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a man with a cane walks along a sidewalk with textured yellow surfaces
Les surfaces texturées sur les trottoirs des villes peuvent contribuer à rendre l’espace public plus accessible aux personnes en situation de handicap. (Shutterstock)

Malgré les progrès législatifs, la ville accessible aux personnes à mobilité réduite reste un objectif difficile à atteindre

Face à l’écheveau complexe de la législation sur les droits des personnes handicapées au Canada et aux États-Unis, on pourrait facilement se laisser aller à penser qu’il ne reste plus rien à faire. Certaines de ces lois datent maintenant de plusieurs décennies ; les ajouts les plus récents comprennent des normes et des lignes directrices pour la conception accessible et des aménagements à accès facile dans les codes du bâtiment.

Mais si seulement c’était vrai. Observer les travaux de Toronto et d’autres villes d’Amérique du Nord dans le domaine de l’accessibilité, c’est un peu comme regarder un escargot se déplacer dans la mélasse : la voie à suivre n’est pas claire, les progrès sont lents et l’on se retrouve souvent bloqué.

Transport adapté

L’accès à des transports publics sécuritaires et fiables fait partie des difficultés rencontrées. Par exemple, bon nombre des obstacles auxquels se heurtent aujourd’hui les usagers du transport adapté (idéalement un service de porte à porte à la demande pour les personnes à mobilité réduite) – temps d’attente excessivement longs, nécessité de planifier et de programmer des jours à l’avance, coûts du service, réglementation alambiquée des déplacements, non-respect de la prise en charge des individus – remontent souvent à l’époque où ces mêmes services ont été créés.

Il est peut-être difficile de l’imaginer, mais la situation pourrait empirer. Les données de l’Enquête canadienne sur l’incapacité de 2017 indiquent que près de 18 % des personnes en situation de handicap confinées à la maison déclarent que la cause est due à l’absence de service de transport ; elles doivent sortir de leur domicile, mais n’ont aucun moyen pour le faire.

Les villes de New York, Toronto et Montréal disposent de réseaux de transports souterrains. Ces infrastructures partagent un passé trouble sur le plan de l’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite. À maintes reprises, elles ont été le théâtre d’actions militantes en faveur des personnes vivant avec un handicap, de litiges, de travaux de réaménagement visant l’accessibilité, de cycles d’avancée et de retard dans les investissements, et de ce que j’appelle l’obstacle du dernier millimètre.

À New York, il a fallu plusieurs recours collectifs intentés par des personnes à mobilité réduite pour que la Metropolitan Transportation Authority (MTA) lance un plan d’accessibilité sur plusieurs décennies. Ce plan comprenait la promesse de cesser la rénovation des stations en infraction avec l’Americans with Disabilities Act (ADA), la Rehabilitation Act of 1973 et la Loi sur les Droits de l’Homme de la ville de New York.

Sept ans plus tard, un article paru en août 2017 dans le New York Times fait état de l’immobilisme de la MTA et du scepticisme justifié des passagers en situation de handicap.

La Toronto Transit Commission (TTC) travaille actuellement à la mise en place d’un plan pluriannuel prometteur sur l’accessibilité du transport en commun. Ce plan prévoit la modernisation des accès à de nombreuses stations construites avant l’entrée en vigueur de la Loi de 2005 sur l’Accessibilité pour les personnes handicapées de l’Ontario (LAPHO). Il s’agit de projets d’infrastructure de grande envergure dont le coût est élevé.

Symptomatique d’un échec beaucoup plus large de la province à respecter l’échéance de 2025 de la LAPHO, la mise en œuvre du plan d’accessibilité de la TTC est en retard. Dans le dernier rapport d’avancement de la LAPHO, Rich Donovan, PDG du Return on Disability Group, a déclaré une situation de crise après « 17 ans d’occasions manquées », des « changements minimes en matière d’accessibilité » et des récits faisant état d’expériences horribles concernant l’accessibilité dans l’ensemble de la province.

Un regard rétrospectif révèle une longue histoire de critiques et d’activisme dans le secteur des transports en commun à Montréal. En 1988, des membres de l’American Disabled for Accessible Public Transit (ADAPT) ont protesté contre le manque d’accessibilité des transports en commun lors des réunions de l’American Public Transit Association (APTA) qui se tenaient à Montréal. Cela se passait deux ans avant l’emblématique « Capitol Crawl » à Washington, D.C., où, fatigués de l’inertie du Congrès, des manifestants en situation de handicap ont gravi les marches du Capitole pour demander l’adoption immédiate de l’Americans with Disabilities Act.

Un documentaire de 2009 sur les expériences des personnes à mobilité réduite dans les transports en commun de Montréal.

La Société de transport de Montréal (STM) dispose désormais d’un plan d’accessibilité à long terme dont l’échéance ambitieuse est fixée à 2038. L’Association canadienne du transport urbain a récemment annoncé que la STM était lauréate d’un prix pour l’équité, la diversité et l’inclusion, soulignant qu’elle avait « pris des mesures significatives pour améliorer l’accessibilité des usagers depuis 2023 ».

L’obstacle du dernier millimètre

Au-delà de l’obligation désormais apparemment normalisée pour les individus à mobilité réduite de demander des comptes aux autorités de transport, la plupart des progrès réalisés sous terre concernaient les ascenseurs.

Ce qui me sidère encore, c’est l’« obstacle du dernier millimètre » – un écart important ou un défaut d’alignement vertical entre les quais et les véhicules de transport en commun, qui rend impossible ou dangereux l’embarquement ou le débarquement de certaines personnes en situation de handicap, comme ma fille. La situation semble se présenter le plus souvent lorsque des trains nouvellement acquis arrivent dans d’anciennes stations.

À New York, un défaut d’alignement vertical allant jusqu’à six pouces a été signalé dans au moins une station de la MTA. Les lacunes du système ont donné lieu à de nouveaux recours collectifs.

En 2019, la TTC a mis en place un programme de réaménagement pour remédier aux écarts des quais de métro. Une consultation avec son Comité consultatif sur l’accessibilité a permis d’obtenir des tolérances de 89 mm ou moins et de 38 mm ou moins respectivement pour les défauts d’alignement horizontaux et verticaux.

Des défauts d’alignement ont également été signalés dans plusieurs stations du métro de Montréal.

Le fait que le handicap soit considéré comme un élément secondaire rend l’adaptation des quais et des véhicules coûteuse et peu commode. La partie technique de ce problème peut vraisemblablement être résolue avec la technologie existante, comme des systèmes de rampes et des ponts de liaison. Attendre que les passagers à mobilité réduite se lancent dans un recours collectif n’est pas une stratégie efficace.

Infrastructures cyclables

Les voix des personnes en situation de handicap ont été reléguées en marge des discussions sur le transport actif (vélo, marche) et des perspectives urbaines de santé et de résilience au changement climatique.

Les personnes ayant un handicap font aussi du vélo sur route et hors route. La littérature sur le vélo et le handicap est axée sur la planification de l’intégration des cyclistes vivant avec un handicap. Il convient également de tenir compte des interactions entre les piétons en situation de handicap et les infrastructures de transport en général, y compris les pistes cyclables.

Récemment, à Toronto, une piste cyclable a été construite au même niveau qu’un trottoir adjacent, sans qu’il y ait suffisamment de dispositifs d’assistance pour alerter les piétons non voyants. Il existe des solutions de conception : le document Éliminons les barrières architecturales de l’Institut national canadien pour les aveugles suggère divers types et applications d’indicateurs tactiles de surface de marche.

Les pistes cyclables en bordure de trottoir peuvent poser d’autres problèmes aux piétons en situation de handicap. Par exemple, les places de stationnement adjacentes aux voies cyclables avec une marche jusqu’au trottoir peuvent obliger les utilisateurs de fauteuils roulants à emprunter la trajectoire des vélos ou des véhicules.

Les infrastructures cyclables doivent être inclusives et sûres.

une piste cyclable bidirectionnelle
Une piste cyclable dans le centre-ville de Toronto. (Shutterstock)

Consulter la communauté

Il existe des recherches, des politiques, des législations, des conceptions et des technologies pour améliorer l’accessibilité des villes. Malgré de réels progrès sur les fronts législatif et infrastructurel, les expériences vécues par les personnes en situation de handicap continuent de mettre en évidence de graves incohérences entre la législation, les politiques et les résultats.

Les comités consultatifs sur l’accessibilité relèvent souvent d’une exigence des lois provinciales et sont adoptés par les autorités provinciales ou municipales. Les agences de transport en commun disposent généralement de comités distincts composés de bénévoles de la communauté et de membres du personnel de l’agence ; la TTC, la MTA de New York et la STM de Montréal ont chacune un comité.

Les critères d’adhésion au comité doivent garantir une représentation adéquate de l’ensemble des communautés de personnes en situation de handicap. Les membres de ces communautés devraient être rémunérés pour le partage de leurs connaissances spécialisées.

Une véritable responsabilité, plutôt qu’une consultation vide et ostentatoire, devrait être à l’ordre du jour. L’accessibilité des villes ne sera possible que si les gouvernements et leurs différentes agences écoutent attentivement ce que les citoyens en situation de handicap ont à dire, et s’ils agissent en conséquence.

This article was originally published in English

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