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Déjà 4 000 exoplanètes découvertes… Et ce n’est pas fini !

La quête des exoplanètes. Margaret Thompson/Spot on Science, CC BY

La quête cosmologique des exoplanètes s’avère fructueuse : la barre des 4 000 découvertes a été franchie la semaine dernière. Cette recherche fascine le grand public puisque l’on espère qu’un jour, l’on puisse déceler, sur l’un de ces corps célestes, des signes de vie. Mais n’allons pas trop vite en besogne. Et répondons tout d’abord aux questions suivantes : qu’est-ce qu’une exoplanète et que signifie « découvrir une exoplanète » ?

Une exoplanète ou planète extra-solaire est une planète qui orbite autour d’une autre étoile que le soleil. Pour la nommer, on ajoute une lettre minuscule au nom de l’étoile, en commençant par « b » pour la première exoplanète détectée ; le A étant réservé à l’étoile. Ainsi, l’exoplanète Corot7c est la deuxième exoplanète trouvée autour de l’étoile Corot7A. Comme il y a des milliards d’étoiles, on s’attend à découvrir des milliards d’exoplanètes. Cependant, nous en connaissons seulement 4 000 car il est compliqué de détecter leur présence. Les instruments actuels ne peuvent en effet découvrir que des exoplanètes qui orbitent autour d’étoiles de notre galaxie dans le voisinage du soleil.

Alors, comment fait-on pour les découvrir ? En 2019, l’astrophysicien professionnel ne met plus jamais l’œil derrière son télescope pour étudier son objet de prédilection. Pour découvrir et étudier des corps célestes, il utilise un ensemble d’instruments composé, entre autres, d’un télescope qui collecte la lumière de la source observée et de dispositifs qui analysent cette lumière. Le tout financé par une institution, un état, voire un groupement d’états comme l’ESO (Observatoire européen austral).

Utilisons l’instrument le plus simple qui soit : un détecteur similaire à un appareil photo numérique. Pointons le télescope vers une étoile autour de laquelle orbite une exoplanète et enregistrons une image. Comme l’étoile est entre 10 000 et 10 milliards de fois plus brillante que la planète extra-solaire, nous ne voyons que l’étoile sur l’image enregistrée… et pas l’exoplanète ! Pour contourner cette difficulté, les astrophysiciens utilisent des techniques indirectes : ils mesurent un signal qui trahit la présence de l’exoplanète sans détecter la lumière réfléchie ou émise par celle-ci. Plusieurs procédés sont utilisés.

Transit

Une première technique, celle des transits, mesure les variations temporelles de la luminosité de l’étoile. Si, en parcourant son orbite, l’exoplanète passe entre l’étoile et l’observateur, elle masque une partie du disque stellaire et la luminosité mesurée diminue : schéma explicatif ci-dessous.

Luminosité stellaire mesurée en fonction du temps. Quand la planète (en bleu) passe devant l’étoile (en jaune), le flux mesuré diminue. ESA

Que mesure-t-on exactement ? Connaissant la masse de l’étoile, on peut en déduire la séparation entre l’étoile et son exoplanète (3ᵉ loi de Kepler). La forme de la courbe de luminosité donne des informations sur les paramètres orbitaux de l’exoplanète. Par ailleurs, l’amplitude de la variation de luminosité permet d’estimer le rapport entre le rayon de l’exoplanète et celui de son étoile. Si on connaît le rayon de l’étoile, on a alors celui de l’exoplanète. Des milliers d’exoplanètes ont été détectées par transit (missions CoRoT, Kepler, ou Tess) mais il existe d’autres techniques.

Mouvement orbital de l’étoile

L’étoile et l’exoplanète tournent toutes les deux autour du centre de gravité du système. Si l’exoplanète tourne autour de son étoile, cette dernière bouge aussi. Il suffit donc de détecter le mouvement de l’étoile pour détecter la présence d’une exoplanète. Deux types d’instruments permettent de mesurer ce mouvement. Les premiers mesurent la vitesse radiale de l’étoile, les seconds son astrométrie.

Vitesse radiale

Une étoile émet une lumière composée d’une infinité de couleurs. C’est pour cela que la lumière du Soleil décomposée par les gouttes de pluie crée un arc-en-ciel. Cet arc-en-ciel, appelé spectre en physique, peut être enregistré par un spectromètre (sans la pluie !). Au premier abord, le spectre du Soleil ainsi obtenu

correspond à l’arc-en-ciel observé dans le ciel.

Spectre du Soleil. Fourni par l’auteur, Author provided

On remarque sur l’image ci-dessus des traits noirs verticaux, appelés raies d’absorption : certaines couleurs manquent car elles sont absorbées par des composés chimiques qui se trouvent dans les couches supérieures du Soleil. En étudiant quelles couleurs manquent, on peut savoir de quels composés chimiques il s’agit. De la même manière, l’étude du spectre des étoiles permet de déterminer leur composition chimique. Elle permet aussi de mesurer la vitesse radiale de rapprochement ou d’éloignement de l’étoile par rapport à nous car le spectre mesuré est modifié par ce que l’on appelle l’effet Doppler-Fizeau : le spectre est décalé vers le rouge si l’étoile s’éloigne, vers le bleu si elle s’approche.

Si on mesure périodiquement que l’étoile s’éloigne et s’approche de nous, c’est qu’elle est en orbite autour d’un point ; dans l’espace, une étoile ne peut pas aller en ligne droite, s’arrêter et repartir en arrière. La valeur mesurée de la vitesse radiale permet d’estimer une valeur minimale de la masse de l’objet qui orbite autour de l’étoile. Si la masse est grande, il s’agit d’une seconde étoile : on a découvert un couple d’étoiles appelé une étoile binaire. Si la masse est plus faible, il s’agit d’une exoplanète.

Et bientôt, l’astrométrie

L’astrométrie consiste à enregistrer le mouvement de l’étoile perpendiculairement à la ligne de visée qui lie l’étoile à l’observateur. Si l’étoile se déplace périodiquement d’un côté à l’autre, c’est qu’elle est en orbite autour d’un point. En fonction de l’amplitude du mouvement, il s’agit d’une étoile binaire ou d’une exoplanète dont on peut mesurer sa masse et ses paramètres orbitaux. Cette technique n’a pas encore été utilisée car le déplacement d’une étoile dû à son exoplanète est très faible. Mais cela va changer avec la mission Gaia qui observe les étoiles de notre galaxie. On prévoit, grâce à cette technique, l’annonce de milliers d’exoplanètes courant 2019 !

Mais on veut une image !

Il est vrai qu’on aimerait obtenir des images des exoplanètes. Plus précisément, on aimerait détecter la lumière émise, réfléchie ou transmise par l’exoplanète. On pourrait ainsi étudier la composition chimique de son atmosphère par spectrométrie.

La technique des transits décrite plus haut permet dans certains cas particuliers d’étudier les hautes couches de l’atmosphère de l’exoplanète. On compare le spectre de l’étoile avant le transit et pendant le transit et on repère les raies d’absorption qui apparaissent pendant le transit. Elles sont dues à des molécules de l’atmosphère de l’exoplanète. Les mesures sont très compliquées car le signal est ténu. De plus, la technique du transit ne permet d’étudier que des exoplanètes qui orbitent très proche de leur étoile (moins d’une unité astronomique, ua, qui représente la distance Soleil-Terre).

Pour détecter la lumière émise ou réfléchie d’une exoplanète qui orbite à plus d’une ua de son étoile, il ne reste qu’une solution : en faire l’image. Pour cela, on utilise un coronographe qui atténue la lumière reçue de l’étoile sans affecter celle de l’exoplanète. Depuis 2014, quelques instruments scrutent les étoiles voisines du Soleil et ont réussi à enregistrer l’image d’une quinzaine d’exoplanètes dont Beta Pictoris b, ci-dessous.

Image de l’exoplanète Beta Pictoris b qui orbite à 8ua de l’étoile Beta Pictoris A, masquée sur cette image. L’est est vers la gauche et le nord vers le haut. Fournie par l’auteur, Author provided

Eh oui, impossible de voir les détails de la surface des exoplanètes ! Comme celles-ci sont très loin de nous, leur image est une tâche et aucun instrument ne permet aujourd’hui d’avoir plus de détails. En revanche, par spectrométrie, nous avons des informations sur la température et la composition chimique de l’atmosphère de l’exoplanète. À ce jour, la quinzaine d’exoplanètes dont on a une image sont de très jeunes (environ 100 millions d’années) planètes géantes gazeuses (au moins 1 000 fois la masse de la Terre) qui orbitent loin de leurs étoiles. Pour détecter des exoplanètes plus légères et plus proches de leur étoile, il faut attendre les années 2020 et la prochaine génération d’instruments.

Et les planètes jumelles de la Terre ?

Il n’est pas rare de lire ou d’entendre qu’une nouvelle exoplanète jumelle de la Terre a été découverte. Une telle affirmation n’est pas scientifique car il faudrait être capable de mesurer le rayon, la masse, la période orbitale et la composition de l’atmosphère de l’exoplanète. Or, aucune technique ne permet de mesurer toutes ces caractéristiques en même temps. Et aucune exoplanète ne peut être observée par un ensemble de techniques qui permettraient toutes ces mesures. Peut-être pourra-t-on le faire un jour ; mais en attendant de découvrir la première jumelle de la Terre, les astrophysiciens ont du boulot, et c’est passionnant ! Étudier la diversité des exoplanètes permet de comprendre comment ces objets se forment et, par voie de conséquence, comment notre système solaire s’est formé.

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