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Facebook, Snapchat, Instagram : les réseaux sociaux font aussi du bien aux adolescents !

Les réseaux sociaux permettent aux natifs du numérique de compenser l'état d’isolement qu'ils peuvent ressentir. Antonio Guillem / Shutterstock

La nouvelle génération d’adolescents est aujourd’hui immergée dans un environnement numérique : Internet, tablettes, et surtout accès constant à leur smartphone. Les jeunes français d’aujourd’hui ne se contentent plus de regarder la télévision ou d’écouter de la musique, mais consomment de plus en plus de médias sociaux.

C’est le constat qu’a réalisé l’institut Médiamétrie au travers son étude « L’année Internet 2019 ». Son rapport révèle que 84 % des enfants de 12 ans interrogés disposent d’un smartphone, en vue de rester connectés avec leurs amis via les réseaux sociaux numériques (RSN).

Taux d’équipement en Smartphone selon l’âge. CREDOC, Enquêtes sur les « Conditions de vie et les Aspirations »

Ces adolescents deviennent si accros aux réseaux sociaux que 40 % d’entre eux dorment même avec leur smartphone ! Le smartphone devient une extension de soi, une sorte de doudou numérique pour ces enfants de l’ère connectée, ou « natifs du numérique » qui grandissent et évoluent dans le monde des réseaux sociaux numériques.

Un moyen de vaincre l’isolement

Les médias évoquent généralement des réseaux sociaux numériques (RSN) pour en dépeindre les risques et dérives qu’on peut y rencontrer : anxiété, isolement, dépression et addiction… Les mauvaises expériences sont épinglées, dramatisées, généralisées. Pourtant, ce ton alarmant, souvent teinté d’un « c’était mieux avant », n’aide nullement à comprendre ce que les adolescents font et vivent sur la toile.

Si la fréquence d’utilisation des RSN peut aggraver les symptômes dépressifs et entraîner une perte d’estime de soi, ils ont aussi des aspects bénéfiques, en permettant de renforcer les liens sociaux au moment de l’adolescence, période charnière dans la construction identitaire. Malgré ces dangers, il est difficile d’empêcher les jeunes d’accéder aux RSN : non seulement parce qu’en être coupés peut être associé à un mal-être, mais aussi parce que les interactions sociales qui s’y tissent contribuent à renforcer les amitiés et peuvent procurer aux adolescents un soutien protecteur contre l’isolement.

D’après notre recherche publiée dans la revue Information & Management en 2019, les ados ultra-connectés souffrent autant, si ce n’est plus, de la solitude que les générations précédentes. Notre étude révèle que près de 80 % des natifs du numérique se sentent continuellement seuls.

Alors pour compenser cet état d’isolement, ils se tournent vers les RSN pour tisser des liens avec leurs pairs.

Se développent des relations interpersonnelles – certes superficielles – qui créent une illusion d’amitié. Mais les natifs du numérique ont-ils systématiquement recours aux médias sociaux pour tisser des liens avec leurs pairs ?

Nous avons réalisé un sondage auprès de plus de 400 adolescents français, âgés de 13 à 18 ans, afin d’estimer leurs capacités d’adaptation. Quel était l’objectif ? Découvrir comment les adolescents réagissent face à la solitude (gardent-ils leur calme ou ont-ils tendance à agir immédiatement ?) et dans quelle mesure ils discutent de leurs sentiments personnels et de leurs angoisses avec leurs amis, sur les RSN et dans la vraie vie.

Les résultats ont mis en évidence deux profils d’adolescents : ceux qui adoptent des stratégies d’adaptation actives, en s’attaquant directement au problème, et ceux qui adoptent des stratégies d’adaptation passives, en ignorant le problème. Plus concrètement, les adolescents adoptant des stratégies d’adaptation actives se tournent vers la communication traditionnelle et authentique avec leur groupe de pairs, le plus souvent à l’école.

Alors que ceux adoptant des stratégies d’adaptation passives, préfèrent partager leurs émois sur les réseaux sociaux numériques (Facebook, Instagram, Snapchat).

Développer les compétences sociales

L’un des résultats les plus frappants est le rôle du genre pour expliquer les différentes stratégies d’adaptation mises en œuvre par les adolescents pour vaincre leur état d’isolement. Les filles tendent à recourir à des stratégies actives en recherchant des interactions concrètes et réelles avec leurs pairs, alors que les garçons ont plutôt recours à des stratégies passives en favorisant le recours aux RSN.

L’image négative que renvoie l’adolescent isolé sur son smartphone ne prendrait pas en compte les compétences sociales que les réseaux sociaux peuvent cultiver. Loreanto/Shutterstock

Nos recherches permettent enfin d’invalider l’idée selon laquelle le temps passé sur les RSN entrave le développement des compétences sociales. En effet, les résultats d’une étude à paraître que nous avons menée en 2019 auprès de 409 adolescents, âgés de 13 à 18 ans, a montré que l’exposition aux réseaux sociaux renforce au contraire la capacité mentale d’inférer des états mentaux à soi-même et à autrui et de les comprendre.

Cette aptitude, décrite par le concept de « théorie de l’esprit » (theory of mind en anglais) permet de prédire, d’anticiper et d’interpréter le comportement des pairs dans une situation donnée. Elle apparaît très tôt durant l’enfance pour atteindre une forme mature et complexe à l’adolescence.

Les réseaux sociaux offrent donc une fluidité dans les liens sociaux. Grâce à eux, ce lien n’est jamais rompu, même après la séparation physique, et peut même permettre d’accroître la capacité à comprendre les intentions d’autrui des adolescents (théorie de l’esprit). Les RSN ne sont donc pas fondamentalement nocifs à l’adolescence, si toutefois ils en font un usage raisonnable et responsable.

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