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ICO : des levées de fonds… en cryptomonnaie

Comment la start-up Filecoin, financée par ICO, voit son business… et sa cryptomonnaie. https://filecoin.io/

Un nombre croissant d’entreprises profitent de l’existence des cryptomonnaies pour lever d’importants financements au moyen de ce qu’on appelle les ICO, soit initial coin offering ou Offres publiques en cryptomonnaies. Et ce ne sont pas seulement des entreprises de technologie qui utilisent cette nouvelle forme de levée de fonds. La liste des sociétés qui ont fait appel à des ICO ou qui prévoient de le faire touche les secteurs de l’immobilier, de la finance… voire de l’industrie dentaire.

De fait, l’intérêt pour les ICO s’est accéléré cette année avec 148 ICO à ce jour, ayant levé plus de 2,2 milliards de dollars US.

Comment marche un ICO ?

Au cœur d’un ICO se trouve la création d’un nouveau token ou cryptomonnaie qui est similaire à la plus célèbre des cryptomonnaies, le Bitcoin. Ceux qui investissent dans un ICO achètent les nouveaux tokens à un prix déterminé dès le départ.

L’entreprise conserve la totalité de l’argent récolté grâce à cette vente. Contrairement aux actionnaires, les investisseurs en tokens n’ont ni contrôle ni mot à dire sur la gestion de l’entreprise. Ils espèrent simplement que le prix de la nouvelle cryptomonnaie augmentera et, dans ce cas, leur permettra de revendre leur mise de fonds à une date ultérieure.

Un grand nombre de ICO sont basés sur la technologie Ethereum qui utilise une norme appelée ERC20. Ethereum a la capacité d’encoder des contrats intelligents, qui permettent l’exécution automatique d’une ou plusieurs opérations sur la base d’un code informatique, du moment que certaines conditions sont remplies. Un exemple simple est la libération de fonds seulement après une certaine date.

Pourquoi la nouvelle monnaie prendrait-elle de la valeur ?

Pour que les tokens d’ICO aient non seulement une quelconque valeur, mais puisse même en prendre, la devise doit faire partie intégrante du modèle économique de l’entreprise. Si l’entreprise marche bien, il s’ensuit que la valeur de la monnaie augmentera parce qu’il y aura plus de demande. Si la demande de devise-token s’accroît, la valeur s’accroît du fait que l’offre de cette devise est limitée.

Ainsi Filecoin est une société qui a créé un service de stockage de fichiers sécurisé, pair à pair. L’entreposage pour ce service est fourni par toute personne qui offre son espace inutilisé en échange de paiements dans la devise, le token Filecoin. La technologie sous-jacente à ce service, le InterPlanetary File System (IPFS) pourrait être en mesure de fournir une solution au problème croissant de la livraison de contenu en ligne, en particulier le contenu en continu, à bas prix et de manière efficace.

Filecoin a levé 250 millions de dollars US par l’intermédiaire de son ICO en août de cette année.

À noter que Filecoin n’est encore cotée sur aucune bourse et n’a même pas encore lancé ses opérations.

Une autre société de stockage, Storj, quant à elle, a levé 30 millions de dollars en mai. Le token Storj a une valeur supérieure au prix à son ICO.

Un autre modèle intéressant pour l’utilisation d’un ICO est celui de Dentacoin où le token est utilisé comme une forme d’assurance dentaire qui permet un traitement dentaire préventif par un réseau de dentistes qui y ont adhéré. Les dossiers des patients peuvent également être partagés dans ce réseau à l’aide d’un système de fichiers de santé électroniques à chaîne de bloc.

En France, la première ICO d’une entreprise française est celle de la start-up DomRaider qui s’achève en octobre 2017. DomRaider espère vendre 560 millions de DomRaider Tokens pour lever 56 millions d’euros. DomRaider est une société de spécialistes en « drop catching » : la réservation des noms de domaines qui viennent à expiration (.com,.net,.fr…) et à les vendre aux enchères.

Quels sont les risques ?

Des organismes de réglementation de divers pays ont fait des déclarations à propos des ICO, mettant en garde contre le fait qu’ils sont hautement spéculatifs et que, aux États-Unis, ils pourraient enfreindre les lois sur les valeurs mobilières. La Chine les a récemment interdits en disant qu’il s’agissait de collectes de fonds illégales.

La règlementation française sur les ICO serait encadrée théoriquement par les lois françaises et européennes… mais elles n’ont pas été encore mises à l’épreuve.

Avec l’intérêt marqué pour les ICO, les escroqueries et la cybercriminalité associées aux ICO se sont multipliées à un rythme tout aussi rapide. Les escroqueries vont de la possibilité qu’un ICO entier soit une fraude. Quant aux cybercriminels, ils profitent simplement de l’intérêt suscité par les ICO pour lancer des attaques ciblées d’hameçonnage.

Il existe aussi un risque plus fondamental du fait que les ICO sont hautement spéculatifs. Ils pourraient ne jamais correspondre à une entreprise viable, ce qui rendrait la monnaie qui y est associée sans valeur. Le financement de masse traditionnel comporte également ce risque, et c’est pourquoi les personnes qui souscrivent aux deux catégories d’investissements devraient être bien conscientes du danger. Il est également vrai que l’achat d’actions de sociétés cotées en bourse comporte des risques, comme quiconque ayant investi dans Snap après son lancement en bourse l’a réalisé quand la valeur de cette action s’est trouvée divisée par deux.

L’avenir des ICO

Pour les entreprises qui ont incorporé une cryptomonnaie dans leur modèle économique, les ICO représentent une nouvelle méthode pour se faire financer par le grand public, méthode qui récompense les investisseurs si les entreprises ont du succès. Cela distingue les ICO du simple financement de masse où les récompenses se limitent simplement à un produit ou un service en échange de l’argent investi, mais ne sont pas liées au succès de l’entreprise.

Cela signifie également que les sociétés peuvent rester strictement privées et ne pas subir les pressions extérieures du marché ou des actionnaires. Étant donné que les entreprises tentent de plus en plus d’utiliser des actions sans droit de vote, les avantages des actions par rapport aux cryptomonnaies auto-émises deviennent moins évidents.

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