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Les 100 mots de l’école du futur

1ᵉʳ mot de cette série sur les 100 mots : les ed-techs

Plusieurs ed-techs se sont développées ces dernières années en France, y compris Coorpacademy, digiSchool et Nomad.

Ed-tech : ce terme est apparu à plusieurs reprises ces dernières semaines, que ce soit au travers d’une étude réalisée par Victor Wacreneiez sur 140 start-ups, de « l’Edtech world tour » réalisé par Svenia Busson et Audrey Jarre, étudiantes à HEC ou encore de différentes levées de fonds significatives réalisées par quelques sociétés françaises.

Une ed-tech se définit comme une Start-up évoluant dans le domaine de l’éducation, au sens large du terme, utilisant la technologie dans son modèle. Cependant, caractériser les business-models des ed-tech et leur cible est beaucoup moins évident, comme je le démontrerai plus loin.

Plusieurs ed-techs se sont développées ces dernières années en France. Je pense à Nomad Education (800K€ pour créer l’éducation mobile), digiSchool (14M€, devenir leader européen de l’e-éducation) ou tout dernièrement Coorpacademy pour son développement en Europe (10M€).

C’est un peu faible eu regard de ce qui passe aux États-Unis (marché de plusieurs milliards de dollars), mais cela montre le début d’un frémissement en France. Ainsi, L’Étudiant- Educpros organise des learning expeditions à destination des professionnels de l’enseignement supérieur pour leur permettre d’aller à la rencontre de ces entreprises.

Il existe également une dimension internationale, voire même géopolitique de ces ed-techs. J’ai été particulièrement impressionné l’an dernier lors de ma visite du salon OEB – Online Education Berlin où 2200 visiteurs provenant de 90 pays se sont bousculés pour rencontrer des ed-techs. Même impression cette fois-ci lors de mon passage au BETT de Londres avec la présence de stands pays. Pour certains, cela paraissait évident (Corée du Sud, Singapour, pays nordiques). Pour d’autres, un plus surprenant (Espagne, Turquie, EAU). La France était bien présente, mais pas sous un label ed-tech !

Pourquoi un tel engouement international ?

J’ai identifié six causes permettant de comprendre le développement et l’enthousiasme pour ces start-up.


1. L’école du futur

Notre monde de l’éducation et de l’enseignement est en pleine évolution et nous allons connaître dans les années à venir un grand nombre de révolutions.

Je les ai exposées dans mon premier article, aussi inutile de revenir là-dessus. Nous aurons besoin d’acteurs pour nous permettre de réaliser cette école du futur (dans tous les domaines, pédagogiques, administratifs, marketing, communication…) et parmi ceux-ci les ed-techs pourront nous apporter des transformations « disruptives » ou nous accompagner dans ces changements.

Prenons un exemple avec la réalité augmentée (RA). Demain, nous pourrons, grâce à la RA immerger nos étudiants dans une négociation avec des Chinois. Ils pourront prendre conscience de l’importance du « non verbal », pourront le faire autant de fois qu’ils le veulent et à leur propre rythme.

C’est fantastique, génial, mais nous, établissements ne pourront pas concevoir ces solutions. Ce n’est pas notre rôle et de toute façon, n’en avons pas les moyens.

Le recours à une start-up – Motion Recall par exemple, sera nécessaire. Elle pourra nous mettre en place des solutions personnalisées.

La réalité virtuelle pour apprendre différemment pourra être développée grâce aux ed-techs. Knight Center for Journalism, CC BY-NC-SA


2. La demande des entreprises

Les entreprises réfléchissent également à cette école du futur, dans une logique de professionnalisation de leurs équipes, d’accompagnement au changement ou d’évolution de carrière.

La logique de ces entreprises est « d’individualiser l’industrialisation » des formations tout en y apportant une valeur ajoutée. Cela ne pourra se faire qu’avec des acteurs qui pourront là aussi leur permettre d’atteindre ces objectifs.

Je le dis souvent, les entreprises sont parfois en avance dans cette formation du futur. Là aussi, changement de paradigme pour nous établissements d’enseignement supérieur….


3. Le développement des services

Ce qui fera la différence dans les années à venir, ce sont les services que nous offrirons à nos étudiants et nos alumni. Il faudra leur apporter une valeur ajoutée qui justifiera leur inscription dans nos établissements. En effet, en simplifiant un peu, pourquoi payer des frais de scolarité alors qu’un savoir de très grande qualité est disponible – gratuitement – sur le net.

La réalisation de ces services ne pourra se faire qu’au travers de ces ed-techs et ce dans un double sens :

  • Idée « disruptive » reprise par une école (Jobteaser par exemple)

  • Idée imaginée par un établissement, mais réalisée par un prestataire (Appscho)

Cette notion de service est elle-même un peu difficile à évaluer car où s’arrête-t-elle ? Pas forcément aux portes de l’école comme le démontre Studylink qui développe une solution de crowdfunding pour financer ses études (et incubée à GEM !).

Enfin, notre offre de services personnalisés pourra passer par des chabots (pensez à Siri ou Cortana mais pas uniquement) imaginés et créés par des ed-techs.

Un QR code pour donner vie à un CV… une idée qui pourrait être développée par une start-up.


4. La génération Z

Nos étudiants veulent apprendre ou étudier d’une autre manière. Ils baignent dans la technologie et l’utilisent en permanence (même s’ils en ont des niveaux de compréhension et de maîtrise différents). Il nous faut nous adapter en permanence pour tenir compte de ces évolutions. Là aussi la réponse passe par les ed-techs.

Une illustration possible est le développement de l’offre de cours de langues tels que Babbel) ou d’exercices corrigés (Kartable mais qui n’existent pas encore dans l’enseignement supérieur. Cela passe aussi par la participation à des jeux-concours (Studyka) ou réalisation de missions pour des entreprises (dans une triple logique, d’acquisition d’expériences, compétences et de financement des études (comme l’initiative Crème de la crème)


5. L’apprentissage pour tous

Ces jeunes pousses vont également nous permettre d’aider « tout le monde » à apprendre. Ainsi Optolexiaaide les élèves dyslexiques et Présences+campus permet aux étudiants hospitalisés et ne pouvant être physiquement en cours de ne pas prendre de retard.


6. La pression des parents

Il y a une sorte de « business de la peur » qui se traduit par l’explosion de sociétés de soutien scolaire. Les « traditionnels (Academia, Completeude) ont été rejoints sur ce créneau par des start-up proposant leur service, mais avec une approche différente. J’ai été impressionné par les chiffres de Diggischool concernant les téléchargements de corrections des sujets au moment du bac.

Un business-model convoité ?

Les ed-techs suscitent également un intérêt majeur auprès d’autres acteurs économiques.

Je l’ai souvent écrit, les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazonà seront bientôt des acteurs importants du monde de l’éducation et seront tout à la fois nos concurrents et nos alliés dans certains domaines. J’inclus bien évidemment aussi LinkedIn qui devient incontournable dans notre monde A titre d’ex, plus de 80 % de nos étudiants ont un profil LinkedIn. J’ai par ailleurs était sidéré la semaine dernière car j’ai demandé à des élèves d’une classe préparatoire aux grandes écoles s’ils avaient un compte LinkedIn et plus de la moitié de la classe a levé la main.

Ces entreprises ne sont pas à proprement parler des ed-techs, mais elles vont donner naissance à tout un écosystème d’applications spécifiques.

Le big data s’immisce déjà dans ces modèles. Demain (et même aujourd’hui), il y aura des solutions qui permettent aux entreprises d’identifier les profils et les talents qui les intéressent grâce à des algorithmes déployés sur des réseaux sociaux. C’est aussi Eurekos, qui permet à l’enseignant d’avoir un accès aux profils LK de ses étudiants et de se renseigner sur leurs spécialités et leurs attentes.

Une solution pour les « déçus » de l’enseignement

Un nombre significatif d’Edtech est enfin créé par des étudiants ou de jeunes diplômés (je ne donnerai pas de noms pour que ceux encours de scolarité n’aient pas d’ennuis !) qui, quand j’échange avec eux, me disent qu’ils ont eu ces idées parce qu’ils ont été déçus et auraient voulu apprendre d’une autre manière.

Souvent, il n’y pas une raison plutôt qu’une autre, mais une combinaison de plusieurs. Le meilleur exemple étant Klaxoon, solution qui matche les critères 1 à 5. L’histoire retiendra peut-être que cette jeune entreprise dynamique (avec des locaux qui donnent immédiatement envie de candidater !) aura été – grâce à son succès sur le CES 2016 de Las Vegas, le précurseur d’une filière française. Klaxoon est une solution très simple qui s’adresse à la fois aux établissements d’enseignement et aux entreprises. Il améliore l’animation des cours, conférences et réunions en facilitant l’interaction. Tout le monde peut s’exprimer et donner son point de vue (même les plus timides !). Dernier avantage et non des moindres, il peut s’utiliser en simultané sur différents lieux.

À suivre, une typologie des ed-techs, les business-models et un plaidoyer pour une filière française d’excellence dans ce domaine !

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