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Le laboratoire créatif

Pourquoi créer son image de marque personnelle ?

Nathan Dumlao, Unsplash

Ah les humains… nous sommes à la fois tous différents et tous semblables. On se jauge, s’observe, on s’imite. Rien ne permet mieux de constater nos points communs et nos différences que les réseaux sociaux.

Le nouvel album de famille

Facebook et Instagram sont devenus, pour certains, l’album de famille. On pose, on mange, on rigole… on donne à voir, on dévoile, on partage.

Pour certains, on a même l’impression d’être leur miroir, tant ils nous emmènent, l’écran de leur téléphone coller au plus près, dans l’intimité d’un lit, d’une salle de bain… au point où l’on se demande, ressentant un certain malaise, s’ils sont bien conscients de cet étalage.

Nous sommes une explosion de diversité

Il y a ceux qui adorent étaler ce qu’ils ont… voici ma nouvelle robe, mon nouveau maquillage, mes nouvelles chaussures, ma nouvelle maison… d’autres aiment tenir les uns et les autres informés… voici dans quelle ville je suis, ce que je fais, avec qui… D’autres, pensant ne s’adresser qu’à des amis intimes, en ont fait un journal sans censure où ils recrachent avec venin leurs colères et leurs souffrances comme une thérapie.

Il y a également ceux qui partagent l’humeur du moment ou l’humour du jour, c’est une détente. Ceux qui ont des choses à dire nous font réfléchir. Coups de gueule. Coups d’éclat. Coups de cafard. Il y a de tout. Pour tous les goûts.

Certains refusent carrément d’y être alors que d’autres publient les photos intimes aux amis seulement ou, au contraire, certains ne sont jamais assez vus et admirés… alors dopamine oblige, une petite publication… pour booster l’estime de soi et recevoir quelques compliments au passage par le plus grand nombre possible.

Et il y a ceux qui ont besoin de vous. Ils ont quelque chose à vous vendre.

Nous sommes plus de 2 milliards, faut se parler !

Tim Bennett/Unsplash.

Au troisième trimestre 2018, Facebook comptait plus de 2,27 milliards d’utilisateurs actifs chaque mois et 1,49 milliard d’utilisateurs actifs chaque jour dans le monde (dont environ 30 millions de Français).

C’est parce que Facebook a fait du bon travail explique Benedict Evans, un des partenaires de la firme californienne Andreessen Horowitz, dans son billet, The End of the News Feed sur son blog que nous commencerions à nous lasser de ces photos et albums de famille. Vous adorez votre chien et vous aimez publier le plus de photos de lui sur Facebook, mais pour ceux qui vous suivent… après une ou deux photos, la lassitude vient rapidement. Même chose pour votre garde-robe… sauf si vous êtes une styliste ou un influenceur.

« Les personnes ont été tellement nombreuses à partager énormément de photos qu’aujourd’hui 50 % des efforts des ingénieurs de Facebook doivent être consacrés à l’insertion de plus de bruit dans le fil d’actualité (vos photos et vos billets), et les 50 % restants sont à la recherche de moyens de les filtrer, » a tweeté le conseiller en venture capital.

Donc, si vous êtes parmi ceux qui se plaignent du changement continuel d’algorithmes, sachez que c’est à cause de cette participation incroyable de nous tous. Lorsqu’on s’y met tous… on peut devenir très bruyants sur les réseaux sociaux, ce qui oblige les ingénieurs de Facebook, assistés de leur intelligence artificielle, à nettoyer derrière notre passage et à choisir ce que nous verrons et ne verrons pas.

La conséquence de ces comportements ?

Le fil d’actualité perd de plus en plus de sa pertinence. Nous commençons à nous désintéresser, selon Benedict Evans, de ce flot interminable qui nous apporte finalement peu de chose en comparaison du temps que cela nous fait perdre.

Nouvelle tendance ?

La tendance qui pointerait son nez en 2019 serait plutôt de participer à des communautés plus petites, mais qui partagent des intérêts et des valeurs semblables aux nôtres.

Vous verrez de plus en plus de personnes créer leurs groupes et tenter d’attirer des personnes qui s’intéressent aux mêmes choses qu’elles, ce qui permet de perdre moins de temps sur les réseaux sociaux à regarder les autres vivre pour occuper ce temps à apprendre et à créer avec d’autres.

Cette tendance en rejoint une autre, les CVs comme on les a connus et les cartes de visite sont en voie de désuétude.

Désormais, chaque personne est responsable de son image de marque personnelle. Son CV n’est plus un document où l’on énumère ses faits et gloires, mais plutôt une histoire qui fera vibrer celle ou celui pour qui elle a été conçue.

Une image de marque personnelle

Ceux et celles qui seront habiles à concevoir ces histoires trouveront davantage de partenaires, d’employeurs et de clients. Cette histoire évolue avec chacun, tout au long de sa vie, tout comme son image de marque personnelle. C’est aussi cette histoire qui donnera envie à d’autres personnes de vous suivre.

Après une première série de trois articles sur l’art des possibilités, voici une deuxième série, de deux articles cette fois, sur l’art de se faire voir et connaître !

Dans le premier article, je parlerai plutôt du phénomène en général alors que dans le deuxième, j’aborderai l’importance pour les artistes et les journalistes d’entrer dans la danse. Nous verrons certaines stratégies adoptées par ceux qui ont compris que ces nouveaux rouages deviennent incontournables pour la longévité d’une carrière ou la réussite de projets et d’entreprises.

Les questions qui se bousculent dans ma tête

Lorsque j’ai choisi ce sujet, plusieurs questions se bousculaient dans ma tête. Comment devient-on un influenceur ? Pourquoi certaines marques réussissent-elles à changer le comportement de plusieurs personnes ? Pourquoi certaines personnes sont-elles suivies alors que d’autres parfois plus intéressantes le sont beaucoup moins ?

Je voulais comprendre pourquoi cette tendance et quelles compétences développées pour prospérer non seulement dans le monde réel, mais également dans le monde virtuel… qui occupe de plus en plus une grande partie de notre vie ?

Pourquoi cette tendance ?

Quels sont les facteurs clés qui expliquent qu’un individu s’identifie à une marque sur Internet ?

Que signifie le terme « identification » dans le contexte des réseaux sociaux ?

  • Le contact qui s’établit entre un individu et une marque à laquelle il s’identifie est continu : l’individu dispose d’un accès ininterrompu à la plate-forme de la marque, et il peut interagir avec une communauté qui partage le même intérêt pour la marque en question.

  • Il manifeste son attachement à la marque au vu et au su de la communauté ; il le fait savoir, en d’autres mots, devant ses amis.

  • Cette identification est gratuite, contrairement au modèle traditionnel, qui exigeait de la part d’un client qu’il achète le produit d’une marque. Dans le monde virtuel des réseaux sociaux, un individu n’a pas à posséder un produit pour revendiquer son attachement à une marque.

Qu’est-ce que le terme « identification » signifie en tant que tel, ou plus spécifiquement comment définir le terme « identification du client à une marque » (CBI : customer brand identification) ?

Plusieurs définitions se recoupent :

  • Les fondements psychologiques sur lesquels reposent les notions d’engagement et de recherche de sens que les responsables marketing utilisent pour établir des relations avec leurs clients.

  • La décision prise par un consommateur de se définir lui-même ou elle-même en intégrant l’élément d’une marque dans la représentation de soi.

On peut tirer de ces définitions les conclusions suivantes :

  • L’image de soi d’un consommateur est cruciale. Elle doit être définie en fonction d’un groupe de référence, car un mécanisme de transfert est à l’œuvre. Lorsque le processus d’identification du consommateur se déroule au sein d’un groupe de référence, l’identification est alors plus forte que si cette identification s’était produite à l’extérieur du groupe.

  • Le consommateur, intégré à un groupe de référence, aura moins tendance à rejeter une marque que les individus qui ne sont reliés à aucun groupe.

  • La composante symbolique d’une marque (le choix des images) est cruciale car elle doit être comprise comme étant la projection de l’image de soi que le consommateur souhaite projeter.

Qu’en est-il maintenant, non pas d’une entreprise, mais d’un individu ?

Le Personal Branding ou développer sa marque

Jeff Sheldon/Unsplash.

Historiquement, le terme est apparu dans les années 90. Le personal branding est un processus planifié d’automarketing. Le concept a tout d’abord été utilisé par certaines personnalités en vue du monde politique ou des affaires. Il s’est ensuite étendu à l’ensemble de la population.

Dans une société où prédominent les réseaux sociaux, les flux d’information circulent de consommateurs à consommateurs, et favorisent tout naturellement le personal branding. Kucharska définit les termes suivants reliés aux personnalités branding :

  • La marque : un nom, un mot, un symbole ou une combinaison visant à identifier le bien ou le service d’un vendeur de façon à le différencier de ses concurrents.

  • Une marque personnelle (personal branding) : un nom (celui d’une personne réelle) relié à toutes les caractéristiques requises pour distinguer cet individu des autres.

  • La gestion d’une marque personnelle :
    a. Gérer un moi étendu.
    b. Processus par lequel un individu consacre des efforts pour se mettre lui-même en marché.
    c. Le déploiement d’identités narratives pour promouvoir sa carrière, son entreprise, ou se trouver un emploi.

Afin de créer une marque personnelle (personal brand), il est nécessaire de clarifier ses « bases » : savoir qui on est, ce que l’on veut, les buts que l’on poursuit.

L’expression de soi en vue du développement d’une marque personnelle efficace passe par une identification claire :

  • Du soi (self).

  • D’un groupe social de référence (images, croyance, valeurs, buts poursuivis).

La co-construction d’une marque

William Iven/Unsplash.

L’identification de l’utilisateur envers une marque commerciale a un impact sur l’attitude positive qu’ont les autres utilisateurs envers la marque personnelle de cet utilisateur.

Cette hypothèse a été testée par une chercheuse polonaise sur la plate-forme Facebook à partir du modèle suivant dans lequel on dénombre

Sept paramètres :

  • L’identification à une marque sur les réseaux sociaux provoque une attitude positive des utilisateurs d’une plate-forme envers la marque personnelle de leurs pairs. L’expression de soi est une manière de s’affirmer, et l’expression de soi se produit toujours dans un contexte social. Le groupe de référence dans lequel se manifeste l’expression de soi a donc une influence à la fois sur l’image de soi ainsi que sur les façons dont l’individu l’exprime. Plus un individu a la chance de s’exprimer sur une page Internet d’abonnés (fan page), plus l’identification à cette page sera forte. Il se produit alors un transfert de sens entre une marque et l’utilisateur de la page en question. L’expression de soi est de nature subjective, alors que le transfert, lui, est objectif.

  • L’expression de soi de l’utilisateur alimente le processus d’identification avec la marque de la page.

  • Le caractère distinctif de la marque incite l’utilisateur à s’identifier à cette marque.

  • La possibilité d’établir des contacts sociaux par l’intermédiaire de la fan page incite encore plus les utilisateurs à s’identifier à la marque.

  • Le caractère utile d’une fan page a un effet positif sur la tendance qu’ont les utilisateurs à s’identifier à la marque.

  • Le caractère divertissant d’une fan page a un effet positif sur la tendance qu’ont les utilisateurs à s’identifier à la marque.

  • L’identification à une marque a un effet positif sur la loyauté des utilisateurs envers la marque.

Des résultats étonnants !

Les résultats de ce modèle testé par la chercheuse polonaise sont étonnants.

Un seul paramètre s’avère très important : l’expression de soi. Tous les autres sont relégués au second plan.

Ainsi, le personal branding, réalisé par l’identification à une marque sur les réseaux sociaux, n’est pas fortuit, mais est le résultat d’une stratégie voulue et planifiée de la part des utilisateurs.

Une marque commerciale doit être considérée comme un outil pour créer une marque personnelle.

Par conséquent, la création d’une marque personnelle par l’identification à une marque commerciale sur les réseaux sociaux détermine les valeurs créées par la marque commerciale sur sa plate-forme.

Sur le plan pratique, pour construire une marque sur Facebook (en l’occurrence), il est nécessaire de livrer un contenu qui se focalise sur les utilisateurs et sur l’image qu’ils ont d’eux-mêmes, et non sur la marque.

Pour être efficace, une marque ne doit pas être le point d’intérêt des contenus qu’elle présente sur sa fan page. La nature des contenus présentés peut susciter l’intérêt pour la marque, mais dans le contexte concurrentiel actuel cela n’est pas suffisant.

Voilà qui est fascinant. Les marques auxquelles nous nous identifions, les communautés auxquelles on adhère nous permettent d’exprimer qui nous sommes. C’est notre personnalité qui s’étend dans ce monde virtuel.

Il y a déjà plusieurs années maintenant que j’encourage mes étudiants à réfléchir à leur histoire et à leur présence sur les réseaux sociaux. Parfois, j’en choque certains… car ils veulent, à tout prix, protéger leur vie privée.

Le souci ?

Ce n’est plus un choix. Si l’on veut survive dans ce monde de plusieurs milliards de personnes, se développer et prospérer, on doit s’occuper de son image personnelle. Faire connaître ses compétences et rejoindre les réseaux et les communautés qui nous permettent d’exprimer qui nous sommes.

Arnel Hasanovic/Unsplash.

S’en exclure, c’est se mettre en danger de survie, sauf si devenir un ermite est dans nos plans. Mais pas de panique, je proposerai des clés pour agir dans la prochaine chronique et d’ici là, je vous propose l’exercice de la semaine pour commencer à y travailler.

Développer son image personnelle peut devenir un projet de création évolutif qui nous accompagnera tout au long de notre existence. Le faire en étant plus conscients des valeurs que nous souhaitons défendre peut être très intéressant. Faites-moi confiance, je ne vous demanderai pas de vous étaler, ni de porter votre égo comme un chapeau ! Ne manquez pas la suite de cette chronique.

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