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Stressé au travail ? Mieux vaut en rire !

Employée hilare au travail
L’humour, une arme face à la résignation en cas d’échec. Shutterstock

« L’humour renforce notre sentiment de survie et préserve notre santé mentale. »

Cette phrase de Charlie Chaplin résume assez bien l’article que nous vous proposons ici. Au quotidien, l’humour nous aide à nous accommoder des situations de stress. Le pouvoir de la satire permet de rediriger l’attention vers des questions majeures, à l’image du film Don’t look up inspiré de notre inaction face au changement climatique. Le long métrage évoque la chute prochaine d’une comète qui va s’écraser sur terre et produire l’extinction des êtres humains sans que ceux-ci ne s’en soucient. Les contestations de la réforme des retraites passent aussi parfois par le rire, lorsqu’on peut par exemple lire sur une pancarte « 16-64, une bière, pas une carrière ».

L’humour semble ainsi une formidable parade à tout évènement dramatique, voire grave. Il y a 60 ans, Freud expliquait que son usage est un mécanisme de défense contre les émotions déplaisantes. Il contiendrait une force thérapeutique capable de briser les tabous et ayant des effets de légèreté et de soulagement.

En sciences de gestion, le sujet a pourtant rarement été pris au sérieux. Pandémie d’ampleur, mouvements sociaux, inquiétudes pour le pouvoir d’achat, anxiété quant à l’avenir et aux conséquences du dérèglement climatique, ces sujets s’installent autant dans les entreprises que dans les foyers français. Quel rôle jouerait l’humour au milieu de ces évènements anxiogènes ?

Notre recherche montre qu’au travail, l’usage de l’humour n’a pas le même effet sur son bien-être selon sa place dans la hiérarchie. Nous analysons un type d’humour dit « adaptatif » Il désigne ces réactions que l’on peut avoir, confronté à une situation déplaisante que l’on va finalement apprécier comme drôle.

Un régulateur du stress social

Contrairement à des modèles d’estime de soi assez répandus dans lesquels « l’hypothèse dominante est que les gens recherchent l’estime de soi simplement parce qu’une haute estime de soi est préférable à une faible estime de soi », la théorie du sociomètre relie l’estime de soi à une forme de pression sociale. Il varie selon celle-ci de la même façon qu’un baromètre réagit à la pression atmosphérique. L’estime de soi découle alors d’une stabilité dans les interactions avec les autres mais également vis-à-vis de soi-même, et de nos propres réactions face aux situations, grâce notamment au maniement de l’humour.

Parmi les situations auxquelles nous sommes régulièrement confrontés en entreprise se trouve l’échec. Une forme de résignation apparaît lorsqu’ils se répètent et lorsqu’on a le sentiment que nos efforts ne se traduisent pas par des résultats positifs. La situation semble incontrôlable, on se sent démuni. On parle dans ce cas d’ « impuissance apprise ».

L’humour peut-il aider à en sortir ? Peut-il faire remonter le baromètre de l’estime de soi ?


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Nos résultats, obtenus grâce à une enquête menée fin 2022 auprès de 532 salariés appartenant à des entreprises privées de l’hexagone, mettent en évidence à ce sujet une différence notable selon que l’on a ou non des responsabilités managériales.

Réduire l’impuissance apprise par l’humour adaptatif

Un ouvrier, un employé de bureau, un technicien ou tout autre individu n’exerçant pas de fonction de management aurait peu de risques d’être en situation d’impuissance apprise s’il fait l’usage d’un humour adaptatif dans un environnement professionnel générant du stress (charge de travail, procédures de mise en place, attente d’une réponse, etc.). Autrement dit, il se sentira moins résigné en situation d’échec sur une tâche s’il est capable de réguler les différents stresseurs par l’humour.

Par un jeu de mots prêtant à rire, un geste qui traduit avec justesse le caractère drôle de la situation de stress, même une simple expression clownesque du visage, il gonfle mécaniquement son estime de lui ce qui va l’inciter à davantage revoir la tâche sur laquelle il travaille actuellement et sur laquelle il bute. Il en viendra probablement à répéter la séquence et à progresser jusqu’à ce qu’il parvienne à réussir son travail. Pour paraphraser Chaplin, l’humour préserve bien la santé mentale du salarié en réduisant le risque de plonger dans une situation d’impuissance apprise.

L’estime de soi chez le salarié manager reste en revanche assez indifférente à sa capacité ou non à gérer des situations stressantes par l’humour. Sans doute est-ce parce que son niveau d’estime de lui est à l’origine, et certainement pour des raisons culturelles dans un contexte français, plus élevé que celui d’un employé dépourvu de fonction d’encadrement. Cela peut s’expliquer par le fait qu’il prend fréquemment des décisions, parfois difficiles, qu’il est mis dans certaines confidences ou encore qu’il touche un bon salaire.

Comment prendre en compte de tels résultats sachant que l’impuissance apprise influence à la fois les résultats des employés et la performance de l’organisation ? Notre étude montre finalement l’importance pour l’entreprise de laisser l’employé pratiquer son humour afin qu’il s’adapte mieux à son environnement à la faveur de sa bonne santé physique et mentale et de son bien-être social.

Attention cependant à ce que cet humour ne dérive pas chez l’employé vers une attitude qui franchirait la frontière du respect et de la considération envers autrui. Outrepasser ces règles de bonne conduite impliquerait une violence comportementale, des mots ou des gestes déplacés qui deviendraient inacceptables pour celles et ceux qui en font les frais. Il s’agit donc pour les managers qui encadrent des employés de rester attentifs à de potentiels dérapages. L’enjeu est de trouver un équilibre, de savoir montrer l’exemple par une attitude mesurée, avoir un discernement de ce qui peut être dit ou non, fait ou non.

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