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Greta Thunberg entourée de jeunes filles, tenant une banderole
Bristol, Royaume-Uni - 28 février 2020 : La militante écologiste Greta Thunberg se joint aux manifestants lors d'un rassemblement du Bristol Youth Strike 4 Climate (BYS4C) dans le centre-ville. Shutterstock

Changements climatiques : repenser nos actions aujourd’hui pour assurer le bien-être des générations futures

Le tout dernier rapport du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat arrive à des conclusions alarmantes quant aux conséquences négatives des changements climatiques, à la fois sur leur vitesse d’évolution et leur ampleur. De fait, elles nous obligent à réfléchir aux impacts que les générations actuelles ont sur les générations futures.

Ces conséquences négatives incluent notamment la hausse globale des températures ainsi que les inondations et les sécheresses qui influenceront inévitablement l’agriculture et, par le fait même, la manière dont s’alimenteront les générations futures. L’augmentation des tempêtes météorologiques extrêmes et la propagation de nouvelles maladies infectieuses feront également partie intégrante de ces conséquences négatives.


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Les générations futures d’êtres humains auront-elles accès aux mêmes opportunités que les générations actuelles ? Est-ce que les ressources auxquelles elles auront accès leur permettront de répondre à leurs besoins de base et de s’épanouir dans des activités choisies au même titre que les générations actuelles ? C’est pour réfléchir à ces questions éthiques que le concept de justice occupationnelle intergénérationnelle a été créé par un groupe de chercheurs, dont Marie-Josée Drolet, en 2019, avec qui je complète mon doctorat en éthique appliquée.

Nos recherches contribuent à la sensibilisation et à l’éducation des professionnels de la santé que sont les ergothérapeutes quant aux rôles qu’ils peuvent adopter dans la lutte contre les changements climatiques. Nous avons aussi collaboré à la création de la Communauté ergothérapique engagée pour l’équité et l’environnement (C4E), dont la mission est notamment de sensibiliser et mobiliser les ergothérapeutes à l’urgence climatique et aux actions pouvant être entreprises à cette fin.

Deux jeunes brandissent une pancarte
Les générations actuelles se mobilisent pour une approche collective plus écoresponsable. Shutterstock

La science de l’occupation pour lutter contre les changements climatiques

Le concept de la justice occupationnelle intergénérationnelle découle de celui de la justice occupationnelle et émerge de la science de l’occupation, c’est-à-dire la science qui étudie les occupations humaines. Elle fait partie des sciences humaines et sociales, et s’appuie sur des méthodologies et des disciplines variées, comme l’anthropologie, la philosophie, la psychologie et la sociologie.

Le concept d’occupation réfère à l’ensemble des activités auxquelles prennent part les êtres humains, à la fois dans leur vie personnelle et professionnelle. Ces activités sont réalisées au sein de divers environnements et nécessitent l’utilisation de ressources naturelles. Par exemple, le simple fait quotidien de s’alimenter, se laver, s’habiller et se déplacer en voiture nécessite l’utilisation de ressources naturelles (eau, végétaux, animaux et ressources géologiques). Suivant cette science, l’être humain est un être occupationnel, soit un être vivant qui se réalise par sa participation constante à diverses occupations.

Dans son cinquième rapport, le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat rapporte que les changements climatiques sont principalement causés par les occupations et activités humaines, que celles-ci soient de nature individuelle, organisationnelle, sociétale ou industrielle. Dans ce contexte, la science de l’occupation peut être utilisée pour réfléchir aux moyens de lutter contre les changements climatiques. Autrement dit, puisque les changements climatiques sont causés par les activités réalisées par les êtres humains, il importe d’utiliser les connaissances issues de la science de l’occupation pour trouver des solutions afin d’agir de manière juste et équitable à l’égard des générations futures.

Les inégalités sociales entravent l’atteinte de la justice occupationnelle

Le concept de justice occupationnelle a émergé au siècle dernier. Il stipule que tous les êtres humains devraient bénéficier équitablement des opportunités sociales leur permettant de réaliser les activités qui leur permettent d’assurer leur survie ainsi que celles qui leur tiennent à cœur et donnent un sens à leur existence.

Concrètement, la justice occupationnelle vise à ce que toute personne, peu importe son lieu d’existence, son âge, son genre ou ses capacités, puisse pouvoir répondre à ses besoins de base, tels que se nourrir, avoir accès à de l’eau potable, se loger, se vêtir et assurer son hygiène corporelle, en plus de pouvoir réaliser les occupations et activités qui contribuent à sa santé et son bien-être, et ce, sans discrimination.

Deux enfants jouent dans un lac
Nous sommes responsables du bien-être des générations de demain. Shutterstock

Puisqu’une grande partie des humains vit actuellement dans une situation de pauvreté et ne peut assurer ses besoins de bases, l’humanité est confrontée à des injustices occupationnelles. Ainsi, les grandes inégalités sociales qui régissent la manière dont les ressources naturelles et les opportunités sociales sont distribuées entre les êtres humains font en sorte qu’une majorité d’entre eux ne parvient pas à s’épanouir comme êtres occupationnels. En effet, ceux-ci éprouvent davantage de difficulté à s’engager dans des occupations qui donnent un sens à leur existence et qui contribuent à leur santé et bien-être. Par exemple, il est possible que ces personnes n’aient pas accès à une alimentation saine au quotidien et à un emploi sécuritaire qui correspond à leurs compétences et valeurs.

Une transition écologique de nature occupationnelle

Les injustices occupationnelles deviennent intergénérationnelles lorsque les êtres humains d’aujourd’hui s’engagent dans des occupations qui détruisent à un tel point les écosystèmes naturels que la survie et le bien-être des générations futures sont compromises.

En s’engageant dans certaines activités non écoresponsables, les générations actuelles épuisent les ressources de la planète et participent à la pollution atmosphérique, aquatique et terrestre.

Suivant le concept de justice occupationnelle intergénérationnelle, il est injuste que les générations futures soient contraintes de vivre dans de tels environnements ou encore que leur survie et bien-être soient mis en péril. Cette vision de la justice invite donc les générations présentes d’êtres humains à respecter leurs devoirs à l’égard des générations futures, incluant celui de s’engager dans des occupations écoresponsables, c’est-à-dire respectueuses des capacités de régénérescence de la planète. En d’autres termes, les personnes, les organisations publiques ou privées, les industries et les dirigeants se doivent de réduire de manière importante leur empreinte écologique et de s’engager dans des occupations écoresponsables.

La transition écologique vers laquelle doit impérativement s’engager l’humanité pour renverser la tendance climatique est une question de justice occupationnelle intergénérationnelle ; une prise de conscience individuelle et collective est donc primordiale afin d’agir de manière juste et équitable à l’égard des générations présentes et futures d’êtres humains.

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