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Prêts à vous poser sur une exoplanète ?

un outil de visualisation 3D en ligne pour découvrir les exoplanètes. Auteurs, CC BY

Cet article est republié dans le cadre de la prochaine Fête de la science (du 5 au 13 octobre 2019 en métropole et du 9 au 17 novembre en outre-mer et à l’international) dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition aura pour thème : « À demain, raconter la science, imaginer l’avenir ». Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site Fetedelascience.fr.


La quête des exoplanètes rocheuses s’avère difficile, tant elles sont petites et lointaines. Pour la première fois, notre équipe de chercheurs propose une technique pour synthétiser numériquement des topographies réalistes des exoplanètes telluriques. En naviguant simplement sur le web, vous pourrez vous approcher et vous poser sur ces objets célestes synthétiques. Et pour nous, scientifiques, cette avancée permettra de mieux préparer l’analyse des données réelles issues des futures campagnes d’observation directe des exoplanètes.

Les exoplanètes telluriques sont des corps qui gravitent autour d’autres étoiles que le soleil, en dehors de notre système solaire. Elles sont extrêmement lointaines, peu lumineuses et petites. Pour l’instant, aucun instrument n’a réussi à acquérir une image d’une exoplanète rocheuse, tant le défi est considérable. À titre de comparaison pour observer la plus proche d’entre elles, il faudrait un télescope situé à Marseille capable de distinguer une aiguille dans une botte de foin à Paris ! Malheureusement, cette technologie ne sera pas disponible dans les prochaines années.

Méthode du transit

Néanmoins, il existe des techniques indirectes pour y parvenir. En 2018, une équipe de l’Université de Columbia a démontré la faisabilité d’une méthode utilisant la projection de l’exoplanète en transit devant son étoile hôte, appelée méthode du transit. Sans montagne, elle apparaîtrait comme un disque parfait qui éclipserait la lumière de l’étoile. Avec la présence de montagnes, une fraction plus importante de l’étoile serait cachée et le flux lumineux observé serait légèrement plus bas. Selon cette étude, les précisions atteintes sur la prochaine génération de télescopes suffiront pour distinguer l’effet des montagnes avec seulement 20h d’observation.

Il reste néanmoins à dessiner la forme réaliste d’une exoplanète. En effet, la méthode du transit ne permet pas de positionner précisément les rugosités de la topographie. Un grand pas vient d’être franchi à ce propos en 2019, car une étude des corps du système solaire démontre une grande régularité des propriétés statistiques des surfaces que l’on peut donc raisonnablement transposer aux exoplanètes telluriques.

Exemples de topographie synthétique d’exoplanètes, sans présence d’océan (à gauche) ou avec un océan (à droite). Auteurs, Author provided

Nous avons mené notre enquête sur les objets les mieux connus du système solaire (incluant : la Terre, la Lune, Mercure et Mars). Malgré leurs différences, les topographies de ces corps telluriques partagent des caractéristiques similaires. Le modèle dit « multifractal » permet de rendre compte de la complexité de ces corps, tantôt lisses, tantôt rugueux, à toutes les échelles. Ce modèle est une extension du modèle des fractales, popularisé par Benoît Mandelbrot.

Plus récemment encore, notre groupe de chercheurs a pour la première fois pu générer des surfaces « multifractales » en géométrie sphérique. Celles-ci comportent des zones lisses et rugueuses à toutes les échelles, comme dans la réalité. L’outil est capable de générer autant d’exemples que nécessaire. Il sera donc possible de proposer des formes réalistes en adéquation avec les futures observations de transit des futurs instruments spatiaux et au sol, comme le télescope spatial James-Webb en 2021, et l’Télescope géant européen à l’horizon 2024.

Géographie des océans

Ces topographies synthétiques réalistes permettront de résoudre d’autres énigmes sur les exoplanètes mais aussi sur les corps du système solaire et la Terre primitive. En guise d’illustration, l’étude propose d’étudier la statistique des terres émergées (îles, continents…) et des mers (lacs, océans…) en fonction du niveau de remplissage d’eau liquide. Les résultats montrent que la taille du plus grand océan est très variable. Dans le cas où il y a peu d’eau, 90 % de la surface est recouverte de continents et 10 % de mers, le plus grand océan a une taille moyenne de 75 % des mers c’est-à-dire une seule grande mer dominante. Dans le cas similaire à la Terre, 70 % de la surface de la planète est recouverte d’océans et 30 % de continents, le plus grand continent regroupe en moyenne 75 % des terres émergées, contre 55 % pour la Terre actuelle.

En définitive, cette étude montre que la configuration de la Terre est plus probable avec des continents connectés plus grands. Cette situation a eu lieu il y a 300 millions d’années : la Terre sous la forme d’un unique supercontinent appelé la Pangée. Ces topographies synthétiques permettent d’étudier la géométrie des potentiels océans en dehors du système solaire, un point important pour l’habitabilité. En effet, les interfaces entre surfaces continentales et océans ont été suggérées comme essentielles pour l’apparition de la vie.

Pour mieux appréhender ces topographies synthétiques, un outil de visualisation 3D en ligne (utilisable sur toutes les plates-formes, y compris tablettes et téléphones) a été mis en place avec plusieurs exemples d’exoplanètes. Lancez-vous, et devenez un voyageur planétaire sans bouger de votre salon !

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