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Comment mesurer la malhonnêteté ?

Lorsque l’on demande aux individus de jeter un dé à l’abri des regards et d’en rapporter le résultat, les tricheurs systématiques s’avèrent minoritaires.

« L’économie est la science qui étudie le comportement humain en tant que relation entre des fins et des moyens rares susceptibles d’être utilisés différemment ». C’est ainsi que l’économiste anglais Lionel Robbins de la London School of Economics caractérisait l’objet de la science économique dans un célèbre texte de 1932. Même si certaines expériences s’avèrent relativement anciennes, à l’instar des questionnements sur le risque, l’économie dite « comportementale » reste pourtant un champ disciplinaire assez récent. Cela peut sembler paradoxal au regard de cette définition canonique. Elle a néanmoins trouvé sa consécration avec en particulier le « Nobel » d’économie reçu par Daniel Kahneman et Vernon Smith en 2002.

Ce comportement humain reliant fins et moyens sert-il toujours un dessein purement personnel, quitte à recourir au mensonge ? Une expérience d’économie maintes fois répliquée met en évidence une préférence pour l’honnêteté chez de nombreux individus. Lorsqu’il leur est demandé de jeter un dé à l’abri des regards et d’en rapporter ensuite le résultat, les tricheurs systématiques s’avèrent minoritaires.

De quoi nuancer quelque peu la théorie classique de la délinquance en économie attribuée à Gary Becker. Miser sur l’importance d’une sanction et sur la probabilité de se faire prendre ne sont pas les uniques moyens de lutte. On peut ainsi observer que la propension à tricher demeure fortement corrélée à la qualité des institutions du pays dans lequel l’expérience est menée.

Jouer sur la honte pourrait notamment avoir un effet sur les fraudeurs occasionnels dans les transports en commun, d’après Fabio Galeotti et Marie-Claire Villeval (CNRS) qui dialoguent dans cet épisode. Cela serait, certes, moins efficace auprès de ceux qui ont entrepris une « carrière de délinquant », adoptant un système de normes différent et fraudant systématiquement, comme l’expliquait en 1963 le sociologue américain Howard Becker. Mais pousser les individus à se sentir comme « quelqu’un de bien » pourrait être un levier d’action puissant. Il apparaît d’ailleurs que ceux qui fraudent au moment de prendre le tram… sont aussi ceux qui trichent le plus au jeu.

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