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Des électeurs quittent un bureau de vote dans la circonscription montréalaise de NDG-Westmount, lors du dernier scrutin fédéral, le 19 octobre 2015. La Presse Canadienne/Graham Hughes

Voici comment inciter plus de gens à voter aux élections

Le budget fédéral annuel comprenait une flopée de promesses politiques ciblées. Elles indiquaient que le gouvernement vise des groupes spécifiques d’électeurs en vue du scrutin d’octobre.

Dans le même ordre d’idées, le leader conservateur Andrew Scheer a exploité l’affaire SNC-Lavalin et l’imposition d’une taxe fédérale sur le carbone. Une analyse récente indique que si Andrew Scheer veut influencer les électeurs, le climat est la façon d’y arriver.

Mais indépendamment de la stratégie des partis, une question plus pressante s’impose : les gens iront-ils voter?

Lors des élections fédérales de 2015, environ le tiers des Canadiens n’ont pas voté. Il s’agissait d’une hausse par rapport aux cinq élections précédentes pour lesquelles le taux de participation s’était établi entre 59 pour cent (en 2008, le plus bas de l’histoire canadienne) et 65 pour cent.

La participation électorale est souvent considérée comme une mesure essentielle à la santé démocratique qui est importante pour la représentativité et la légitimité d’un gouvernement et la vigueur d’une culture civique. La baisse du taux de participation électorale a été une source d’inquiétude depuis quelques décennies, soulevant des questions à savoir pourquoi les gens ne votent pas et comment les inciter à le faire.

Pourquoi les gens ne votent pas

Les politologues avancent plusieurs explications sur la décision de voter ou pas.

Une théorie répandue se base sur les particularités sociodémographiques des électeurs, telles que l’âge, l’éducation et le revenu comme facteurs expliquant si ils iront ou non voter. Plus un électeur est âgé, éduqué et fortuné, plus il sera enclin à aller voter. Ceci peut expliquer pourquoi les jeunes votent moins parce qu’à mesure qu’ils vieillissent et qu’ils assument les responsabilités de l’âge adulte comme le mariage, l’achat d’une maison et le paiement d’impôts, ils se sentent plus concernés par la politique et sont plus portés à aller voter.

Les gens âgés sont plus enclins à voter que tout autre groupe d’âge, quoiqu’on ait enregistré une hausse significative du vote des jeunes aux élections de 2015. Élections Canada

Une autre explication repose sur l’identification à un parti. Plus une personne s’identifie à un parti politique, plus elle est susceptible de se rendre aux urnes. De même, des liens faibles ou instables envers un parti pourraient expliquer pourquoi un électeur reste chez lui.

La mobilisation peut aussi entrer en jeu. Les organisations politiques, les partis, la famille et les amis créent des pressions qui encouragent les gens à aller voter. La recherche qui a examiné le changement de l’énumération à la liste électorale indique que cette modification a eu un effet négatif sur la participation parce que les énumérateurs ne passent plus de porte à porte.

Finalement, une autre façon d’envisager la participation électorale est le « coût » d’aller voter — la distance et le temps qu’il faut pour se rendre au bureau de vote, le temps passé à faire la queue et le mauvais temps sont tous des éléments qui pourraient inciter un électeur à rester à la maison. Ces coûts sont une excuse de plus en plus répandue auprès des électeurs qui choisissent de ne pas voter.

Les données des Sondages d’Élections Canada auprès des électeurs, par exemple, indiquent qu’une proportion de non votants qui disent qu’ils n’ont pas pu aller voter pour des « problèmes de vie quotidienne » parce qu’ils étaient « trop occupés » ou « à l’extérieur de la ville » a augmenté au cours des dernières années, constituant un groupe de réponses plus important que celui qui évoque des raisons administratives comme la non inscription sur la liste électorale ou l’indifférence vis-à-vis le processus politique.

Que peut-on faire pour intéresser les électeurs?

Devrions-nous nous inquiéter du fait que près du tiers des Canadiens ne votent pas? Ou est-ce plutôt un signe de satisfaction? Après tout, le référendum de 1995 au Québec, qui a eu lieu après que le taux de participation électorale ait commencé à baisser, a enregistré un taux de participation de 93,4 pour cent — indiquant que lorsqu’un vote est considéré important, les électeurs se rendent aux urnes.

En 2016, le gouvernement fédéral a envisagé trois réformes : le changement du système, le scrutin en ligne et le vote obligatoire. On s’est opposé au changement du système électoral en raison d’une absence de consensus sur une autre option appropriée. Les deux autres ont été écartées en raison de divergences sur les avantages du vote obligatoire et des problèmes de sécurité concernant le scrutin en ligne.

Plusieurs électeurs canadiens se sont butés à de longues files d’attente aux bureaux de scrutin lors des élections fédérales de 2015. La Presse Canadienne/Chad Hipolito

La recherche indique que toutes ces réformes peuvent à des degrés variables améliorer la participation électorale.

Toutefois, même si le passage à un système proportionnel peut accroître la participation, les coûts politiques de la réforme au Canada sont élevés. Il y a eu plusieurs tentatives infructueuses de réforme électorale dans les provinces comme la Colombie-Britannique, l’Ontario, le Nouveau-Brunswick et l’Île-du-Prince-Édouard.

Le vote obligatoire et le scrutin en ligne sont des changements moindres aux règles électorales qui sont plus faciles à mettre en œuvre. Ils sont tous deux controversés, mais pas dans la même mesure que le changement du système électoral. Même s’ils favorisent tous deux une augmentation de la participation, aucun d’entre eux n’est une panacée.

L’Australie, par exemple, où le vote obligatoire est bien établi grâce à l’adoption d’un projet de loi privé en 1924, examine encore d’autres réformes comme le scrutin en ligne pour augmenter davantage la participation électorale.

Alors que le vote obligatoire impose l’action de voter, le scrutin en ligne par ailleurs peut écarter les obstacles et promouvoir l’égalité des voix, particulièrement pour les groupes qui doivent surmonter des difficultés supplémentaires pour voter comme les citoyens ou les militaires à l’étranger, les personnes handicapées, les résidants de zones rurales ou éloignées et les étudiants de niveau postsecondaire vivant à l’extérieur de leur domicile.

Le scrutin en ligne est plus commode et accessible et, de plus, offre la possibilité d’écarter les excuses de ne pas voter, telles que « trop occupé » ou « à l’extérieur de la ville », puisque les électeurs peuvent voter à l’aide d’un simple clic sur un bouton. Passer au scrutin en ligne ne s’apparente pas seulement à d’autres changements dans les services publics et commerciaux, mais cela est aussi conforme aux tendances récentes, telles que les hausses du vote par anticipation, selon lesquelles les électeurs souhaitent davantage de choix et de contrôle aux urnes.

Si le débat à propos de la participation électorale continue, ce qui arrivera selon ce qu’on peut présumer, le gouvernement fédéral devra éventuellement moderniser les élections de façon à répondre à l’évolution des attentes de la société quant à la prestation des services.

Ceci pourrait ne pas inciter de nouveaux électeurs à voter, mais serait la meilleure façon d’éviter une nouvelle baisse de la participation. Il est vraisemblablement plus probable que nous reprendrons le débat sur le scrutin en ligne plutôt que les discussions sur le vote obligatoire ou des changements plus élaborés du système électoral.

Dans le cadre du Projet Démocratie, CPAC transmettra en direct un événement public le 17 avril au Longboat Hall de Toronto, animé par Peter Van Dusen de CPAC et Karyn Pugliese de APTN. Cette séance de discussions portera sur l’état de la démocratie au Canada.

This article was originally published in English

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