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L’équilibre vie privée–vie professionnelle au cœur des attentes des jeunes actifs

Ceux qui concilient de manière satisfaisante leur travail avec leur vie personnelle sont plus engagés dans leur entreprise. Black Salmon / Shutterstock

Les entreprises doivent mieux s’intéresser à la vie personnelle de leurs collaborateurs : 83 % des jeunes actifs considèrent en effet que l’employeur doit la prendre en compte. C’est ce qui ressort d’une enquête menée début 2020 en partenariat avec la société DOMPLUS Groupe auprès de 6 500 jeunes actifs. En outre, 40 % estimaient, au moment où ils étaient interrogés, que leur employeur ne prenait pas suffisamment en compte cette donnée.

Ce que les jeunes actifs nous disent, c’est donc que pour eux, l’entreprise doit oser sortir des frontières établies pour leur proposer des services, des solutions qui les aident concrètement à mieux gérer cette conciliation. Et que cela implique donc de mieux prendre en considération leur vie personnelle, que le sujet n’est plus tabou – dans certaines limites bien sûr.

Notre enquête révèle également que 66 % des jeunes actifs se sentent engagés au sein de leur entreprise. Et ils sont 72 % à se dire engagés (+6 points) parmi les jeunes actifs qui concilient de manière satisfaisante leur vie privée et leur vie professionnelle. Cette conciliation est donc une source essentielle de leur engagement.

Une population vulnérable

Cette quête d’équilibre, dont dépend fortement leur engagement, est aussi le signe de la vulnérabilité d’une partie de la population étudiée. Ainsi, les jeunes actifs ne sont pas préservés des aléas de la vie qui fragilisent les personnes : malgré leur jeune âge, 11 % sont déjà en situation de monoparentalité, devant s’occuper seul de leurs enfants. Ces situations restent les principales causes de fragilités : financières, organisationnelles, psychiques…

Plus de 8 jeunes actifs sur 10 considèrent que leur employeur doit mieux prendre en compte la vie privée. Baranq/Shutterstock

Dans ce contexte, les attentes vis-à-vis des managers se transforment. C’est notamment vrai pour le manager de proximité qui, selon les jeunes actifs, doit être le premier garant de la conciliation vie professionnelle – vie personnelle. On peut faire l’hypothèse que sa propre exemplarité en la matière comptera : « oser » partir à 18h pour aller chercher les enfants à la crèche doit aujourd’hui pouvoir être perçu comme un acte managérial exemplaire, notamment pour les hommes, qui restent globalement moins présents que les femmes dans les actes de « care » du quotidien.

On voit également que le besoin de valorisation ressort très nettement : le manager de proximité est celui qui encourage, récompense, mais aussi qui accompagne le développement des compétences – ce qui est une autre manière de reconnaître – reconnaître un potentiel, un désir de s’accomplir en progressant, une marque de confiance.

Il doit donc mobiliser le registre de la reconnaissance plus que le registre du devoir moral (vis-à-vis de l’entreprise, des collaborateurs…), lequel ressort d’une vision paternaliste de l’entreprise qui semble avoir toujours cours et qui apparaît bien désuète aux yeux des jeunes actifs.

Il semble enfin que l’ère du « tout à l’ego » soit une réalité, et les « chefs » doivent apprendre à se mettre en retrait, à reconnaître plus souvent les bons comportements, les bonnes initiatives, de générations soucieuses de bien faire et d’apporter une valeur ajoutée perceptible à l’entreprise, et donc reconnue. Sans cela, l’engagement en pâtira.

Équilibre éthique

Le manager doit enfin être le garant d’une bonne ambiance au travail, de relations apaisées entre les personnes : au-delà d’une indispensable convivialité, sur laquelle on se focalise trop souvent (les espaces et les temps de convivialité, tels que les afterworks, etc.), ce sont bien plus des relations sereines, respectueuses et bienveillantes qui sont recherchées par les jeunes actifs.

Enfin, cet équilibre privé – professionnel n’est pas à entendre uniquement comme un équilibre en termes de temps. C’est aussi un équilibre éthique : 79 % des jeunes actifs considèrent que leur emploi doit être en parfaite cohérence avec leurs valeurs.

La cohérence avec les valeurs, un point d’attention pour les jeunes actifs. Yuttana Contributor Studio/Shutterstock

Ainsi, lorsqu’une marque prône le respect de l’environnement, mais gère très mal ses retours produits, et qu’une jeune collaboratrice l’interpelle au plus haut niveau sur ce sujet, on se situe clairement dans un conflit de valeurs.

Pour le dire autrement, le « faites ce que je dis, pas ce que je fais », est de moins en moins toléré par les jeunes actifs pour qui la question de l’alignement entre les valeurs affichées et les actes du quotidien, notamment managériaux, est fondamentale. Cela repose la question « serpent de mer » de l’exemplarité.

Dès lors, en affichant de plus en plus leurs valeurs, en revendiquant des pratiques respectueuses, « responsables », les entreprises doivent comprendre qu’elles s’exposent de plus en plus au jugement non seulement de leurs clients, mais, aussi, de leurs équipes.

Arnaud Vallin, docteur en sociologie, a participé à la rédaction de cet article.


Enquête menée avant la crise sanitaire auprès de 6 500 jeunes actifs ont été interrogés en partenariat avec la société DOMPLUS Groupe, qui accompagne à distance près de 8 000 jeunes actifs chaque année. Il s’agissait de mieux comprendre leur rapport au travail et au management. Les jeunes actifs interrogés sont à 61 % des femmes, leur moyenne d’âge est de 28 ans et ils sont en couple pour 74 % d’entre eux.

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