Menu Close
Vue d'artiste de la mission spatiale Psyche qui se posera sur l'astéroïde Psyche en 2029.
Vue d'artiste de la mission spatiale Psyche qui se posera sur l'astéroïde Psyche en 2029. NASA/JPL-Caltech, CC BY

Psyche : une mission spatiale à la découverte d’un mystérieux astéroïde

La mission spatiale Psyche de la NASA, lancée avec succès le 13 octobre 2023 à 10h19, est en route vers l’astéroïde Psyche, situé dans la ceinture d’astéroïdes entre Mars et Jupiter à environ 500 millions de kilomètres. L’astéroïde, d’un diamètre de 250 kilomètres, initialement considéré comme presque entièrement métallique, attise la curiosité scientifique. De nouvelles données suggèrent en effet qu’il pourrait être un monde mixte de métal et de silicate.

Les meilleures analyses indiquent plus précisément que Psyche est probablement un mélange de roche et de métal, le métal représentant entre 30 et 60 % de son volume. À l’heure actuelle, il est encore difficile de dire si Psyche est tout ou partie du noyau riche en fer d’un embryon planétaire, ou bien un morceau d’un autre corps riche en fer formé à partir de matériau riche en métal dans le système solaire. Dans le premier cas, Psyche serait le noyau métallique d’une planète qui n’a jamais vu le jour alors que dans le second, il correspondrait à d’autres types de matériaux riches en fer, comme les pallasites, formés lors d’impacts ou par des volcans de fer.

Retracer l’histoire de la formation des planètes telluriques

Visiter l’astéroïde métallique (16) Psyche sera donc une première qui nous en apprendra davantage sur l’histoire collisionnelle de formation des planètes telluriques (Mercure, Vénus, Terre et Mars), et sur leur intérieur planétaire.

S’il est difficile de lui donner un âge, nous savons que la formation des météorites de fer est très ancienne, et bien antérieure à la formation de notre planète. La formation d’un corps céleste, comme la Terre, se fait par accrétion, à savoir par accroissement de volume par apport de matière extérieure. Dans l’accrétion planétaire, ce sont des planétésimaux, ou des embryons planétaires (comme Psyche) qui s’accrétant (s’agglomérant) les uns aux autres forment petit à petit le corps planétaire.


Read more: Origine du système solaire et protection de la Terre : à l’assaut des astéroïdes


La sonde spatiale Psyche devrait arriver en orbite autour de Psyche en juillet 2029. D’ici là, de nombreuses équipes de recherche à travers le monde travaillent à la meilleure compréhension de ce corps céleste. La nôtre à Nice pilotée par l’Observatoire de la Côte d’Azur (Nice), en collaboration avec des collègues de l’Université de Kobe/ISAS (Japon) et de l’Université Grenoble Alpes/IPAG (Grenoble), s’attache à mieux décrire l’évolution de la surface des astéroïdes de fer sous l’effet d’impacts et de collisions violentes durant leur temps de vie dans la ceinture principale d’astéroïdes.

Dans le cas de la mission Psyche, la nature, l’aspect et la topographie de la surface de ce monde métallique à l’arrivée de la sonde en 2029 sont de véritables inconnues. Pour répondre à ces interrogations, nous effectuons des expériences d’impacts hypervéloces de projectiles rocheux sur des cibles d’acier et de météorites riche en fer à l’aide de canons à gaz double étage. Ces expériences permettent d’atteindre des vitesses d’impact vertigineuses, jusqu’à près de 8 km/s, soit 30 000 km/h simulant les impacts se produisant entre les astéroïdes dans la ceinture principale. A titre de comparaison, pour une arme de poing la vitesse de la balle est en moyenne autour de 300m/s.

Expérience d’impact hypervéloce. Vidéo d’un projectile de verre basaltique de 3 mm de diamètre percutant à 7 km/s un cylindre métallique. Noter après l’impact (flash lumineux) l’onde de choc et les éjectas de matière fondue. credit: Akiko M. Nakamura, Guy Libourel, Patrick Michel.

Comme on le voit dans la vidéo, ces expériences permettent d’étudier le comportement des matériaux pendant l’impact ou l’état de la surface après impact.

Comprendre à quoi ressemble la surface de Psyche

Les principaux résultats mettent en évidence des surfaces impactées très irrégulières où alternent métal et silicate. Les bords des cratères sont caractérisés par des lames de métal redressées donnant des « paysages » particuliers ressemblant à des tôles métalliques déformées. Nous avons également montré que les fonds de cratère étaient systématiquement nappés par des liquides/verres silicatés produits lors d’impacts à haute vitesse. Dans certains cas, de spectaculaires carapaces vitreuses et bulleuses tapissent le fond des cratères en formant des reliefs étranges, donnant un aperçu de ce à quoi pourrait ressembler la surface de Psyche.

Image au microscope électronique à balayage en électrons rétrodiffusés d’un cratère résultant d’un impact hyper-véloce (5.08 km/s) d’un projectile basaltique sur un morceau de Gibeon, une météorite de fer utilisée comme cible et simulant la surface d’un astéroïde riche en fer. L’aspect sombre est lié au nappage du fond du cratère par d’un verre d’impact silicaté, initialement liquide au moment de l’impact. Fourni par l'auteur

En général, l’analyse du rayonnement électromagnétique dans le visible et l’infrarouge (observation spectrale) et de la réflectivité des micro-ondes (observation albedo radar) des surfaces des astéroïdes de la ceinture principale indiquent qu’il y a moins d’objets riches en fer que ce que l’on pourrait s’attendre à trouver, compte tenu de l’abondance relative des météorites de fer. Cependant, l’étude spectrale de nos cibles après impact montre que ce déficit n’est qu’apparent. Il serait simplement causé par le camouflage des surfaces métalliques par des silicates fondus, maintenant vitreux, produits lors d’impacts de projectile météoritique à des vitesses d’impact typiques de celles rencontrées dans la ceinture d’astéroïdes (≈ 5 km/s).

Ces résultats sont importants, car ils soulignent deux points essentiels. Premièrement, le mélange métal-silicate de Psyche pourrait être d’origine collisionnel et deuxièmement que les observations spectrales du sol (télescope) peuvent être trompeuses pour identifier les astéroïdes riches en fer. Pour obtenir des résultats plus fiables, notre étude montre qu’il est nécessaire de combiner les observations spectrales avec des mesures radar. Les micro-ondes, utilisées pour les radars étant plus pénétratives dans les matériaux de surface des astéroïdes que les ondes du rayonnement visible ou infrarouge, permettent en effet de distinguer les astéroïdes riches en fer des autres types d’astéroïdes, même s’ils sont recouverts de silicates vitreux.

Nous poursuivons nos efforts visant à décrire, à comprendre et à modéliser l’évolution de la surface des astéroïdes riches en fer soumis à des impacts violents typiques de la ceinture des astéroïdes. Nous avons récemment effectué des expériences d’impact hypervéloces sur des mésosidérites et des pallasites, deux classes de météorites rares (et donc chères !) constituées de parties métalliques et de silicates. Ces météorites ferreuses sont fréquemment proposées comme les constituants possibles des astéroïdes riches en fer, et notamment de Psyche. Pour mener à bien ces études, ce sont joints à nos partenaires habituels les collègues de l’INSA de Lyon qui nous aide à fabriquer de « fausses pallasites » à l’aide d’une technique de frittage flash, ou spark plasma sintering (SPS). L’objectif en mélangeant différentes proportions de silicate et de métal est d’évaluer le rôle de la transition ductile/metal – fragile/silicate dans les collisions entre astéroïdes et éventuellement dans la formation de leur régolite (sol).

Want to write?

Write an article and join a growing community of more than 182,700 academics and researchers from 4,947 institutions.

Register now