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Pour la 4e année consécutive, la France figure en tête du classement EY des pays européens les plus attractifs. Shutterstock

L’attractivité économique du pays est aussi une question de fiscalité

La dernière étude du cabinet de conseil EY sur l’attractivité des pays européens confirme la primauté de la France pour la 4e année consécutive. Le pays comptait en 2022 plus de 1250 projets d’investissement industriels ou technologiques annoncés, soit plus que le Royaume-Uni (900) et l’Allemagne (800), destinations longtemps privilégiées. Le Spiegel va même jusqu’à titrer en une, dans un étonnant renversement : « la France aujourd’hui : une meilleure Allemagne ».

Illustrant le retour en grâce du pays, quelques exemples d’investissements massifs ont frappé les esprits : celui du danois Novo Nordisk à Chartres pour plus de 2 milliards ; les gigantesques usines de super batteries dans les Hauts-de-France, à hauteur de 5,2 milliards euros d’ici 2030 du taiwanais Prologium ; ou encore la start-up italienne Newcleo, créée en 2021, qui a prévu d’investir 3 milliards d’ici 2030 dans les réacteurs nucléaires de faible et moyenne capacité.

Tout aussi significatif de l’attractivité retrouvée de l’Hexagone, Paris distance désormais largement ses rivales (Francfort, Luxembourg, Dublin et Amsterdam) dans la féroce compétition pour devenir la grande place financière européenne. Aux atouts traditionnels liés au prestige de la Ville-Lumière et à un vaste marché d’emplois qualifiés s’est ajouté un rocambolesque coup de pouce du destin qui a transféré l’Autorité bancaire européenne de Londres à La Défense (au détriment de Dublin), lors d’un vote des 27 États restants de l’Union européenne (UE) post-Brexit qui s’est achevé par… un tirage au sort le 20 novembre 2017.

Liberté et stabilité

Si l’attractivité d’un pays se définit comme sa capacité à attirer les facteurs mobiles de production (capital et travail), la France répondait déjà, avant l’arrivée d’Emmanuel Macron à L’Élysée en 2017, à nombre des critères de la compétitivité internationale.

L’économie était déjà diversifiée et robuste, la liberté d’entreprendre garantie par un régime politique stable depuis 1958 et les cadres d’entreprise formés par des écoles de management très bien classées dans le prestigieux classement du Financial Times. En outre, grâce à son modèle social très redistributeur, le pays était l’un des plus égalitaires au sein de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Président VRP

Lors de sa prise de fonction, le président de la République a mis sur pied un gouvernement ouvertement probusiness focalisé sur la réindustrialisation. Cette politique a même connu une accélération spectaculaire juste après le Covid et les pénuries de médicaments fabriqués en Asie, l’exécutif cherchant à renforcer notre base industrielle au-delà des domaines d’excellence traditionnels comme l’aéronautique, le luxe ou l’agroalimentaire.

Le plan France 2030 lancé en octobre 2021 vise ainsi à faire émerger les champions de demain dans une poignée de secteurs clés liés à la qualité de vie : la transition environnementale, l’énergie, les transports, l’alimentation ou encore la santé. Le montant total de l’enveloppe s’élève à 54 milliards, dont la moitié versée fin 2023.

L’acteur clé est ici Bpifrance, banque publique des entrepreneurs créée à parité en 2012 par L’État et la Caisse des dépôts et consignations. Initialement destinée à soutenir l’économie française en prenant des participations dans des entreprises stratégiques pour le développement local, l’institution a élargi son périmètre d’intervention en gérant les prêts garantis par l’État (PGE) aux entreprises pendant les confinements et surtout en finançant l’innovation notamment au travers du label « French Tech ».

En parallèle, Emmanuel Macron s’est présenté dès 2018 en « super VRP » de la nation en lançant le sommet annuel « Choose France », destiné à présenter aux grandes multinationales les réformes menées pour stimuler l’activité économique : un raout annuel très médiatique dans le cadre royal du château de Versailles.

Le premier sommet a permis de récolter quelque 3,5 milliards en investissement en 2018 et la dernière édition, en mai 2023, a battu les records avec la promesse de 13 milliards d’euros d’investissement et de 8 000 créations d’emplois annoncés auprès de 200 multinationales.

Cette bonne performance s’explique également par la loi de finances pour 2018, qui a significativement amélioré la compétitivité fiscale du pays. L’introduction d’une « flat tax » à 30 % sur tous les revenus du patrimoine des particuliers (intérêts, dividendes et plus-values des particuliers) a réduit et simplifié la fiscalité du capital, tout comme le remplacement de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en un impôt sur la fortune limité aux seuls biens immobiliers (IFI).


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Six ans après ces mesures, le rapport final du Comité d’évaluation des réformes de la fiscalité du capital de France stratégies constate des effets positifs, comme nous l’avions anticipé même si l’ensemble des prélèvements sur les ménages et les entreprises au titre d’une détention, d’un revenu ou d’une transmission de patrimoine demeure toujours l’un des plus élevés dans le monde.

L’emploi résiste au ralentissement

La fiscalité des entreprises a également été réduite et stabilisée : l’impôt sur les sociétés est tombé de 34,4 % en 2018 à 25 % en 2023. La baisse a surtout concerné à partir de 2021 les impôts de production, qui pénalisent l’investissement même s’ils restent encore bien au-dessus de la moyenne européenne. Enfin, la niche du crédit d’impôt recherche (CIR), la plus coûteuse et sans doute la plus controversée des dépenses fiscales (alors qu’elle confère un avantage compétitif majeur au pays) a été sanctuarisée en 2017.


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Les investisseurs étrangers sont également sensibles aux nombreuses réformes du marché du travail qui ont renforcé la politique de l’offre amorcée en 2013 par le prédécesseur d’Emmanuel Macron à l’Élysée, François Hollande. Les ordonnances du 22 septembre 2017 ont plafonné les indemnités licenciement. La loi du 5 septembre 2018 a supprimé les cotisations salariales du régime d’assurance-chômage en y substituant un financement via la contribution sociale généralisée (CSG) à l’assiette plus large. Enfin la réforme de l’apprentissage avec la création du compte personnel de formation (CPF) et surtout le transfert du pouvoir sur l’utilisation des fonds des régions aux employeurs directement concernés a spectaculairement augmenté le nombre d’apprentis de 300 000 en 2017 à plus 800 000 en 2022.

Toutes ces mesures ont eu un effet sur l’emploi puisque, malgré le ralentissement de la croissance de 0,5 % au second trimestre 2023, les créations nettes ont progressé pour le dixième trimestre consécutif. Encore un indicateur de dynamisme attractif aux yeux des investisseurs étrangers.

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