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Des gens attendent à l’aéroport international Pearson de Toronto, le 25 janvier 2020. La Presse Canadienne/Nathan Denette

Que signifie la déclaration d’état d’urgence sur le coronavirus pour le Canada  ?

Le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a affirmé que l’épidémie de 2019-nCoV constitue une urgence de santé publique de portée internationale (USPPI), car de plus en plus de pays ont signalé des cas confirmés de coronavirus. Cette décision actualise les décisions de la semaine précédente, lorsque l’OMS a indiqué ne pas disposer de preuves scientifiques suffisantes pour proclamer l’état d’urgence.

L’OMS n’a déclaré que cinq autres USPPI depuis une dizaine d’années : pour la pandémie de grippe H1N1 (2009-10), le recul dans la lutte contre la polio (2014), l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest (2014), le virus Zika (2015-2016) et la récente épidémie d’Ebola en République démocratique du Congo qui est toujours en cours.

Si l’OMS a répondu à 58 urgences sanitaires dans 50 pays l’année dernière, l’USPPI constitue une catégorie d’urgence particulière : elle est définie par le Règlement sanitaire international comme un événement extraordinaire qui entraîne un risque de santé publique à cause d’une propagation internationale et qui peut nécessiter une action internationale coordonnée.

Il y a eu trois cas de 2019-nCoV confirmés en Ontario et un, en Colombie-Britannique. Les responsables de la santé publique continuent d’insister sur le fait que le risque d’infection est faible au Canada. Que signifie alors la déclaration d’urgence pour les Canadiens et quel rôle le Canada peut-il jouer sur la scène internationale ?

Des actions renforcées

Le Règlement sanitaire international vise à « prévenir la propagation internationale des maladies, à s’en protéger, à la maîtriser et à y réagir par une action de santé publique proportionnée et limitée aux risques qu’elle présente pour la santé publique, en évitant de créer des entraves inutiles au trafic et au commerce internationaux. »

La déclaration d’USPPI donne à l’OMS plus de pouvoir pour organiser une réaction internationale à une épidémie afin de prévenir ou de réduire la propagation de la maladie. Ses recommandations ne sont pas contraignantes pour les pays membres, mais on s’attend à ce qu’ils les suivent.

Dans le cas actuel, les recommandations de l’OMS demandent à la Chine de renforcer les mesures pour contenir l’épidémie, de partager les données pertinentes sur les cas et d’effectuer des dépistages au départ dans les aéroports et les ports internationaux. Elle recommande également aux autres pays de partager leurs informations avec l’OMS, de se concentrer sur la réduction de la propagation de l’infection et d’informer l’Organisation de toute mesure prise en matière de voyage.

L’OMS recommande aux nations de soutenir celles dont le système de santé est plus faible et d’accélérer le développement de vaccins et de traitements. Les scientifiques canadiens travaillent déjà à la mise au point d’un vaccin contre ce nouveau virus, même s’il ne sera probablement pas prêt avant au moins un an.

Le Comité d’urgence du RSI, qui conseille le directeur général de l’OMS, a déclaré que les recommandations devraient être interprétées dans un esprit de solidarité et de coopération avec la Chine, afin de renforcer la préparation dans d’autres régions du monde qui pourraient avoir besoin d’un soutien supplémentaire.

Le Comité ne recommande pas de limiter les voyages ou le commerce, alors même que les États-Unis ont imposé des restrictions de voyage en Chine. Le Canada avait fermé ses frontières aux personnes des pays touchés par le virus Ebola pendant l’épidémie de 2014-2016, même s’il n’y avait aucune preuve scientifique à l’appui de cette décision. L’OMS avait alors critiqué le Canada.

Pourquoi maintenant ?

La déclaration d’une urgence de santé publique mondiale peut avoir de graves répercussions. Si on l’émet trop tôt, elle peut perturber le trafic et le commerce internationaux. Mais si elle est promulguée trop tard, on risque d’accuser l’OMS de ne pas protéger suffisamment la santé publique.

L’OMS a été critiquée dans le passé pour des déclarations prématurées ou tardives d’USPPI. Certains experts ont affirmé que l’OMS s’était montrée trop lente à déclarer l’état d’urgence pour le 2019-nCoV.

La déclaration est une décision à la fois politique et éthique prise dans une période de grande incertitude. Elle doit trouver un équilibre délicat entre la nécessité de freiner la propagation d’une maladie et celle de prévenir les peurs et les interventions inutiles.

Qu’est-ce que cela signifie ?

Cela ne signifie pas automatiquement que le risque d’infection a augmenté au Canada.

L’OMS affirme qu’il est urgent de coordonner une réaction internationale pour protéger les pays dont les systèmes de santé n’ont pas ce qu’il faut pour combattre ce nouveau virus.

Malgré ses faiblesses, le système de santé canadien est relativement bien équipé et préparé pour réagir à des épidémies de maladies infectieuses, notamment grâce à son expérience de l’épidémie de syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS). Il existe de nombreux systèmes au Canada qui visent à prévenir la propagation de maladies infectieuses graves.

La déclaration de l’OMS ne devrait pas faire naître la peur chez les Canadiens. Le Canada et ses habitants ont un rôle important et collectif à jouer pour freiner la propagation de ce nouveau virus et éviter les erreurs commises dans le passé.

Le Canada devrait se concentrer sur le partage de son expertise scientifique avec des pays mal équipés en matière de surveillance et de détection, et les Canadiens devraient contribuer à limiter la propagation de la maladie en adoptant de bonnes pratiques d’hygiène.

This article was originally published in English

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