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La rentrée gâchée de François Hollande

Grand-messe à l'Elysée, le 7 septembre 2015. Charles Flatiau/Reuters

Hollande aborde la rentrée politique au plus bas dans les sondages dont certains prédisent qu’il serait éliminé au premier tour de l’élection présidentielle de 2017. Il faut comprendre que le rejet du président est avant tout politique. La politique économique dite « de l’offre » multiplie les baisses de cotisations et d’impôts pour les entreprises. Elle suscite l’incompréhension et le désarroi des électeurs socialistes et écologistes, une hostilité virulente de la part des partisans du Front de gauche, et le mépris de la droite. En d’autres termes, Hollande est totalement isolé.

On pourra estimer que l’été fut propice à un retour au premier plan de François Hollande : il est sorti victorieux du dernier congrès du Parti socialiste puisque les « frondeurs » restent largement minoritaires. Manuel Valls, son concurrent direct pour 2017, perd les élections et ses coups de menton autoritaires ont fini par lasser. Le premier ministre n’a même plus l’exclusivité du discours le plus droitier sur les questions sociales : Emmanuel Macron, le ministre des Finances, avec ses attaques répétées contre le code du travail et les 35 heures, est aujourd’hui la figure de proue de la tendance post-socialiste au sein du gouvernement.

À droite, Nicolas Sarkozy peine à s’imposer dans son nouveau parti, Les Républicains : des anciens alliés se détournent de lui et, en l’absence d’idées nouvelles, il court derrière les thèmes anti-immigration et islamophobes du Front national. Pour ce qui est de l’extrême droite, la querelle entre le père et la fille Le Pen semble aujourd’hui ralentir la progression de Marine Le Pen.

Good cop, bad cop

François Hollande est-il sur le retour, et peut-il espérer redevenir un candidat crédible pour 2017 ? C’est peu probable. Deux questions importantes pourraient encore lui compliquer la tâche prochainement. D’une part, l’aggravation du chômage et de la situation économique du pays. Hollande s’était engagé à ne pas se représenter en 2017 s’il échouait à inverser la courbe de chômage. Or, celle-ci n’a cessé de croître pour atteindre un niveau record.

Grand amour. Union européenne, CC BY-NC-ND

Par ailleurs, la crise grecque n’a pas été résolue, loin s’en faut. Avec ce troisième mémorandum, la Grèce n’est ni en mesure de mettre en place les nouvelles mesures d’austérité prescrites, ni de renouer avec la croissance. Dans les négociations de l’Eurogroupe, Hollande a rempli le rôle de « good cop » et laissé celui de « bad cop » à Angela Merkel et à Wolfgang Schaüble.

Les différences entre la France et l’Allemagne ne portaient pas sur le contenu des politiques austéritaires, mais étaient de pure forme. Il n’existe donc pas de « problème allemand » en Europe, mais un problème « franco-allemand ». Hollande peut encore redouter que la situation économique et politique au niveau européen se détériore davantage (Grexit, sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, essor de la contestation populaire contre l’UE, problème migratoire).

Coup de barre à droite

En réalité, le sort de Hollande va totalement dépendre des aléas politiques, tant il est aujourd’hui affaibli et décrédibilisé auprès des Français. Pour remonter la pente, il ne peut espérer que le faux pas de ses adversaires (qui sont, il est vrai, médiocres, que ce soit au Front de gauche ou chez les Républicains), ou le renversement miraculeux (donc improbable) de la conjoncture économique. Sa politique de l’offre qui combine d’énormes cadeaux fiscaux au patronat et une austérité qui tue la croissance dans l’œuf a été sévèrement critiquée par des économistes de renom (Joseph Stiglitz, Thomas Piketty).

Les mesures préconisées à la rentrée sont aussi dérisoires que nocives pour l’emploi et le pouvoir d’achat des Français : extension de la redevance audiovisuelle ; baisses d’impôts clientélistes, promotion de la TVA. Dans sa conférence de presse du 7 septembre, le président a donné un nouveau coup de barre à droite. Aucune des promesses progressistes de campagne ne sera tenue (dont l’arrêt du contrôle au faciès ou l’établissement d’un système fiscal plus juste). Après des mois d’inaction, Hollande a annoncé que la France accueillera 24 000 réfugiés sur une période de deux ans. L’Allemagne en a accueilli 13 000 en un week-end. Pendant que Merkel tend la main aux réfugiés, Hollande se prépare à provoquer un nouvel exode en envisageant le bombardement de la Syrie.

Ainsi va la présidence Hollande, rythmée par des tactiques politiciennes insignifiantes et la promotion de mesures réactionnaires dont l’objectif est de lui permettre de se représenter en 2017. Il reste à voir comment un président au bilan conservateur pourrait être réélu avec des voix de gauche. Cette hypothèse n’est pas à exclure, mais elle serait synonyme d’un approfondissement de la crise démocratique qui affecte la France. S’il parvient à réaliser son ambition – se représenter en 2017 – Hollande pourra célébrer le triomphe du vide.

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