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Primes, promotions …Les « bonnes » incitations ne suffisent pas, c’est aussi une question de timing

Un lapin court avec sa montre
Une incitation sera d'autant plus efficace qu'elle intervient au bon moment. Sofia Horyn/Shutterstock

Promotions, primes, subventions, réductions d’impôt… les incitations sont largement utilisées pour provoquer des changements de comportement. Par exemple, plusieurs pays offrent des primes pour passer aux véhicules électriques ou des paiements pour des services écosystémiques (550 programmes actifs dans le monde correspondant à 36 à 42 milliards de dollars).

Plusieurs facteurs expliquent pourquoi une incitation est ou non efficace, comme leur niveau ou leur nature (monétaire, morale ou sociale). Une incitation monétaire élevée est a priori plus susceptible d’encourager l’adoption du comportement souhaité, comparée à une incitation d’un montant plus faible, si on suppose et vérifie que les individus préfèrent toujours obtenir davantage.

Toutefois, dans une étude récente, nous avons souligné l’importance d’une autre dimension parfois oubliée ou sous-estimée : le timing. Notre principal argument est qu’il existe des « fenêtres d’opportunité » à saisir pour accroître considérablement le pouvoir des incitations. Récemment, les distributeurs ont ainsi considérablement insisté sur les derniers jours des mégapromotions, juste avant leur « interdiction », notamment dans les domaines de l’hygiène et de l’entretien.

Obtenir un effet de surprise

L’effet « bon moment » est notamment lié à l’existence de repères temporels, c’est-à-dire, des événements réguliers qui marquent le passage du temps (débuts d’année, mariages, nouveaux emplois, départs à la retraite…). Certains travaux montrent comment les recherches Google sur le terme régime sont plus fréquentes après certains repères temporels pouvant favoriser la sensation d’un « nouveau départ ». Quand la date d’un changement est proche d’un repère temporel, la résistance diminue.

Le timing pourrait également être un facteur important lorsque l’on se concentre sur l’impact des incitations qui se produisent à un moment imprévu et aléatoire. En 2021, un patron français, Jean-Yves Glumineau, fait une belle surprise à ses 150 employés juste avant Noël. Ce dirigeant a annoncé à la fois son départ et un cadeau de 2 680 000 euros aux salariés pour les remercier de leur travail.

Les incitations inattendues ont, en effet, un impact émotionnel plus important que les incitations attendues. Partant de constat, si les autorités souhaitaient demander aux contribuables de participer à certains investissements durables, il pourrait être opportun que cette sollicitation arrive au moment où les contribuables perçoivent un bonus, bénéficiant ainsi de « l’humeur positive » générée par l’effet de surprise.

Effet immédiat pour plus d’impact

Dans certaines situations, la proximité temporelle entre le comportement ciblé et l’incitation peut accroître l’expérience positive de la tâche : c’est ce que peuvent produire des récompenses immédiates. Elles ont la vertu d’associer la récompense au comportement souhaité qui crée une émotion positive.

Certaines entreprises exploitent les opportunités offertes par les interactions en ligne et conçoivent des programmes pour récompenser les consommateurs, les employés et d’autres individus en temps réel, instantanément, « au moment précis où ils sont le plus engagés ». Un autre exemple surprenant est offert par Zappos, un site de vente de chaussures en ligne. Cette entreprise soumet les nouveaux employés à un programme de formation intensif de quatre semaines. À l’issue de ce dernier, les salariés se voient proposer une prime de plus de 2 000 dollars (en plus du temps déjà travaillé) s’ils souhaitent démissionner immédiatement. Cette pratique profite d’un moment décisif pour « écarter » les recrues insuffisamment engagées ou passionnées.

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Le moment choisi pour l’octroi des incitations n’est pas neutre. Définir une fenêtre d’opportunité, par exemple, en utilisant un repère temporel comme le jour du dépassement peut être exploité pour inciter les individus à agir en faveur de la planète. Un autre exemple consiste à communiquer intentionnellement le montant de l’écotaxe que les particuliers doivent payer avant et à chaque fois qu’ils font le plein d’essence.

Tu klaxonnes, tu attends

Dans certaines situations, les incitations peuvent être délivrées en unités de temps. Par exemple, le bruit constitue un problème majeur dans de nombreux pays. Après avoir tenté plusieurs approches, les autorités de Mumbai, en Inde, ont mis en œuvre une nouvelle politique intitulée « Klaxonnez davantage, attendez davantage ». Lorsque le bruit des klaxons dépasse 85 décibels, le feu repasse au rouge. Cette incitation temporelle, mise en œuvre au bon moment, semble prometteuse là où d’autres approches telles que les amendes ont échoué.

Toutefois, certains mécanismes peuvent être difficiles à mettre en œuvre et nécessiter de l’audace politique. En effet, les nouvelles approches ne sont pas créées à partir de rien et doivent tenir compte de l’héritage des précédentes. La suppression de ces obstacles est plus probable si les changements proposés sont appliqués à de nouveaux sous-domaines où l’héritage n’est pas trop fort.

A cet égard, l’exemple de politiques complètement nouvelles comme la proposition de taxes sur la fast fashion et avec des échantillons plus susceptibles de réagir positivement. [Par exemple, les agriculteurs sont habitués à certaines formes d’incitations, mais des changements pourraient plus facilement s’appliquer aux nouveaux agriculteurs, à compter d’une certaine date (même si cela peut soulever des problèmes d’équité).]

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