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Les RH dans tous leurs états

Plafond de verre quand tu nous freines !

Plafond de verre. Jennifer Woodard Maderazo / Flickr, CC BY

Le 1er janvier prochain au plus tard, les entreprises devront être en conformité avec les quotas imposés par la loi n° 2011-103 du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle, à savoir 40 % de femmes.

La proximité de cette échéance nous invite à réfléchir sur les problèmes réels ou supposés liés au syndrome du plafond verre dont serait victimes les femmes.

15 % de salaire en moins

Le lundi 7 novembre 2016 à 16h34, un collectif féministe a invité les femmes à cesser le travail !

En effet, les statistiques sont réelles : en France on constate un écart de salaire de plus de 15 % entre les hommes et les femmes (différence de salaire horaire brut moyen entre les hommes et les femmes salariés en pourcentage du salaire horaire brut moyen des hommes)

Différences de salaire brut horaire en Europe en femmes et hommes. Eurostat

Selon cette enquête effectuée tous les 4 ans dans les États membres de l’Union européenne (UE).

Pourtant, en France, le principe de droit est « A travail égal salaire égal ». Le principe de l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes est inscrit dans la loi depuis 1972. Le problème n’est semble-t-il donc pas nouveau.

Un cadre juridique très complet

En 1995 est créé l’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes puis, en 1999, les articles 3 et 4 de la Constitution sont modifiés afin d’introduire l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives. Cette disposition est suivie en 2000 par la loi de mise en œuvre sur l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux.

D’autres lois vont se succéder et parmi elles on notera les plus représentatives ;

2006 : Loi sur l’égalité salariale entre les femmes et les hommes.

2007 : Loi sur l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives.

2008 : Ajout d’un alinéa à l’article 1er de la Constitution qui dispose désormais que « la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales ».

2011 : La loi du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle prévoit que la proportion des membres du conseil d’administration ou de surveillance de chaque sexe ne peut pas être inférieure à 20 % au terme d’un délai de 3 ans à compter de la promulgation de la loi ; puis de 40 % dès le deuxième renouvellement du conseil à compter de la promulgation et dans un délai de 6 ans à compter de la promulgation de la loi.

2012 : Décret n° 2012-1408 du 18 décembre 2012, relatif à la mise en œuvre des obligations des entreprises pour l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Ce décret qui s’applique aux entreprises de plus de 50 salariés a renforcé le dispositif de pénalité qui pèse sur les entreprises ne respectant pas leurs obligations en matière d’égalité professionnelle. Il rend en particulier obligatoire la négociation sur la rémunération. Par ailleurs, les entreprises auront désormais l’obligation de déposer auprès des services de l’État leurs plans d’action.

2014 : Loi du 4 août pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, vise à combattre les inégalités entre hommes et femmes dans les sphères privées, professionnelles et publiques.

Alors, malgré cet arsenal normatif, pourquoi les écarts de salaires persistent ?

Plafond de verre

Plafond de verre.

Nous pouvons tenter un début d’explication à travers la notion de plafond de verre. Il s’agit d’une expression américaine des années 70 qui désigne des freins « invisibles » à la progression des femmes dans les structures hiérarchiques. Ce plafond reste un obstacle dans la prise de responsabilité et les progressions de carrière.

Il est pourtant contradictoire de constater la progression des femmes dans les métiers qualifiés et le maintien des inégalités de postes et de salaires, jusque dans l’administration.

Plusieurs pistes pour expliquer ce phénomène :

Le retard historique

Les femmes ont eu accès plus tardivement que les hommes à l’éducation et aux diplômes (Laufer, 1997). Ce retard est censé être rattrapé par la présence de plus en plus importante de jeunes femmes dans l’enseignement supérieur,

Les choix familiaux.

Il est souvent reproché aux femmes leur moindre capacité de mobilité et les congés maternité ou leur souhait de travail à temps partiel. C’est le cas à l’université du modèle idéal de l’enseignant chercheur dont le mérite est évalué à partir de critères tels que le nombre et le rythme de publication, la vitesse de carrière ou la capacité de mobilité, des critères qui peuvent contribuer à exclure les femmes qui ne s’y conforment pas strictement, compte tenu par exemple d’interruptions de carrière dues aux congés de maternité. (Femmes et carrières : la question du plafond de verre Revue française de gestion, 2004/4)

L’absence de réseaux informels et de cooptation

Il apparaît qu’une majorité de femmes ne parvient pas à franchir les obstacles qui freinent leur développement de carrière. Une minorité de femmes développe des stratégies qui leur permettent d’atteindre le sommet des hiérarchies. Il semblerait alors que les femmes sont moins sensibles à l’intérêt des réseaux et bénéficieraient peu du principe de cooptation.

Le problème de la disponibilité

Les postes à responsabilité proposés aux femmes entre 30 et 40 ans ne sont pas toujours conciliables avec des contraintes familiales. La mobilité géographique répétée demandée dans certaines grandes entreprises constitue aussi un facteur limitant pour certaines femmes, dont le conjoint ne peut/veut pas toujours suivre.

Par ailleurs, on constate une forme d’autocensure des femmes qui ne parviennent pas toujours à se mettre en avant pour obtenir un poste à responsabilité.

Une alternative : la création d’entreprise

Il serait intéressant de s’interroger sur la pertinence de l’entrepreneuriat féminin comme alternative à une carrière organisationnelle et une solution au problème du plafond de verre. Les motivations d’autonomie et d’indépendance apparaissent ici très présentes chez les « créatrices » et le plafond de verre apparaît bien l’une des causes les conduisant à quitter le statut de salariée. (voir « Femmes et carrières : la question du plafond de verre » dans la Revue française de gestion)

Éviter l’autocensure

Pour crever les plafonds de verre, il serait opportun que les femmes tentent de briser les stéréotypes véhiculés par les hommes et ne s’imposent pas de freins. Valérie Rocoplan, directrice de Talentis, spécialisée dans l’accompagnement des managers et des dirigeants estime

« Beaucoup estiment par exemple que si elles atteignent leurs objectifs, cela suffira pour progresser…. Elles doivent oser demander, apprendre à gérer leur image, leur visibilité et réseauter ».

Gageons que la génération Y, plus encline à concilier vie privée et vie professionnelle, contribue à changer la donne.

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