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Comprendre l’organisation dans un monde en constante évolution

Fluidité. Twentyfour Students / Flickr, CC BY-SA

Comprendre comment émergent les nouvelles pratiques de travail et les phénomènes organisationnels, tel est l’objectif de l’étude menée avec Stéphanie Missonier. Une « approche par les événements » a été développée afin d’étudier une banque luxembourgeoise et son comportement de survie après la crise des subprimes.

Cette approche repose sur la prise en compte des événements passés, présents et anticipés pour comprendre comment de nouveaux modes d’organisation émergent et se maintiennent dans le temps.

De la crise des subprimes aux nouvelles pratiques de travail

2008 : la crise des subprimes ébranle le système bancaire mondial qui licencie lourdement pour faire face à la tempête. Pendant ce temps-là, au Luxembourg, une banque spécialisée dans le private banking choisit de conserver ses collaborateurs. Les dirigeants estiment qu’il y aura toujours des postes indispensables pour assurer la pérennité de l’établissement. Ils décident alors de développer un outil de gestion des compétences pour évaluer les collaborateurs et leur proposer, si nécessaire, une formation appropriée permettant de les réaffecter à d’autres postes où des besoins sont identifiés.

D’octobre 2008 à fin août 2009, nous avons accompagné les collaborateurs du département Ressources Humaines de Banca (dénommée ainsi pour les besoins de l’étude) afin de suivre l’émergence de nouvelles pratiques de travail et de modes organisationnels. À partir de cette étude, nous avons construit une réflexion sur le rôle des événements passés, présents et anticipés, dans l’évolution constante des formes organisationnelles.

Après l’ère des structures fixes (le bâtiment, l’usine, les bureaux), est survenue celle des entreprises en réseau, puis celle des organisations en reconfiguration permanente. Dans un monde en constante évolution, le dernier modèle tend à devenir la norme.

De nouvelles formes organisationnelles

Le projet Banca n’est qu’un avant-goût de ces nouvelles formes organisationnelles constamment en évolution. On peut en observer, par exemple, dans les espaces de coworking ou les makerspaces dans lesquels l’organisation des activités est en évolution permanente. Cependant, ces nouveaux modèles organisationnels n’émergent pas de nulle part. Ils s’enracinent dans un passé personnel ou local et correspondent à une définition d’un futur plus ou moins lointain. De plus, ces nouveaux modes d’organisation se reconfigurent également en fonction des activités et des collaborations.

On peut comparer cela à un match de football dont l’organisation se prépare certes à l’avance sur la base des matchs passés, mais surtout se construit pendant le jeu. L’organisation de l’équipe évolue en fonction du déroulement du match, tenant compte par exemple des réactions de l’équipe adverse. En somme, l’organisation se construit en jouant.

L’objectif de cette recherche a été de développer un cadre théorique basé sur les événements – appelé l’approche par les événements et qui s’inspire notamment des travaux du théoricien des organisations Tor Hernes – pour comprendre l’organisation comme un phénomène qui émerge et se maintient uniquement dans les activités.

Plus précisément, c’est en mobilisant les événements passés, présents et anticipés relatifs à l’activité que les acteurs structurent leurs actions, assurant ainsi une forme de continuité, malgré des changements permanents. En conséquence, une coexistence créative de la nouveauté et de la stabilité est possible.

Pas de dichotomie « stabilité/nouveauté »

La valeur ajoutée de l’étude est de deux ordres. D’une part, elle remet en cause l’approche traditionnelle qui considère l’organisation comme une entité stable qui change par accident ou par action planifiée. Et d’autre part, elle dépasse la dichotomie nouveauté – stabilité et montre que dans « la vraie vie », ces deux phénomènes coexistent.

En d’autres termes, leur distinction est purement artificielle. Comme dans nos activités quotidiennes, à la fois, nous reproduisons certaines caractéristiques de l’organisation (c’est la stabilité) et nous en produisons de nouvelles (c’est la nouveauté). À notre connaissance, cela n’avait pas été traité de manière conceptuelle en théories de l’organisation.

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