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Quelle communication pour stimuler l’adoption des énergies renouvelables ?

L’hypothèse selon laquelle la sensibilisation favorise naturellement l’adoption des innovations reste peut-être trop simpliste… Shutterstock

Quel est l’impact des différents types d’information sur l’adoption des technologies durables et les décisions des consommateurs ? Il s’agit d’une question importante pour les pouvoirs publics et les fournisseurs de technologies durables comme les sources d’énergies renouvelables. Si l’Europe veut atteindre ses objectifs ambitieux en matière d’émissions de CO2 et devenir le premier continent neutre en carbone d’ici 2050, l’adoption de systèmes d’énergie renouvelable doit s’accélérer, et vite.

Un fossé entre « dire » et « faire »

Dans le passé, diverses stratégies ont visé à promouvoir les énergies renouvelables, notamment auprès des ménages. Elles consistent généralement en des subventions pour l’installation de systèmes et/ou en tarifs de rachat généreux pour garantir aux consommateurs un retour sur investissement total ou partiel. Mais au fur et à mesure que le coût des énergies renouvelables (en particulier l’installation de panneaux photovoltaïques) baisse, ces stratégies incitatives se raréfient.

Les principaux outils pour encourager l’adoption des énergies renouvelables prennent donc de plus en plus souvent la forme de campagnes de sensibilisation et de promotion de leurs avantages sociaux, économiques et environnementaux. Il est vrai que la population y est de plus en plus sensible.

Mais il est aussi vrai que l’écart est important entre le comportement de chacun en public et en privé : si l’on parle volontiers de la nécessité des énergies durables et des technologies vertes, on ne passe pas toujours à l’acte en investissant dans ces systèmes.

Nos recherches se sont intéressées de près à ce qui se cache derrière ce fossé entre « dire » et « faire » pour étudier l’impact de différentes formes d’information sur l’adhésion au développement durable et les décisions prises par les consommateurs. Nos deux grandes interrogations ont été : « quel type d’information favorise l’adoption des innovations ? » et « quand, dans ce processus d’adoption, l’information est-elle la plus efficace ? »

Nos résultats suggèrent que l’hypothèse prédominante, selon laquelle l’information et la sensibilisation favorisent l’adoption des innovations, reste peut-être trop simpliste. Les résultats de notre étude remettent en question l’idée selon laquelle l’abondance d’informations entraîne l’adoption des écotechnologies in fine.

L’information a certes une incidence directe sur les attitudes et les comportements durables en améliorant la sensibilisation et la connaissance des technologies à faible émission de carbone. Cependant, l’information a également un effet indirect, car elle permet aux consommateurs de prendre conscience des normes et des croyances sociales. La communication agit donc sur le « compromis entre soi et les autres », c’est-à-dire l’équilibre entre les considérations égoïstes de son bien-être personnel et la notion de retombées plus larges sur la société (par exemple, pourquoi devrais-je être le seul à faire un effort qui profitera à tous ?).

En revanche, toutes les informations n’entraînent pas un changement de comportement durable ni l’adoption des écotechnologies de la part des consommateurs : elle va provoquer ou non l’adoption des écotechnologies en fonction de sa nature, des canaux par lesquels elle parvient aux consommateurs et du moment, dans le processus d’adoption, où le public la reçoit.

Messages génériques vs. messages ciblés

Nous avons constaté que les informations génériques, non personnalisées, communiquées au début du processus d’adoption ou d’achat sensibilisent le consommateur et le poussent à adopter une attitude positive à l’égard des technologies durables. Ce type d’information attire l’attention des consommateurs et leur fait comprendre les bienfaits collectifs des différentes solutions écologiques.

Les messages non personnalisés jouent un rôle important au début, en fournissant des informations pérennes et en préparant le terrain pour les étapes suivantes du processus d’adoption. Sans ce minimum de connaissances, il serait difficile pour les utilisateurs potentiels de poser des questions pertinentes au moment où ils décident d’adopter telle ou telle solution.

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Mais à mesure que les consommateurs approchent de la décision finale d’adoption ou d’achat, ils ont besoin d’informations plus spécifiques pour répondre à leurs questions et à leurs besoins. Ces informations personnalisées comblent leurs doutes et leurs incertitudes associés aux décisions écologiques et facilitent la recherche d’un compromis entre soi et les autres. Cette approche individualisée a aussi plus de chances de répondre aux éventuelles préoccupations des consommateurs à l’égard des technologies durables : esthétique, performances, coût…

Cette source est-elle fiable ?

Nos conclusions indiquent également que la source d’information influence le comportement des consommateurs en matière de développement durable, et ce, d’autant plus que les consommateurs approchent de la fin du processus d’adoption d’une nouvelle technologie. Les informations provenant de sources commerciales (publicités) sont plus utiles au début du processus, lorsque les consommateurs commencent à adopter une attitude durable : elles les sensibilisent et suscitent leur l’intérêt pour les questions environnementales visées par la technologie.

Plus tard, lorsque les personnes disposent déjà d’informations suffisantes sur la technologie, ont déjà manifesté leur intérêt et sont prêtes à passer d’une attitude durable (dire) à un véritable comportement (faire) via leurs achats, les choses sont différentes. À ce stade, elles doivent avoir confiance dans la source d’information.

Ainsi, les informations impartiales fournies par des tiers de confiance, comme les organismes de réglementation ou de conseil indépendants, sont beaucoup plus efficaces que celles qui défendent un certain intérêt commercial. Les informations supplémentaires émanant de sources commerciales peuvent alors provoquer des attitudes négatives, susciter la méfiance voire compromettre l’investissement.

Notre étude met aussi en évidence le lien entre l’adoption des technologies durables, les revenus des consommateurs et la notion de rapport qualité-prix. Toute proportion gardée, plus les revenus sont élevés et plus le coût de la technologie est faible, plus l’attitude ou l’intention d’adopter une technologie est positive, mais ces facteurs ne jouent aucun rôle significatif dans le comportement d’adoption réel.

Les conclusions de notre étude peuvent donc aider les responsables politiques à mettre au point des mécanismes favorisant la pénétration de technologies durables sur le marché, mais aussi les fabricants de produits et de services écologiques/durables à optimiser leurs campagnes marketing.


Cet article a été co-publié en anglais sur le site Knowledge@HEC.

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