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Musique : jouer en groupe pour apprendre la résilience ?

Jouer en groupe suppose de s'écouter les uns les autres. Shutterstock

La résilience, ou la capacité à surmonter l’adversité, est l’une des qualités les plus importantes à développer, aujourd’hui plus que jamais où les jeunes ont été confrontés, avec le Covid, à d’importantes perturbations dans leur formation, leur vie familiale et professionnelle.

La bonne nouvelle est que ce n’est pas une qualité innée mais une compétence qui peut s’acquérir au fil des expériences et de nos interactions avec les autres. Jouer de la musique en groupe, participer à un orchestre ou une chorale est par exemple une bonne situation pour développer ces aptitudes.


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Dans une étude menée auprès de jeunes de 14 ans à 25 ans, musiciens accomplis participant à des orchestres en Tasmanie, nous nous sommes interrogés sur les compétences que ces expériences permettent de développer au-delà de l’apprentissage d’un instrument et du chant.

Pour ce projet, nous avons recueilli les commentaires de musiciens, professeurs et chefs d’orchestre dans un groupe Facebook fermé puis nous avons réalisé huit entretiens de suivi qui ont fait ressortir le travail d’équipe, l’empathie et le courage, développés par ces pratiques de groupe, et qui sont tous des composantes de la résilience.

S’écouter les uns les autres

Pour jouer de la musique ensemble, il faut s’écouter les uns les autres, comprendre ce qui se passe autour de soi et être prêt à changer son style d’interprétation, en fonction de la performance du groupe. Il faut être capable aussi d’apprécier les contributions des autres, au-delà du jugement que vous portez sur votre propre travail.

Comme l’explique David, un chef d’orchestre, au-delà d’un certain temps, les joueurs ont réalisé qu’ils étaient en fin de compte responsables les uns devant les autres joueurs, et pas seulement devant le chef d’orchestre. La participation à un ensemble musical permet donc d’apprendre toutes ces attitudes et façons nécessaires au travail en groupe.

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Les musiciens doivent aussi être capables de partager leurs idées et leurs sentiments avec les autres participants. Dans une chorale ou un orchestre, la création musicale est une expérience créative partagée, qui implique tout le corps. C’est là que l’empathie entre en jeu. Comme le travail d’équipe, elle peut être cumulative, se développant au fil des répétitions et des représentations, les élèves et les professeurs se soutenant mutuellement.

« Je dois intégrer que je ne serai pas toujours le point central d’un morceau », note Tom, tandis que Simon nous dit qu’il a réalisé qu’il n’était pas seul à devoir travailler encore et encore ses accords.

Persévérer

C’est important que les jeunes développent un certain état d’esprit, favorable à l’apprentissage, comprenant que l’effort les rend plus fort et que l’étude est un engagement à long terme. C’est là qu’entre en jeu le cran, permettant de poursuivre un objectif et de s’y tenir même si les choses se corsent.

L’apprentissage d’un instrument exige une pratique quotidienne, et il faut parfois des mois pour être au niveau et bien interpréter un morceau. L’engagement est donc un élément clé de la formation musicale, comme le souligne le témoignage de Lawrence, qui a participé à une comédie musicale dans son établissement scolaire : « à plusieurs reprises au cours de l’année, j’ai eu envie d’abandonner […] mais c’était une chose à laquelle je m’étais engagé et j’ai continué à travailler pour être au meilleur de mes capacités, même si j’avais l’impression de ne pas pouvoir le faire ».

La participation à un ensemble musical permet donc d’apprendre à être responsables les uns vis-à-vis des autres. Shutterstock

Tory, un chef de chœur note que les concerts ou performances apprennent à faire face à l’inattendu, et que cela demande une certaine forme de bravoure.

« Il y a la sécurité d’être en groupe, dans une certaine mesure, mais monter sur scène revient toujours à faire un saut dans l’inconnu. Ayant répété, vous pouvez compter les uns sur les autres mais cela n’empêche pas l’imprévu de se produire […]. C’est une aptitude très importante pour la vie d’être capable de reconnaître qu’une prestation n’était pas bonne mais de se dire que quoiqu’il en soit, on va recommencer. »

Les spécificités de la musique

La musique aurait-elle quelque chose de particulier pour favoriser la résilience, par rapport à d’autres activités de groupe, en sport ou en classe ? Les jeunes peuvent très bien s’initier au travail en équipe à travers des jeux ou en participant à des compétitions sportives.

En ce qui concerne la musique, il faut voir qu’elle provoque de l’activité dans différentes parties du cerveau simultanément. Écouter une musique que l’on aime active le circuit de la récompense. De la dopamine et de la sérotonine sont libérées, ce qui entraîne une situation de bien-être et incite à continuer à écouter de la musique.

L’apprentissage d’un instrument de musique renforce également les connexions dans le cerveau, reliant le cortex auditif aux parties du cerveau impliquées dans le traitement d’informations complexes. Il a été démontré que ce lien améliore la mémoire, les fonctions motrices et l’apprentissage dans d’autres domaines.

Jouer de la musique avec d’autres affecte également les niveaux d’ocytocine, l’hormone de l’attachement, tout en réduisant les niveaux de cortisol, l’hormone du stress, et en renforçant la fonction immunitaire.

Pour les jeunes, la musique peut offrir un répit précieux entre les études et la vie quotidienne et les aider à gérer et exprimer leurs émotions.


* les noms ont été changés.

This article was originally published in English

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