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« L’envers des mots » : Aquaponie

Des systèmes d'aquaponie existent à différentes échelles, d’une production domestique à des fermes industrielles. Shutterstock

Entré dans le dictionnaire en 2023, le mot aquaponie est dérivé des termes latins aqua, qui signifie « eau », et ponie, qui veut dire « travail ». Son sens littéral est donc de faire travailler l’eau pour produire. Il s’agit d’un système de production agricole combinant production d’animaux aquatiques (poissons, crustacés…) et de plantes. L’aquaponie s’inspire de techniques millénaires comme les chinampas de Mésoamérique – où des jardins flottants délimités par des poteaux sont créés sur des lacs – ou encore la rizi-pisciculture chinoise – où des poissons sont mis à grandir dans les rizières pendant leur période inondée.

Sous l’impulsion de chercheurs anglo-saxons, l’aquaponie refait surface dans les années 1970 sous une forme modernisée et combine aujourd’hui la production de plantes en hydroponie, c’est-à-dire sans substrat ou dans un substrat neutre, et la production d’animaux aquatiques, majoritairement des poissons. Ce système repose sur un écosystème en trois parties :

  • Les poissons sont nourris par des aliments adaptés et produisent des déjections qui sont filtrées et minéralisées par un compartiment bactérien tandis que la partie solide est utilisée pour fertiliser des champs.

  • Puis, l’eau contenant les minéraux quitte le compartiment des bactéries pour rejoindre le compartiment des plantes qui sont nourries par ces minéraux.

  • Enfin, l’eau nettoyée de ses minéraux peut ensuite rejoindre le compartiment des poissons ou partir irriguer d’autres cultures selon que le système est ouvert ou fermé.

Dans l’aquaculture classique, l’eau se charge en éléments riches en azote issus des déjections et finit par devenir toxique pour les poissons. Elle doit donc être régulièrement renouvelée alors qu’en aquaponie, les plantes vont jouer le rôle de filtre et purifier cette eau ce qui permet de l’économiser.

Le choix des poissons élevés est guidé par les températures de la région et peut varier selon les saisons. Les espèces communément élevées en France sont la truite arc-en-ciel, le saumon, le sandre, l’esturgeon et l’anguille. D’autres productions existent comme la crevette d’eau douce. Le tilapia n’est pas autorisé en France mais est largement élevé dans d’autres pays.


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Pour la production des plantes en hydroponie, on retrouve plusieurs systèmes généralement sous serre : les rafts où les plantes sont positionnées dans des trous sur des plaques qui flottent sur l’eau, des gouttières (horizontales ou verticales) dans lesquelles circule en permanence l’eau, un substrat neutre (laine de roche, billes d’argile expansé, graviers de roche volcanique…) qui n’apportent aucun élément nutritif mais permettent à la plante de développer ses racines.

Dans tous les cas, il faut que les racines des plantes soient à la fois en contact avec l’eau et ses nutriments et aérées pour un bon apport d’oxygène. Les plantes ont parfois besoin de fertilisation complémentaire, en particulier si l’on cherche à produire des légumes comme les tomates, contrairement à la salade ou au basilic. La production de plantes se fait sans pesticides car on ne peut prendre le risque d’impacter les poissons ou les bactéries. Par contre, il est possible d’introduire des animaux auxiliaires (pollinisateurs, prédateurs ou parasites des ravageurs de cultures).

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L’aquaponie permet donc d’économiser de l’eau pour les poissons et les plantes. Elle est particulièrement adaptée à des situations où le manque d’eau est important. Des systèmes existent à différentes échelles, d’une production domestique à des fermes industrielles. Actuellement, c’est également une production qui se développe dans ou à proximité des villes. Cependant la rentabilité économique de ces systèmes n’est pas toujours garantie. Ils font l’objet de multiples recherches à travers le monde en particulier pour améliorer la recirculation de l’eau, produire de nouvelles espèces animales et végétales et limiter sa consommation d’énergie.


Cet article s’intègre dans la série « L’envers des mots », consacrée à la façon dont notre vocabulaire s’étoffe, s’adapte à mesure que des questions de société émergent et que de nouveaux défis s’imposent aux sciences et technologies. Des termes qu’on croyait déjà bien connaître s’enrichissent de significations inédites, des mots récemment créés entrent dans le dictionnaire. D’où viennent-ils ? En quoi nous permettent-ils de bien saisir les nuances d’un monde qui se transforme ?

De « validisme » à « silencier », de « bifurquer » à « dégenrer », nos chercheurs s’arrêtent sur ces néologismes pour nous aider à mieux les comprendre, et donc mieux participer au débat public.

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