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un cercle noir entouré d'un halo lumineux blanc sur fond sombre
Photographie de l’éclipse solaire totale de 2017, prise à l’Oregon State Fair Grounds, à Salem, en Oregon. (Dominic Hart/NASA)

L’archéoastronomie étudient les anciennes éclipses solaires afin de nous aider à reconstituer l’histoire

Les peuples de ces époques ont relevé ces phénomènes. Des quatre coins de la planète, les récits de jours qui se transforment en nuits ou de soleils qui se consument abondent et ouvrent un nouveau domaine d’étude.

L’archéoastronomie utilise les données astronomiques pour dater des moments ou des événements clés de l’histoire. De tous les phénomènes astronomiques, les éclipses solaires totales sont parmi les meilleurs instruments de mesure, car elles ne sont visibles qu’à un moment et à un endroit précis.

Les éclipses totales de Soleil sont suffisamment rares pour qu’un point donné de la Terre n’en voie une que tous les 375 ans (en moyenne). Et lorsqu’une éclipse se produit, elle n’est totale que pour les personnes qui se trouvent le long d’une trajectoire étroite sur la Terre.

dessin d’une éclipse solaire représentée par un cercle noir entouré d’une aura blanche sur fond noir
Illustration de l’éclipse solaire du 22 janvier 1898 en Inde. (Edward Walter Maunder/British Astronomical Association)

Déterminer l’année

Cette rare combinaison d’un moment et d’un lieu permet aux chercheurs de déterminer la date exacte à laquelle des peuples anciens ont vu une éclipse. Des indices supplémentaires, tels que le moment de la journée où elle s’est produite (matin, midi ou soir), l’époque de l’année (saison) ou la présence de planètes brillantes, peuvent également aider à déduire de quelle éclipse il est question.

Ainsi, la mention d’une éclipse solaire totale survenue à l’aube dans d’anciens textes chinois portant sur le roi Yi a permis de déterminer l’année du début de son règne.

L’une des plus anciennes éclipses répertoriées figure sur une tablette d’argile de la ville d’Ougarit, dans la Syrie actuelle. La ville a été renversée après l’éclipse, et la tablette est un des derniers documents écrits par un habitant de la ville. On peut y lire l’inscription suivante : « … jour de la Nouvelle Lune de Hiyar, le Soleil se coucha, son gardien était [Rashap]. »

Le mot Hiyar fait référence à une période de l’année autour de février-mars, et Rashap est probablement une planète. Forts de ces informations et sachant que la ville a disparu à l’âge du bronze, les chercheurs ont daté la tablette et l’éclipse du 5 mars 1222 avant notre ère, soit il y a plus de 3 000 ans, la planète Mars étant visible à proximité du Soleil. Grâce à cette éclipse, nous savons qu’Ougarit est tombée après le 5 mars 1222 avant notre ère.

De tels documents aident les scientifiques à établir des dates précises dans le monde antique.

une illustration de texte au-dessus d’une photographie d’une tablette d’argile grise
Photographie et illustration de la tablette d’argile KTU 1.78 d’Ougarit, dans la Syrie actuelle, qui mentionne une éclipse solaire totale. (Dietrich and Loretz/University of Chicago Library)

Difficiles de faire des prédictions

Pour prédire avec précision les éclipses futures ou tracer les trajectoires d’anciennes éclipses, il faut connaître les positions du Soleil, de la Lune et de la Terre. Les ordinateurs peuvent suivre leurs mouvements, mais ceux-ci ne sont pas constants. On sait que la Lune provoque des marées dans les océans terrestres, mais ce processus entraîne également une lente dérive de la Lune par rapport à la Terre et une lente augmentation de la durée du jour sur Terre.

La durée d’une journée sur Terre s’allonge d’environ 18 microsecondes chaque année, ce qui représente une seconde tous les 55 000 ans. Après des centaines ou des milliers d’années, cette fraction de seconde par jour représente plusieurs heures.

La modification du jour terrestre a une incidence sur la datation des anciennes éclipses : si la différence de la durée du jour n’est pas corrigée, les calculs peuvent être inexacts de plusieurs milliers de kilomètres. Ainsi, lorsqu’on utilise les éclipses pour dater des événements historiques, il faut effectuer une correction. La marge d’incertitude liée à cette correction peut rendre plus ardue l’identification d’anciennes éclipses en l’absence d’informations supplémentaires permettant de circonscrire les possibilités.

Mesurer l’évolution de la longueur du jour

Les éclipses solaires bien connues permettent de suivre l’évolution de la durée du jour terrestre au fil des siècles. En datant les éclipses des 2 000 dernières années, les scientifiques ont établi un graphique représentant la durée de la journée terrestre au cours de cette même période. La valeur de 18 microsecondes par an est une moyenne, mais la Terre ralentit parfois un peu plus et parfois un peu moins.

un graphique montrant la longueur des jours au fil du temps
Variation de la durée du jour (lod, pour length of day) pour la Terre en millisecondes (0,001 s), mesurée à partir d’observations d’éclipses (ligne noire). La ligne rouge montre le changement moyen sur 2 000 ans, tandis que la ligne grise montre ce à quoi l’on s’attendrait en fonction de la force de marée entre la Terre et la Lune uniquement. La ligne verte en pointillés représente un modèle ajusté aux données en noir. (F.R. Stephenson, L.V. Morrison and C.Y. Hohenkerk), CC BY

Les marées ne suffisent pas à expliquer ce phénomène : il se passe quelque chose de plus entre la Lune et la Terre, et la cause en est encore inconnue. Ce mystère peut toutefois être exploré grâce aux éclipses solaires.

Nous pouvons désormais mesurer la variation de la durée du jour terrestre à l’aide d’instruments, mais nous ne serions pas en mesure de calculer cette variation en remontant des centaines ou des milliers d’années sans un outil de mesure précis et des données sur les éclipses depuis des millénaires et partout dans le monde. Les éclipses solaires totales nous permettent de jeter un regard sur notre histoire ainsi que sur celle de la Terre.

This article was originally published in English

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