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Vidéo-protection au travail : ce qu’en pensent les salariés

Vidéo-surveillance ou vidéo-protection ? Ludovic Bertron/Flickr, CC BY

Filmer les lieux publics et l’enceinte des entreprises soulève de nombreux débats. Si certains invoquent, à l’instar de la Ligue des droits de l’homme, l’atteinte à la liberté individuelle, d’autres y voient au contraire un instrument de protection rassurant et nécessaire.

L’évolution du vocable utilisé abonde d’ailleurs dans cette deuxième direction : le terme de vidéo-protection remplace désormais celui de vidéo-surveillance afin de gommer l’image liberticide et de favoriser son acceptation par l’opinion publique. Si l’on peut imaginer que les évènements tragiques de Nice puissent favoriser l’acceptation d’un tel dispositif sur la voie publique, l’utilisation dans l’enceinte de l’entreprise scinde véritablement l’opinion. Pourquoi cette dichotomie persiste-t-elle ? Quels sont les freins à ces mesures dites de protection ? Existe-t-il des facteurs clés d’acceptation ?

Des entreprises peu regardantes…

Big brother is watching you. Thomas Galvez/Flickr, CC BY

Habilitée à prendre des sanctions depuis la modification du 6 août 2004, la CNIL n’hésite plus à se prononcer sur le contentieux de la vidéo-protection à l’égard des salariés. Sous couvert de lutter contre le vol ou de garantir la sécurité de leurs collaborateurs, des entreprises se sont équipées de caméras pour les épier en continu sur leur poste de travail et dans les lieux de détente, voire même pour surveiller leurs interactions avec les syndicats… sanctions à la clé ! Et si la fin est parfois loin d’être cautionnable, les moyens peuvent aussi être largement discutés.

Certes la loi autorise la mise en œuvre d’un système de vidéo-protection dans les entreprises, mais il ne faut pas oublier que celle-ci est soumise à plusieurs obligations : consultation des représentants du personnel avant sa mise en œuvre, déclaration à la préfecture et à la CNIL selon la typologie de l’organisation (privée, ouverte au public ou mixte), information officielle des salariés, affichage des droits d’accès aux enregistrements, etc… Et les manquements en la matière sont nombreux. De quoi inviter à réfléchir sur la cohérence du système, ses fondements juridiques ainsi que sur l’identité au travail.

Ces salariés favorables à la vidéo-protection…

OK pour être filmés ? Cory Doctorow/Flickr, CC BY-SA

L’EM Normandie a réalisé fin 2015 une enquête intitulée « Vidéo-protection au travail, panorama des facteurs d’acceptation » auprès de salariés de différents secteurs soumis à la vidéo-protection sur leurs lieux de travail. À travers les réponses formulées se dégagent clairement des paramètres clés dans le processus d’acceptation de ce type de dispositif avec, d’une part, des critères inhérents à la personne (âge, perception du risque, expérience passée du contrôle, peur, motivation et capacité à intégrer le changement) et, d’autre part, des critères liés à l’entreprise (secteur, effectif, etc.) et surtout à son environnement.

« La vidéo-protection est très utile, voire indispensable dans certains établissements, comme en ZEP » explique ainsi un enseignant. Des propos qui trouvent leur écho dans le secteur des transports publics desservant des Zones urbaines sensibles (ZUS). Si l’entreprise n’a que très peu, voire aucune emprise sur ces critères, elle n’en a pas moins un rôle déterminant dans le processus d’acceptation d’un dispositif de vidéo-surveillance.

Les résultats de l’analyse sont sans équivoque : la direction doit être un élément moteur ! Elle doit construire et entretenir une véritable culture d’entreprise, informer et communiquer de façon transparente avec ses équipes et faire preuve d’un management efficace. Elle doit in fine inspirer la confiance et faire jaillir un sentiment de justice et d’équité pour remporter l’adhésion de ses salariés.

Protéger sans perturber le travail : voilà donc la formule magique pour s’épanouir avec la vidéo-protection au travail. Même si certains syndicats se sont mobilisés contre l’installation de caméras dans l’enceinte des entreprises, le système de vidéo-protection peut être compris et cautionné par les salariés si l’entreprise ne viole pas leurs droits, mais au contraire les protège. CQFD !

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