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La « vape » peut-elle endommager l’ADN et augmenter le risque de cancer ?

Une sélection de vapoteuses sont disposées sur un portant de tubes à essais.
S'il est prouvé que la vape est moins nocive que la cigarette, ses conséquences réelles sur la santé sont toujours étudiés. CDC / Unsplash, CC BY-SA

La question fait régulièrement l’actualité : qu’en est-il des effets du vapotage sur la santé ? Selon un article récent publié dans Nature, les vapoteurs subiraient des modifications de leur ADN, similaires à celles observées chez les fumeurs quoique bien que beaucoup moins prononcées.

Il est important de noter que ces conclusions ont été établies sur quelques personnes en examinant les altérations de leur génome au moment de l’analyse, comme s’il s’agissait d’une image instantanée, sans tenir compte d’un éventuel changement de comportement futur en matière de vapotage ou de tabagisme. L’étude n’apporte ainsi pas de preuves concrètes de conséquences néfastes sur la santé associées au vapotage.

L’étude présente toutefois des approches intéressantes, notamment en essayant de séparer les effets du vapotage lui-même des dommages causés par le tabagisme. Ce qui est difficile, car la plupart des fumeurs utilisent des e-cigarettes pour les aider à arrêter de fumer et sont donc d’anciens fumeurs.

Des dommages mais moins importants

Un résultat important de cette analyse, peu visible dans l’article, est que les gènes endommagés chez les fumeurs étaient environ 7,4 fois plus nombreux que chez les vapoteurs. Cette étude confirme donc ce que nous savions déjà : le vapotage n’est pas totalement exempt de risques, mais il est beaucoup moins risqué que le tabagisme. (« L’analyse comparative des réseaux de gènes et des voies canoniques déréglés chez les fumeurs et les vapoteurs a montré des modèles étonnamment similaires dans les deux groupes, bien que l’étendue des changements transcriptomiques ait été plus prononcée chez les fumeurs que chez les vapoteurs. Il est important de noter le ciblage préférentiel des gènes mitochondriaux […] et la dérégulation des gènes de la réponse immunitaire, » indique les auteurs, ndlr.)

La transcriptomique (étude de la « lecture des gènes » dans une cellule), utilisée dans cette étude, est un domaine prometteur qui explore les mécanismes moléculaires et les processus potentiels conduisant au développement possible d’un cancer. Cependant, elle ne peut actuellement pas être utilisée pour prédire avec précision le risque futur de cancer.

Autre biais, l’étude a recruté un nombre relativement faible de personnes qui n’étaient pas représentatives de la population. Et elle n’a pas pris en compte d’autres habitudes de vie susceptibles d’affecter les mesures, comme la consommation d’alcool.

Des études montrent déjà que le passage du tabac à l’e-cigarette peut avoir des effets bénéfiques sur la santé, comme l’amélioration des symptômes respiratoires et de la fonction pulmonaire chez les patients asthmatiques, ou l’amélioration des mesures permettant de prédire le développement futur d’une maladie – comme l’état des vaisseaux sanguins pour les maladies cardiovasculaires.

Étalage de buraliste avec des paquets de cigarettes portant les messages de santé, dont « Fumer provoque le cancer »
Si la « vape » n’est pas sans risque, le niveau d’exposition aux toxines est bien moins élevé qu’avec les cigarettes. De même, les effets sur l’ADN, potentiellement cancérigènes, sont plus de sept fois moins importants. Sébastien Bozon/AFP

D’autres rapportent que l’exposition aux toxines est plus faible chez les vapoteurs anciens fumeurs par rapport aux fumeurs. Il est important d’examiner toutes les preuves qui soutiennent le rôle de réduction des risques des e-cigarettes en tant que substitut au tabac.

Malheureusement, les études qui n’examinent pas les effets cliniques directs sont facilement interprétées comme des preuves de risques pour la santé. Un titre du Daily Mail affirmait ainsi : « Le vapotage endommage l’ADN et augmente le risque de cancer de la même manière que les cigarettes… » Bien que la deuxième partie du titre rétablisse un équilibre en précisant « … mais ce n’est pas aussi mauvais que le tabagisme traditionnel », les dommages causés à la perception du public sont peut-être déjà faits.

Moins de risque n’est pas absence de risque

Personne ne prétend que les e-cigarettes sont totalement sans risque. L’inhalation de n’importe quoi dans les poumons peut entraîner des modifications de l’ADN susceptibles d’accroître les risques de maladies futures. Il a été démontré que l’inhalation de fumées provenant de voitures diesel, par exemple, provoque des modifications de l’ADN.

De nombreuses personnes sont physiquement dépendantes de la nicotine. Elles peuvent commencer à consommer de la nicotine en fumant du tabac ou, plus rarement, en s’adonnant au vapotage. Une fois dépendant, il est très difficile d’arrêter. Si vous essayez d’arrêter, vous souffrirez de symptômes de sevrage désagréables et ressentirez des envies de fumer.

Certaines personnes, notamment avec un soutien, peuvent surmonter la dépendance à la nicotine. D’autres trouvent cela plus difficile ou ne veulent pas arrêter de consommer. Pour ces personnes, les médecins de santé publique doivent encourager les fumeurs à utiliser la nicotine de manière à réduire les dommages, en utilisant des substituts nicotiniques.

Les coûts pour la santé des personnes qui consomment de la nicotine en continuant à fumer sont énormes. L’Organisation mondiale de la santé estime que le tabac tue plus de 8 millions de personnes par an.

Il est irresponsable de communiquer au public des titres sensationnalistes basés sur des études complexes qui, en réalité, ne montrent aucun dommage réel. Surtout en comparaison avec les immenses méfaits du tabagisme sur la santé.

This article was originally published in English

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