec le président. Joe Biden n’a pas ce problème. Biden est un vieux Blanc. Et il faut hélas se rendre à l’évidence : il y a quelque chose de réconfortant pour les vieux électeurs blancs centristes en la personne d’un vieux Blanc centriste. Quand Joe Biden dit quelque chose, cela se passe différemment que si Barack Obama l’avait dit. Les préjugés implicites sont réels et il convient, pour ce sujet comme pour les autres, de ne pas céder à trop de conclusions hâtives avant novembre 2022.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/162866/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nicolas Gachon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Avec l’ambitieuse relance économique de Joe Biden, le Parti démocrate semble revenir à ses principes d’avant le tournant vers le centre droit enclenché sous Bill Clinton il y a trente ans.Nicolas Gachon, Maître de conférences HDR en histoire et civilisation des Etats-Unis, Université Paul Valéry – Montpellier IIILicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.