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Ninon : « Pourquoi faut-il que je respecte des règles ? »

On doit souvent respecter des listes de choses à faire. Vector Juice/Shutterstock

Imagine… tu te réveilles un matin et chez toi sur la table de la cuisine tu trouves une bague qui a le pouvoir de te rendre invisible pendant toute une journée ! Tu es libre de faire tout ce que tu veux sans le regard des autres, personne ne peut te voir, te juger, te commander, de donner des ordres. Que ferais-tu de ta journée d’invisibilité ? Prends un peu de temps pour réfléchir…

Cette histoire d’un berger, Gygès, qui découvre par hasard un anneau magique qui a le pouvoir de rendre invisible se trouve dans un des tout premiers livres de philosophie, La République, du philosophe grec Platon qui vivait à Athènes il y a plus de 2 500 ans. Dans cette histoire, Gygès décide d’utiliser ce pouvoir pour séduire la reine, tuer le roi et devenir un tyran ! Grâce à cette histoire, Platon cherche à nous faire réfléchir sur la notion de Liberté, sur notre rapport à la Loi, aux interdits, aux règles, et même sur le bien et le mal. Pourquoi faut-il des règles pour bien vivre ensemble ? Qu’est-ce qu’une règle juste ?

Souvent, les interdits nous embêtent. On a d’abord l’impression qu’ils nous empêchent d’être libres. On a spontanément envie de définir la liberté́ comme la possibilité́ de faire « tout ce que l’on veut quand on veut » sans aucune contrainte. Mais cette liberté́ totale et absolue est en fait impossible car il existe toujours déjà des lois de la nature qui limitent nos désirs.

Si Superman par exemple peut s’envoler dans les airs, il n’en est pas de même pour les humains dans la vie réelle. Et ce sont la connaissance et l’acceptation de ces limites naturelles (comme ici la gravité) qui évitent de commettre des actes fous et dangereux (comme se jeter d’un immeuble pour s’envoler). D’ailleurs peut-être que si nous adorons autant les histoires de superhéros, c’est parce qu’ils peuvent transgresser les lois de la nature et pas nous… Les histoires de Gygès ou d’Harry Potter (avec sa cape d’invisibilité) – nous plaisent beaucoup parce qu’elles nous permettent de vivre dans l’imaginaire ce que nous ne pourrons jamais vivre dans la vraie vie : une liberté totale !

Mais souhaiterions-nous vraiment vivre dans un monde sans aucune loi, sans aucune règle, où tout le monde pourrait faire tout ce qu’il veut sans jamais rendre de compte ou être punis ? Essaye aussi d’imaginer ce monde : un monde sans aucune règle… La première image qui vient souvent à l’esprit est que ce monde serait sûrement violent, dangereux et chaotique. Et c’est aussi un monde qui serait très injuste car y règnerait la loi du plus fort.

Les lois qui limitent au quotidien notre liberté individuelle peuvent donc être vues comme la condition de notre sécurité parce qu’elles nous protègent de certains dangers et mais de la Justice en évitant que règne la loi du plus fort. Les parents, par exemple, protègent leurs enfants pour leur sécurité ou leur santé (comme l’interdiction de sortir seul en pleine nuit ou l’obligation de se brosser les dents).

Un philosophe qui vivait au XVIII siècle, Jean-Jacques Rousseau, a écrit que les lois devraient surtout permettre d’organiser un partage équitable entre les Hommes et d’établir la justice et l’égalité entre les membres de la Société. Dans une cour de récréation, les enseignant·e·s garantissent ainsi à la fois la sécurité mais aussi la justice entre tous les élèves (comme l’obligation de se partager équitablement les jeux).

Mais malheureusement, les lois peuvent parfois être aussi injustes surtout si elles sont imposées de façon arbitraire et autoritaire (que ce soit par les adultes pour les enfants ou les États pour les citoyen.es). C’est le cas notamment dans des dictatures. Il est donc essentiel de réfléchir sur les limites possibles de l’obéissance aux lois et à la distinction que l’on fait en philosophie entre le légal (la loi) et le légitime (le juste). Essaye de réfléchir à des exemples de lois que tu trouves justes (parce que les parents ou les enseignants cherchent à te protéger ou à permettre de bien vivre ensemble dans la justice et l’égalité entre frères et sœurs ou entre camarades d’école) et essaye aussi de trouver des exemples de lois injustes (à la maison, à l’école ou dans l’Histoire de l’Humanité) que tu trouves très injustes et donc illégitimes.

La vraie liberté ne consiste donc pas à faire tout ce que l’on veut sans tenir compte des autres mais d’accepter d’obéir raisonnablement à des lois qui garantissent la protection et la justice. Dans une démocratie, ce sont les citoyens et citoyennes qui par le vote décident de ce que seront les meilleures lois pour bien vivre ensemble.


Diane Rottner, CC BY-NC-ND

Si toi aussi tu as une question, demande à tes parents d’envoyer un mail à : tcjunior@theconversation.fr. Nous trouverons un·e scientifique pour te répondre.

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