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Les pourfendeurs des livres de croissance personnelle reprochent à leurs auteurs de promouvoir des « recettes » dont l’efficacité reste à prouver. La Conversation , CC BY-NC-ND

Voici pourquoi les livres de croissance personnelle sont utiles… et pourquoi certains les dénigrent!

Le développement personnel est à la mode. Les livres qui visent à aider le lecteur à changer sa vie ont du succès. Mais les dénigrer est aussi de bon ton. On dit qu’ils encouragent le narcissisme, poussent au repli sur soi, contaminent les rayons des librairies… mais que cache le dédain de cette littérature ?

Étant moi-même sociologue, lecteur et auteur de livres classés en sociologie et d’autres en développement personnel, j’ai cherché à comprendre ce que l’on reproche à ces livres et ce que cherchent leurs lecteurs.

Les pourfendeurs des livres de croissance personnelle reprochent à leurs auteurs de promouvoir des « recettes » dont l’efficacité reste à prouver en tirant de quelques exemples, voire d’un seul (le leur), des leçons de vie soi-disant universelles. Or les sociologues s’appuient aussi parfois sur très peu de cas pour élaborer des théories, tout comme les philosophes tirent leur conception du monde de leurs réflexions personnelles.

En fait, ces livres s’appuient souvent sur des travaux scientifiques. En outre, s’il est difficile de mesurer l’effet des thérapies — pensons aux controverses sur l’efficacité de la psychanalyse —, il est encore plus ardu de mesurer celui de la lecture d’un livre.

Pour les psychanalystes, ces livres n’iront jamais assez loin, car il est difficile d’accéder seul à son inconscient. Mais les témoignages et lettres de remerciement envoyés par les lecteurs aux auteurs, ainsi que les succès en librairies en partie grâce au bouche-à-oreille, peuvent être considérés comme des signes que les lecteurs jugent ces livres utiles.

Source de discussions et de soutien

Une autre critique faite à cette littérature est qu’elle favorise le narcissisme puisqu’elle nous ferait croire que nous pouvons résoudre seuls tous nos problèmes. Si nous ne sommes pas heureux, ce serait donc uniquement de notre faute.

Enfin, ces livres sont accusés de contribuer à une société individualiste et inégalitaire, car ils encourageraient leurs lecteurs à accepter leur sort. Au lieu de chercher des solutions collectives, grâce à la politique ou au syndicalisme, par exemple, ces derniers feraient contre mauvaise fortune bon cœur.

Mais si chacun gère mieux ses frustrations, c’est toute la société qui est gagnante car moins violente. Ce type de lecture est source de discussions et de soutien; les lecteurs prêtent leur livre à des amis, font preuve de solidarité, participent à des stages ou conférences où ils sympathisent avec de nouvelles personnes.

Des racines dans la philosophie antique

Les lecteurs de développement personnel sont des personnes qui ont souvent vécu une brèche dans leur parcours de vie, comme une rupture ou un deuil. Ils cherchent à rebondir en se prenant en main. Ils lisent pour apprendre à mieux communiquer, aimer, et pour chasser leurs vieux démons (jalousie, peurs, jugement).

Traduit en 17 langues, le livre «Père manquant, fils manqué» de Guy Corneau est l’un des livres de croissance personnelle ayant connu le plus de succès au Québec. Éditions de l’Homme

Par exemple, les lecteurs du défunt auteur Guy Corneau cherchent à quitter les rôles de victimes, bourreaux ou sauveurs, et à devenir de meilleurs pères. Personnellement, je ne vois ici que de belles intentions et valeurs. Ces citoyens n’apportent-ils pas plus à la société que ceux qui se complaisent dans leur malheur?

Enfin, le développement personnel ne s’oppose pas aux lectures plus intellectuelles. Comme le montre le psychothérapeute Christophe André, le développement personnel tire ses racines dans la philosophie antique. Ce sont les mêmes questions: quel est le sens de la vie ? Comment se défaire de nos conditionnements ? Les philosophes antiques et orientaux n’hésitaient pas à livrer leurs recommandations sur la façon de mener une bonne vie. Des préceptes antiques tels que «deviens ce que tu es» et «connais-toi toi-même» sont repris souvent dans les ouvrages de développement personnel.

Il est aussi fort probable que les auteurs de livres de développement personnel et leurs détracteurs aient à peu près le même public. Et quand je croise une personne triste, déprimée ou en colère, je me sens plus utile en lui offrant un (bon) livre de développement personnel qu’un ouvrage de sociologie.

This article was originally published in French

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