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Anatomie du maquillage : le visage

David Gray / Reuters

La pratique du maquillage est certainement la façon la plus ancienne qu’ont trouvée hommes et femmes pour mettre leur corps en valeur. Dès l’Antiquité, les cosmétiques à disposition se déclinent en fonction de leur destination. Les soins destinés au visage ont traversé les époques, leurs recettes évoluant au gré des canons de beauté.

L’obsession de la blancheur

Jusqu’aux années 1930, c’est le teint le plus clair possible qui est de mise chez les classes aisées. Avoir un teint hâlé signifie travailler en plein air. Il faut donc éviter à tout prix les rayons du soleil si l’on souhaite ne pas être confondu avec la plèbe. Égyptiens, Grecs et Romains mettent au point les recettes les plus extravagantes afin de conserver la « pureté » de leur teint.

Préparations à base de corne de cerf, de graisse ou d’excréments de crocodile, plantes diverses et variées sont autant de formules originales censées contrer taches de rousseur et pigmentations défendues. La céruse, un sel de plomb, constitue l’ingrédient-phare des préparations blanchissantes. Appliquée en couche plus ou moins épaisse de l’Antiquité jusqu’au XIXe siècle, incorporée dans des excipients différents selon la période (du simple mélange d’huiles et de graisses à l’émulsion de composition plus complexe), cette céruse, ingrédient précieux pour ses utilisateurs est, en réalité, un toxique qui sera chassé, beaucoup plus tard, des cosmétiques.

Un art récent

Dans l’histoire des cosmétiques, le maquillage du visage s’apparente bien souvent à celui du clown : teint blanc, lèvres rouges, yeux noirs ! Rappelons-nous les premières vamps dans les années 1915 (on pense à l’actrice Musidora) arborant encore et toujours teint pâle et yeux charbonneux à souhait.

L’art du maquillage est un art moderne. Pour transcender un teint, il faut une infinité de couleurs et non plus le seul et unique colorant rouge, teinte chérie de nos prédécesseurs, associée à la poudre de riz qui fit fureur jusqu’à la moitié du XXe siècle. Disons ici encore que le maquillage du visage est quasi exclusivement féminin.

Lucas Jackson / Reuters

Le naturel vs l’artificiel

Farder ou non son visage a depuis toujours suscité la controverse. Écrivains, philosophes, poètes et médecins s’opposent au sujet de la beauté naturelle ou artificielle. Si les philosophes antiques mettent en garde contre une utilisation abusive de cosmétiques – la beauté rimant pour eux avec nature –, Ovide est un peu plus circonspect. Il n’est pas avare de conseils. Selon lui, une femme laide doit avoir recours aux cosmétiques. Toutefois, elle doit le faire avec subtilité, et surtout en cachette. Elle doit avoir un teint pâle et, pour ce faire, user de préparations adéquates.

Colette rejoint ici le célèbre poète considérant que le maquillage, s’il est nécessaire, relève d’une forme de politesse, de respect des autres. Sacha Guitry le considère comme un masque qui n’est toutefois pas plus mystérieux que l’âme cachée dessous. Sans oublier l’incontournable « Éloge du maquillage » de Charles Baudelaire.

Le temps des cosmétiques « l’air de rien »

Au XIXe siècle, de nombreux médecins et pharmaciens mettent en garde les femmes vis-à-vis des cosmétiques, conscients qu’un grand nombre d’entre eux renferment des ingrédients plus néfastes qu’efficaces pour la santé. Il y a donc débat.

Actuellement, on assiste à un désir de beauté naturelle. Les cosmétiques « nude » qui gomment les imperfections en douceur sont recherchés. Il n’est qu’à voir le succès des BB crèmes. On recherche, avant tout, un maquillage léger qui transcende le teint, l’air de rien. On vit également dans un monde pressé, à 100 à l’heure… ceci explique le succès des produits « 8 en 1 », voire « 10 en 1 », qui nous promettent monts et merveilles après une seule application. Les plus extrémistes, celles qui ont peur de s’empoisonner avec des cosmétiques, ont déjà remplacé leur shampooing par de l’eau (mode du « No poo ») et n’ont, bien sûr, pas recours aux produits de maquillage.

Pour les hommes, grands absents de cette brève histoire du maquillage, l’usage du maquillage reste un geste extrêmement rare. Les premières gammes de cosmétiques masculins ont vu le jour dans les années 1980. Toutefois, le maquillage en est encore exclu. Produits d’hygiène, de rasage, déodorants sont largement utilisés. Pour le reste, la demande relève d’un marché de niche.

Cet article s’appuie sur l’ouvrage publié par les auteurs : Beauté, mon beau souci : Histoire de la beauté et des cosmétiques.

Retrouvez le premier et le second volet de cette série sur le maquillage.

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