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Transformation digitale : le management de portefeuille de projets devient incontournable en entreprise

L’évolution du contexte sanitaire a fortement impacté les DSI qui ont dû souvent revoir les priorités de déploiement des projets, et contribue à replacer encore plus la question du management de portefeuille de projets au cœur des réflexions des organisations. PxHere, CC BY-SA

Plusieurs études et recherches montrent que l’investissement croissant dans les systèmes d’information (SI) ou dans les technologies de l’information (TI ou IT en anglais) a un impact bénéfique sur la performance globale des entreprises.

Les projets de transformation digitale (applications SaaS, services cloud, infrastructures big data, etc.) fleurissent maintenant depuis plusieurs années dans la plupart des secteurs d’activités, mettant sous pression de plus en plus les directions des systèmes d’information (DSI). L’une des explications repose sur les bénéfices de ces projets.

Par exemple, dans l’étude du cabinet de conseil EY auprès de la communauté du think tank français sur l’innovation digitale EBG, 88 % des répondants considèrent que la transformation digitale constitue un enjeu important et 65 % une source de création de valeur. Le cabinet PWC, dans une autre étude de 2019, montre que la transformation digitale est l’un des trois enjeux majeurs pour les PME et les entreprises de taille intermédiaire (ETI).

La crise sanitaire de la Covid-19 accélère également la digitalisation d’une partie des activités au sein des entreprises, que cela soit par les outils permettant le télétravail, les outils collaboratifs, le renforcement des infrastructures en SI, la gestion de la sécurité des applications, etc.

L’évolution du contexte a ainsi fortement impacté les DSI qui ont dû souvent revoir les priorités de déploiement des projets. Cela contribue à replacer encore plus la question du management de portefeuille de projets au cœur des réflexions des organisations.

C’est dans le cadre d’une recherche avec un doctorant CIFRE au sein d’un cabinet de conseil que ce sujet majeur est ici analysé pour les projets de déploiement de SI.

La difficile évaluation des projets

Les projets de transformation digitale impliquent des investissements matériels, logiciels, de la formation et le recrutement du personnel, l’acquisition de nouvelles compétences, l’accompagnement par des cabinets spécialisés, etc. Or, il existe plusieurs modèles concernant l’évaluation des projets (Cost Benefit Graphical, risk management matrix, Analytic Hierarchical Process, etc.) et la plupart reposent sur une approche « financière » classique dans les grands principes.

Ces modèles cherchent ainsi à démontrer le rapport « coût/bénéfices/risques » en identifiant les critères qui semblent les plus pertinents (qui sont parfois très nombreux et donc en réalité peu applicables au sein des organisations) et qui permettent d’évaluer le retour sur investissement des projets. L’un des objectifs est également de pouvoir réaliser une comparaison afin de pouvoir les hiérarchiser entre eux.

L’approche reste relativement théorique car elle repose sur une approche multicritères complexe avec une incomplétude et une fiabilité non exhaustive en matière d’indicateurs.

Cela s’explique par les difficultés à prévoir le niveau des ressources à mobiliser et d’évaluer les délais qui, dans la très grande majorité des cas, ne sont pas ou peu respectés. À cela vient s’ajouter l’imprévisibilité de l’évolution des technologies (IA, big data, deep learning, etc.), du fait notamment des progrès techniques, des innovations inhérentes au secteur et des interrelations complexes entre les différents projets (par exemple les technologies liées à l’IA supposent des SI permettant de collecter une très grande masse de données, etc.).

L’approche par le rapport « coût/bénéfices/risques » reste relativement théorique car il est difficile de prévoir et d’évaluer les délais.. Pixabay, CC BY-SA

Enfin, l’évaluation des bénéfices peut également s’avérer complexe, soit au niveau de leur mesure (gains directs et indirects mesurables vs perçus), soit au niveau de la temporalité. De plus, les gains de l’implémentation de certains projets peuvent également relever d’une perception biaisée selon la manière dont le projet a été décidé.

La nécessité d’une vision globale

Manager un portefeuille de projets liés à la transformation digitale des organisations suppose une réflexion approfondie sur l’alignement stratégique entre les SI déployés et la stratégie de l’entreprise. De nombreux exemples ont montré comment de nouvelles technologies ont pu conduire à l’arrivée de nouveaux entrants dans certains secteurs et des changements de modèles économiques dans d’autres (Amazon, Netflix, Uber, etc.).

Cette problématique est importante car les projets sont souvent coûteux et longs et viennent donc dans un processus d’arbitrage vis-à-vis d’autres ressources ou d’autres projets hors de la DSI. Il est donc de plus en plus courant de voir au sein des organisations, notamment de grandes entreprises, une direction de la transformation se créer afin d’avoir une vision globale des projets et de proposer des arbitrages au comité de direction.

Dans les grandes entreprises, on assiste de plus en plus à la création de direction de la transformation afin de disposer d’une vision plus globale des projets. PxHere, CC BY-SA

Les décisions et les arbitrages dans le management de portefeuille de projets pour les organisations sont d’autant plus cruciaux car ils comportent aussi une très forte part d’irréversibilité. En effet, l’implémentation d’un projet notamment basé sur des SI et son degré d’appropriation par les différentes business units de l’organisation vont créer des routines parfois fortement ancrées qui seront très difficiles à modifier.

À cela s’ajoutent les problématiques de gouvernance et les jeux de pouvoir internes entre les business units elles-mêmes et les business units et la DSI lorsqu’il s’agit d’effectuer des arbitrages en matière de ressources.

Une compétence dynamique

Des recherches plus récentes tendent à montrer que le management de portefeuille de projets relève d’une véritable capacité dynamique. D’une part, les organisations qui sont capables de gérer de manière agile et réactive leur portefeuille de projets bénéficient d’un avantage concurrentiel.

D’autre part, il s’agit bien d’une compétence dynamique au sens où les projets, notamment avec l’utilisation des méthodes agiles, sont lancés de plus en plus souvent en parallèle les uns des autres et sont soumis à de multiples aléas internes et externes.

Il convient donc de s’inspirer des principes des méthodes agiles en les adaptant aux caractéristiques des projets basés sur des SI. Cela peut alors nécessiter une organisation différente au sein des entreprises pour faire face à une très grande complexité compte tenu de la multiplicité des projets qui coexistent.

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