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80 % de nos apprentissages passent par les yeux, ce qui rend notre vision essentielle à la réussite scolaire. Les écoles doivent être repensés afin de maximiser la lumière naturelle. Shutterstock

Plus de lumière dans nos écoles, SVP!

Fortement médiatisé depuis son lancement en 2017, le projet de « Lab-École » a de belles ambitions. Mais au-delà de leur esthétisme, les écoles de demain devraient aussi permettre de maximiser le principal outil de l’apprentissage : la vision.

Rappelons que ce projet vise à transformer les écoles du Québec en fonction de trois axes : l'environnement physique, les saines habitudes de vie et l'alimentation.

De façon plus spécifique, les écoles ainsi repensées deviendraient de réels milieux de vie favorisant l’apprentissage et motivant les enseignants et le personnel qui y travaillent auprès des jeunes.

En partant, il faut savoir que 80 % de nos apprentissages passent par les yeux, ce qui rend notre vision essentielle au développement et à la réussite scolaire. Ainsi, les milieux scolaires devraient être repensés en fonction de maximiser les capacités visuelles des élèves.

Aménagement problématique

Afin de définir cette classe idéale (ou milieu de travail), il faut tenir compte de paramètres essentiels : l’organisation spatiale de la classe, les niveaux d’éclairage et les contrastes qui en découlent ainsi que l’utilisation de la technologie (tableaux interactifs, tablettes électroniques). Il faut également tenir compte de la demande visuelle, soit l’effort demandé aux yeux pour s’adapter aux diverses tâches requises au cours de la journée en fonction des activités d’apprentissage proposées.

La majorité des locaux d’enseignement sont rectangulaires, avec des fenêtres placées sur un côté ou face au tableau de l’enseignant. Ceci étant, de multiples configurations existent selon les particularités de chaque école. Les fenêtres sont rarement dotées de stores et plus souvent de rideaux et l’éclairage, aux tubes fluorescents, ne peut pas être modulé par zone ou en intensité.

Ce genre d’aménagement est problématique pour plusieurs raisons, selon les conclusions d'une étude du Dr Benoît Frenette, optométriste et expert en ergonomie visuelle, menée en collaboration avec des étudiants en optométrie de l’Université de Montréal.

Pas assez de lumière naturelle

Ainsi, dans un scénario où tous les rideaux sont ouverts et les lumières allumées, les deux tiers des pupitres des élèves sont plongés dans un environnement trop éblouissant par rapport aux niveaux recommandés d'éclairement lumineux, une mesure appelée lux (500 à 700 lux au tableau, 300 à 500 lux sur la surface de travail).

Lorsque les lumières sont fermées et les rideaux demeurent ouverts, seule la moitié des élèves bénéficient d’un éclairage adéquat pour le travail scolaire, soit ceux assis au milieu et vers l’arrière de la classe. Les élèves à l'avant de la classe bénéficient rarement d'un éclairage propice à l’apprentissage.

Le scénario optimal pour le tableau interactif (rideaux fermés, lumières allumées) prive les élèves de l'exposition nécessaire à la lumière naturelle. Shutterstock

Lorsque tout est fermé, rideaux et lumières, il est évident que l’éclairage est largement insuffisant sur le plan de travail de l’enfant. C’est pourtant une situation que les élèves vivent souvent puisque dans plusieurs classes, il s’agit de la seule façon de rendre le tableau interactif visible, avec de bons contrastes.

Si on laisse les rideaux ouverts ou les lumières allumées, le tableau perd ses contrastes et les reflets nuisent à la bonne visualisation de ce qui est projeté. La meilleure combinaison, au plan de l’éclairage, se produit lorsque les rideaux sont fermés et les lumières allumées.

Toutefois, ce scénario optimal pour le tableau interactif prive les élèves d’une exposition à la lumière du jour, ce qui peut favoriser l'apparition de la myopie chez les enfants . De plus, il peut y avoir des effets sur leur apprentissage et leur humeur.

Voir mieux et loin

Dans d’autres pays, l’exposition à la lumière du jour est plutôt maximisée. En Chine, par exemple, on construit des locaux de classes dont les murs extérieurs sont presqu’entièrement vitrés, sachant que l'exposition à une forte luminosité est préférable et favorise également l’apprentissage. Au Danemark, on favorise la classe faite directement à l'extérieur, en milieu naturel. Des classes extérieures sont aussi expérimentées en Grande-Bretagne.

L’apprentissage peut également être influencé par plusieurs autres éléments présents dans la classe et qui ont également des impacts sur la vision. La perspective et le champ de vision ne devraient pas être restreints .

Ainsi les fenêtres devraient être assez grandes pour permettre de voir au loin et les barrières physiques devraient être minimisées afin de permettre un horizon ouvert.

Hyperactivité ou problème de vision?

Il est établi que 70% du temps en classe exige l’usage de la vue dans les activités proposées. Ainsi, si l’enfant présente un problème de coordination des yeux, ce qui est le cas de 15 à 20 pour cent des enfants d’âge primaire, il développe alors rapidement des symptômes de fatigue et de migraine. Il sera tenté de délaisser le travail qu’on lui demande de faire. On le croira souvent hyperactif alors qu'il s’agit d’une réponse logique à un problème visuel, dans un environnement inadéquat pour son apprentissage.

Le reflet sur la tablette peut nuire à la visibilité du texte ou des images et donc, à l’apprentissage. Shutterstock

L’usage de la tablette électronique, de plus en plus répandu, est un autre enjeu pour la vision. La distance de travail, avec la tablette, est réduite par rapport à d’autres supports. Les yeux sont donc d’avantage sollicités et peuvent développer des symptômes de fatigue. L’éclairage aura ici aussi une importance certaine : le reflet sur la tablette peut nuire à la visibilité du texte ou des images et donc à l’apprentissage.

Les mêmes enjeux soulevés dans les classes sont également rencontrés dans des milieux de travail traditionnels. Imaginons des cubicules éclairés par des tubes fluorescents, sans accès à la lumière du jour et sans horizon vaste à regarder. Le stress visuel et les symptômes tels que la sécheresse oculaire se manifestent alors tout autant chez le travailleur que chez l’élève. Or les problèmes visuels non corrigés peuvent réduire significativement la productivité des travailleurs.

Plus de fenêtres

Comment améliorer la situation? Tout d’abord, favoriser des classes à aires ouvertes, aux horizons larges et neutres au plan de la demande visuelle. La présence de nombreuses fenêtres est alors requise, ce qui entraîne une augmentation de l'exposition à la lumière du jour.

Des stores permettant de moduler l’entrée de lumière sont à privilégier. A l'opposé, les rideaux opaques sont à bannir. L’éclairage artificiel doit pouvoir se moduler en zones. La partie avant de la classe, souvent mal servie dans les scénarios actuels, pourrait ainsi être éclairée différemment du milieu ou de la partie arrière du local.

Le tableau interactif doit être placé à un endroit stratégique : visible de tous, sans effet de distorsion si on le voit de côté. L’éclairage au-dessus du tableau devrait pouvoir être contrôlé indépendamment de tout autre afin d’éviter de plonger la classe en tout ou en partie dans la noirceur.

Dans nos milieux de travail, prévoir des aires ouvertes, bien éclairées, est également une approche gagnante. Shutterstock

Dans nos milieux de travail, les mêmes recettes s'appliquent: prévoir des aires ouvertes, bien éclairées, s'avère une approche gagnante. L’éclairage du poste de travail doit être modulable également, en fonction du travail sur ordinateur. Il faut aussi éviter les reflets sur l’écran ou les contre-jours nuisibles, près du poste de travail. Autoriser des pauses fréquentes, en fixant au loin, (une à deux minutes aux 30 à 45 minutes) permet un gain de productivité.

Enfin, il est primordial de porter les lunettes ou verres de contacts prescrits par un professionnel selon la correction visuelle nécessaire. Également, tout problème de coordination des yeux doit être traité grâce à des exercices ou autres méthodes appropriées.

Le Québec a la chance de pouvoir repenser l’aménagement de ses écoles. Il sera encore plus gagnant s'il le fait en fonction des besoins visuels des enfants.

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