Menu Close
image ressemblant à un feu d'artifice
Les trajectoires de galaxies au fil de l'évolution de l'univers semblent dessiner un feu d'artifice (ici, il s'agit d'un modèle numérique avec des données artificielles). Bruno Lévy, Inria, Fourni par l'auteur

Un feu d’artifice de galaxies pour mieux comprendre l’univers

Ceci n’est pas une photo des traditionnels feux d’artifice du mois de juillet, mais celle d’un autre « bang », autrement spectaculaire. Vous voyez des galaxies et la manière dont elles se sont déplacées dans le ciel au fil du temps cosmique, depuis leur formation.

Si, longtemps après les feux d’artifice, toutes les lumières éteintes, vous observez le ciel et êtes pris par un sentiment d’immensité, vous vous posez sans doute des questions : à quoi ressemblait l’univers il y a très très longtemps ? Est-ce que ces étoiles et galaxies ont toujours occupé ces mêmes positions dans le ciel ? Elles se déplacent, mais comment ?

Nous avons développé un nouvel outil pour voyager dans le temps et le passé de l’univers, en combinant des avancées en cosmologie, en mathématiques et en informatique.

Cet outil est susceptible d’apporter des éléments de réponse à nos questions métaphysiques nocturnes : à partir d’une carte en 3D de l’univers, obtenue grâce aux données de télescopes, tels que SDSS, DESI, ou le futur LSST, nous pouvons reconstruire les trajectoires des galaxies à rebours dans le temps, jusqu’au Big Bang ou presque.

Des mystères dans le ciel : énergie sombre et matière noire

Les observations du ciel nous ont appris beaucoup de choses sur l’histoire de l’univers. Par exemple, on sait estimer son âge, 13,7 milliards d’années, et on sait qu’à ses débuts, il était beaucoup plus chaud et beaucoup plus dense que maintenant, pour connaître ensuite une violente phase d’expansion. C’est la fameuse théorie du Big Bang, élaborée en 1927, qui semble confirmée par de nombreuses observations.

Toutefois, certaines observations restent inexpliquées : par exemple, on sait depuis la fin des années 90 que l’expansion de l’univers s’accélère. On a donné le nom d’« énergie sombre » à la cause de ce phénomène, mais sa nature réelle reste inconnue.

D’autre part, dans les années 60, Vera Rubin a mesuré la vitesse de rotation des étoiles autour des galaxies, vitesse anormalement élevée quand on s’éloigne du centre galactique, ce qui pourrait être expliqué par la présence de matière supplémentaire, qui n’a jamais été détectée, et qui a été nommée « matière noire ». Là aussi, sa nature réelle reste inconnue… et on ne sait toujours pas à l’heure actuelle s’il s’agit réellement de matière. Il pourrait très bien s’agir d’un comportement particulier de la gravité, qui obéirait à une loi différente de celle qu’on connaît.

Tester différentes théories en connectant le présent avec le passé

Différentes théories de l’énergie sombre et de la matière noire ont été proposées. Ces théories décrivent l’évolution de l’univers dans le temps, sous forme d’un ensemble d’équations. Pour départager ces théories, il faut les confronter à l’observation de l’univers, et analyser si les données d’observation et la théorie restent cohérentes.

[Plus de 85 000 lecteurs font confiance aux newsletters de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde. Abonnez-vous aujourd’hui]

Les observations que l’on peut réaliser pour départager ces théories sont essentiellement de deux natures. D'une part, des observations de télescopes permettent de produire une carte en 3D de l’univers, c'est-à-dire la position dans l’espace de plusieurs millions de galaxies. D’autre part, des mesures d’un rayonnement qui a été émis aux tous premiers âges de l’univers, quelque 380 000 ans après le Big Bang, appelé le « fond de rayonnement cosmologique », contiennent beaucoup d’informations sur les premiers âges de l’univers.

En particulier, on peut y mesurer un signal, des ondes de pression qui se sont propagées dans l’univers primordial à la manière d’ondes sonores et portent le nom un peu barbare d’« oscillations acoustiques des baryons ». On pense qu’elles ont à l’époque formé des zones légèrement plus denses, des « germes » qui ont ensuite évolué pour devenir dans un premier temps des galaxies puis des structures beaucoup plus grandes – des amas de galaxies et filaments qui forment la « toile cosmique ».

Un nouvel outil à l’assaut du « Rubik’s cube cosmique »

En faisant remonter le temps aux galaxies suivant les lois décrites dans différentes théories, le nouvel outil permettra de tester ces théories en comparant le profil d’ondes obtenu numériquement (avec notre outil numérique, qui utilise en entrée la carte des positions des galaxies) avec le profil d’« ondes baryoniques » réellement mesuré dans le fond de rayonnement cosmologique.

À première vue, ce « voyage dans le temps à l’envers » semble un problème très compliqué : en effet, la carte 3D de l’univers a été brouillée par 13,7 milliards d’années d’évolution, et il faut parvenir à retrouver pour chaque galaxie la région de l’espace depuis laquelle la matière qui la compose a voyagé.

Résoudre ce problème nécessite les points de vue combinés de la physique, des mathématiques et de l’informatique.

Au tout début du cheminement, le principe physique de moindre action, nous guide parmi l’infinité de solutions possibles. On retrouve ce principe de moindre action avec les paratonnerres, qui fournissent à la foudre un chemin direct vers le sol – et l’électricité parcourt ainsi le chemin le plus facile. D’une certaine manière, les galaxies parcourent elles aussi leur « chemin le plus court », en suivant un élastique tendu dans l’espace et dans le temps.

Ensuite, un outil mathématique (« le transport optimal ») permet de modéliser ce chemin le plus court.

Enfin, des algorithmes informatiques permettent de traduire ces équations mathématiques et de les résoudre.

Nous avons tout d’abord testé notre méthode en l’appliquant à des données purement fictives, obtenues en simulant un « big-bang numérique » dans l’ordinateur, en partant d’une configuration initiale comportant un modèle numérique des fameuses oscillations des baryons. À partir de l’état final de la simulation, nous avons bien pu remonter à l’état initial (et y trouver le profil d’ondes baryoniques primordiales). Nous avons réalisé ces calculs pour différents modèles de répartition de la matière noire dans l’univers. L’étape suivante va consister à appliquer la méthode à des données réelles.

Want to write?

Write an article and join a growing community of more than 182,600 academics and researchers from 4,945 institutions.

Register now