En 2020, les premières semaines de la pandémie de Covid-19 avaient été marquées par la polémique sur la pénurie de masques.
Les choses se sont progressivement améliorées, et aujourd’hui quatre catégories de masques sont répertoriées par les pouvoirs publics : les masques de protection respiratoire (FFP), les masques de type « chirurgical », les masques fabriqués par des professionnels du textile ou « faits maison » selon la spécification AFNOR dédiée (spécification dont les performances ont été testées en laboratoire), et les masques textiles « grand public » (dont les propriétés de filtration peuvent être supérieures à 90 % (catégorie 1) ou à 70 % (catégorie 2). Ces derniers, définis par la note interministérielle du 29 mars 2020, sont réservés à un usage hors du système de santé (on parle parfois de masque UNS1 ou 2, pour « usage non sanitaire »).
Avec l’émergence de variants plus transmissibles, le gouvernement français déconseille désormais l’utilisation des masques barrières faits maison, car leur efficacité de filtration n’a pas pu être évaluée, ainsi que des masques de catégorie 2, dont la filtration est jugée insuffisante.
Seuls les masques de catégorie 1 ou chirurgicaux sont désormais tolérés dans les établissements dépendant du ministère de l’Éducation nationale (école, collège, lycée). Mais sont-ils tous aussi performants qu’annoncé ?
Critères de performance des masques de protection
Au début de la pandémie, face à la pénurie de masques, les industriels ont pour la plupart utilisé les matières qu’ils avaient immédiatement à disposition et notamment des matières tricotées. En mars 2020, la Direction générale de l’Armement a donc dû élaborer dans l’urgence un protocole pour valider les performances des divers masques barrières disponibles.
Majoritairement tissés ou tricotés, ces dispositifs doivent respecter deux critères de performance, à savoir un seuil de perméabilité à l’air, qui traduit la respirabilité au travers du masque, et deux seuils d’efficacité de filtration, en fonction de la catégorie du produit. Sur ce dernier critère, l’efficacité des matériaux constitutifs du masque est mesurée vis-à-vis de particules solides à base d’amidon de maïs, de riz… de 3 µm de diamètre. De nombreux masques ainsi certifiés se sont retrouvés et se retrouvent sur le marché.
Le port de ce type de masque reste agréable ce qui facilite grandement sa dissémination auprès du grand public. Mais son niveau de performance est-il à la hauteur de sa certification ?
Prendre en compte l’étirement des mailles
Compte tenu de leur élasticité, la morphologie du porteur ou le fait de parler peuvent conduire à un écartement des mailles de ces masques tissés ou tricotés, ce qui génère des passages préférentiels à l’air, aussi bien exhalé qu’inhalé. Cet étirement a pour conséquence une meilleure respirabilité, mais au détriment d’un niveau de protection élevé.
Des études menées au laboratoire réactions et génie des procédés (Université de Lorraine/CNRS) sur des masques tricotés commercialisés montrent une diminution importante de l’efficacité dès lors que les matériaux sont étirés. Cette perte de performance est plus ou moins accentuée selon les masques :
Les mesures effectuées sur une dizaine de sujets ont révélé un étirement moyen de l’ordre de 10 % selon la morphologie des visages. Cet échantillon testé, bien que non représentatif de la population, met néanmoins en évidence une élongation du masque lors de son port. On ne peut ainsi que recommander aux organismes de certification de prendre en compte cette donnée en appliquant, pour ce type de matériau, une certaine tension au masque lors de la mesure d’efficacité.
Un autre point à prendre en compte est le type d’aérosol généré lors de l’évaluation de l’efficacité du matériau. Ce paramètre semble être un paramètre d’influence. La génération d’un aérosol neutre, autrement dit non chargé électriquement, est de ce fait recommandée, afin de ne pas surévaluer les performances du matériau, ce qui risquerait d’entraîner la mise sur le marché de masques dont les performances réelles sont nettement inférieures aux performances mesurées en laboratoire.
Une autre source de dégradation de l’efficacité non prise en compte pour accréditer les masques barrières, mais également les masques à usage sanitaire (masques chirurgicaux) concerne les fuites au visage. En effet, contrairement à la norme de certification des masques FFP1, FFP2 et FFP3, la norme européenne NF EN 14683+AC qui définit les exigences de fabrication, de conception et de performance, ainsi que les méthodes d’essai relatives aux masques à usage médical (les « masques chirurgicaux ») ne spécifie pas le taux maximal de fuite au visage admissible. Elle précise uniquement les valeurs d’efficacité à 3 µm et de perte de charge que doivent atteindre les masques chirurgicaux, selon leur type :
Or, une étude portant sur des masques chirurgicaux perforés pour simuler ce type de fuite montre clairement une baisse d’efficacité. Si le matériau filtrant présente un niveau d’efficacité d’environ 99 % à 3 µm, on constate cependant une chute d’environ 20 % de cette efficacité liée à une fuite de surface 0,5 % ce qui représente une surface de fuite d’environ 1 à 1,5 cm2 sur un masque chirurgical. L’augmentation de la surface de fuite accélère la dégradation de l’efficacité.
Les valeurs d’efficacité affichées par les masques chirurgicaux ou ceux à usage non sanitaire caractérisent donc uniquement le matériau filtrant, et non l’efficacité de filtration du masque porté en conditions réelles. Une efficacité élevée sur le papier ne présage nullement d’un haut niveau de protection si l’ajustement du masque n’est pas optimal.
Privilégier les masques chirurgicaux
Des travaux récents ont fait état d’un fort recul de la transmission des virus en cas de port d’un masque par la majorité de la population, même si l’efficacité de ces derniers est modérée.
Néanmoins, l’utilisation de masques chirurgicaux semble à privilégier. En effet, comparativement aux masques barrières, les masques chirurgicaux possèdent une structure moins déformable et plus efficace. En outre, la présence d’une barrette nasale, systématique sur les masques à usage sanitaire, limite les fuites d’air au visage.
Pour diminuer autant que possible le coût de l’emploi de tels dispositifs jetables, qu’il soit financier ou environnemental, rappelons qu’il a été démontré qu’il est possible de réutiliser les masques chirurgicaux après lavage à 60 °C, et ce jusqu’à 10 fois sans altérer leur respirabilité ou leur efficacité de filtration vis-à-vis de gouttelettes de 3 µm.