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Près d’un dirigeant de PME ou d’ETI sur deux déclare se sentir isolé. Shutterstock

Entrepreneurs, comment faire face à la solitude du dirigeant ?

La vie d’un entrepreneur n’est pas un long fleuve tranquille, notamment lors des premières années suivant la création de son organisation. Le créateur d’entreprise se trouve notamment confronté à un fort sentiment d’isolement, généré par l’incertitude et la complexité de l’environnement, la peur de l’échec, le poids des responsabilités, les préjugés à l’égard des chefs d’entreprise et la difficulté à concilier vie personnelle et vie professionnelle. En effet, une étude montre que 45 % des dirigeants de petites et moyennes entreprises (PME) ou d’entreprise de taille intermédiaire (ETI) déclarent se sentir isolés pour ces raisons.

Dans la littérature, le sentiment d’isolement est décrit comme une émotion néfaste qui affecte le bien-être de l’individu. En psychologie, la solitude est perçue comme un ensemble de sentiments complexes ressenti lorsque les besoins d’un individu ne sont pas satisfaits. Cette solitude peut être inhérente à la personnalité de l’entrepreneur, telle que la timidité, la faible estime de soi, ou résulter de facteurs personnels ou professionnels.

« J’avais besoin de soutien »

La solitude peut être à la fois objective et/ou subjective. La solitude objective se manifeste par une privation de compagnie humaine, tandis que la solitude subjective est un état d’âme ressenti émotionnellement. Nos études sur les entrepreneurs marginalisés et/ou précaires ont notamment mis en évidence la vulnérabilité de ces individus, notamment les femmes ou les jeunes issus de quartiers défavorisés. Quelle que soit sa forme, la solitude ressentie par les entrepreneurs et chefs d’entreprise peut et doit être endiguée ou minimisée.

Pour lutter contre l’isolement des entrepreneurs, une première approche consiste à réduire la solitude objective par la solidarité entrepreneuriale. Ainsi, les espaces de coworking, les chambres de commerce et d’autres réseaux professionnels favorisent une meilleure intégration des entrepreneurs et peuvent contribuer à surmonter l’isolement.

Un entrepreneur que nous avons rencontré dans le cadre de nos recherches en témoigne :

« Travailler dans un espace de coworking m’a permis d’échanger avec mes pairs […] j’ai réalisé que je n’étais pas seul […] j’ai trouvé mon premier client grâce à un contact rencontré lors d’un événement réseau organisé par la chambre de commerce ».

Le deuxième conseil pour combattre la solitude subjective est de privilégier l’entrepreneuriat collectif. Les structures d’accompagnement, telles que les coopératives d’activités et les sociétés de portage, réduisent le risque juridique et offrent un contrat d’entrepreneur salarié, conciliant autonomie de l’entrepreneur et protection sociale.

L’entrepreneuriat collectif, un levier pour limiter la solitude subjective. Pxhere, CC BY-SA

Notre recherche auprès d’une société coopérative et participative (SCOP) révèle que, sur les 100 nouveaux porteurs de projets intégrant la coopérative, 30 se sont immatriculés principalement pour rompre l’isolement et tisser des partenariats. Un entrepreneur détaille son choix :

« Je ne pouvais plus tout gérer seul […] j’avais besoin de soutien […] mon comptable et mon assurance étaient onéreux […] seul, je ne pouvais pas répondre à certaines demandes ou viser d’autres marchés ».

Le modèle de cette SCOP illustre le succès de l’entrepreneuriat collectif dans la réduction de l’isolement. Alors que les faillites inquiètent parmi les très petites entreprises (TPE), le taux de pérennité à 5 ans des SCOP augmente, atteignant 76 % en 2023 contre 61 % pour l’ensemble des entreprises françaises.

Mieux accepter l’échec

Ce succès s’explique notamment par un meilleur accompagnement, un réseau solide et un soutien efficace aux entrepreneurs. Le mode de l’entrepreneuriat collectif prôné par ces coopératives montre une vraie réussite dans l’accompagnement, le réseautage et le soutien aux entrepreneurs luttant par là même contre l’isolement des entrepreneurs.

Au-delà de la lutte contre l’isolement, il reste par ailleurs essentiel de s’appuyer sur d’autres leviers pour renforcer l’activité entrepreneuriale.

À court ou moyen terme, cela passe en particulier par un changement des mentalités et une meilleure acceptation de l’échec. Diminuer l’écart entre ceux qui aspirent à entreprendre et ceux qui franchissent le pas nécessite une valorisation accrue du risque et une meilleure protection des entrepreneurs.

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