Une petite fille recroquevillée dans un bunker flatte son chien.
Des gens ensanglantés et en état de choc émergent des décombres, serrant leurs animaux de compagnie dans leurs bras.
Un homme qui s’enfuit d’un immeuble bombardé emporte un chat et un poisson rouge. Certaines personnes refusent de quitter l’Ukraine sans leurs animaux.
La guerre révèle diverses réalités, qu’elles soient brutales ou belles. La guerre en Ukraine met en lumière, de manière puissante et douloureuse, l’interdépendance des vies humaines et animales et, heureusement, notre détermination à agir avec amour, même quand on fait face à un danger mortel.
Les animaux domestiqués sont affectés par presque toutes les décisions humaines et surtout par celles qui comportent de la violence, que celles-ci se déroulent discrètement dans des fermes industrielles ou qu’elles soient capturées par les objectifs des photographes et diffusées dans le monde entier.
Les animaux sont toujours affectés par la guerre. Des millions de chevaux et d’ânes appartenant à de pauvres paysans ont été emmenés jusqu’aux fronts meurtriers de la Première Guerre mondiale, et des pigeons devaient transporter des messages.
Aujourd’hui encore, les chiens d’utilité militaires sont soit célébrés comme des héros, soit euthanasiés sans ménagement.
Les animaux souffrent avec les humains
Partout où la violence est un fléau persistant ou une éruption soudaine, les animaux souffrent aux côtés des victimes humaines. Les animaux ont une vie intellectuelle et émotionnelle riche que nous commençons à peine à voir.
En Ukraine, ils manifestent des sentiments de peur intense, de douleur et de confusion. Ils ne comprennent apparemment pas pourquoi leur monde est en train de basculer.
Une certaine Alisa a fui Kyiv à pied avec sa mère, sa sœur, ses enfants et deux chiens — dont un berger allemand âgé nommé Pulya — et a confié son expérience à The Guardian.
Ma chienne a 12 ans et demi et elle avait du mal à marcher et tombait tous les kilomètres environ et ne pouvait plus se relever. J’arrêtais des voitures et je demandais de l’aide, mais tout le monde refusait ; ils nous ont conseillé de laisser les chiens. Mais nos chiens font partie de notre famille. Ma chienne a vécu tous les moments heureux et tristes avec nous. Le chien de maman est tout ce qui lui reste de son ancienne vie. Alors mon mari a dû parfois porter notre chienne sur ses épaules.
Dans ma famille, il y a des bergers allemands que nous avons secourus, et les images de cette chienne de 80 livres, au museau gris, transportée en Pologne pour qu’elle survive, m’ont serré le cœur. Nous ferions la même chose pour nos chiens. Nous n’aurons pas à le faire, et nous en sommes profondément reconnaissants. Mais personne ne devrait avoir à vivre ça.
Certains chevaux sont également évacués d’Ukraine, tandis que d’autres sont relâchés par des personnes pleines d’espoir qui pensent qu’ils ont de meilleures chances de survivre par eux-mêmes.
On relâche aussi les chevaux lorsque des catastrophes naturelles, comme des incendies de forêt, ravagent des territoires. On peut anticiper et se préparer à certaines urgences. D’autres, comme les invasions, ne sont pas aussi faciles à prévoir, mais nous pouvons y réagir.
Le monde aide les animaux
Le monde réagit. Les pays voisins autorisent les animaux à entrer avec les migrants — certains, de façon honteuse, le font plus facilement qu’ils n’admettent les personnes racisées. Des refuges et des vétérinaires fournissent des soins d’urgence. Des organisations du monde entier élaborent des plans pour accueillir les animaux des réfugiés d’Ukraine et d’ailleurs.
Des animaux terrifiés ont été transportés des zoos vers un lieu sûr. Des organisations à but non lucratif de toute l’Europe et du monde entier envoient des fournitures et des vétérinaires. Elles ont besoin de soutien.
L’étendue réelle des dégâts reste à déterminer, mais les effets seront considérables. Lorsque les fermes et les refuges manqueront de nourriture, d’eau et de personnel, ou seront privés d’électricité, un nombre incalculable d’animaux souffriront et mourront, rapidement ou très lentement.
Nous sommes tous interconnectés, que ce soit à l’intérieur ou au travers des frontières, que ce soit à l’intérieur d’une même espèce ou entre les espèces. Les Ukrainiens qui restent dans leur pays et défendent la vie des autres font preuve d’une immense bravoure qui se loge au plus profond de l’esprit humain.
Anastasiia Yalanskaya, une jeune femme de 26 ans qui refusait de quitter Kyiv, a été tuée alors qu’elle livrait de la nourriture à un refuge pour animaux qui en était privé depuis trois jours. Une autre défenseure des animaux, Natasha Derkach, a été tuée alors qu’elle tentait de sauver des animaux à Dnipro, une ville frappée par des bombardements intensifs.
Les victimes sont bien plus nombreuses. Des Ukrainiens perdent leur vie en défendant des animaux.
Réagir aux violences
L’Ukraine a créé une société plus humaine à bien des égards. Nature Watch a travaillé en partenariat avec des organisations ukrainiennes pour lutter contre les violences et encourager une culture de soins pour les animaux.
Une semaine avant le début de l’invasion russe, le 24 février 2022, une collègue m’a contactée pour aider une ville ukrainienne qui souhaitait créer la première unité de lutte contre la cruauté envers les animaux au pays. Ma collègue a ensuite reçu un message d’un défenseur des animaux ukrainien qui craignait ne plus jamais pouvoir lui parler.
Cette guerre a exposé la violence des hommes qui terrorisent les humains et les animaux. Elle a montré à quoi ressemble vraiment la perte de liberté.
Cependant, le dévouement dont font preuve les Ukrainiens à l’égard des animaux montre que, même dans les moments les plus dangereux, la capacité de l’humain à la cruauté n’a d’égal que sa capacité à faire preuve de courage et de compassion. Nous pouvons être plus que de simples humains. Nous pouvons être véritablement humains.