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Diversité en entreprise, comment relever le défi ?

Le mélange des âges et des cultures, une source de richesse. rawpixel.com / pxhere, CC BY-SA

« Je suis heureux de vous présenter l’Agenda pour la diversité et l’inclusion, en signe de notre engagement et comme source d’inspiration. Nous devrions tous reconnaître que promouvoir l’égalité, la diversité et l’inclusion est affaire de droits humains mais aussi de paix, de sécurité, de justice sociale et de progrès économique ».

Josep Borrell, haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité introduisait par ces mots, à la mi-février, un nouveau document des Vingt-Sept, rédigé par le Service européen pour l’action extérieure, le service diplomatique de l’Union européenne chargé de la politique étrangère et de sécurité commune afin de promouvoir « la paix, la prospérité, la sécurité et les intérêts des Européens dans le monde entier ».

Si les objectifs fixés, concernent la politique extérieure, il s’agit bien également de les atteindre en montrant l’exemple. Parmi les engagements pris, on retrouve ainsi celui de développer l’attention portée par les dirigeants des organisations sur la question des inégalités et leur capacité à y faire face. De nouveaux mécanismes comptables tenant compte d’objectifs en matière d’égalité, de diversité et d’inclusion sont également promis (points 3.1 et 3.2).

Il ne suffit néanmoins pas toujours que les institutions gouvernementales et les décideurs politiques affichent des priorités pour que les choses se fassent, en d’autres termes. Rien ne se passe si les principales parties concernées, les entreprises et leurs dirigeants notamment, ne les prennent pas en considération et ne les mettent pas en œuvre de manière appropriée.

La diversité, qu’elle ait trait à l’âge, à l’ethnicité, à la nationalité, au sexe, aux capacités physiques, aux préférences amoureuses, au niveau d’éducation, aux revenus, à la situation matrimoniale, aux croyances religieuses, au statut parental ou à l’expérience professionnelle, peut influer sur la réussite des organisations. Les chercheurs ont notamment montré qu’une main-d’œuvre riche de nombreuses différences entre les individus présente un niveau plus élevé de créativité, d’innovation et de capacité à résoudre les problèmes. C’est une source d’avantages pour les entreprises comme pour les pays.

Encore faut-il pour les dirigeants bien comprendre quelles sont les opportunités mais aussi les défis liés, ce pour quoi les universitaires trouvent leur utilité. Les cultures et les âges communiquent et interagissent de manières différentes, appelant des styles de leadership différents. Dans un ouvrage récent, intitulé Diversity in Action : Managing Diverse Talent in a Global Economy et dont nous avons assuré la coordination, des auteurs abordent la question sous différents aspects. Que devons-nous donc savoir sur la diversité pour relever les défis mondiaux et locaux ?

Sexe et autonomie, âge et technologie

Les stigmates de genre font partie des questions largement débattues par les universitaires, les hommes politiques et les praticiens du monde des affaires. Ils peuvent s’avérer durables et englober tous les domaines de la vie des femmes : de la santé physique et mentale à la qualité de vie, en passant par l’engagement et les performances professionnelles. C’est un premier défi pour les dirigeants que d’en identifier les sources fréquentes.


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L’ouvrage suggère notamment que les femmes se sentent plus autonomes lorsque les discriminations entre sexes sont moindres, lorsqu’elles bénéficient d’un meilleur équilibre entre le travail et la maison, lorsqu’elles se sentent soutenues par leur famille et lorsqu’elles ont d’autres femmes sous leur responsabilité. Il montre aussi que pour attirer, motiver et retenir les femmes, les entreprises devraient mettre en place des pratiques de gestion des ressources humaines individualisées qui répondent aux exigences des différents types de carrières féminines, entre celles qui cherchent à faire carrière et celles dont le travail est surtout un emploi qui sert à apporter des ressources pour d’autres fins.

Pour ce qui est de l’âge, les différences de motivation, d’attentes en matière de carrière et d’attitudes à l’égard des processus économiques, politiques et sociaux appellent des modes de gestion différents. Un des thèmes qui suscitent régulièrement un questionnement au sein des organisations concerne l’usage des outils technologiques. Comme l’indique notre ouvrage, l’âge semble bien un déterminant de leur usage. Cela implique notamment d’adapter les types de médias sociaux à la communication avec un groupe générationnel particulier.

En termes de gestion, le défi est souvent de regarder au-delà de son réseau, celui sur lequel on s’appuie pour répondre aux différents objectifs que l’on se donne. Les différentes générations côtoient des cercles différents, de sorte que la manière dont les entreprises modèrent les compétences et les flux de connaissances qui en émanent définit les effets de la présence des différentes générations. Cela appelle des modes de gestion spécifiques.

Ces problématiques liées aux différences d’âge se ressentent en particulier dans les entreprises familiales, transmises de parents à enfants, dans celles où se mêlent aussi plus qu’ailleurs vies professionnelle et privée. Leur équilibre, ainsi que l’engagement, l’enthousiasme et la passion des futurs dirigeants pour leur tâche semblent à ériger en priorités éducatives principales pour une succession efficace.

Diversité des origines, un potentiel à exploiter

La diversité culturelle et ethnique ne peut pas non plus être ignorée. Les talents sont présents partout dans le monde et dans les flux migratoires. Les diasporas sont ainsi souvent une source de connaissances pour le pays d’accueil. Avec des talents de différentes origines, une entreprise trouve des accès facilités dans différents pays, notamment via la langue, l’anglais n’étant pas le seul moyen de communiquer de la mondialisation. En se constituant un « portefeuille de langue », la firme acquiert un potentiel d’innovation supérieur. Les diasporas créent un effet d’entraînement, assurent le transfert de connaissances. Leur impact positif est largement reconnu.

Cela vaut néanmoins à condition qu’elles soient correctement intégrées dans un contexte organisationnel. L’immersion dans deux cultures peut en effet conduire à des incompréhensions et des formes de distanciation par rapport au personnel non migrant. Une identité fortement centrée sur le pays d’origine peut, en outre, dresser une frontière entre des groupes.

Puisque les entreprises tirent de nombreux avantages du rôle de médiateur des diasporas employées, notre ouvrage insiste ainsi sur l’importance de mettre en place des pratiques de ressources humaines spéciales et réfléchies. Il s’agit par exemple d’être formé aux différentes valeurs culturelles que peut prendre l’éthique du travail.

La gestion des talents pris dans leur diversité constitue ainsi un impératif stratégique, en particulier pour les entreprises opérant à l’échelle mondiale compte tenu des changements démographiques et de l’intensification de la concurrence. C’est à formuler des clefs pour y aider que notre ouvrage s’est attelé : modalités de travail alternatives, mentorat, flexibilité des horaires, initiatives de développement axées sur les caractéristiques de la diversité en font partie. L’idée est de tirer avantage de chaque employé pour que les réussites de la main-d’œuvre excèdent la simple somme du produit de ses membres.

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