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Une patiente avec un surplus de poids discute avec sa médecin.
Pour de nombreuses personnes, il est très difficile de perdre du poids sans aide professionnelle. L'obésité est un problème moderne, qui nécessite une approche novatrice. (Shutterstock)

La biologie, et non le manque de volonté, serait à l’origine de l’épidémie d’obésité

Depuis que l’humain a utilisé pour la première fois un outil pour faciliter sa vie, il était condamné à prendre du poids.

Les progrès époustouflants de l’humanité ont suivi une trajectoire parallèle à la disponibilité croissante de calories. Cela a eu des conséquences sanitaires et sociales — initialement positives.

Tout au long de son histoire notre espèce a dû composer avec le manque de nourriture. Il fallait se démener pour trouver suffisamment de calories pour rester en vie, et notre capacité à rivaliser et à survivre impliquait parfois de longues pauses entre de maigres repas.

Lorsque la nourriture était abondante, notre corps emmagasinait l’énergie excédentaire sous forme de graisse pour pouvoir l’utiliser en temps de disette.

Un métabolisme ancien dans un monde moderne

Notre ingéniosité nous a conduits à exploiter le feu, à créer des armes de chasse et à inventer l’agriculture. Notre intelligence a permis à notre espèce de mener une vie plus facile et plus confortable tout en assurant un approvisionnement régulier en nourriture pour soutenir la croissance de la population.

Au fil des progrès de l’humanité, nos ancêtres ont appris à domestiquer et à utiliser les animaux. Plus tard, nous avons inventé des machines pour nous déplacer, nous et nos biens, d’un endroit à l’autre, et la vie est devenue encore plus facile.

Silhouettes de l’évolution commençant par un primate, se transformant en humains portant du feu ou des lances, et finalement en une personne poussant un chariot d’épicerie
Notre métabolisme reste calibré pour une vie dure et inconfortable durant laquelle chaque bouchée devait être gagnée au prix d’un effort physique intense. Notre cerveau nous dit toujours de manger plus que ce dont nous avons besoin. (Shutterstock)

Aujourd’hui, des montagnes d’aliments riches en calories (et souvent pauvres sur le plan nutritionnel) de même que des boissons sucrées sont facilement accessibles partout dans le monde. Il n’est plus nécessaire de sortir de chez soi — ni même de se lever — pour accéder à cette corne d’abondance.

Cependant, notre métabolisme n’a pas suivi nos avancées technologiques. Il reste calibré pour une vie dure et inconfortable dans laquelle chaque bouchée doit être gagnée au prix d’un effort physique intense. Notre cerveau nous envoie encore le message de manger plus que ce dont nous avons besoin.

L’obésité polygénique (la prédisposition héréditaire à consommer et à emmagasiner de l’énergie) est le résultat inévitable de l’affrontement entre nos instincts primaires et l’abondance phénoménale créée par l’humain. C’est aussi ce qui rend la perte d’un excès de graisse et le maintien d’un poids sain si difficile.

Le rôle du cerveau dans l’obésité

Grâce à notre travail clinique et à nos recherches sur l’obésité, nous savons que certaines personnes peuvent prendre du poids et être en bonne santé. Mais d’autres développent de graves problèmes, comme le diabète, l’hypertension artérielle, le cancer et l’arthrite.

La société a trop longtemps considéré l’obésité comme un échec personnel, alors qu’il s’agit en réalité d’une maladie biologique, physiologique, environnementale et chronique.

Pour plusieurs, essayer de perdre un excès de poids sans aide est très difficile. Le cerveau nous pousse à manger autant que possible parce qu’il croit que cela nous aide à survivre. Il a ainsi le pouvoir d’anéantir nos meilleures intentions.

En dépit de l’opinion courante selon laquelle les personnes à forte corpulence devraient simplement manger moins et bouger plus, il est pratiquement impossible de lutter contre notre patrimoine génétique ou d’autres facteurs sur lesquels nous n’avons aucun contrôle.

Dessin à la craie d’un cerveau dont la moitié est remplie de différents types d’aliments
Le cerveau nous incite à manger le plus possible parce qu’il croit que cela nous aide à survivre, et il a le pouvoir de faire fi de nos meilleures intentions. (Shutterstock)

Notre corps défend farouchement son poids. Il modifie les niveaux de leptine et d’insuline qui régulent l’appétit. Lorsque nous nous restreignons sur le plan calorique pour perdre du poids, les hormones obligent notre cerveau à signaler une augmentation de la faim et une diminution de la satiété, et elles ralentissent notre métabolisme dans le but de conserver la graisse corporelle.

Entre-temps, une autre partie de notre cerveau, qui régule la récompense et le plaisir, travaille également à nous faire manger davantage.

Le plaisir de manger est stimulé par des substances neurochimiques naturelles comme la dopamine, les opioïdes et les cannabinoïdes, afin d’aider à la survie et à l’emmagasinage de l’énergie. Les personnes souffrant d’obésité peuvent avoir une prédisposition génétique à un système de récompense accru associé à la nourriture. Les emballages brillants, le marketing agressif (ciblant souvent les enfants), les aliments au bon goût, mais pauvres en nutriments, les commandes au volant et les services de livraison en ligne sont autant d’éléments qui favorisent ce phénomène.

Un traitement efficace

De la même manière que le progrès humain est à l’origine de l’obésité, il peut contribuer à le résoudre.

Cela commence par l’acceptation du fait que l’obésité polygénique est une maladie et non une question de volonté. Plutôt que de juger la taille de tout un chacun, nous devrions être plus compréhensifs et en apprendre davantage sur ses causes.

La société envoie des messages nuisibles relativement au poids, en particulier par le biais de la culture populaire. Nous voulons donc être très clairs : notre poids ne définit pas qui nous sommes, et il ne définit pas notre état de santé non plus.

Il importe de reconnaître que lorsque l’obésité nuit à la santé d’une personne, elle nécessite un traitement, et il y en a de très efficaces qui sont disponibles. Les lignes directrices de pratique clinique 2020 du Canada reposent sur trois piliers : la chirurgie bariatrique, la médication et la psychothérapie cognitive.

Celle-ci est essentielle à l’efficacité tant de la chirurgie que de la prise de médicaments. La thérapie comportementale permet de répondre à des questions telles que : pourquoi est-ce que je mange comme je le fais ? Quelle est ma relation avec la nourriture ? Quelle en est l’origine ?

Il a été démontré à maintes reprises que ces piliers constituent les principales interventions susceptibles d’aider les personnes souffrant d’obésité à améliorer leur santé tout en réduisant leur poids et en le maintenant sur le long terme.

Nous avons besoin de moins de jugement et de plus de science. Le progrès est possible si nous y travaillons.

This article was originally published in English

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