L’activité physique est reconnue pour ces nombreux bienfaits, autant au niveau de la santé physique que mentale. Elle peut, entre autres, réduire le taux de mortalité, le risque de nombreuses maladies chroniques ainsi qu’améliorer les symptômes de dépression et d’anxiété.
Il existe aussi un autre aspect bénéfique à considérer : nous avons observé que l’activité physique peut également contribuer à diminuer la consommation de drogue et d’alcool.
En tant que kinésiologue et candidate au doctorat en science de l’activité physique, cette découverte a renforcé ma passion pour ce domaine de recherche. Dans cet article, je vais vous expliquer comment notre équipe de recherche sommes parvenus à ce résultat.
Nous avons d’abord conduit une revue systématique de la littérature scientifique, c’est-à-dire une compilation et analyse de toutes les études portant sur l’activité physique et la dépendance.
Nous avons choisi de ne pas inclure le tabac dans notre revue en raison de sa sur-représentation dans les études liées à l’effet de l’activité physique. Nous nous sommes concentrés sur l’alcool et les autres drogues, car bien que le tabac puisse mener à une dépendance, celle-ci est singulièrement différente des autres substances au niveau fonctionnel ainsi qu’au niveau des traitements.
Ainsi, un total de quarante-trois articles incluant plus de 3 135 personnes suivant un traitement pour la dépendance ont été analysés. La plupart des études proposaient des interventions en activité physique trois fois par semaine, pendant une heure. L’activité physique la plus utilisée a été la course, suivie par l’entraînement en musculation, le vélo et le yoga.
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Des dépendances communes
Pour des raisons complexes et encore mal comprises, la consommation de drogue et d’alcool, courante en Occident, peut parfois amener à un état de dépendance. Cet état se nomme trouble de l’usage de substance. Il s’agit d’un trouble de santé mentale diagnostiqué et défini par le DSM-5 comme étant la persistance de la consommation de substances malgré l’apparition de symptômes cognitifs, comportementaux et physiologiques. On note par exemple l’incapacité de remplir ses obligations majeures au travail, à l’école ou au domicile ; des symptômes de sevrage lors de la cessation ou encore une haute tolérance lors de la consommation.
Les dépendances touchent environ 18 % de la population québécoise. Les plus courantes sont celles liées à l’alcool (53 %), au cannabis (5 %), et aux autres drogues telles que les opioïdes ou l’héroïne par exemple (13 % des dépendances).
Sortir d’une situation de dépendance, seul ou accompagné, peut être difficile. On estime qu’entre 40 à 60 % des personnes vont rechuter plusieurs fois avant d’atteindre leur objectif personnel de consommation. En effet, certaines peuvent vouloir diminuer leur consommation sans vouloir nécessairement atteindre la complète sobriété. Les traitements psychologiques ou pharmacologiques restent encore peu efficaces sur la diminution des symptômes de dépendance. On estime qu’entre 35 à 54 % des personnes vont atteindre une rémission complète à la suite d’un traitement tout dépendant de la sorte de traitement suivi.
C’est pourquoi il est important de trouver de nouvelles façons de soigner les personnes ayant des dépendances.
Les trois-quarts des études observent une amélioration à la suite de la pratique d’une activité physique
Parmi les traitements pour contrer les dépendances, l’activité physique est considérée comme une avenue thérapeutique potentielle, vu ses bienfaits au niveau physiologique, psychologique ou encore social.
Nous avons ainsi découvert que 75 % des études montraient une plus grande diminution de la consommation de substance chez les personnes qui pratiquaient des activités physiques pendant leur traitement de dépendance comparativement à celles qui n’en pratiquent pas.
Par ailleurs, un effet a aussi été observé au niveau du craving, un symptôme central dans la dépendance et qui peut grandement influencer la rechute. Il est défini comme un manque intense souvent ressenti pendant le sevrage d’une substance. Les trois-quarts des études montraient que les personnes pratiquant de l’activité physique pendant leur traitement ressentaient moins de symptômes de manque.
Ce dernier résultat est très important, car il montre l’importance de l’activité physique d’un point de vue thérapeutique, soit le pouvoir d’aider concrètement les personnes pendant leur traitement et d’améliorer l’issue de celui-ci.
Meilleure pour la santé mentale
Un deuxième point que nous avons relevé est le fait que le traitement pour la dépendance incluant de l’activité physique s’avérait plus efficace pour la santé mentale. L’activité physique en complémentarité avec le traitement pour la dépendance a amélioré les symptômes de dépression et d’anxiété.
En effet, les symptômes de dépression se sont améliorés dans plus de la moitié des études, et les symptômes anxieux, dans plus de 70 %. Ces résultats sont cliniquement utiles, car ces troubles sont souvent présents chez cette population, et peuvent fortement influencer le rétablissement.
Un outil peu coûteux
Les équipes en dépendance vont prioriser les symptômes reliés directement à la dépendance (comme le craving) souvent par manque de temps ou de ressources, une réalité incontournable dans les centres de dépendances. Ainsi, l’activité physique pourrait être un outil peu coûteux, demandant peu de ressources et apportant des bénéfices considérables, tant pour contrer la dépendance elle-même que la dépression et l’anxiété.
Notre recherche montre l’importance, autant pour les personnes ayant une dépendance que pour les intervenants et les professionnels de la santé qui travaillent avec cette clientèle, d’ajouter de l’activité physique dans les traitements.
Il s’agit d’une option thérapeutique efficace, peu coûteuse, faisable et bénéfique pour les personnes souhaitant diminuer leur consommation et améliorer, en même temps, leur santé mentale et physique.