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Des étudiants en médecine, de dos, suivent un cours.
Dans différentes universités, des patients partenaires co-animent des cours auprès d'étudiants en médecine, aux côtés des enseignants médecins généralistes. Anna Jurkovska/Shutterstock

Quand les patients enseignent aux étudiants en médecine

À l’Université Paris-Est Créteil, des patients participent pour la première fois aux enseignements de médecine générale. Désignés comme « patients partenaires enseignants » aux côtés des médecins formateurs, ils partagent leur expérience et leur parcours de soins avec les étudiants et aident ces futurs médecins généralistes à axer leur pratique sur le malade plutôt que sur la maladie.


Les patients ne sont plus seulement des malades qui consultent en cabinets de médecine de ville ou à l’hôpital pour se faire soigner. Certains d’entre eux participent à la formation des étudiants en faculté de médecine. C’est le cas à l’Université Paris-Est Créteil (UPEC) où, depuis 2018, trois patients enseignent au département de médecine générale.

Des « patients experts », « patients enseignants » ou « patients partenaires »

Cette intégration des patients à l’UPEC a été réalisée à l’instar d’autres expérimentations à l’étranger (au Royaume-Uni, aux États-Unis, en Australie, au Canada) ainsi qu’en France (à Lyon, Saint-Étienne et plus récemment, à l’Université Sorbonne Paris Nord ainsi qu’à l’Université de Rennes). Les patients qui y interviennent sont le plus souvent connus sous les termes de « patients experts », « patients enseignants » ou « patients partenaires ».

À l’UPEC, ils ont été désignés comme « patients partenaires enseignants ». « Enseignants » au même titre que les formateurs médecins généralistes du département. Et « partenaires » car ils travaillent en collaboration avec ces derniers, auprès des étudiants. Dès lors, les patients partenaires enseignants co-animent différents cours en petits groupes d’une dizaine d’étudiants, avec les enseignants médecins généralistes.

Ces enseignements interactifs portent sur la communication en santé, l’éducation thérapeutique du patient, la télémédecine, ou encore des situations cliniques ayant posé problème aux étudiants lors de leurs stages en ville et à l’hôpital. L’intervention des patients est différente de celle des médecins, en étant plus libre mais complémentaire.

Les patients, atteints au moins d’une maladie chronique, font part aux étudiants de leur expérience de la maladie et de leur parcours de soins. Ils favorisent la réflexion de ces médecins généralistes en formation par l’apport de la perspective patient.

Enfin, ils partagent leurs avis lors de certains exercices et travaux dispensés en cours selon les thématiques abordées, par exemple, la prise en charge de patients ayant des maladies chroniques telles que le diabète ou l’annonce d’une mauvaise nouvelle.

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« Mieux comprendre nos patients, nous rendre compte de notre façon d’être avec eux »

Après deux ans d’expérimentation, une enquête de satisfaction des étudiants de l’UPEC a montré que près de 80 % des étudiants interrogés appréciaient ces enseignements avec les patients (publication à paraître). Ils considéraient que les patients partenaires enseignants contribuaient à l’amélioration de la qualité des cours dispensés au cours de leur cursus.

Les jeunes médecins trouvaient « intéressant d’avoir le retour des [patients] ». Ils estimaient que leur présence « permet de mieux comprendre [les] patients, de se rendre compte de [leur] façon d’être avec les patients ».

Une étude préalable auprès des enseignants du département de médecine générale de l’UPEC avait relevé que la communication, une des compétences professionnelles attendues du médecin généraliste, était la plus difficile à développer chez les étudiants, bien que ces derniers y soient formés dès le deuxième cycle des études médicales.

Grâce à la présence des patients pendant les cours, les étudiants déclaraient progresser dans le travail de cette compétence, en étant plus centrés sur le patient en consultation, et en développant une meilleure relation avec lui.

Vers une posture du médecin plus axée sur le malade que sur la maladie

Cette recherche d’une posture du médecin plus axée sur le malade que la maladie, d’une plus grande empathie pour le patient, d’une décision médicale partagée avec lui, est justement un enjeu dans la formation des médecins généralistes. Il en va de la responsabilité des universités et des tutelles. Et qui mieux que le patient pour transmettre au soignant son expérience de la maladie, ses représentations, ses craintes et ses attentes ?

Début 2024, la Direction générale de l’offre de soins, en lien avec le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, a élaboré un rapport proposant 23 recommandations afin de faciliter le déploiement de la participation des patients dans la formation initiale des médecins.

Ces propositions pourraient être reprises à l’UPEC où la place des patients dans l’élaboration des programmes de formation des médecins généralistes, leur représentativité et leur reconnaissance au niveau institutionnel (cadre d’emploi, rémunération, structuration) restent à développer.

Depuis cette étude de satisfaction réalisée en 2021, les patients partenaires enseignants continuent d’être impliqués dans l’animation des cours mais également dans l’évaluation des travaux des étudiants en médecine générale de l’UPEC. Pour renforcer l’équipe actuelle de trois patients partenaires enseignants, le recrutement de nouveaux patients au département de médecine générale est prévu prochainement.

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