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Économie du partage : Pourquoi Airbnb et Abritel ont-ils intérêt à avoir des loueurs et locataires ?

Jouer les deux rôles aident à comprendre les inquiétudes de son vis-à-vis.

Airbnb, Blablacar ou encore Ouicar sont autant d’acteurs de l’économie du partage qui ont bouleversé le marché des échanges de services depuis le début des années 2000. Ces plates-formes collaboratives, de notoriété internationale, jouent notamment un rôle de tiers de confiance dans le cadre d’une relation impliquant des particuliers qui souhaitent mettre une ressource à disposition et ceux qui symétriquement vont en bénéficier. C’est le cas du covoiturage ou de la location de logement.

Ces services collaboratifs permettent ainsi à tout un chacun d’être soit consommateur, lorsqu’on achète le service, soit prestataire, lorsqu’on le fournit. Certains utilisateurs peuvent également alterner entre ces deux rôles. Une famille peut ainsi proposer sa maison dans le Vercors à la location pendant qu’elle profitera de l’appartement d’un autre particulier à Londres. On parle là d’« interchangeabilité ».

Il nous est apparu que les entreprises de l’économie du partage ont tout intérêt à la favoriser. Dans nos recherches, nous montrons notamment comment elle vient catalyser la confiance que les utilisateurs s’accordent entre eux.

Se mettre à la place de l’autre

Nous avons ainsi comparé les comportements des utilisateurs qui jouent chacun des deux rôles (les utilisateurs interchangeables) avec ceux des personnes qui se cantonnent à un seul. Il s’agissait notamment de voir si oui ou non les premiers échangeaient et participaient plus.

Pour ce faire, nous avons mené une enquête par questionnaire auprès de 222 personnes ayant participé au moins une fois à un service de location de courte durée via une plate-forme de type Airbnb ou Abritel. Chaque participant devait indiquer s’il avait été impliqué dans ce genre de service en tant que consommateur, prestataire, ou s’il avait joué les deux rôles.

Le répondant devait ensuite renseigner son « degré de proximité sociale perçue » vis-à-vis des autres utilisateurs de ce type de plate-forme, ce que l’on obtient avec des questions du type « les autres utilisateurs sont-ils des personnes semblables à vous ? » Puis nous l’interrogions sur son niveau de confiance vis-à-vis des autres utilisateurs, par exemple, en lui demandant si d’après lui il s’agit de personnes honnêtes. Enfin, chacun devait préciser son intention de participer à ce type d’échanges collaboratifs dans le futur.

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Les résultats de notre enquête montrent que les individus ayant été à la fois consommateurs et prestataires ont tendance à percevoir les autres utilisateurs de la plate-forme comme plus proches d’eux socialement que les individus ayant joué un seul des deux rôles. Ce résultat s’explique par le fait que celles et ceux qui ont endossé les deux rôles tendent à avoir plus d’informations sur les deux types de situations, aller chez un inconnu et recevoir chez soi un inconnu. Ils développent ainsi une plus grande capacité à se mettre à la place de l’autre.

Complémentaires aux notes et aux avis

Dit autrement, qui fait preuve d’interchangeabilité peut, lorsqu’il est consommateur se former une représentation plus concrète de ce qu’est un hôte ou un loueur d’un logement, et vice versa, ce qui revient à favoriser la proximité sociale perçue. Nos résultats montrent, de plus, que ces personnes développent une plus grande confiance envers les utilisateurs des plates-formes collaboratives, et cela favorise, in fine, leur intention d’y avoir à nouveau recours.

Ce résultat ne semble pas neutre pour les entreprises de mise en relation. Bien qu’elles jouent le rôle de tiers de confiance, les utilisateurs peuvent parfois être réticents à faire confiance à un inconnu, notamment lorsqu’il s’agit de faire un trajet en voiture avec lui ou de lui prêter son logement. L’enjeu pour les plates-formes collaboratives qui souhaitent développer davantage ce modèle économique est ainsi de favoriser la confiance entre utilisateurs à différents stades de l’expérience de service.

Parmi les leviers qui existent pour favoriser cette confiance, il existe déjà les avis, les notes et les vérifications effectuées par l’entreprise qui met consommateurs et prestataires en relation. Nous suggérons, grâce aux résultats de cette recherche, un autre moyen d’augmenter cette confiance, à savoir inciter les consommateurs à l’interchangeabilité, et donc à « passer de l’autre côté du miroir ». Cela, en augmentant la proximité sociale perçue des participants, permet en retour d’augmenter la confiance vis-à-vis des autres utilisateurs, et ainsi de favoriser l’intention d’utiliser des services collaboratifs.

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