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soleil vu de proche
De nos jours, l’activité solaire est constamment suivie et étudiée, ce qui permet de savoir quand une tempête va survenir. (Shutterstock)

Tempête solaire : voici ce qui est arrivé et pourquoi

Notre Soleil travaille sans relâche, éjectant régulièrement des particules microscopiques dans toutes les directions, qui forment ce qu’on appelle le vent solaire. Ce « travail », aussi appelé activité solaire, résulte de réactions complexes qui se produisent au sein de l’étoile. L’intensité de l’activité du Soleil suit un cycle qui dure environ 11 ans.

Comme le vent à la surface de la Terre, l’intensité du vent solaire varie en fonction des perturbations à son origine. Le vent solaire peut donc devenir une tempête solaire, pendant laquelle de très grandes quantités de particules extrêmement rapides peuvent atteindre la Terre. Et cette tempête peut durer plusieurs heures.

C'est ce qui s'est passé vendredi sur la planète. Une tempête solaire dite « extrême », de niveau 5, la première de ce niveau depuis 2003, a frappé la Terre, générant d'impressionnantes aurores boréales.

On savait que cette tempête allait survenir : en 2024, on approchait du sommet du cycle actuel, c’est-à-dire le moment où le risque de tempête solaire provenant de notre étoile sera à son plus élevé. Il était difficile de prédire à quel moment le sommet du cycle serait atteint. Les experts estimaient qu’il devrait se produire vers la fin de 2024 ou au début de 2025.

Quels effets ces tempêtes solaires ont-elles avoir sur notre quotidien ? Qu’en est-il des avions et des satellites, qui sont plus proches du Soleil ?

Professeur en génie électrique à l’École de technologie supérieure (ÉTS), j’ai récemment étudié une partie de ces questions. Dans cet article, je tenterai d’y répondre.

De (rares) pannes d’électricité

Les particules les plus énergétiques (soit les plus rapides) envoyées vers la Terre au cours de ces tempêtes peuvent traverser la magnétosphère, qui est la « région » protégée par le champ magnétique de notre planète et qui s’étend au-delà de l’atmosphère. Plus on s’approche des pôles, plus la probabilité que les particules traversent la magnétosphère est grande.

Or, l’atmosphère nous procure également une certaine protection. En interagissant avec les particules, l’atmosphère contribue à réduire leur nombre et leur vitesse, et ce, au fur et à mesure qu’elles se rapprochent de la surface de la Terre. Vous serez sans doute ravis d’apprendre qu’en entrant en collision avec les gaz de l’atmosphère, ces particules créent de magnifiques aurores boréales (et australes). C'est ce qu'on a pu admirer partout au Québec et dans le monde vendredi soir, et aussi samedi.

Mais elles peuvent également causer certains dommages aux lignes de transmission d’électricité lorsqu’elles ne sont pas adéquatement protégées. Résultat ? Des bris d’équipements et des pannes, privant les foyers d’électricité.

Par exemple, en 1989, pendant un sommet d’activité solaire, le Québec a connu une panne d’électricité majeure causée par une forte tempête solaire.

Cet événement spectaculaire à l’échelle de la province, qui a duré 9 heures, représente l’effet le plus tangible des tempêtes solaires que peut ressentir la population. Mais il demeure très rare. De plus, depuis cette panne, Hydro-Québec a entre autres amélioré les systèmes de protection des lignes électriques, rendant le réseau plus robuste et moins vulnérable aux tempêtes solaires. Cela a porté fruit puisqu'aucune panne d'électricité n'a été signalée vendredi.

Quels sont les effets potentiels d’une tempête solaire ?

Des satellites vulnérables aux tempêtes solaires

C’est plutôt au-dessus de nos têtes que les tempêtes solaires risquent davantage de faire des dégâts.

De nos jours, l’activité solaire est constamment suivie et étudiée, ce qui permet de savoir quand une tempête va survenir. C’est d’autant plus important aux altitudes élevées ou dans l’espace, car les particules plus énergétiques qui s’y rendent pourraient entraîner jusqu’à la destruction pure et simple des appareils électroniques (et de leurs puces, qui agissent comme des cerveaux) qui y sont exposés.

Un peu plus haut dans le ciel, les satellites de communication et de météo, situés à 36 000 km de la Terre, sont en effet davantage susceptibles d’être affectés par les particules du Soleil émises lors de tempêtes solaires. Les dégâts varient de pannes mineures facilement corrigibles à des pertes totales.

Un peu moins loin de nous, à 20 000 km de la surface terrestre, se trouvent les satellites GPS. Ceux-ci sont mieux protégés par la magnétosphère, mais doivent quand même faire l’objet d’un suivi.

Il est à noter que lors de la conception des différents satellites, la menace des tempêtes solaires est prise en considération. Ainsi, des mécanismes de protection, rendant les puces électroniques et les calculs qui y sont effectués plus robustes, y sont généralement ajoutés.

Des avions qui volent de plus en plus haut

Dans les dix dernières années, nous avons pu réaliser des projets qui nous ont permis de faire des tests avec un accélérateur de particules du laboratoire TRIUMF, en Colombie-Britannique. Mon équipe a bombardé des puces électroniques de particules afin d’évaluer leurs effets sur un type particulier de puces, les circuits intégrés programmables par l’usager.

Ces tests ont été motivés par le fait que les avionneurs veulent faire voler leurs avions à des altitudes plus élevées qu’avant. Et selon la littérature scientifique, le fait de passer d’une altitude de 35 000 à 50 000 pieds entraîne une augmentation des effets de l’activité solaire de l’ordre de 25 %.

Cela dit, cette différence n’entraîne pas à proprement parler de dangers ; à moins de voler très près des pôles pendant une forte tempête solaire. Il n’y a donc pas d’inquiétude à avoir, ne serait-ce que pour les appareillages très sensibles des avions, comme les ordinateurs de vol. Heureusement, ces ordinateurs font l’objet de redondance, c’est-à-dire qu’il y existe plus d’une copie de ces appareils. La protection contre les erreurs de calcul, par exemple, est donc généralement suffisante.

Mais le risque n’est tout à fait pas nul. En 2008, un vol de la compagnie australienne Qantas a subi une perte d’altitude « violente ». Le pilote a pu récupérer le contrôle, mais il y a tout de même eu des blessés. Après enquête, on a attribué l’incident à une variation cosmique.

Cette exception qui confirme la règle justifie donc qu’on s’intéresse au sujet. Mais pas qu’on s’inquiète si on doit prendre l’avion !


Je tiens à remercier Julien Lamoureux pour son soutien à la rédaction du premier jet de l’article.

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