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Une manifestation devant l'Assemblée législative du Nouveau-Brunswick avant que le dépôt du budget, en mars 2019. Pour que des changements majeurs soient acceptés par la population, il faut suivre certaines règles de communication publique. La Presse Canadienne/Stephen MacGillivray

Les quatre piliers d’une bonne communication publique

Lorsque des chercheurs se rencontrent, que ce soit en personne ou virtuellement, comme par les temps qui courent, force est de constater que, malgré un langage différent, leur principal souhait est que leurs recherches servent à la société.

Ces échanges nous font aussi réaliser que ceux et celles qui évoluent dans les domaines du secteur public, comme la santé et l’environnement, éprouvent encore des difficultés à communiquer.

En partant de la prémisse que les gouvernements ne réussissent pas toujours à atteindre les objectifs qu’ils se fixent, autant à l’égard de la lutte au changement climatique que lorsqu’il s’agit d’apporter des transformations en santé, nous vous partageons aujourd’hui les fruits d’un dialogue amical qui tournera autour de quatre points convergents : le contexte, la gouvernance locale, la pluralité et la consultation publique.

Dans le cadre de mon doctorat, j’ai étudié la réforme du système de santé du Nouveau-Brunswick, et je m’intéresse à la gouvernance, à l’accès aux services pour les communautés acadiennes et francophones et à l’organisation en réseau. Mon coauteur, nommé tout récemment au sein de l’Ordre du Canada, a contribué à de nombreuses publications scientifiques sur les milieux côtiers et ruraux, autant en adaptation au changement climatique qu’en protection des écosystèmes.

L’importance du contexte

Les résultats d’une recherche récente ayant eu cours au Nouveau-Brunswick ont montré que l’adaptation au changement climatique était largement tributaire au développement territorial.

En effet, les histoires et les vécus distincts des individus vivant sur des territoires côtiers et forestiers ont des conséquences sur la manière avec laquelle ils perçoivent le changement climatique et les stratégies qu’ils élaborent pour s’y adapter. Dans une région forestière de cette province, c’est surtout l’aspect économique qui motive les citoyens à « passer à l’action », alors que dans une région côtière, la nature et l’environnement les touchent davantage.


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Il serait faux de penser que le système de santé est différent. Dans cette province, des groupes se mobilisent de façon récurrente autour d’enjeux comme la gouvernance des institutions francophones, et ces manifestations influencent le cours des services et des soins publics. Afin de réussir le changement, il est donc important pour les décideurs publics de prendre en compte les aspirations et les valeurs des communautés.

La gouvernance locale

En santé, des réformes continuent à être implantées par les gouvernements. La dernière au Nouveau-Brunswick visait à « mettre les patients au premier plan ». Or, des experts reprochent souvent aux organisations, comme les régies ou autorités de santé, d’être « trop loin » de la réalité et des besoins du terrain. Des groupes écologistes ont partagé leurs déceptions à la suite des négociations entourant la COP25. Celles-ci ont mis en lumière les difficultés des pays signataires à s’entendre sur des cibles concernant le climat.

Non seulement il importe d’imaginer diverses manières de faire les choses en fonction du contexte et des besoins des communautés, mais il est essentiel de réfléchir aux notions d’émergence des idées et de confiance. Des recherches que nous menons actuellement au Nouveau-Brunswick sur l’accès aux soins mettent en lumière le manque de confiance entre les parties prenantes et les organisations de santé.

Or, lorsqu’il s’agit de réformes, les gouvernements ont intérêt à trouver des moyens de faire converger leurs intérêts vers les cibles souhaitées. Afin de mener le navire à bon port, les citoyens doivent être considérés, non pas comme un client ou un patient, mais plutôt, comme un partenaire ou un agent qui contribue à ces transformations de la société.

Lorsque les décideurs publics permettent aux acteurs communautaires de s’asseoir autour de la table, le temps devient certes un ennemi, mais il peut être un soutien pour que ces derniers acceptent mieux le changement. Une étude a d’ailleurs montré que l’adoption de pratiques durables face aux problèmes d’érosion et d’inondations dans trois communautés du littoral acadien du Nouveau-Brunswick dépassait les éléments techniques comme de bâtir un mur, par exemple. La mise en relation des différents acteurs concernés, comme les citoyens et les élus, était nécessaire afin que des solutions innovantes soient envisagées par chaque communauté pour résoudre leur problème.

La pluralité

La pluralité implique que dans une « arène publique de débats », les groupes d’individus sont variés. Chacun défend ses propres objectifs. Autant dans le cas de la réduction des émissions de gaz à effets de serre que dans l’adaptation au changement climatique, il est évident que les sociétés privées ont des valeurs et visées différentes des organismes sans but lucratif ou des fonctionnaires.

En santé, les professionnels sont surtout motivés par la qualité des soins tandis que les gestionnaires utilisent des mots comme « coûts » ou « efficience » pour influencer l’opinion publique. Des difficultés d’interprétation et de coordination se posent aux décideurs publics qui désirent aussi atteindre leur propre but.

Les exercices de consultation publique offrent ainsi une possibilité de connaître les représentations des groupes d’individus aux positions parfois divergentes.

La consultation publique

Dans le jargon, on dit que les gouvernements mobilisent des « instruments » pour modifier les comportements des individus dans le sens souhaité.

Des instruments sont plus rigides, d’autres, plus souples. Parmi les plus directs, on peut penser à une taxe fédérale sur le carbone ou à un règlement provincial sur les ceintures de sécurité en voiture. Parmi les moins directs, on peut se référer à une norme ISO partagée par un organisme international à l’égard du développement durable, à une commission d’enquête ou à un contrat entre un gouvernement et une entreprise privée concernant la gestion des buanderies d’hôpitaux, par exemple.

Autant en environnement qu’en santé, les décideurs publics ont intérêt à choisir des instruments plus « mous », qui sont basés sur la participation et la concertation et qui peuvent atténuer les résistances.

Les exercices de consultation publique requièrent du temps et des ressources, et ils sont quelquefois mis de côté par les décideurs publics. Ils nous semblent cependant indispensables. En plus de les aider à mieux comprendre les contextes locaux, ils servent à rendre plus acceptables leurs décisions. Ceci est encore plus vrai au sein de sociétés dans lesquelles sont présents des enjeux délicats entre des communautés linguistiques, comme l’équité en matière de services et soins de santé.

S’il est vrai que les cibles, peu importe si elles concernent un avenir faible en carbone ou l’accès à un médecin de famille, sont indispensables, les outils visant à les atteindre le sont autant.

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