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Bonne nouvelle, nos entrepreneur·e·s gardent le moral !

Les créateurs d'entreprises ont constaté un élan d'entraide pendant le confinement. Drazen Zigic / Shutterstock

L’entrepreneuriat est un signe de vitalité économique comme de la confiance dans l’avenir d’une nation. Après ces semaines de mise au ralenti de l’économie française, nous pourrions penser que les entrepreneurs et les projets en germe de création d’entreprises seraient complètement atones et leurs porteurs en train d’abandonner ou, du moins, de surseoir.

Ce n’est pas le cas des entrepreneurs que nous avons interrogés, bien au contraire : ils souhaitent pour la très grande majorité continuer dans la voie tracée avant le confinement, même si certains envisagent d’infléchir leur trajectoire.

Ils ont « envie », même s’ils sont bien conscients que les obstacles seront nombreux. Ils ne sont pas inconscients ni insouciants, et réalisent bien l’importance qu’ont cet optimisme et cette motivation pour être au rendez-vous de leur création d’entreprise.

Un signal très positif

Cette volonté d’aller de l’avant est un excellent signal dans cette période morose. Mais elle peut être fragile. Il faut donc exercer la plus grande vigilance pour que cet enthousiasme ne s’affaiblisse pas avec le temps, et il va falloir s’assurer d’un bon accompagnement tant financier que psychologique de ces catalyseurs d’énergie économique.

Nous tirons ces enseignements d’une étude menée entre le 4 et le 15 mai 2020 qui nous a amenées à interroger (en ligne et en direct) 120 entrepreneur·e·s.

Qui sont-ils ? 51 % d’hommes pour 49 % de femmes, ils sont plutôt jeunes (21 % entre 18 et 25 ans, 38 % entre 26 et 35 ans, 22 % entre 36 et 45 ans, 18 % plus de 45 ans), diplômés (66 % à Bac +5), 33 % en microentreprise, 45 % en société. 57 % d’entre eux entreprennent seuls et 77 % n’ont pas de salariés. 22 % ont un projet d’entreprise, 27 % ont une très jeune entreprise (moins d’un an), 25 % entre un et deux ans, 17 % trois ans et plus, principalement dans le secteur des services (47 % en BtoB, 11 % en BtoC).

Ils viennent de différentes villes françaises (Lyon, Paris, Strasbourg…), quelques-uns de l’international (Québec, Maroc, Sénégal). Leur chiffre d’affaires annuel s’étend de 0 à plusieurs millions d’euros.

L’échantillon n’est donc pas exactement représentatif de l’ensemble des créateurs d’entreprises français, mais l’étude dessine un baromètre de l’état d’esprit de ces entrepreneurs, à un instant t.

Que nous disent-ils de façon plus détaillée ?

On continue, et même on accélère !

Avouons-le, quand nous avons démarré cette étude, nous avions en tête ce que nous a confié un entrepreneur : « La crainte : que soit détruit ce qu’on construit pas à pas avec passion ».

À l’arrivée, notre étude montre plutôt le contraire : les entrepreneurs interrogés se sentent très persévérants, motivés, plutôt compétents et optimistes. Très peu d’entre eux (moins de 3 %) ont décidé de stopper leurs activités. Les répondants la continuent (50 %), la modifient (environ 16 %), voire l’accélèrent (30 %).

Ils nous disent disposer des moyens financiers et humains pour faire face à cette crise, même s’ils savent qu’ils devront faire preuve d’agilité. « Nous continuons notre activité mais nous sommes prêts à pivoter si la crise venait à perdurer », nous explique un créateur d’entreprise.

Certains évoquent même le fait que la crise a créé une opportunité pour eux. Une créatrice nous raconte : « J’ai perdu mon job salarié et la crise m’a fait comprendre que c’était le bon moment pour me relancer […] à 100 % dans mon projet entrepreneurial ».

Rester vigilants

L’une des premières préoccupations pour les entrepreneurs se situe dans la poursuite de leur activité. Globalement, tout est plus difficile : la prospection, le lien avec les clients, les fournisseurs, les partenaires : « L’incapacité à rentrer en contact avec des fournisseurs est le plus grand problème ».

La préoccupation financière figure également, et sans surprise, en haut de la liste de leurs préoccupations actuelles. L’inconnu de la durée de la crise au regard de la trésorerie disponible pour tenir est une équation difficile à résoudre, comme l’illustre un témoignage que nous avons recueilli : « Pendant la crise, les prestations étaient encore là (signées fin d’années dernière ou début d’année). Mais c’est la suite qui va être difficile ! »

L’une des préoccupations des entrepreneurs se situe dans la poursuite de leur activité, le lien avec leurs clients et leurs fournisseurs. Alliance Images/Shutterstock

La gestion de l’incertitude vient ensuite, avec les difficultés à se projeter, à envisager les évolutions de certains marchés : « Difficile de percevoir les opportunités du marché du tourisme actuellement » nous a dit un startupper.

Les sujets de préoccupation suivant ce top 3 sont la motivation et le moral qu’il va falloir garder coûte que coûte. L’équilibre de vie est également un vrai sujet, beaucoup l’ont évoqué dans les échanges, car il a été souvent mis à mal pendant cette période de confinement : « La famille ! Étant maman il reste très peu de temps pour le projet » nous écrit une entrepreneure.

De quels soutiens ont-ils besoin ?

Les entrepreneurs nous disent en grande majorité (70 %) rechercher des mises en relation avec d’autres contacts. Le soutien d’autres entrepreneurs est recherché et important pour 30 % d’entre eux. Lors d’un échange, un dirigeant de société nous a expliqué que le confinement a fait naître un élan d’entraide : « La solidarité entre entrepreneurs est à l’œuvre et semble s’installer dans la durée. Les communications sont intenses et renouvelées ».

Un tiers d’entre eux attend également une aide technique, opérationnelle, particulièrement concernant les demandes de financement, parce que « c’est très compliqué de s’y retrouver parmi toutes les aides à disposition/éligibilité de notre projet ».

Certains parlent de cette période de manière positive – une période décrite comme « faste » en termes de réflexion et de production d’idées, et même propice à certaines prises de conscience : « Cette période m’a fait prendre conscience qu’il fallait investir dans son business pour être mieux armée à affronter les difficultés », nous a dit une jeune entrepreneure.

Le confinement, une période propice à la réflexion. GaudiLab/Shutterstock

Le confinement a pu aussi agir comme un révélateur de son propre rythme de vie : « La hiérarchie des préoccupations est aussi très importante dans cette nouvelle situation […] », explique un entrepreneur interviewé.

Maintenir le cap…

En cette période de grand vent, les résultats de notre étude montrent donc que, malgré la situation incertaine, les entrepreneurs maintiennent le cap… pour le moment. L’enjeu majeur pour eux sera de tenir, stratégiquement, financièrement, bien sûr, mais aussi moralement.

Les entrepreneurs interrogés nous adressent finalement un message représentatif des défis inhérents à toute démarche entrepreneuriale, comme le résume très bien ce dirigeant : « Nous devons toujours nous adapter aux changements. Les changements récents sont rapides et il va falloir se réinventer rapidement et en profondeur ». Ils ne doivent pas être oubliés dans la grande course à la reprise économique !

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