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Les classements et les listes ESG ne sont pas parfaitement fiables pour ceux qui s’en inspirent dans leurs décisions d’achat et d’investissement. Appolinary Kalashnikova/Unsplash

Voici pourquoi les classements des entreprises les plus responsables ne sont pas toujours fiables

La British American Tobacco (célèbre pour ses cigarettes), Coca-Cola (connue mondialement pour ses boissons sucrées) et Glencore (société minière anglo-suisse) ont récemment été choisies parmi les cinq entreprises les plus responsables sur les plans environnemental et social du FTSE 100, l’indice boursier des 100 plus grandes sociétés cotées à la bourse de Londres.

En tant que consommateurs ou investisseurs, nous pouvons nous fier aux classements environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) pour guider nos décisions d’achat, d’investissement et d’emploi. Mais que penser de cette liste, compilée par Hargreaves Lansdown, une entreprise britannique de services d’investissement ?

Quand nous étions petits, on nous disait que fumer peut tuer. Pourtant, la British American Tobacco figure en tête de liste, ce qui suggère qu’il s’agit d’une société particulièrement responsable.

L’obésité, les maladies cardiovasculaires et le diabète sont mortels. Pourtant, Coca-Cola, dont les boissons sucrées sont vendues de par le monde, se trouve également en tête du classement.

A tractor trailer truck backs into a loading dock at Coca-Cola Beverages Florida past a Now Hiring sign
Un camion semi-remorque recule dans un quai de chargement de Coca-Cola Beverages Florida devant un panneau « Nous engageons » en mai 2020, à Hollywood, en Floride. Photo AP/Wilfredo Lee

Glencore fait l’objet d’une enquête pour des délits de fraude présumés, et pourtant elle figure en quatrième position sur la même liste.

Peut-on s’y fier ?

Divers classements présentent les entreprises « les plus responsables », « les plus citoyennes » ou « les plus vertes ».

Corporate Knights Global 100 évalue annuellement les entreprises sur la base de leurs résultats en matière de durabilité. Les sociétés reçoivent une cote en fonction de leurs performances environnementale, sociale, de gouvernance et économique et sont ensuite classées de 1 à 100.

La liste des entreprises les plus responsables d’Amérique du magazine Newsweek classe les entreprises américaines selon leurs résultats sur le plan de la durabilité.

Dans la liste de 2021, Citigroup se trouve au neuvième rang des entreprises les plus responsables du pays. La banque a récemment été condamnée à une amende de 400 millions de dollars US par les autorités de réglementation américaines pour « pratiques bancaires dangereuses et peu fiables ».

Microsoft figure en troisième position sur la même liste, et pourtant, plus tôt cette année, 250 millions de dossiers de clients ont été mis en ligne sans protection par mot de passe.

Procter & Gamble, 23e au classement de Newsweek, est actuellement scrutée à la loupe pour sa destruction d’arbres de la forêt boréale du nord du Canada.

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Une partie de la forêt boréale canadienne au Québec. Ali Kazal/Unsplash

Au Canada, Corporate Knights présente les 50 meilleures entreprises citoyennes du pays. En tête de liste, on trouve Mountain Equipment Co-op, qui s’est récemment excusée pour l’absence de personnes de couleur dans ses campagnes publicitaires.

Hydro One, qui occupe la onzième place, a été prise à partie pour la rémunération de ses dirigeants.

Pour les consommateurs et les investisseurs

Un nombre croissant d’investisseurs se fient aux informations ESG fournies par des tiers pour leurs décisions d’investissement. De même, les consommateurs recherchent des produits durables et se tournent vers des entreprises responsables pour éclairer leurs décisions d’achat.

Les entreprises sont de plus en plus nombreuses à offrir des classements ESG. Il n’y a toutefois aucune réglementation ni cohérence entre les agences de classement quant aux facteurs évalués et aux personnes qui effectuent l’évaluation.

De plus, il n’existe pas de normes ni d’exigences acceptées à l’échelle mondiale ou nationale sur ce qui doit être rapporté ou mesuré en matière de résultats ESG. Comme les entreprises sont examinées en fonction d’un large éventail de critères, il est loin d’être évident pour les consommateurs et les investisseurs de prendre des décisions en toute connaissance de cause.

Les investisseurs doivent-ils tenir compte des classements ESG pour jauger leurs choix d’investissement et les risques associés ?

Nous avons étudié les cinq premières entreprises canadiennes de la liste Global 100 de 2020 de Corporate Knights et avons effectué une recherche dans la base de données de Sustainalytics des risques ESG. Sustainalytics, une entreprise d’abord fondée au Canada sous le nom de Jantzi Research, mesure l’exposition d’une entreprise aux risques ESG propres à un secteur d’activité et la façon dont elle les gère, ainsi que la portée de tout risque ESG non géré.

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Une usine de Cascades à Laval, au Québec, en novembre 2020. LA PRESSE CANADIENNE/Paul Chiasson

Trois entreprises canadiennes – la Banque de Montréal, Cascades et le Canadien National – ont été présentées comme étant à faible risque, tandis que deux d’entre elles, Algonquin et Bombardier, qui se sont mieux classées dans la liste Corporate Knights Global 100 que les trois entreprises mentionnées ci-dessus, sont considérées comme étant à risque élevé par Sustainalytics.

Manque de cohérence

Pourquoi une agence de classement ESG reconnue placerait-elle une entreprise parmi les premières alors qu’une autre la présenterait comme à haut risque ? Si toutes ces listes mesurent l’ESG, il serait logique de s’attendre à ce qu’il y ait une certaine uniformité dans les résultats.

Si les classements devraient nous aider à prendre des décisions axées sur la durabilité et à choisir, comme consommateurs et investisseurs, des entreprises éthiques, ils ne reflètent parfois que partiellement les engagements ESG d’une entreprise.

Afin de reconnaître les listes qui sont fiables, nous suggérons de privilégier les organismes qui utilisent des informations publiques pour évaluer les performances ESG. Les bonnes agences sont transparentes quant à leur façon d’analyser les sociétés et d’établir leurs classements. Les personnes qui lisent ceux-ci doivent être en mesure d’évaluer rapidement les informations fournies et de savoir avec certitude ce qu’ils disent réellement.

Recherchez les organismes qui n’acceptent pas de paiement pour la participation à leur classement ; cela réduit la possibilité d’influencer les résultats. Examinez les informations provenant de plusieurs systèmes de cotes.

Lorsque des entreprises appartenant à des industries contestées (qui sont nuisibles) obtiennent une cote élevée dans un classement de durabilité, il convient de s’interroger sérieusement sur la validité de l’évaluation.

Plutôt que de faire une confiance aveugle aux listes, il faut comprendre les informations fournies par chacune. Elles sont conçues pour offrir des renseignements condensés, mais malheureusement, chacun doit faire des recherches pour pouvoir mieux jauger les entreprises.

This article was originally published in English

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