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Fragment de papyrus.
Fragment du papyrus berlinois P.Berol. 13044r. Les colonnes qui parlent de géographie dans le papyrus sont les quatre dernières. Dans la dernière, on trouve les « plus belles fontaines », dans l'avant-dernière, « les plus grands fleuves », dans la précédente, « les plus hautes montagnes » et dans la quatrième, en partant de l'arrière, les « sept merveilles » et les « plus grandes îles ». Author provided

Ce que les papyrus nous apprennent sur la géographie dans l’Antiquité

Si l’on associe généralement l’Égypte à la culture millénaire des pharaons qui nous ont légué les pyramides et les hiéroglyphes, il ne faut pas oublier qu’à partir de 330 avant J.-C., l’Égypte a été une province de l’empire grec conquise par Alexandre le Grand. Des siècles plus tard, elle devient une province romaine.

Pendant toute cette période, le grec est utilisé par les classes sociales les plus privilégiées du pays, la langue et la littérature grecques étant un symbole de culture et de haut statut social.

Ainsi, de la fin du IVe siècle avant J.-C. jusqu’à l’islamisation du pays au VIIe siècle après J.-C., l’Égypte est un lieu où circulent les livres grecs. Aujourd’hui, il nous reste des fragments de papyrus, la matière dont ils étaient faits, ancêtre de notre papier fabriqué à partir des fibres du roseau du même nom qui poussait dans le delta du Nil. Les livres grecs sur papyrus existaient dans toute la Méditerranée, mais seul le climat sec de l’Égypte a permis de les préserver.

Dans cet article, nous allons nous concentrer sur le cas particulier des fragments de livres de géographie trouvés sur papyrus.

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Dans l’Antiquité grecque et romaine, la géographie prenait trois formes différentes. D’une part, il y avait la géographie dite descriptive, c’est-à-dire la description des territoires et de leurs habitants. D’autre part, il y avait la géographie astronomique ou mathématique et, enfin, il y avait aussi une production de cartes. Les papyrus nous fournissent des exemples de ces trois branches.

La Géographie de Strabon

Le seul ouvrage de géographie descriptive qui nous soit parvenu presque complet est le XVIIe livre de la Géographie de Strabon.

Cependant, Strabon écrit au début du Ier siècle, mais aucun auteur ne le cite avant la fin du IIe siècle ou même au début du IIIe siècle. On a donc longtemps pensé que, pour une raison ou une autre, son œuvre n’avait pas circulé pendant de longues années.

Fragment de papyrus
Fragment de papyrus P.Oxy.XLIX 3447. Oxyrhynchus

Mais l’un des papyrus découverts à la fin du XIXe siècle lors des fouilles de Bernard Grenfell et d’Arthur Hunt à la cité d’Oxyrhynque allait modifier ce que nous savions de la circulation de l’œuvre de Strabon à ses débuts.

L’un des papyrus, celui publié sous le nom de P.Oxy. XLIX 3447, contenait les restes d’une très belle copie de la Géographie écrite en onciale romaine, un style d’écriture typique du 1er siècle. Il s’agit d’un exemplaire de luxe, un exemplaire qui, à l’époque, a dû coûter très cher à l’acquéreur et, surtout, qui ne peut en aucun cas être daté plus tard que le début du IIe siècle.

En d’autres termes, bien que nous ne sachions toujours pas pourquoi personne ne l’a cité à cette époque, nous sommes désormais certains que la Géographie de Strabon était en circulation aux Ier et IIe siècles. À l’époque où les érudits soupçonnaient que la Géographie n’était peut-être pas en circulation, un habitant du centre de l’Égypte, dans une ville de province, l’a fait copier par un scribe professionnel et y a investi une petite fortune.

Trois cartes du monde selon le concept de trois anciens géographes grecs
« Les systèmes géographiques de Ptolémée, Strabon et Ératosthène », une planche avec trois cartes. Carte 4 de l’Atlas complet du précis de la géographie universelle de Conrad Malte-Brun. David Rumsey Map Collection/Wikimedia

Apprendre les caractéristiques géographiques

La branche mathématique ou astronomique de la géographie est la moins représentée et celle qui, jusqu’à présent, a offert le moins de découvertes aux spécialistes. Pourtant, les papyrus nous donnent accès à des domaines de la culture antique que nous ne pourrions pas connaître sans eux.

C’est le cas par exemple, le matériel utilisé dans les écoles, tant par les élèves que par les enseignants. Un papyrus berlinois, P.Berol. 13044r (1er siècle av. J.-C.), nous offre une sorte de « livre du maître » dans lequel figure, entre autres, une série de listes géographiques (d’îles, de rivières, de montagnes, de lacs, de sources).

Certaines d’entre elles semblent prendre la forme de courts poèmes, sans doute pour que les élèves puissent les mémoriser plus facilement.

La cartographie ancienne

Enfin, grâce aux papyrus, nous connaissons également mieux l’aspect cartographique de la géographie antique. À la fin des années 1990, l’une des principales découvertes papyrologiques concernait précisément cette catégorie.

Un grand fragment d’un rouleau de papyrus daté du début du 1er siècle a été retrouvé (il était entre les mains d’un collectionneur privé), contenant deux textes à thème géographique et l’esquisse d’une carte laissée inachevée.

D’après l’auteur de l’un des textes, Artémidore d’Éphèse, l’ensemble du papyrus est connu sous le nom de « Papyrus d’Artémidore ». L’authenticité de l’objet a été remise en question à plusieurs reprises, bien que la majorité de la communauté papyrologique admette son authenticité et le considère comme un témoignage très important de la façon dont les cartes étaient dessinées au début de la période romaine.

Fragment d’un papyrus ancien
Fragment du papyrus d’Artémidore. Wikimedia

Selon cette source, on commençait à dessiner à partir du coin supérieur gauche et de là, on se déplaçait vers le coin inférieur droit – cette méthode était déjà conseillée par Claude Ptolemée. Les lignes des rivières et des cours d’eau semblent définir le contour général du territoire. Par-dessus, on ajoute les éléments du paysage tels que les montagnes ou les forêts et, enfin, les villes et autres éléments d’origine humaine.

Ce ne sont là que quelques exemples de ce que l’on peut trouver dans ces fragments de livres laissés datant d’il y a deux millénaires.

This article was originally published in Spanish

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