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le lanceur Ariane 5 en cours de montage
Transfert du lanceur du bâtiment intégration lanceur (BIL) au bâtiment d'assemblage final (BAF). Les étages et la coiffe contenant les satellites ne sont pas encore assemblés. © CNES/ESA/Arianespace/Optique Vidéo CSG/S Martin, 2023, Fourni par l'auteur

Le dernier lancement d’Ariane 5 pour mettre en orbite Syracuse 4B, un satellite de télécommunications militaires

Le satellite Syracuse 4B, un satellite de télécommunications militaires sécurisées qui appuie les forces françaises déployées à travers le monde, sera lancé ce soir, mercredi 5 juillet, par la dernière fusée Ariane 5, un lanceur que l’on connaît bien et dont la fiabilité est remarquable. Dès son arrivée au centre spatial guyanais, le satellite a été préparé pour le tir et intégré sous la coiffe du lanceur avec son compagnon de vol, le satellite allemand Heinrich Hertz (ou « H2SAT »).

Quatre générations du système Syracuse se sont succédé depuis les années 1980. Chaque génération a marqué une nette progression des performances par rapport à la génération précédente. Syracuse a en outre évolué au fil du temps d’une simple composante d’un système dual, c’est-à-dire d’un système offrant des services civils et militaires, à un système purement militaire.

En 2021, Syracuse 4A a été lancé depuis Kourou, premier satellite de la quatrième génération de Syracuse et qui sera rejoint par Syracuse 4B, dont la « charge utile » est identique (la charge utile désigne les équipements liés à la fonction spécifique du satellite).

la coiffe contenant les satellites dans un hangar avec des travailleurs en tenues fluo
Hissage du composite, coiffe d’Ariane 5 contenant les deux satellites, au sommet du lanceur. CNES/ESA/Arianespace/Optique Vidéo CSG/P. Baudon, 2023, Fourni par l'auteur

Un satellite de télécommunications spatiales sécurisées

La France possède une dimension ultramarine et est depuis longtemps une grande puissance militaire. Les armées françaises sont donc déployées de manière permanente dans de très nombreuses zones dans le monde et conduisent des opérations extérieures. Très logiquement, elles ont besoin de capacités de télécommunication spatiale. Dès l’avènement de celles-ci au début des années 80, a ainsi été lancé le programme de télécommunications spatiales militaires Syracuse, acronyme signifiant « système de radiocommunication utilisant un satellite ».

Nos forces déployées et nos navires militaires bénéficient, grâce aux satellites Syracuse, d’un lien permanent et hautement protégé avec la métropole leur permettant de conduire leurs opérations.


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Syracuse IV est composé d’un « segment spatial », constitué de satellites et de moyens de contrôle au sol (maintien à poste en orbite du satellite et opération de la charge utile de télécommunication), et d’un « segment sol utilisateur », constitué d’un système de gestion globale et d’un parc de stations utilisateur déployé dans les forces armées.

Télécommunications militaires et civiles : des défis différents, des réponses similaires

En matière de télécommunications spatiales, côté civil, il s’agit de répondre à des enjeux de compétitivité. Du côté militaire, il s’agit de répondre à des enjeux de ce qu’il est convenu d’appeler la « numérisation du champ de bataille », c’est-à-dire d’un besoin sans cesse croissant des militaires en bandes passantes, en débit, en agilité et en sécurité des communications.

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À bien y regarder, ce sont les mêmes technologies qui permettent de relever ces défis, ce qui valide la pertinence d’une approche duale pour développer celles-ci. Ainsi, Syracuse 4B est un satellite géostationnaire utilisant une plate-forme tout électrique, de durée de vie minimum de 15 ans et à propulsion électrique.

Une particularité des satellites Syracuse 4A et 4B est leur processeur numérique transparent, constituant l’« intelligence » de la charge utile de télécommunications, et permet une très haute flexibilité de cette charge utile.

La propulsion électrique, véritable percée technologique pour l’industrie spatiale

La propulsion des satellites, historiquement de type chimique (combustion d’ergols), a évolué avec le développement des moteurs tout électriques, qui représentent une véritable percée technologique pour l’industrie spatiale. Ces moteurs électriques, développés depuis les années 70 et 80 pour l’exploration spatiale, utilisent l’énergie produite par les panneaux solaires du satellite pour expulser du xénon par effet Hall. Sa densité, son potentiel d’ionisation et son inertie font de ce gaz un excellent candidat pour la propulsion électrique des satellites. Un propulseur à effet Hall est un propulseur à plasma, qui utilise un champ électrique pour accélérer des atomes de xénon, eux-mêmes préalablement ionisés par un champ magnétique.

Dans une salle blanche, on fait le plein du satellite compagnon
Remplissage en ergol du satellite Heinrich Hertz, le compagnon de Syracuse 4B, qui dispose lui d’un système de propulsion chimique. CNES/ESA/Arianespace/Optique Vidéo CSG/P Piron, 2023, Fourni par l'auteur

La propulsion électrique est utilisée en remplacement de la propulsion chimique pour la mise en orbite et le maintien à poste des satellites. Elle permet de diminuer la masse de carburant embarquée et le volume des réservoirs afin d’augmenter significativement la capacité de la charge utile de télécommunication embarquée à bord du satellite. On distingue en effet le « bus » (l’ensemble des équipements du satellite concourant à son fonctionnement intrinsèque : propulsion, génération électrique, contrôle de position…) et la « charge utile ».

Le gain significatif d’emport de charge utile présente néanmoins une contrepartie : la durée de transit vers l’orbite géostationnaire est allongée, en raison de la très faible poussée produite. Syracuse 4B mettra ainsi sept mois à rejoindre sa position orbitale.

Le rôle du CNES

Le CNES a beaucoup contribué au développement de toutes les générations de Syracuse, en particulier celui au développement de la propulsion électrique de ces plates-formes, et des processeurs numériques de nouvelle génération de la charge utile.

Le CNES assure dans le programme Syracuse IV le rôle d’architecte et d’expert spatial au bénéfice de la DGA et des armées dans ses domaines de compétence. Il assure également le suivi du développement de la filière de plate-forme Eurostar électrique d’Airbus utilisée pour le satellite et celui du développement du moteur plasmique PPS 5000 de Safran qui équipe Syracuse 4B.

Enfin, nous mettons aussi en œuvre des moyens multimissions (Centre d’opérations du réseau, Centre d’orbitographie opérationnelle, réseau 2 GHz) pour assurer la « TTC » (telemetry, tracking, and command) en bande S (une bande de fréquence utilisée pour ce type de télécommunications, pour les radars météorologiques, le wifi et les réseaux mobiles) des satellites pendant toute la phase de mise à poste et une partie de la recette en orbite. Nous participons au suivi des opérations de « mise à poste » (c’est-à-dire sur son orbite opérationnelle) électrique et de « recette en vol » (c’est-à-dire les tests de bon fonctionnement en environnement réel et vraie grandeur, qui ne pouvent être effectués au sol), en accompagnement de la DGA.

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