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Une jeune femme parle au téléphone portable tout en regardant un ordinateur portable ouvert. Un bébé est assis sur ses genoux et mâchonne un jouet.
La naissance d'un enfant entraîne d'importantes pertes de revenus pour les femmes. (Shutterstock)

Les revenus des femmes diminuent après la naissance d’un enfant. Voici pourquoi

Les inégalités entre les hommes et les femmes persistent dans de nombreux domaines. Les femmes gagnent toujours moins que les hommes en moyenne sur le marché du travail.

Une différence encore plus frappante est l’écart salarial lié à la maternité, qui se produit lorsque les femmes ont des enfants. Phénomène également connu sous le nom « pénalité liée à la maternité », le salaire des femmes s’effondre après la naissance d’un enfant, tandis que celui des hommes reste pratiquement inchangé.

De nombreuses études se sont penchées sur les causes de l’inégalité entre les sexes et ont conclu que les femmes ne sont pas en mesure de rattraper les niveaux de revenus des hommes en partie en raison des responsabilités parentales.

Pourquoi cela se produit-il ? Les enfants ont un effet négatif sur la productivité des femmes sur le marché du travail en réduisant considérablement leur capital humain, ce qui se traduit par une réduction significative de leurs revenus.

Après la naissance de leur enfant, les mères ont tendance à se tourner vers des emplois à temps partiel, des postes aux horaires flexibles ou des postes offrant des conditions de travail plus favorables à la conciliation famille-travail — autant d’éléments qui tendent à payer des salaires plus bas.

À leur tour, les employeurs peuvent considérer les employés à temps partiel comme moins dévoués et moins productifs, en particulier lorsqu’ils s’appuient sur des heuristiques — des raccourcis mentaux pour résoudre des problèmes — pour juger de la qualité des travailleurs, plutôt que sur des informations réelles concernant leur performance. Cela peut se traduire par moins de primes et de promotions pour ces employés.

Les effets de la parentalité

Une étude portant sur le Danemark, l’un des pays les plus égalitaires au monde, indique que les mères sont pénalisées à long terme d’environ 20 % en termes de revenus.

Une de nos études révèle une situation similaire au Canada. Nous avons utilisé les données de l’Étude longitudinale et internationale des adultes de Statistique Canada et des dossiers administratifs historiques de 1982 à 2018.

Nous avons comparé l’évolution des revenus des hommes et des femmes après la naissance de leur premier enfant entre 1987 et 2009. En utilisant une méthodologie de type étude d’événement, nous avons suivi le revenu d’emploi des individus sur une période allant de cinq ans avant la naissance jusqu’à dix ans après.

Un graphique qui montre les variations de revenus d’emploi pour les mères et les pères relativement à la naissance de leur premier enfant
L’impact des enfants sur les mères et les pères. Les revenus des mères sont représentés par le trait plein et les marqueurs ronds, alors que ceux des pères le sont pas le trait pointillé les marqueurs carrés. (Connolly, Fontaine & Haeck, 2023)

Nous avons observé des effets négatifs significatifs et persistants de la parentalité pour les mères, mais pas pour les pères. Les revenus des mères chutent de 49 % l’année de la naissance, avec une pénalité de 34,3 % dix ans plus tard. Les revenus des pères ne semblent guère affectés.

Effets inégaux des enfants

La naissance d’un enfant entraîne des pertes de revenus importantes, qui ne sont pas réparties uniformément entre les parents des couples hétérosexuels. Les pères restent sur la même trajectoire de revenus, tandis que les femmes subissent des pénalités qui persistent au fil des ans. Ceci est particulièrement vrai pour les mères ayant plusieurs enfants ou celles qui ont un faible niveau d’éducation.

Cet appauvrissement déclenché par la naissance d’un enfant peut avoir des répercussions économiques importantes en cas de séparation du couple. Au Canada, près d’un tiers des mariages se termine par un divorce.

Les femmes sont généralement désavantagées financièrement à la suite d’une séparation. Ce désavantage peut être dû à des facteurs antérieurs à la séparation, tels que la répartition inégale des tâches pendant le mariage et les revenus inférieurs des femmes, mais aussi à l’absence prolongée des femmes sur le marché du travail en raison de leurs responsabilités familiales.

A travail égal, salaire égal

Dans ce contexte, il est essentiel de se demander s’il existe des mesures susceptibles d’éliminer, ou du moins de réduire, l’impact économique associé aux responsabilités familiales sur les revenus et l’emploi des mères.

Nous avons étudié le rôle des politiques familiales, puisqu’elles ont été en partie conçues pour encourager le travail des femmes et promouvoir un partage plus équitable des responsabilités parentales entre conjoints.

Plus précisément, nous nous sommes concentrés sur la prolongation des congés parentaux au Canada et sur l’introduction des services de garde d’enfants à contribution réduite pour les familles du Québec. Nous avons trouvé des preuves que ces politiques peuvent contribuer à réduire les pénalités liées la maternité.

Les politiques « à travail égal, salaire égal », telles que la loi sur l’équité salariale du gouvernement fédéral, ont également le potentiel de faire une différence substantielle. Ces politiques peuvent rendre le marché du travail plus équitable et plus attrayant pour les femmes et réduire l’impact potentiellement négatif de la rémunération basée sur l’expérience pour les mères.

Plus d’avantages au bout du compte

En plus d’avoir un effet positif sur la situation économique des femmes, encourager l’emploi des mères pourrait contribuer à éliminer les stigmates de la division du travail au sein des couples en exposant les enfants à un modèle plus symétrique de travail rémunéré et non rémunéré.

Une étude récente utilisant des données provenant de 29 pays a montré que les mères qui travaillent sont plus susceptibles de transmettre des valeurs égalitaires à leurs enfants, tant au travail qu’à la maison. Les filles dont les mères travaillent finissent elles-mêmes par travailler davantage : elles font plus d’heures, sont mieux payées et occupent plus souvent des postes de supervision que les filles dont les mères restent à la maison.

Un enfant en bas âge est assis sur les genoux d’une femme, probablement sa mère, devant un bureau. Il sourit et touche un ordinateur portable tandis que sa mère lui sourit
Les mères au travail sont plus susceptibles de transmettre des valeurs égalitaires à leurs enfants. (Shutterstock)

Ce résultat n’a pas été observé chez les garçons. Cependant, les garçons ayant grandi avec une mère salariée étaient plus impliqués dans les responsabilités familiales et domestiques à l’âge adulte que les hommes dont la mère n’était pas sur le marché du travail. Les filles passaient également moins de temps à effectuer des tâches ménagères.

Les mères qui travaillent semblent avoir un impact intergénérationnel favorisant l’égalité des sexes, tant au sein de la famille que sur le marché du travail.

Nous savons tous qu’élever des enfants prend beaucoup de temps. Les enfants, bien sûr, bénéficient de cet investissement en temps des parents. Mais élever des enfants est également coûteux. Notre recherche a quantifié un type de coût : la trajectoire des revenus inférieurs. Il est essentiel de savoir comment ces coûts sont partagés entre les deux parents pour permettre une meilleure prise de décision, pour les décideurs politiques, mais aussi, en fin de compte, pour les parents, les futurs parents et leurs enfants.

This article was originally published in English

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