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Comment, au sortir des océans, la vie a fleuri sur la terre

Un sporange datant de la fin du Silurien. En vert : une tétrade de spores. En bleu: une spore marquée d'un trilète. Les spores ont un diamètre d'environ 30 à 35 µm. Smith609/Wikipedia, CC BY-SA

Nous publions ici un extrait du livre « Évolution », coordonné par Steve Parker, qui paraît ce jour aux Éditions Delachaux & Niestlé.


Quand la vie s’est-elle affranchie des océans pour gagner la terre ? Les fossiles qui pourraient concourir à préciser ce moment sont quasiment inexistants. Ce processus évolutif a requis des millions d’années et la fossilisation reste un événement rare, d’autant plus lorsqu’il s’agit de tissus végétaux fragiles comme dans le cas de cet Asteroxylon. Au vu des rares vestiges, il est probable que la colonisation des terres émergées par la vie végétale débuta à l’ordovicien, il y a 485 à 443 millions d’années, mais il est possible que ce processus ait commencé en fait bien antérieurement.

Un afflux d’oxygène

Avant que la vie n’ait pris pied sur la terre ferme, l’atmosphère de la planète a dû changer. Elle était initialement pauvre en oxygène puisqu’elle renfermait moins de 1 % de la concentration actuelle. L’oxygène forme de l’ozone dans les hautes couches atmosphériques, un gaz qui – cela importe pour la vie – absorbe les rayons ultraviolets potentiellement dangereux. Sans couche d’ozone, la vie serait exposée sur terre à trop de radiations qui induiraient des ruptures de l’ADN, des mutations génétiques et occasionneraient donc des cancers. Ainsi, ce n’est qu’une fois que la photosynthèse réalisée par des organismes aquatiques eût produit suffisamment d’oxygène pour former la couche d’ozone qu’il devint possible que des espèces fragiles survivent.

Ce processus nécessita des centaines de millions d’années. Les scientifiques s’accordent désormais à penser que les plantes ne furent pas les premiers organismes à coloniser la terre car, en plus de la lumière solaire et du dioxyde de carbone, il leur fallait en effet des nutriments absorbables. L’étude des paléosols (sols fossilisés) suggère que les terres émergées furent investies en premier par des bactéries. Cyanobactéries, algues, champignons et peut-être lichens participèrent ainsi à la formation des premiers sols dans lesquels les plantes puisèrent des nutriments.

Les algues vertes charophycées sont généralement tenues comme les ancêtres des plantes terrestres : l’étude de leur métabolisme et de leur génome montre qu’elles avaient plus de choses en commun avec les végétaux terrestres archaïques qu’avec les espèces actuelles. Le premier fossile de plante véritable date du silurien (443-419 millions d’années). Les couches de cette époque livrent aussi des fossiles de mille-pattes, de chilopodes et d’arachnides se nourrissant de débris végétaux, prouvant qu’il existait donc déjà de vrais écosystèmes terrestres. En colonisant les terres, les plantes gagnèrent une dynamique évolutive qui explique la diversité que nous connaissons aujourd’hui.

Milieu terreste hostile

Alors que les océans constituaient un environnement relativement stable, la surface était un milieu hostile dont la conquête relevait du défi pour des cellules avant tout constituées d’eau, et qui s’y exposaient à un risque de déshydratation. Il est probable que l’arrivée des plantes sur la terre ferme coïncida avec une période de changement climatique : la succession de périodes humides et sèches aurait eu raison des formes de vie mal adaptées aux conditions environnementales trop drastiques de la vie sur terre. Le flux et reflux des vagues sur le littoral purent constituer une opportunité facilitant l’accès à ce milieu. Les plantes se protégèrent en développant une cuticule cireuse pour prévenir les pertes hydriques et créèrent des pores (stomates) permettant les échanges gazeux avec l’atmosphère (elles absorbent du dioxyde de carbone et rejettent de l’oxygène).

Une autre adaptation essentielle fut l’apparition d’un tissu vasculaire, décrit sur des fossiles de Cooksonia vieux de 410 millions d’années. Analogue au système sanguin des animaux, ce tissu est constitué de cellules permettant le transport de l’eau et des nutriments absorbés par les racines. Ils sont véhiculés vers les feuilles qui produisent les glucides distribués en retour dans les tissus. La capacité d’absorber de l’eau dans le sol et de la répartir dans leurs tissus a permis aux plantes de s’adapter à des climats secs. Le réseau vasculaire a aussi constitué un tissu de soutien, une sorte de « squelette » rigide donnant leur forme aux racines, aux tiges, aux feuilles et permettant à la plante de rester érigée : il avantagea tellement les végétaux qu’ils se développèrent rapidement et dominèrent la scène.


Evolution. Editeur

Partie rédigée par Robert Snedden pour le livre « Evolution ».

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